L'ONU s'attelle à définir sa place dans l'Afghanistan des talibans

Des policiers de New York surveillent le siège de l'ONU à New York, le 2 décembre 2021. (Photo, AFP)
Des policiers de New York surveillent le siège de l'ONU à New York, le 2 décembre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 04 février 2022

L'ONU s'attelle à définir sa place dans l'Afghanistan des talibans

  • Selon un autre diplomate, des «consensus» peuvent être trouvés dans le domaine humanitaire ou du terrorisme
  • Les «divergences» seront davantage entre ceux qui seront tentés par une «coopération», et ceux qui auront une «approche dure» pour obtenir des concessions des talibans

NATIONS UNIES : Le Conseil de sécurité de l'ONU va engager prochainement des discussions sur le futur rôle de l'Organisation dans l'Afghanistan des talibans, sur la base d'un récent rapport du chef des Nations Unies qui préconise le dialogue et d'éviter de les isoler.

Menées par la Norvège, organisatrice récemment d'une première rencontre internationale avec les talibans, les négociations sur le mandat de la mission politique de l'ONU dans le pays, la Manua, "vont être très délicates et très difficiles", indique sous couvert d'anonymat un ambassadeur d'un pays membre du Conseil.

D'un côté, l'Occident va vouloir s'assurer "que les femmes et les filles, en particulier, ne sont pas mises de côté dans cette discussion". De l'autre, Chine et Russie pourraient vouloir minimiser la dimension des droits humains pour la future mission Manua, laisse entendre cette source.

Selon un autre diplomate, des "consensus" peuvent être trouvés dans le domaine humanitaire ou du terrorisme. Les "divergences" seront davantage entre ceux qui seront tentés par une "coopération" (Chinois et Russes), et ceux qui auront une "approche dure" pour obtenir des concessions des talibans, à savoir les Occidentaux.

Le mandat de la Manua, présente en Afghanistan depuis 2002, expire le 17 mars. Outre les négociations au Conseil de sécurité, la définition du rôle de l'ONU dépendra du bon vouloir des talibans qui ont repris le pouvoir à la mi-août et cherchent une reconnaissance internationale.

Les nouvelles autorités n'ont pas réussi jusqu'à présent à faire légitimer par l'ONU la nomination à New York d'un nouvel ambassadeur, Suhail Shaheen, qui occupait récemment les fonctions de porte-parole des talibans. Le processus de reconnaissance est gelé à l'ONU à la suite d'un accord entre Etats-Unis, Russie et Chine.

Dans un rapport publié cette semaine, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, plaide pour un nouveau mandat d'un an pour la Manua. Il détaille ses contours en relevant que les talibans n'ont "pas établi la confiance avec une grande partie du peuple afghan ni convaincu celui-ci de leur capacité à gouverner", conduisant de nombreux Afghans "à continuer à chercher à quitter le pays".

Pour autant, "la meilleure façon de promouvoir la stabilité et le soutien international à l'avenir est que les talibans évitent l'isolement qui a marqué leur passage précédent au pouvoir" (1996-2001), fait-il valoir.

«Service des droits humains»

"Il est donc essentiel d'instaurer un dialogue constructif, axé sur le bien-être et les droits du peuple afghan, entre les autorités de facto, les autres parties prenantes afghanes, les pays de la région et la communauté internationale", insiste-t-il.

Le chef de l'ONU vise notamment la crise économique et financière de l'Afghanistan qui menace de famine plus de la moitié de sa population. Il plaide depuis des mois pour un allègement des sanctions infligées à Kaboul pour éviter l'effondrement du pays. Près de 9,5 milliards de dollars de la banque centrale afghane sont gelés depuis août par Washington.

"Il est essentiel que ce dialogue porte sur l'ensemble des questions liées à la gouvernance – y compris la question des droits humains et des libertés fondamentales – qui auront une forte incidence sur la prospérité et la sécurité des citoyennes et citoyens et sur l'avenir de l'Afghanistan, notamment ses relations avec la communauté internationale", souligne Antonio Guterres.

Son rapport comporte plusieurs recommandations, notamment "de travailler avec tous les acteurs pour promouvoir une gouvernance et une société afghanes efficaces, responsables et inclusives, tout en faisant progresser la réconciliation".

Pour la Manua, le chef de l'ONU recommande en priorité de "coordonner et permettre la fourniture de l'aide humanitaire essentielle", de "fournir des conseils" en matière de respect des droits humains et de participer à "la surveillance et au signalement des violations et des atteintes à ces droits".

Antonio Guterres demande que le futur émissaire de l'ONU travaille sur deux axes, "politique et gouvernance" et "action humanitaire et développement". Sous ses ordres, "un Service des droits humains (...) fournirait des rapports impartiaux et collaborerait avec toutes les parties prenantes aux niveaux national et infranational".

Son rapport recommande aussi de fournir à l'Afghanistan des services de déminage et de "conserver les six bureaux régionaux et les cinq bureaux provinciaux actuels, afin de permettre une action de proximité dans tout le pays".

La Manua devrait aussi maintenir ses bureaux de liaison à Islamabad et Téhéran pour faciliter la coopération régionale, précise le secrétaire général.


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.