Au procès du 13-Novembre, «l'interrogatoire» de la femme de l'accusé

Ce croquis d'audience réalisé le 27 janvier 2022 montre les coaccusés (de gauche à droite): Mohammed Abrini, Mohammed Amri et Salah Abdeslam. (AFP)
Ce croquis d'audience réalisé le 27 janvier 2022 montre les coaccusés (de gauche à droite): Mohammed Abrini, Mohammed Amri et Salah Abdeslam. (AFP)
Short Url
Publié le Samedi 29 janvier 2022

Au procès du 13-Novembre, «l'interrogatoire» de la femme de l'accusé

  • Kim parle depuis moins d'une minute qu'elle fond en larmes en évoquant l'arrestation de Mohammed Amri, au lendemain des attentats
  • Sur une éventuelle «radicalisation», elle n'a «jamais eu un doute». «Je connais ses valeurs», maintient-elle

PARIS : Au procès du 13-Novembre, la cour attendait vendredi des réponses de Mohammed Amri, l'homme qui a ramené Salah Abdeslam de Paris le soir des attentats, mais c'est surtout sa femme, dont l'audition a tourné à l'interrogatoire, qu'on a entendue.

Debout dans le box, Mohammed Amri, chemise blanche et crâne rasé, n'a pas grand chose à dire à la cour d'assises spéciale. "La vérité ...", avance-t-il. "Vous commencez toutes vos phrases par 'la vérité'. Dites nous la vérité", s'énerve l'avocat général.

"Je me rappelle plus", répond l'accusé d'un ton plat et hésitant, comme à la plupart des questions qu'il semble peiner à comprendre. "Six ans de détention provisoire, c'est compliqué".

Pour ce premier interrogatoire, il n'est pas question du fameux aller-retour Bruxelles-Paris qui lui vaut d'être ici mais de son rapport à la religion, aux frères Brahim et Salah Abdeslam qu'il connaissait bien, ayant notamment travaillé trois mois en 2015 au café "Les Béguines" tenu par l'aîné. 

"Vous étiez derrière le bar ?", s'enquiert le président. "Si quelqu'un veut une boisson chaude, ou une boisson froide, je sors de derrière le bar". 

Poussé, en vain, à donner plus d'informations sur ses "potes", il finit par lancer: "Si je suis ici, c'est à cause des frères Abdelslam. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise de plus ?"

Son interrogatoire aura duré moins longtemps que les trois heures d'audition en visioconférence de sa femme Kim, 31 ans, entendue juste avant. Le contraste est saisissant entre l'accusé et cette jeune femme aux longs cheveux clairs qui ne se laissera jamais démonter par une pluie de questions faisant parfois oublier – une fois encore à ce procès, regrettera l'avocate de Salah Abdeslam, Olivia Ronen – que les proches des accusés ne sont pas jugés. 

«Sans plus?»

Kim parle depuis moins d'une minute qu'elle fond en larmes en évoquant l'arrestation de Mohammed Amri, au lendemain des attentats. "Des stupéfiants ça m'aurait pas étonnée mais du terrorisme..."

Sur une éventuelle "radicalisation", elle n'a "jamais eu un doute". "Je connais ses valeurs", maintient-elle. "Il n'a pas changé, il ne s'est pas soudainement mis à prier toute la journée", dit cette puéricultrice qui s'est elle même convertie à l'Islam, avant leur rencontre. 

Elle détestait que son mari traîne aux "Béguines", à la "réputation exécrable" de point de vente de cannabis. 

Son mari est "très introverti", n'est "pas du tout un meneur", dit-elle dans un éclat de rire. "C'est vraiment un  suiveur, même à la maison", répète-t-elle à ceux qui s'emploient à lui faire dire qu'il pouvait être "impulsif". C'est arrivé occasionnellement, notamment avec un voisin qui n'aime pas "les couples mixtes", sourit-elle sans se démonter.

Le soir du 13-Novembre, une fois sa tournée du Samu social terminée, Mohammed Amri l'appelle. "Il me dit 'je suis parti chercher un copain'". 

"Sans plus ?", demande la cour. "Sans plus". 

"Il aurait pas pu dire non ?". "Il n'est pas comme ça malheureusement", "trop gentil".  

Comment pouvait-elle ne pas connaître ses "copains" ? N'a-t-elle pas cherché à en savoir plus sur celui que son mari a ramené de Paris ? Et à son retour, pourquoi n'ont-ils pas parlé des attentats qui venaient de se produire ? 

"Votre mari rentre à midi au lieu d'1H00 du matin, il y a eu le 13-Novembre, et vous, vous lui faites... des oeufs", lâche une avocate des parties civiles. 

"Pourquoi ne vous a-t-il rien dit?", insiste une autre. "Je suis son tout", "il ne voulait pas rajouter sa femme dans cette histoire", avance Kim.

"Ca ne vous gêne pas un peu Madame ?", l'invective encore un avocat. "De savoir que c'est votre mari qui ramène le dernier homme de ce commando ?"

La témoin fond en larmes, on enrage sur les bancs de la défense. "Bien sûr, c'est pas normal", dit-elle la voix tremblante. "Ma peine ne sera jamais aussi grande que celle des victimes, mais cette personne là (Salah Abdeslam), elle m'a aussi volé une partie de ma vie".

Elle se reprend. "Mon mari n'a jamais voulu ça, j'en suis sûre. Malheureusement il y est allé, et il l'a ramené".


Grève nationale : les syndicats unis contre le budget du futur gouvernement

Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
Short Url
  • Journée de grève nationale ce jeudi à l’appel des 8 principaux syndicats français, unis contre les mesures budgétaires jugées « brutales »
  • Les autorités redoutent des débordements à Paris, avec jusqu’à 100 000 manifestants attendus et la présence annoncée de casseurs. 900 000 personnes pourraient se mobiliser dans toute la France

Les syndicats français ont promis une "journée noire" de manifestations et de grèves jeudi pour peser sur les choix budgétaires du prochain gouvernement, en pleine crise politique dans la deuxième économie de l'UE.

A Paris, le préfet de police s'est dit "très inquiet" de la présence de nombreux casseurs venant pour "en découdre" dans la manifestation prévue dans la capitale, qui pourrait selon lui rassembler 50.000 à 100.000 personnes.

Les autorités s'attendent à une mobilisation massive, avec plus de 250 cortèges annoncés qui pourraient réunir jusqu'à 900.000 personnes à travers le pays, soit cinq fois plus que lors du mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre lancé sur les réseaux sociaux, hors de tout cadre syndical.

Cette mobilisation lancée par les huit syndicats français, unis pour la première fois depuis le 6 juin 2023, vise les mesures budgétaires "brutales" préconisées cet été par le Premier ministre François Bayrou pour réduire le déficit de la France (coupes dans le service public, réforme de l'assurance chômage, gel des prestations sociales notamment).

Son gouvernement alliant le centre droit et la droite, minoritaire à l'Assemblée nationale, a été renversé par les députés le 8 septembre.

Nommé le lendemain, son successeur Sébastien Lecornu - troisième Premier ministre d'Emmanuel Macron depuis juin 2024, le cinquième depuis sa réélection en 2022 - s'est lui aussi engagé à réduire le déficit qui plombe les comptes de la nation (114% du PIB), tout en promettant des "ruptures sur le fond" en matière budgétaire.

Ce fidèle du président a entamé une série de consultations avec les partis politiques avant de composer un gouvernement et présenter son programme, en vue de boucler dès que possible un projet de budget pour 2026.

Il a également reçu quasiment tous les syndicats, qui n'en ont pas moins maintenu leur mot d'ordre, espérant une mobilisation similaire à celles de 2023 contre la réforme des retraites qui avaient régulièrement réuni un million de manifestants, dont un pic à 1,4 million.

- "Démonstration de force" -

"Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", s'est indignée lundi la leader de la CGT, Sophie Binet, après avoir rencontré le nouveau Premier ministre.

L'abandon par Sébastien Lecornu de la très controversée suppression de deux jours fériés voulue par François Bayrou est "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a-t-elle estimé.

Même la CFDT, syndicat réputé plus apte au compromis, est "plus que jamais motivée pour aller dans la rue", a fait savoir sa responsable Marylise Léon qui attend "des faits et des preuves" du nouveau chef de gouvernement, et notamment un "besoin d’efforts partagés".

Elle a apprécié à cet égard que le successeur de François Bayrou se dise selon elle conscient de la nécessité de "faire quelque chose" au sujet de la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat.

"Le budget va se décider dans la rue", estime Mme Binet, qui évoque une "démonstration de force" et laisse entrevoir une mobilisation dans la durée.

Côté transports, le trafic sera "perturbé" voire "très perturbé" dans la capitale, ainsi que pour les trains interurbains.

Ce sera moins le cas pour les trains régionaux et les TGV. Un service proche de la normale est attendu dans les aéroports, le principal syndicat de contrôleurs aériens ayant reporté sa grève.

A l'école, un tiers des enseignants du premier degré (écoles maternelles et élémentaires) seront grévistes. L'ampleur du mouvement dans la fonction publique en générale reste encore à préciser.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Short Url
  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Short Url
  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.