Dans les mines du Panchir, reconversion forcée pour les bannis du régime taliban

Sur cette photo prise le 12 janvier 2022, un travailleur sort d'un tunnel dans la zone minière sur une montagne de la vallée de Mikeni dans la province du Panjshir. (Photo, AFP)
Sur cette photo prise le 12 janvier 2022, un travailleur sort d'un tunnel dans la zone minière sur une montagne de la vallée de Mikeni dans la province du Panjshir. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 28 janvier 2022

Dans les mines du Panchir, reconversion forcée pour les bannis du régime taliban

  • Si la présence d'émeraude dans le Panchir est connue depuis des millénaires, son exploitation sérieuse ne date que des années 1970 et reste largement artisanale
  • A Mikeni, comme dans les autres mines de la région, chaque puits est possédé en copropriété par plusieurs dizaines d'associés et exploité par une équipe d'une dizaine de mineurs

MIKENI : Par un froid mordant à plus de 3 000 m d'altitude, Mohammad Israr Muradi gratte la terre avec un peu d'eau et un tamis improvisé. S'il a de la chance, l'ancien policier trouvera quelques miettes d'émeraude qu'il revendra pour une poignée d'afghanis.

Comme lui, ils sont des dizaines à se précipiter, chaque fois qu'un trolley rempli de roches ressort d'un des innombrables puits s'enfonçant dans cette montagne de la vallée de Mikeni, dans le Panchir, environ 130 kilomètres au nord-est de Kaboul.

"Les émeraudes qu'on trouve, on les vend pour 50, 80, 100 ou 150 afghanis" (0,4 à 1,2 euro au taux actuel), explique calmement Mohammad Israr Muradi, 25 ans, qui était il y a encore six mois le chef de la police anti-terroriste du district voisin de Paryan.

Comme nombre d'anciens policiers et militaires, il s'est brusquement retrouvé sans travail à l'arrivée au pouvoir des talibans, mi-août, après la chute de l'ancien gouvernement soutenu par les Etats-Unis.

Mohammad Israr Muradi a alors investi quelques milliers d'afghanis et tenté sa chance comme vendeur ambulant de vêtements d'occasion à Kaboul.

Mais "ça n'a pas marché" et sans argent, il a été "forcé" de rejoindre la mine où, comme tous les nouveaux venus, il se contente du travail le plus ingrat et le moins bien payé.

Creusés à l'explosif

Si la présence d'émeraude dans le Panchir est connue depuis des millénaires, son exploitation sérieuse ne date que des années 1970 et reste largement artisanale, alors que sa qualité et sa pureté est souvent comparée à l'émeraude colombienne, la plus recherchée de la planète.

A Mikeni, comme dans les autres mines de la région, chaque puits est possédé en copropriété par plusieurs dizaines d'associés et exploité par une équipe d'une dizaine de mineurs.

Les puits, qui s'enfoncent parfois sur plus de 500 m, sont creusés à l'explosif. Pour accéder au site depuis le bas de la vallée, il faut grimper via une piste tracée dans la neige, sillonnée par les chevaux et les ânes apportant le nécessaire, de la nourriture aux moteurs des générateurs électriques.

C'est, entre autres, cette difficulté d'accès qui a convaincu Gulabuddin Mohammadi de travailler à Mikeni. De l'armée afghane, où il a servi pendant sept ans, il se souvient que c'était "un très bon job" payé 35 000 afghanis (295 euros au taux actuel) par mois.

A la mine, en comparaison, "on est traité comme du bétail" soupire l'homme de 27 ans, avant d'énumérer: "Nous n'avons pas de vrai endroit où vivre, nous sommes sous des tentes. On n'a pas d'eau, pas de feu, pas de clinique si on tombe malade".

Mais Gulabuddin Mohammadi n'avait pas le choix: "J'ai la responsabilité de nourrir les 25 membres de ma famille".

Selon lui, de nombreux autres anciens soldats ou policiers sont venus travailler là, ne sachant pas très bien quelle allait être l'attitude des nouveaux maîtres du pays à leur égard.

A leur retour au pouvoir, ceux-ci avaient décrété une amnistie générale, mais plusieurs ONG ont depuis fait état de l'exécution ou de la disparition d'anciens membres des forces de sécurité.

Inspection des mains

Les talibans sont bien montés une fois jusqu'à la mine. C'était peu après leur arrivée au pouvoir, se remémore Mohammad Riyah Nizami, un haut gradé de la police de Kaboul ayant travaillé à Mikeni.

"Ils ont rassemblé les travailleurs dans leurs chambres", leur ont examiné les mains pour repérer les nouveaux venus et en ont embarqué une vingtaine qui seront plus tard relâchés, raconte-t-il, expliquant que les talibans cherchaient "des combattants".

Vallée encaissée et difficile d'accès, le Panchir est un bastion historique de la résistance contre les talibans et la dernière région à être tombée sous le contrôle total des islamistes, fin septembre.

Mohammad Riyah Nizami se souvient d'ailleurs du voyage angoissant de Kaboul au Panchir, la "peur d'une incompréhension" aux nombreux barrages où les téléphones des voyageurs étaient inspectés.

Lui a eu de la chance: son travail, trouvé par un ami, consistait à pousser le chariot. Un peu plus de stabilité, 400 afghanis par jour et une petite prime s'ils trouvaient un filon.

Mais dès qu'il l'a pu, rappelé à Kaboul par les talibans ayant besoin de ses connaissances informatiques, il est rentré.

Ce qu'est prêt à faire aussi Mohammad Israr Muradi, alors que les talibans ont dit vouloir rebâtir l'armée et la police afghanes. Pendant des années, son travail était de poursuivre les talibans mais aujourd'hui, confie-t-il, "s'ils me rappellent au travail, j'y vais".


Naufrage au large de Djibouti: au moins 21 migrants morts et 23 disparus, selon l'ONU

Une embarcation de migrants qui a coulé au large de Djibouti. Photo d'archives. (AFP).
Une embarcation de migrants qui a coulé au large de Djibouti. Photo d'archives. (AFP).
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  • La bateau transportait des Ethiopiens venant du Yémen, a indiqué sur X l'ambassadeur éthiopien à Djibouti, Berhanu Tsegaye, en précisant que l'accident a eu lieu dans la nuit de lundi à mardi au large de Godoria (nord-est de Djibouti)
  • Sur les 77 migrants à bord de l'embarcation, 23 sont toujours portés disparus et 21 corps ont été retrouvés, dont ceux d'enfants

NAIROBI: Au moins 21 migrants, dont des enfants, ont été tués et 23 autres sont portés disparus dans le naufrage de leur embarcation au large de Djibouti, a annoncé mardi l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).

La bateau transportait des Ethiopiens venant du Yémen, a indiqué sur X l'ambassadeur éthiopien à Djibouti, Berhanu Tsegaye, en précisant que l'accident a eu lieu dans la nuit de lundi à mardi au large de Godoria (nord-est de Djibouti).

"Les opérations de recherche et sauvetage par les autorités locales et l'OIM sont en cours", a affirmé l'OIM sur X.

Sur les 77 migrants à bord de l'embarcation, 23 sont toujours portés disparus et 21 corps ont été retrouvés, dont ceux d'enfants, selon le chef de mission de l'OIM à Djibouti, Tanja Pacifico.

Le bateau était en route vers la côte djiboutienne après avoir quitté le Yémen lundi vers 19H30 (16H30 GMT), a-t-elle indiqué.

L'ambassadeur éthiopien à Djibouti a confirmé que 33 personnes, dont une femme, avaient survécu, exprimé sa "peine profonde (...) devant la succession d'horribles désastres", et réclamé l'adoption de "mesures légales" contre "les trafiquants d'êtres humains qui mettent les vies de nos citoyens en danger".

Il s'agit du deuxième naufrage rapporté par l'OIM au large de Djibouti en quelques semaines, après un autre le 8 avril dans lequel au moins 38 migrants, dont des enfants, ont péri.

« Route dangereuse »

La "route de l'Est", empruntée par les migrants venant de la Corne de l'Afrique pour rejoindre l'Arabie saoudite via le Yémen en guerre, est considérée par l'OIM comme "l'une des routes migratoires les plus dangereuses et les plus complexes d'Afrique et du monde".

Malgré les risques, "le nombre de personnes qui tentent de traverser est en constante augmentation", a affirmé Mme Ndege.

Le 8 avril, l'OIM estimait qu'au moins 698 personnes avaient péri le long de la "route de l'Est" en 2023. Mais "ce chiffre pourrait être plus élevé car certaines tragédies passent souvent inaperçues", ajoutait l'agence onusienne.

En novembre 2023, 64 migrants avaient disparu, présumés morts en mer, lors d'un naufrage au large des côtes du Yémen.

Outre les naufrages, les migrants sont confrontés le long du chemin à "la famine, aux risques sanitaires, aux trafiquants et autres criminels" et manquent "de soins médicaux, de nourriture, d'eaux, d'un abri", souligne l'organisation.

Selon l'OIM, les Éthiopiens représentent 79% des quelque 100.000 migrants arrivés au Yémen en 2023 depuis les côtes de Djibouti ou de Somalie, le reste étant des Somaliens.

La plupart d'entre eux évoquent des motifs économiques à leur départ, mais une partie met aussi en avant les violences ou les catastrophes climatiques dans leur pays.

Deuxième pays le plus peuplé d'Afrique, l'Ethiopie est déchirée par de nombreux conflits et plusieurs régions ont souffert ces dernières années d'une importante sécheresse. L'inflation est galopante et plus de 15% des 120 millions d'habitants dépendent de l'aide alimentaire.


L'Ukraine va annoncer des mesures pour faire rentrer ses hommes de l'étranger

Des habitants locaux se tiennent devant une affiche de recrutement de la troisième brigade d'assaut ukrainienne alors qu'ils se réfugient dans une station de métro souterraine lors d'une alerte de raid aérien à Kiev le 23 avril 2024 (Photo, AFP).
Des habitants locaux se tiennent devant une affiche de recrutement de la troisième brigade d'assaut ukrainienne alors qu'ils se réfugient dans une station de métro souterraine lors d'une alerte de raid aérien à Kiev le 23 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Selon des estimations de médias, des dizaines de milliers d'hommes ont fui le pays illégalement pour éviter d'aller au front
  • Des centaines de milliers d'Ukrainiens vivaient en outre à l'étranger avant l'invasion

KIEV: Le chef de la diplomatie ukrainienne a indiqué mardi des "mesures" imminentes visant à faire rentrer en Ukraine les hommes en l'âge de combattre se trouvant à l'étranger.

L'Ukraine, qui combat depuis deux ans l'invasion russe, a cruellement besoin de soldats, d'autant que Kiev s'attend à ce que la Russie lance une nouvelle offensive dans les semaines ou mois à venir.

"Le fait de séjourner à l'étranger ne dispense pas un citoyen de ses devoirs envers sa patrie", a déclaré Dmytro Kouleba sur X, annonçant avoir ordonné des "mesures pour rétablir l'équité entre les hommes en âge d'être mobilisés en Ukraine et ceux à l'étranger".

Il n'a pas précisé la nature de ces mesures se bornant à dire que le ministère allait "prochainement fournir des éclaircissements" sur de nouvelles procédures à suivre pour "accéder aux services consulaires".

L'Ukraine interdit aux hommes en âge de combattre de voyager à l'étranger à quelques exceptions près.

Déserteurs 

Mais, selon des estimations de médias, des dizaines de milliers d'hommes ont fui le pays illégalement pour éviter d'aller au front.

Des centaines de milliers d'Ukrainiens vivaient en outre à l'étranger avant l'invasion.

La déclaration du ministre intervient alors qu'un influent site d'information ukrainien ZN.UA a publié lundi soir ce qu'il affirme être une lettre officielle signée par un adjoint de M. Kouleba et préconisant aux consulats ukrainiens de suspendre à partir de mardi tout service consulaire pour les hommes âgés de 18 à 60 ans.

Selon des médias ukrainiens, plusieurs consulats ukrainiens ont cessé d'accepter ces dossiers.

La compagnie d'Etat Dokument qui facilite la délivrance de documents ukrainiens a annoncé mardi sur son site qu'elle "suspendait" les procédures à l'étranger pour des "raisons techniques".

L'Ukraine, dont l'armée est en difficulté face aux troupes russes, a adopté une loi sur la mobilisation visant à durcir les punitions pour les récalcitrants.

Elle a aussi baissé l'âge de mobilisation de 27 à 25 ans.


Début des discussions entre Washington et Niamey sur le retrait des troupes américaines du Niger

Les manifestants réagissent alors qu'un homme brandit une pancarte exigeant que les soldats de l'armée américaine quittent le Niger sans négociation lors d'une manifestation à Niamey, le 13 avril 2024. (AFP)
Les manifestants réagissent alors qu'un homme brandit une pancarte exigeant que les soldats de l'armée américaine quittent le Niger sans négociation lors d'une manifestation à Niamey, le 13 avril 2024. (AFP)
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  • Le gouvernement du Niger, issu d'un coup d'Etat en juillet dernier, avait dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis
  • Washington a accepté de retirer du pays ses plus de 1 000 soldats et annoncé envoyer une délégation à Niamey pour s'accorder sur les détails de ce retrait

WASHINGTON: Washington a entamé les discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des troupes américaines qui y étaient déployées dans le cadre de la lutte antidjihadiste au Sahel, a déclaré lundi le Pentagone.

Le gouvernement du Niger, issu d'un coup d'Etat en juillet dernier, avait dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis, estimant que la présence américaine était désormais "illégale".

Washington a finalement accepté la semaine dernière de retirer du pays ses plus de 1 000 soldats et annoncé envoyer une délégation à Niamey pour s'accorder sur les détails de ce retrait.

"Nous pouvons confirmer le début des discussions entre les Etats-Unis et le Niger sur le retrait ordonné des forces américaines du pays", a déclaré le porte-parole du Pentagone Pat Ryder.

Une "petite délégation du Pentagone et du commandement militaire américain pour l'Afrique" participe aux discussions, a-t-il précisé.

Les Etats-Unis vont "continuer à explorer les options possibles afin d'assurer que nous soyons toujours en mesure de faire face aux potentielles menaces terroristes", a-t-il encore dit.

A Niamey, le ministre nigérien des Affaires étrangères, Bakari Yaou Sangaré, a indiqué dans un communiqué avoir eu lundi "des discussions" avec l’ambassadrice des États-Unis à Niamey, Kathleen Fitzgibbon, portant "sur la question du départ des troupes militaires américaines du Niger".

L’entretien s’est déroulé en présence de Maria Barron, directrice de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) à Niamey, qui a assuré que l'agence allait "poursuivre sa coopération bilatérale" avec le Niger, annonçant "un nouvel accord devant remplacer celui en cours qui expire en septembre 2024", selon le communiqué.

Au Niger, les Etats-Unis disposent notamment d'une base de drone importante près d'Agadez, construite pour environ 100 millions de dollars.

Après le coup d'Etat qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum fin juillet, le nouveau régime militaire a rapidement exigé le départ des soldats de l'ancienne puissance coloniale française et s'est rapproché de la Russie, comme le Mali et le Burkina Faso voisins, également dirigés par des régimes militaires et confrontés à la violence de groupes jihadistes.