La France sur le point d'adopter une loi demandant «pardon» aux harkis

Dans cette photo d'archive prise le 2 juin 1975, de jeunes musulmans français, enfants de harkis, manifestent devant le camp de harkis de Saint-Maurice l'Ardoise, près de Saint-Laurent-des-Arbres, Gard, sud-est de la France, pour porter l'attention sur les conditions des Harkis. AFP
Dans cette photo d'archive prise le 2 juin 1975, de jeunes musulmans français, enfants de harkis, manifestent devant le camp de harkis de Saint-Maurice l'Ardoise, près de Saint-Laurent-des-Arbres, Gard, sud-est de la France, pour porter l'attention sur les conditions des Harkis. AFP
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Publié le Mardi 15 février 2022

La France sur le point d'adopter une loi demandant «pardon» aux harkis

  • Soixante ans après la fin de la guerre d'Algérie, le Parlement français s'apprête à adopter définitivement mardi, par un ultime vote du Sénat, un projet de loi pour demander «pardon» aux harkis
  • Le texte reconnaît «les conditions indignes de l'accueil» réservé aux 90.000 harkis et à leurs familles, qui ont fui l'Algérie après l'indépendance

PARIS: Soixante ans après la fin de la guerre d'Algérie, le Parlement français s'apprête à adopter définitivement mardi, par un ultime vote du Sénat, un projet de loi pour demander "pardon" aux harkis, qui ouvre la voie à une indemnisation pour certaines familles.

Ce texte vient concrétiser un engagement pris par le président Emmanuel Macron, qui, le 20 septembre dernier, avait demandé "pardon" à ces Algériens ayant combattu aux côtés de l'armée française, mais qui furent "abandonnés" par la France après la signature des accords d'Evian, le 18 mars 1962.

60 ans après, les plaies ouvertes par cette guerre meurtrière (1954-1962, près de 500.000 morts) sont loin d'être refermées. Et la discussion du texte a suscité beaucoup d'émotion et de passion dans les hémicycles des deux assemblées, des tensions aussi dans la communauté harkie.

Députés et sénateurs sont parvenus à un texte de compromis en commission mixte paritaire, qui a été approuvé la semaine dernière une dernière fois par l'Assemblée nationale. Le vote de la haute assemblée vaudra donc adoption définitive.

Ce projet de loi est "celui de la reconnaissance par la Nation d'une profonde déchirure et d'une tragédie française, d'une page sombre de notre Histoire", fait valoir la ministre chargée de la Mémoire et des Anciens Combattants Geneviève Darrieussecq.

Le texte reconnaît "les conditions indignes de l'accueil" réservé aux 90.000 harkis et à leurs familles, qui ont fui l'Algérie après l'indépendance.

Près de la moitié d'entre eux ont été relégués dans des camps et des "hameaux de forestage". "Ces lieux furent des lieux de bannissement, qui ont meurtri, traumatisé et parfois tué", selon la ministre.

Pour ceux-ci, le projet de loi prévoit "réparation" du préjudice avec, à la clef, une somme forfaitaire tenant compte de la durée du séjour dans ces structures, de 2.000 à 15.000 euros. 

Le nombre de bénéficiaires potentiels est estimé par le gouvernement à 50.000, pour un coût global de 302 millions d'euros sur environ six ans.

Si le niveau d'indemnisation été jugé "faible", voire "ridicule" par certains, les déceptions se sont cristallisées sur les quelque 40.000 rapatriés exclus de la réparation parce qu'ils ont séjourné dans des "cités urbaines", où il n'étaient pas privés de liberté de circulation, même s'ils ont connu des conditions de vie précaires.

Mémoire composite

Jusqu'à 200.000 harkis avaient été recrutés comme auxiliaires de l'armée française pendant le conflit entre 1954 et 1962.

Une journée d'hommage de la Nation leur est consacrée chaque 25 septembre, depuis un décret de 2003. Symboliquement, cette date sera inscrite dans la loi.

Le texte crée une commission nationale de reconnaissance et de réparation, qui statuera sur les demandes de réparation et contribuera au travail de mémoire.

Deux missions supplémentaires lui ont été assignées lors des débats dans l'hémicycle du Sénat. La commission pourra ainsi proposer pour les harkis combattants qui en font la demande "toute mesure de reconnaissance et de réparation" appropriée. Elle pourra aussi proposer au gouvernement des évolutions des dispositifs.

"Histoire complexe", "mémoire composite" : Emmanuel Macron s'est engagé dans une série d'actes forts pour "apaiser" les mémoires de la guerre d'Algérie qui continue à diviser les Français.

Dans un discours à l'Elysée fin janvier, le chef de l'Etat a fait un geste envers les pieds-noirs en qualifiant d'"impardonnable pour la République" la fusillade de la rue d'Isly à Alger en mars 1962, dans laquelle des dizaines de partisans de l'Algérie française furent tués par des soldats de l'armée française, et en estimant que le "massacre du 5 juillet 1962" à Oran devait être "reconnu". 

Mardi dernier, il a rendu hommage aux neuf victimes mortes au métro Charonne, à Paris, lors d'une manifestation pour la paix en Algérie le 8 février 1962, violemment réprimée par la police française sous autorité du préfet Maurice Papon.

Le travail mémoriel se poursuivra par la commémoration des Accords d'Evian le 19 mars, soit 20 jours avant le premier tour de la présidentielle. La présidence française a indiqué préparer avec attention cet anniversaire pour qu'il "ne soit pas pris en otage" par la politique. 


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.