La crise ukrainienne, pierre angulaire de la Conférence de Munich sur la sécurité

La vice-présidente américaine Kamala Harris et le président ukrainien Volodymyr Zelensky face à face lors de la Conférence de Munich sur la sécurité à Munich, dans le sud de l'Allemagne, le 19 février 2022. (Photo, AFP)
La vice-présidente américaine Kamala Harris et le président ukrainien Volodymyr Zelensky face à face lors de la Conférence de Munich sur la sécurité à Munich, dans le sud de l'Allemagne, le 19 février 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 20 février 2022

La crise ukrainienne, pierre angulaire de la Conférence de Munich sur la sécurité

  • Depuis vendredi, les Occidentaux sont réunis à la Conférence sur la sécurité à Munich, y confirmant leur unité en cas d’attaque russe contre l’Ukraine
  • Les tensions entre la Russie et l'Ukraine ont accaparé, sans surprise, l’ordre du jour de la Conférence de Munich sur la sécurité

BEYROUTH : Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est rendu samedi à la conférence de Munich, selon des sources proches de son cabinet, malgré la menace d’invasion russe, et la mise en garde de Joe Biden vendredi soir, qui a s'est dit convaincu que Poutine a décidé d'envahir l'Ukraine, laissant toutefois la porte ouverte à la diplomatie.

Outre le président ukrainien Volodymyr Zelenskiy, la vice-présidente américaine Kamala Harris et le secrétaire général de l'OTAN Jens Stoltenberg comptent parmi les personnalités présentes à l'événement de trois jours, connu sous le nom de "Davos pour la défense", qui a débuté vendredi au luxueux hôtel Bayerischer Hof de Munich.

Conférence orientée vers la crise ukrainienne

Depuis vendredi, les Occidentaux assistent à la Conférence sur la sécurité à Munich, y confirmant leur unité en cas d’attaque russe contre l’Ukraine, mais appelant toutefois à la désescalade et au dialogue.

Aucune délégation russe n'a assisté à la conférence, ce qui constitue, comme l’a déclaré le Kremlin la semaine dernière, une première absence depuis plusieurs années qui montre à quel point les relations Est-Ouest se sont détériorées.

Les tensions entre la Russie et l'Ukraine ont accaparé, sans surprise, l’ordre du jour de cette conférence sur la sécurité de Munich dont le coup d’envoi a été donné vendredi dans le contexte d’une situation explosive à l’Est de l’Ukraine.

Déclarations tous azimuts

Interrogé sur les dernières déclarations du président américain Joe Biden à l’égard de la situation en Ukraine, le ministre ukrainien assurait aux journalistes : "nous nous préparons à tous les scénarios possibles". En effet, Joe Biden s'est dit certain d'une invasion imminente de l'Ukraine par la Russie.

Le Premier ministre britannique Boris Johnson a, pour sa part, appelé les alliés présents à Munich à "l'unité" face aux risques d'invasion russe en Ukraine. M. Johnson a également souligné que les sanctions britanniques en cas d'invasion russe en Ukraine rendraient "impossible" l'utilisation par Moscou de la place financière britannique.

La vice-présidente américaine Kamala Harris a menacé samedi d'un renforcement des forces de l'Otan dans l'Est de l'Europe en cas d'attaque de l'Ukraine par la Russie, et averti Moscou qu'il s'exposerait à des sanctions économiques "sévères et rapides".

"Nous ne nous arrêterons pas aux mesures économiques. Nous renforcerons encore nos alliés de l'Otan sur le flanc oriental", a-t-elle déclaré lors d'un discours à la Conférence de Munich.

Côté chinois, le chef de la diplomatie chinoise Wang Yi a martelé à la Conférence de Munich sur la sécurité que les «préoccupations de la Russie autour de l'Ukraine "doivent être respectées" au même titre que celles des autres acteurs de cette crise.»

« La Russie et la Chine "cherchent à remplacer les règles internationales existantes", a lancé de son côté la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen devant les dirigeants internationaux rassemblés pour trois jours.

"Pour la première fois, Pékin se joint à Moscou pour demander à l'Otan de ne plus admettre de nouveaux membres", s'est ému samedi le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg à Munich. «Nous sommes extrêmement inquiets parce que nous voyons que les troupes russes continuent de se renforcer, et nous n'avons jamais vu en Europe depuis la fin de la Guerre froide une telle concentration de troupes prêtes au combat », a-t-il lancé.

Pour sa part, le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian a mis en garde Sergueï Lavrov, le ministre des Affaires étrangères, contre «les conséquences pour la Russie de toute nouvelle atteinte à l'intégrité territoriale de l'Ukraine». Il a exprimé sa certitude sur «la réponse unie des Européens, et de leurs alliés, à une telle atteinte, sous la forme de sanctions massives».

En marge de la conférence, M. Le Drian a rencontré le Premier Ministre libanais Najib Mikati, avec qui il a discuté de la nécessité de la mise en œuvre immédiate de réformes au Liban et à la poursuite des négociations avec le Fonds monétaire international qui reste jusqu’aujourd’hui le seul espoir qui sauverait la crise économique. M. Le Drian a aussi souligné lors de sa rencontre avec M. Mikati l’importance de l’organisation d’élections transparentes telles que prévues, sans aucun délai.

«L'Ukraine est le bouclier de l'Europe»

Parmi les derniers à prononcer leur discours samedi, à Munich, le président ukrainien Volodymyr Zelensky, a souligné : «Depuis huit ans, l'Ukraine a été un bouclier. Depuis huit ans, l'Ukraine retient l'une des plus grandes armées au monde qui est massée à nos frontière et pas à celles de l'UE».

Il a exhorté les Occidentaux à cesser leur politique «tendre» vis-à-vis de Moscou, lui offrant "un rameau d'olivier" alors que la Russie a hâte de faire la guerre.

Emmanuel Macron s'est entretenu avec son homologue ukrainien qui dit ne pas vouloir «riposter aux provocations le long de la ligne de contact», selon l'Elysée. De son côté, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a confié au président français « de transmettre au président russe la disponibilité de l'Ukraine au dialogue», a souligné la présidence française. Emmanuel Macron devait avoir un nouvel entretien avec son homologue russe dimanche matin.

Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg a souligné, quant à lui, l'importance de « relations transatlantiques solides » lors de sa rencontre avec la vice-présidente américaine Kamala Harris, et a remercié les États-Unis, le Canada, l’Australie, la Lituanie et l’Allemagne pour leurs importantes contributions à l'Alliance.

Jens Stoltenberg avait ouvert la conférence de Munich sur la sécurité avec un discours liminaire sur l'importance d'un lien transatlantique fort pour la sécurité européenne. M. Stoltenberg a reçu le prix Ewald von Kleist de la Conférence de Munich sur la sécurité. Le secrétaire général s'est également adressé à la Chambre de commerce américano-allemande, qui lui a remis le 30e prix du partenariat transatlantique au nom de l'OTAN.

Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane al-Saoud, a abordé la question des pourparlers de Vienne et affirmé lors de son discours à la Conférence de Munich qu’une relance de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien de 2015 devrait être «un point de départ et non un point final», et ce afin de répondre aux préoccupations régionales. Il a conclu en confirmant que l’Arabie saoudite demeure intéressée par les pourparlers avec l’Iran.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.