Conflit en Ethiopie: internet, l'autre champ de bataille

Des soldats éthiopiens captifs blessés arrivent sur un camion au centre de réhabilitation de Mekele à Mekele, la capitale de la région du Tigré, en Éthiopie, le 2 juillet 2021. (Yasuyoshi Chiba/AFP)
Des soldats éthiopiens captifs blessés arrivent sur un camion au centre de réhabilitation de Mekele à Mekele, la capitale de la région du Tigré, en Éthiopie, le 2 juillet 2021. (Yasuyoshi Chiba/AFP)
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Publié le Samedi 25 décembre 2021

Conflit en Ethiopie: internet, l'autre champ de bataille

  • Internet est devenu un autre champ de bataille où les partisans des deux camps répandent de fausses nouvelles
  • Les communications sont coupées dans les zones des combats et l'accès des journalistes y est restreint, rendant difficile toute vérification indépendante sur le terrain

JOHANNESBURG, Afrique du Sud : Depuis le début des combats il y a un an entre l'armée fédérale éthiopienne et les rebelles de la région septentrionale du Tigré, internet est devenu un autre champ de bataille où les partisans des deux camps répandent de fausses nouvelles pour tenter d'imposer leur version du conflit.

Les experts mettent en garde: ces campagnes en ligne alimentent une situation déjà explosive, dans un pays fortement marqué par les tensions ethniques.

«Les messages incendiaires ont fait empirer la situation en Ethiopie en répandant la peur et la confusion et en alimentant les tensions», explique à l'AFP FactCheck le chercheur et juriste éthiopien Yohannes Eneyew Ayalew, spécialisé dans les médias.

La guerre au Tigré, qui s'est propagée dans deux régions voisines en juillet, a fait des milliers de morts, provoqué une grave crise humanitaire et les combattants des deux camps sont accusés d'exactions.

Les communications sont coupées dans les zones des combats et l'accès des journalistes y est restreint, rendant difficile toute vérification indépendante sur le terrain.

«Il est ardu de savoir avec certitude ce qui se passe sur le terrain: c'est un aspect majeur de ce conflit depuis le début», souligne Joseph Siegle, directeur de recherche au Centre africain d'études stratégiques.

«La prévalence de faux discours contribue à accroître le scepticisme vis-à-vis de toutes les accusations d'exactions. Ce qui conduit à entraver une réponse internationale davantage coordonnée et uniforme à la crise», estime-t-il.

- «Affaire complexe» -

L'AFP FactCheck a vérifié de nombreuses affirmations depuis que le Premier ministre Abiy Ahmed a envoyé les troupes au Tigré en novembre 2020, afin d'en destituer les autorités locales, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qui défiaient son autorité et qu'il accusait d'avoir attaqué des bases militaires.

Elle a découvert des photos accompagnées d'une teneur mensongère, de faux communiqués officiels et des contenus manipulés.

En août, une étude de la Harvard Kennedy School (HKS) a mis en évidence, menées parallèlement par chacun des deux camps, «deux vastes campagnes visant à façonner la politique internationale autour d'un conflit militaire en cours».

«Ces deux campagnes médiatiques sont dirigées vers la communauté internationale».

Les partisans du gouvernement ont ainsi cherché à discréditer tous ceux contredisant le discours officiel, une démarche encouragée par le Premier ministre lui-même.

«Nous sommes aussi engagés dans une guerre de l'information sophistiquée menée contre la nation, utilisant la désinformation (...) Chaque Ethiopien doit jouer un rôle pour réfuter et corriger les récits mensongers», avait tweeté Abiy Ahmed en novembre.

- Atrocités niées -

Une page Facebook intitulée «Vérification des faits sur les affaires en cours en Ethiopie» s'autoproclame ainsi «Site internet du gouvernement».

En dépit du nom et de la coche bleue certifiant un caractère officiel, ce compte ne pratique pas une vérification indépendante des faits mais publie des messages pro-Abiy cherchant à discréditer la couverture critique de l'intervention militaire au Tigré.

 

Les partisans du Premier ministre ont aussi attaqué un rapport d'Amnesty International qui affirmait en février que des soldats érythréens avaient tué des civils dans la ville éthiopienne d'Aksoum en novembre 2020.

Après des mois de déni, les autorités éthiopiennes ont reconnu la présence, au côté de l'armée, de troupes érythréennes et admis qu'elles avaient tué à Aksoum, mais que les victimes étaient «en grande majorité» des combattants.

L'AFP FactCheck a déconstruit un article du journal gouvernemental Ethiopian Herald affirmant faussement que les Etats-Unis avaient mené leur propre enquête sur ce massacre et n'avaient trouvé aucune preuve des atrocités.

Les partisans des rebelles mènent eux aussi des campagnes de désinformation.

L'AFP FactCheck a découvert qu'un internaute avait modifié une image de troupes éthiopiennes pour faire croire qu'il s'agissait de rebelles avançant vers Addis Abeba. Un autre a cherché à faire croire qu'une photo prise pendant la sécheresse en Ethiopie dans les années 1980 montrait une femme mourant de faim au Tigré de nos jours.

L'AFP FactCheck a par ailleurs pointé le mensonge d'un message publié sur Twitter affirmant que l'Union africaine avait demandé à son personnel de quitter l'Ethiopie. L'enquête a permis de montrer que ce compte soutenait le TPLF.

- Rôle de la diaspora -

Selon les experts, la diaspora éthiopienne a joué un rôle-clé pour promouvoir la désinformation au profit des deux côtés.

Des militants de base en ligne ont aussi eu «un impact sur les récits relayés sur Twitter concernant la crise au Tigré, en dépit d'un accès limité à des informations vérifiables sur la situation réelle sur le terrain», explique le Digital Forensic Research Lab, laboratoire basé à Washington, spécialisé dans l'analyse de la désinformation.

Les médias occidentaux ont souvent été ciblés dans cette bataille pour le contrôle de l'information, notamment par les partisans de M. Abiy qui ont accusé les organes de presse de publier de fausses informations sur le conflit.

Selon Alphonse Shiundu, de l'organisation Africa Check de vérification de l'information, cela est partiellement dû au fait que certains médias internationaux «n'ont pas saisi correctement le contexte en rendant compte du conflit».

Pour certains Ethiopiens «les médias internationaux font largement état des critiques sur les abus du gouvernement éthiopien», mais «n'accordent par la même attention aux accusations de violations des droits humains de la part des rebelles tigréens», estime-t-il.


Trump s'en prend à des magistrats après l'assassinat de Charlie Kirk

Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X
  • Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre

WASHINGTON: Le président américain Donald Trump a de nouveau stigmatisé mercredi des magistrats qui l'avaient poursuivi et jugé durant le mandat de Joe Biden, prenant prétexte du récent assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.

Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X.

Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre.

"Pourquoi le merveilleux Turning Point a-t-il été mis sous ENQUÊTE par le +Dérangé+ Jack Smith et l'administration Biden Corrompue et Incompétente ?", s'interroge Donald Trump dans un message sur Truth.

"Ils ont essayé de forcer Charlie, ainsi que de nombreuses autres personnes et mouvements, à cesser leurs activités. Ils ont instrumentalisé le ministère de la Justice contre les opposants politiques de Joe Biden, y compris MOI!", s'offusque-t-il encore.

Jack Smith, lui-même visé par une enquête administrative depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, avait été nommé procureur spécial en 2022.

Il avait lancé des poursuites fédérales contre Donald Trump, pour tentatives illégales d'inverser les résultats de l'élection de 2020 et rétention de documents classifiés après son départ de la Maison Blanche.

Les poursuites avaient été abandonnées après la réélection de Trump, en vertu de la tradition consistant à ne pas poursuivre un président en exercice. Jack Smith avait ensuite démissionné du ministère de la Justice.

Sans jamais le citer nommément, le président Trump s'en prend également sur le réseau Truth à Juan Merchan, qui a présidé le procès Stormy Daniels. Le président avait été reconnu coupable de 34 chefs d'accusation, pour des paiements cachés de 130.000 dollars à l'ex-star du X.

Donald Trump exprime le souhait que le juge "corrompu" paie "un jour un prix très élevé pour ses actions illégales".

Depuis l'assassinat de Charlie Kirk, le camp républicain redouble de véhémence contre les démocrates et organisations progressistes, accusés de promouvoir la violence politique.

"La gauche radicale a causé des dégâts énormes au pays", a affirmé le président républicain mardi, avant son départ au Royaume-Uni. "Mais nous y remédions".

Selon le Washington Post, un élu républicain du Wisconsin a déposé une proposition de loi visant à bloquer les fonds fédéraux aux organisations employant des personnes "qui tolèrent et célèbrent la violence politique".

Le New York Times précise pour sa part que sont notamment dans le viseur l'Open Society Foundation du milliardaire George Soros ainsi que la Ford Foundation, qui toutes deux financent des organisations de gauche.


Pompe exceptionnelle pour la deuxième visite d'Etat de Trump au Royaume-Uni

Le président américain Donald Trump (C) et la première dame américaine Melania Trump débarquent d'Air Force One après avoir atterri à l'aéroport de Stansted, dans l'est de l'Angleterre, le 16 septembre 2025. (AFP)
Le président américain Donald Trump (C) et la première dame américaine Melania Trump débarquent d'Air Force One après avoir atterri à l'aéroport de Stansted, dans l'est de l'Angleterre, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Donald Trump entame une visite d'État de deux jours au Royaume-Uni, marqué par un faste inédit à Windsor malgré des manifestations annoncées à Londres
  • Alors que le gouvernement de Keir Starmer tente de tirer profit de cette visite par des annonces d’investissements technologiques majeurs, la rencontre est aussi ternie par l’affaire Epstein

LONDRES: Tour en calèche, garde d'honneur géante, défilé aérien inédit: le Royaume-Uni sort le grand jeu pour la deuxième visite d'Etat de Donald Trump, reçu mercredi à Windsor par Charles III, à l'abri des manifestations.

"Cela va être un très grand jour", a commenté M. Trump en arrivant au Royaume-Uni mardi soir, se réjouissant de voir le roi, son "ami de longue date".

Encadrée par un dispositif de sécurité exceptionnel, cette visite d'Etat de deux jours débute par un déploiement spectaculaire de faste royal, dont le dirigeant républicain est friand, et une cérémonie militaire d'une ampleur sans précédent, impliquant 1.300 membres des forces armées britanniques.

"On dit que le château de Windsor, c'est le top, non? Donc ça va être chouette", avait lancé Donald Trump, 79 ans, avant son départ de Washington, se félicitant aussi d'être le seul président américain à avoir deux fois les honneurs d'une visite d'Etat au Royaume-Uni. La première avait eu lieu en 2019.

Le président et son épouse Melania seront accueillis à la mi-journée dans ce domaine royal situé à l'ouest de Londres, d'abord par le prince héritier William et son épouse Catherine, puis par le roi Charles III, 76 ans, et la reine Camilla, 78 ans.

Une incertitude entoure toutefois la présence de Camilla: la reine consort se remet d'une sinusite aiguë qui l'a empêchée d'assister à des funérailles royales mardi.

Après une salve royale tirée du château et depuis la Tour de Londres, les trois couples doivent participer à une procession en calèche, mais toujours dans l'enceinte du domaine, et non dans les rues de la ville comme cela avait été le cas lors de la visite d'Etat du président français Emmanuel Macron en juillet.

- Fanfare et cornemuses -

Donald Trump aura l'unique privilège de passer en revue une garde d'honneur comprenant exceptionnellement trois régiments de la Garde royale, accompagnée d'une fanfare, tambours et cornemuses dans la cour carrée du château.

Après un déjeuner en privé avec la famille royale, le couple Trump déposera des fleurs sur la tombe de la reine Elizabeth II, décédée en septembre 2022, dans la chapelle St George.

Un défilé aérien, alliant de façon inédite des avions de combat F35 britanniques et américains, et la patrouille acrobatique des "Red Arrows", précèdera le traditionnel banquet royal avec quelque 150 invités.

Une profusion d'honneurs de nature à flatter l'ego du milliardaire américain, qui s'est plus tôt cette année lui-même comparé à un monarque.

Mais à 40 km de là, des milliers de manifestants sont attendus dans le centre de Londres, pour protester contre la venue d'un président très impopulaire dans le pays. Le rassemblement à l'appel de la coalition "Stop Trump", prévu à partir de 14H00 (13H00 GMT), sera encadré par plus de 1.600 policiers. D'autres sont prévus ailleurs au Royaume-Uni.

Le deuxième jour de la visite, jeudi, sera consacrée à une séquence plus politique, qui se déroulera à Chequers, résidence de campagne du Premier ministre Keir Starmer.

La conférence de presse pourrait donner lieu à des questions embarrassantes pour les deux dirigeants, relatives notamment à l'affaire Jeffrey Epstein. Elle est revenue hanter cette semaine Keir Starmer, qui a limogé son ambassadeur à Washington Peter Mandelson, après des révélations sur ses liens avec le délinquant sexuel américain, mort en prison en 2019.

Un sujet dont se passerait bien Donald Trump, qui voit sa présidence également empoisonnée par l'affaire Epstein depuis des semaines.

Des images du financier américain ont d'ailleurs été diffusées mardi soir par un groupe anti-Trump sur une tour du château de Windsor.

De son côté, le gouvernement de Keir Starmer, fragilisé sur le plan économique et en pleine crise politique, cherche à tirer parti de cette visite pour multiplier les annonces, entre accord sur la tech et investissements américains.

Il a déjà enregistré un investissement massif de 30 milliards de dollars (25 milliards d'euros) de Microsoft, un autre de 5 milliards de livres (5,8 milliards d'euros) de Google et l'annonce d'un partenariat incluant OpenAI et Nvidia pour développer des infrastructures dédiées à l'IA dans le nord-est de l'Angleterre.

Un partenariat plus général pour doper la coopération technologique dans l'IA, le quantique et le nucléaire doit être signé pendant la visite, mais ses contours sont encore flous.

Les espoirs d'accord pour faire baisser les droits de douane actuellement appliqués sur le whisky (10%) et l'acier (25%) semblent en revanche avoir été douchés, selon la presse britannique.


Des milliers de morts cet été en Europe à cause du changement climatique, avancent des chercheurs

Plus de 15.000 morts pourraient être attribuées au changement climatique à l'issue de cet été dans les principales villes européennes, avancent des chercheurs dans un travail encore préalable mais dont l'intérêt a été salué par d'autres scientifiques. (AFP)
Plus de 15.000 morts pourraient être attribuées au changement climatique à l'issue de cet été dans les principales villes européennes, avancent des chercheurs dans un travail encore préalable mais dont l'intérêt a été salué par d'autres scientifiques. (AFP)
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  • Il s'agit de la première estimation de si grande ampleur sur les impacts sanitaires d'un été marqué en Europe par des températures particulièrement élevées
  • Plusieurs canicules ont été observées et l'été s'est révélé le plus chaud jamais enregistré dans plusieurs pays, comme l'Espagne, le Portugal et le Royaume-Uni

PARIS: Plus de 15.000 morts pourraient être attribuées au changement climatique à l'issue de cet été dans les principales villes européennes, avancent des chercheurs dans un travail encore préalable mais dont l'intérêt a été salué par d'autres scientifiques.

"Centrée sur 854 villes européennes, cette étude conclut que le changement climatique est à l'origine de 68% des 24.400 morts qui seraient liées à la chaleur cet été", souligne mercredi le communiqué des deux instituts britanniques auxquels appartiennent les auteurs, l'Imperial College London et la London School of Hygiene & Tropical Medicine.

Ils concluent donc qu'entre 15.013 et 17.864 décès liés cet été à la chaleur n'auraient pas eu lieu sans le réchauffement climatique, dans ces villes qui ne représentent par ailleurs qu'un petit tiers de la population européenne.

Il s'agit de la première estimation de si grande ampleur sur les impacts sanitaires d'un été marqué en Europe par des températures particulièrement élevées. Plusieurs canicules ont été observées et l'été s'est révélé le plus chaud jamais enregistré dans plusieurs pays, comme l'Espagne, le Portugal et le Royaume-Uni.

Or, les effets sur la santé des chaleurs sont bien connus: aggravation des troubles cardiovasculaires, déshydratation, troubles du sommeil... Et les plus âgés sont, de loin, les plus à risque d'en mourir.

"Il suffit que les canicules soient plus chaudes de 2 à 4°C pour que des milliers de personnes passent de vie à trépas", a souligné Garyfallos Konstantinoudis, co-auteur de l'étude, lors d'une conférence de presse, qualifiant les pics de chaleur de "tueurs silencieux".