Avec Omicron, la réa de Saint-Denis craint de manquer de bras

Des infirmières soignent un patient Covid-19 au service de réanimation de l'hôpital Delafontaine AP-HP à Saint-Denis, en région parisienne, le 29 décembre 2021.(AFP)
Des infirmières soignent un patient Covid-19 au service de réanimation de l'hôpital Delafontaine AP-HP à Saint-Denis, en région parisienne, le 29 décembre 2021.(AFP)
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Publié le Jeudi 30 décembre 2021

Avec Omicron, la réa de Saint-Denis craint de manquer de bras

  • Dans les couloirs flambant neuf se succèdent les chambres et, à travers les portes vitrées, les visages souvent entubés des patients
  • Le chef de service et le directeur délégué relatent les nombreux départs de soignants, dès la deuxième vague: recherche d'un poste loin de la pression francilienne ou virage professionnel à 180 degrés

SAINT-DENIS : "1, 2, 3, on retourne": dans cette chambre de réanimation de l'hôpital Delafontaine à Saint-Denis, sept soignants s'activent autour d'une patiente atteinte du Covid-19. Des personnels précieux dont le chef de service craint d'être privé à cause de la déferlante du variant Omicron. 

Si son état s'est stabilisé, c'est la quatrième fois que sa position (de dorsale à ventrale et vice versa) est changée en quatre jours. "Ça reste un état grave", commente le chef de service Daniel Silva.

A 69 ans, cette femme, obèse et qui souffre d'hypertension et de diabète, est la doyenne des patients du service et, comme la majorité d'entre eux, n'a reçu aucune dose de vaccin.

"90% de nos patients sont non-vaccinés", détaille le Dr Silva. "Et ceux qui sont vaccinés ont la particularité, du fait d'un traitement ou d'une maladie, d'avoir des facteurs d'immunosuppression", soit un système immunitaire particulièrement vulnérable, poursuit-il.

Sur les 18 lits du service, la moitié - et bientôt plus - est occupée par des malades du Covid-19. "La moyenne d'âge est de 49 ans", précise Daniel Silva, dont le patient le plus jeune a 34 ans. 

Le service, "saturé depuis début octobre", était monté à 32 lits au pic de la première vague de l'épidémie en 2020.

Des infirmières travaillent dans une unité de soins intensifs Covid-19 de l'hôpital Delafontaine AP-HP à Saint-Denis, en région parisienne, le 29 décembre 2021.(AFP)
Des infirmières travaillent dans une unité de soins intensifs Covid-19 de l'hôpital Delafontaine AP-HP à Saint-Denis, en région parisienne, le 29 décembre 2021.(AFP)

Dans les couloirs flambant neuf se succèdent les chambres et, à travers les portes vitrées, les visages souvent entubés des patients. 

Ces derniers jours, les chiffres de contamination au Covid-19 ont explosé en France pour atteindre des records. Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a annoncé mercredi quelque 208.000 cas enregistrés en 24 heures, un "raz-de-marée" attisé par le variant Omicron. 

Au-delà de la pression croissante exercée sur le service, qui ne peut plus prendre en charge les patients atteints de Covid-19 amenés par le Samu, la crainte porte aujourd'hui surtout sur un personnel épuisé par les vagues successives de la pandémie. 

Sur la centaine de soignants de l'établissement, deux sont en arrêt maladie.

« Héros, pestiférés puis oubliés »

"La particularité de cette cinquième vague, c'est que ce sont des équipes qui jettent aujourd'hui leurs dernières forces pour soigner pour l'essentiel des patients qu'on aurait pu ne pas avoir s'ils avaient été vaccinés", estime Yohann Mourier, directeur délégué du centre hospitalier de Saint-Denis.

"Les soignants étaient les héros de la première vague, les pestiférés lors de la vaccination et maintenant un peu les oubliés", déplore-t-il.

Des infirmières soignent un patient Covid-19 au service de réanimation de l'hôpital Delafontaine AP-HP à Saint-Denis, en région parisienne, le 29 décembre 2021.(AFP)
Des infirmières soignent un patient Covid-19 au service de réanimation de l'hôpital Delafontaine AP-HP à Saint-Denis, en région parisienne, le 29 décembre 2021.(AFP)

Le chef de service et le directeur délégué relatent les nombreux départs de soignants, dès la deuxième vague: recherche d'un poste loin de la pression francilienne ou virage professionnel à 180 degrés, citant des infirmiers devenus pâtissiers ou esthéticiennes.

"La crainte particulière, c'est qu'on n'ait pas suffisamment de personnel pour continuer à faire ce qu'on avait à peu près réussi à faire en 2021. C'est-à-dire prendre en charge à la fois les patients Covid et les patients non-Covid, notamment dans les situations les plus urgentes", regrette Yohann Mourier.

"Très marqué par la première vague", où sa "vie était ici", Franck Palmier, aide-soignant depuis 32 ans en réanimation à l'hôpital de Saint-Denis, a tenu face à tous les décès, notamment grâce à la solidarité entre collègues.

Changer de métier ? "J'aurais pu, mais comme je suis à un an de la retraite...", confie le sexagénaire, surblouse et charlotte vertes, en sortant de la chambre d'un patient. 

Pour des soignants plus jeunes, la réalité a été violente.

En juillet 2019, en sortie d'école, Cécile Le Corvic avait "choisi la réanimation parce que c'est une prise en charge complète, avec un panel de pathologies immense, qui se répercute sur les soins et la technicité". "J'ai connu une réa sans Covid que quelques mois...", se désole cette infirmière de 25 ans. 

Après presque deux années d'une pandémie qui "a été soudaine", la jeune femme a décidé de "quitter la réa". "Je pars en mars, je serai pendant un an en disponibilité", dit-elle, sans savoir dans quel service elle souhaite être réintégrée à son retour.


Paris salue la conférence de New York et poursuit l’initiative avec Riyad

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
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  • Paris et Riyad poussent pour une reconnaissance collective de l’État palestinien
  • La France appelle à un cessez-le-feu, la levée du blocus et le désarmement du Hamas

PARIS: Sur fond de crise humanitaire d’une cruauté inqualifiable dans la bande de Gaza, le président Emmanuel Macron a annoncé une opération de largage de vivres conduite par la France, avec le soutien de la Jordanie, des Émirats arabes unis et de l’Allemagne.

« Face à l’urgence absolue, nous venons de conduire une opération de largage de vivres à Gaza », a déclaré le chef de l’État sur X, en remerciant les partenaires impliqués et saluant l’engagement des forces armées françaises.

Mais, de son point de vue, ces largages restent insuffisants : « Il faut qu’Israël ouvre un plein accès humanitaire », a-t-il insisté, réitérant l’exigence française d’une levée immédiate du blocus des aides.

Au-delà de la réponse d’urgence, Paris entend porter une initiative diplomatique structurante : la conférence internationale co-présidée à New York par la France et l’Arabie saoudite a marqué un tournant en posant un cadre politique ambitieux.

Cette conférence, tenue en l’absence des États-Unis et d’Israël, a réuni plus de 40 ministres et 120 participants, aboutissant à l’adoption d’un plan d’action en 42 points.

Malgré les réticences et le scepticisme ambiants, elle a permis l’émergence d’une dynamique inédite vers la reconnaissance de l’État palestinien et un processus de paix régional.

Le plan d’action validé à New York constitue désormais un socle politique partagé entre acteurs européens, puissances arabes, Union européenne et Ligue arabe.

Ce texte appelle à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, à la libération de tous les otages, à l’acheminement massif de l’aide humanitaire, mais surtout à la mise en œuvre concrète de la solution à deux États.

Il prévoit notamment un processus progressif de désarmement du Hamas, condition indispensable à la stabilisation durable de la région.

Pour la France, ce texte marque une rupture avec l’impasse diplomatique des dernières décennies et propose pour la première fois un mécanisme concerté de démilitarisation et de réintégration de Gaza dans le giron de l’Autorité palestinienne.

Le document évoque même la possibilité de confier les armes du Hamas à une tierce partie sous supervision internationale, afin de garantir qu’elles ne soient plus utilisées.

Ce volet, essentiel pour Israël, est aussi le fruit d’un consensus entre les États arabes partenaires, y compris ceux perçus comme proches du Hamas.

Sur le front politique, Paris se réjouit de l’effet de levier de la conférence : peu après, plusieurs pays — Portugal, Royaume‑Uni, Canada — ont annoncé leur volonté de reconnaître l’État palestinien, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre.

Une coalition de volontaires est en train de se constituer : quinze États, aux côtés de la Ligue arabe et de l’Union européenne, ont d’ores et déjà signé une déclaration commune en ce sens.

La France espère ensuite entraîner d’autres partenaires européens, notamment l’Allemagne. « Nous continuons à travailler en E3 avec nos partenaires allemands et britanniques », indique une source haut placée.

Si Berlin reste prudent, des signes d’évolution apparaissent dans les récentes déclarations de sa ministre des Affaires étrangères. Paris entend maintenir ces échanges diplomatiques jusqu’à septembre.

Contrairement aux critiques israéliennes et américaines, la France affirme que cette dynamique de reconnaissance ne constitue pas un obstacle à la paix, mais un levier pour la relancer.

Le président Macron estime que cette reconnaissance, inscrite dans un cadre politique exigeant — avec une gouvernance palestinienne réformée et un désarmement du Hamas — peut rebâtir les conditions d’une solution durable.

Les ruptures des négociations avec le Hamas sont antérieures aux annonces de Paris, souligne-t-on à l’Élysée, et ne peuvent donc pas lui être imputées.

La reconnaissance collective envisagée en septembre serait également un signal fort en direction des modérés palestiniens, en particulier l’Autorité palestinienne, qui s’est engagée début juin à respecter une série d’exigences posées par la communauté internationale en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption.

Un des apports majeurs de la conférence de New York est l’introduction formelle de la question du désarmement du Hamas dans un cadre diplomatique multilatéral.

Jusqu’ici marginalisée ou qualifiée d’irréaliste, cette exigence est clairement codifiée dans le plan d’action. Des discussions sont en cours, y compris sur l’exil éventuel de certains cadres du mouvement auprès d’États tiers.

Le Hamas n’a pas accepté ces conditions, mais le message politique est clair : son isolement au sein du monde arabe s’accentue et sa marge de manœuvre se rétrécit.

Face à cette dynamique, Israël et l’administration américaine ont haussé le ton, estimant qu’une reconnaissance unilatérale de la Palestine constituerait une « insulte » aux victimes israéliennes du 7 octobre.

Le président américain Donald Trump a même imposé des sanctions ciblées contre certains membres de l’Autorité palestinienne et de l’OLP, en contradiction avec les efforts en cours pour renforcer cette autorité.

La position américaine révèle un décalage croissant avec une partie de la communauté internationale, y compris des alliés traditionnels, en raison de son soutien inconditionnel à Israël, malgré l’ampleur des pertes civiles à Gaza et la persistance de la colonisation en Cisjordanie.

Cet état de fait suscite déjà des interrogations en Europe, où des pays comme la Suède exigent, par exemple, le gel de la partie commerciale de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël.

La France, de son côté, entend poursuivre cette dynamique au-delà de la conférence de New York. Un sommet est prévu les 21 et 22 septembre, juste avant l’Assemblée générale de l’ONU, pour réunir les États prêts à reconnaître collectivement la Palestine et à faire vivre ce nouveau cadre politique.

« Il s’agit d’une coalition inédite, qui repose sur un équilibre entre exigences sécuritaires et reconnaissance des droits politiques du peuple palestinien », souligne-t-on à Paris.

En réaffirmant l’exigence d’un cessez-le-feu immédiat, la levée du blocus humanitaire, la libération des otages, mais aussi le désarmement du Hamas et la mise en place d’un État palestinien souverain, la France, de concert avec l’Arabie saoudite, tente de reconstruire une architecture de paix.


La défiance à l'égard de Macron et de Bayrou au plus haut, selon un sondage Paris, France

Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
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  • La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat
  • Le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi

PARIS: La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat, tandis que le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi.

Près des trois quarts des Français interrogés (73%) affirment ne pas faire confiance au chef de l'Etat et la moitié (49%) va jusqu'à "ne pas lui faire du tout confiance", le niveau le plus élevé atteint de son second mandat, qu'il n'a dépassé qu'une seule fois depuis son arrivée à l'Elysée en 2017 au plus fort de la crise des gilets jaunes en décembre 2018.

Selon le sondage, seuls 21% des Français font confiance à Emmanuel Macron, soit un point de moins qu'en juin et 6 de perdus par rapport à mars.

Pour François Bayrou, qui a présenté à la mi-juillet les mesures d'économie prévues par le gouvernement dans son projet de budget pour l'année prochaine, la chute se poursuit avec seulement 12% des Français qui disent lui faire confiance, soit un nouveau record d'impopularité (-2 points).

La défiance à l'égard du chef du gouvernement a progressé, avec 80% des Français (+5 points en un mois) qui disent ne pas lui faire confiance et 56% qui affirment ne pas lui faire "du tout" confiance, soit un bond de 9 points depuis juin.

Au classement des personnalités, le RN Jordan Bardella conserve la première place avec 39% des Français (+3 points) qui ont une image positive de lui, devant l'ancien Premier ministre Edouard Philippe (37%) et Marine Le Pen (35%).

A gauche, le mieux classé est l'ancien président François Hollande qui s'installe en huitième position grâce à un bond de 6 points en un mois.

Sondage réalisé par internet les 29 et 30 juillet auprès d'un échantillon de 1.000 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. Marge d'erreur entre 1,4 et 3,1 points.


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.