Crise ukrainienne: l'Allemagne tergiverse et s'attire les critiques

Le chancelier allemand Olaf Scholz s'exprime lors d'une conférence de presse conjointe avec le ministre allemand de l'Économie et du Climat et le ministre allemand des Finances après une réunion à huis clos du gouvernement allemand sur la présidence du G7 à la Chancellerie de Berlin le 21 janvier 2022.(AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz s'exprime lors d'une conférence de presse conjointe avec le ministre allemand de l'Économie et du Climat et le ministre allemand des Finances après une réunion à huis clos du gouvernement allemand sur la présidence du G7 à la Chancellerie de Berlin le 21 janvier 2022.(AFP)
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Publié le Dimanche 23 janvier 2022

Crise ukrainienne: l'Allemagne tergiverse et s'attire les critiques

  • Olaf Scholz a de nouveau mis en garde la Russie, dimanche, contre les "coûts élevés » qu'aurait toute agression militaire, dans une interview au journal Süddeutsche Zeitung
  • Les atermoiements au sein du parti social-démocrate sur le stratégique gazoduc Nord Stream 2 (NS2) n'aident pas à clarifier le message

BERLIN : Le gouvernement allemand d'Olaf Scholz était sous pression dimanche pour réaffirmer sa fermeté vis-à-vis de la Russie, après d'embarrassantes dissonances dans sa coalition et les déclarations d'un haut gradé allemand qui ont indigné Kiev.

En qualifiant d'"ineptie" l'idée que la Russie puisse envahir l'Ukraine et en estimant que le président russe Vladimir Poutine "mérite probablement" le respect, le chef de la marine allemande a déclenché un tollé.

Malgré sa démission forcée samedi soir, 24 heures après la diffusion de ces propos tenus en Inde, l'irritation de Kiev est vive. Elle est également alimentée par le refus persistant de l'Allemagne de livrer des armes à l'Ukraine.

Pour Kiev, cette position est susceptible d'"encourager" Vladimir Poutine dans son intention supposée d'attaquer l'Ukraine.

Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et les pays baltes ont annoncé l'envoi d'armes à l'ex-république soviétique. Traditionnellement réticente, depuis la Seconde guerre mondiale, à tout engagement militaire, l'Allemagne estime que ce type de soutien ne ferait qu'aggraver les tensions.

Olaf Scholz a de nouveau mis en garde la Russie, dimanche, contre les "coûts élevés" qu'aurait toute agression militaire, dans une interview au journal Süddeutsche Zeitung. 

Mais, toujours prudent, il a également appelé à la "sagesse" dans l'examen des sanctions possibles et "des conséquences qu'elles auraient" pour l'Allemagne, première économie européenne.

Un mois et demi après son entrée en fonction à la tête d'une coalition avec les écologistes et les libéraux, le chancelier social-démocrate commence à essuyer des critiques pour son flou diplomatique.

"Les tergiversations des Allemands sont un danger pour la stratégie des Occidentaux", s'inquiète l'hebdomadaire allemand Spiegel.

Soucieux d'afficher un front uni avec ses alliés face à Moscou, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a assuré dimanche n'avoir "aucun doute" sur la détermination de l'Allemagne face à la Russie. Il avait rencontré Olaf Scholz la semaine dernière. 

« Cacophonie »

"Jusqu'à présent, le chancelier s'en est tenu à un programme minimal sur la crise russe", a déploré sur Twitter Ulrich Speck, expert au bureau berlinois du German Marshall Fund (GMF), un think-tank américain, déplorant des "déclarations stéréotypées".

"La confusion règne quant à savoir qui détermine désormais l'orientation de la politique à l'égard de la Russie - la chancellerie dirigée par le SPD ou le ministère des Affaires étrangères dirigé par les Verts ?", observait dans une note publiée cette semaine la chercheuse Jana Puglierin, du bureau berlinois du centre de réflexion ECFR (European Council on Foreign Relations).

L'écologiste Annalena Baerbock, cheffe de la diplomatie allemande reçue à Kiev la semaine dernière, avait assuré que son pays ferait "tout pour garantir la sécurité de l'Ukraine".

Les atermoiements au sein du parti social-démocrate sur le stratégique gazoduc Nord Stream 2 (NS2) n'aident pas à clarifier le message.

Mi-janvier, la ministre SPD de la Défense Christine Lambrecht avait estimé que la décision sur la mise en service de ce pipeline reliant la Russie et l'Allemagne devait être tenue à l'écart du dossier ukrainien. D'autres figures du parti, comme l'ancien secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Michael Roth, ont estimé l'inverse.

Résultat : "Une cacophonie qui a donné l'impression que Berlin manquait de leadership", constate encore Jana Puglierin.

 Ostpolitik

Olaf Scholz a lui-même cultivé l'ambiguïté en parlant de NS2 comme d'un "projet privé".

Il a récemment clarifié sa position, assurant s'en tenir à l'accord germano-américain sur le gazoduc signé cet été, qui prévoit des sanctions si la Russie devait "utiliser l'énergie comme une arme ou commettre de nouveaux actes agressifs contre l'Ukraine". 

Pour de nombreux responsables du SPD, "le mot +Russie+ active un réflexe nostalgique", notait cette semaine l'hebdomadaire die Zeit : celui de "l'Ostpolitik", c'est-à-dire le rapprochement avec Moscou lancé par le chancelier Willy Brandt dans les années 1970, toujours perçu comme la possibilité d'obtenir des progrès démocratiques par le dialogue.

La conservatrice Angela Merkel avait de son côté veillé, durant ses 16 années au pouvoir, à maintenir le lien avec la Russie, tentant de dissocier les différends géopolitiques des intérêts économiques entre les deux pays.

L'Allemagne "a considéré les actions du Kremlin de manière critique mais largement inactive au cours des trois dernières décennies", estiment, dans une lettre ouverte publiée ce mois-ci par l'hebdomadaire Die Zeit, 73 experts de l'Europe de l'Est et des politiques de sécurité.

Le pays doit "corriger" le traitement particulier appliqué à la Russie, plaident-ils, estimant que désormais "l'Allemagne doit agir".


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com