Le Pen, Mélenchon, Zemmour critiquent les sanctions contre la Russie, au risque de l'ambiguïté

Les candidats à la presidentielle Eric Zemmour et Marine Le Pen assistent à un briefing sur la guerre en Ukraine dirigé par le Premier ministre français Jean Castex à l'Hôtel Matignon à Paris, le 28 février 2022. (Photo, AFP)
Les candidats à la presidentielle Eric Zemmour et Marine Le Pen assistent à un briefing sur la guerre en Ukraine dirigé par le Premier ministre français Jean Castex à l'Hôtel Matignon à Paris, le 28 février 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 03 mars 2022

Le Pen, Mélenchon, Zemmour critiquent les sanctions contre la Russie, au risque de l'ambiguïté

Les candidats à la presidentielle Eric Zemmour et Marine Le Pen assistent à un briefing sur la guerre en Ukraine dirigé par le Premier ministre français Jean Castex à l'Hôtel Matignon à Paris, le 28 février 2022. (Photo, AFP)
  • Eric Zemmour - qui qualifie toujours le président Vladimir Poutine de «démocrate» mais «autoritaire» - appelle lui aussi à «une relation normalisée» avec la Russie
  • Marine Le Pen, qui veut également sortir la France du commandement intégré de l'Otan, a expliqué qu'elle ne «croyait pas» dans les sanctions économiques

PARIS: Que reste-t-il de leurs amours russes passées? Certains candidats à la présidentielle comme Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen ou Eric Zemmour se montrent critiques quant aux sanctions contre Moscou, même s'ils ont condamné l'invasion russe contre l'Ukraine. 

Considérations économiques hexagonales et emprunt à la terminologie du siècle dernier de « non-alignement », ces trois prétendants à l'Elysée, comme Nicolas Dupont-Aignan et Nathalie Arthaud, multiplient leurs réserves: « Je regrette que l'Union européenne ait décidé, je cite, de ‘fournir des armements nécessaires à une guerre’. Cette décision ferait de nous des cobelligérants », a tonné mardi Jean-Luc Mélenchon à l'Assemblée nationale. 

Il s'en est également pris à l'exclusion de la Russie du système international d'échange interbancaire Swift, selon lui « une escalade mondiale en poussant Russes et Chinois à utiliser désormais exclusivement leurs propres circuits ». 

Critiqué depuis une semaine pour sa mansuétude à l'endroit de Moscou, le leader insoumis se veut gaullien: « Hélas, nous avons été incapables de promouvoir l'Europe de l'Atlantique à l'Oural », a-t-il paraphrasé l'illustre général français Charles de Gaulle, en appelant à la « neutralité » de l'Ukraine autant que la sortie de l'Otan dans une logique de « non-alignement ». 

Eric Zemmour - qui qualifie toujours le président Vladimir Poutine de « démocrate » mais « autoritaire » - appelle lui aussi à « une relation normalisée » avec la Russie, avec « un traité consacrant la fin de l'expansion de l'Otan » dont la France doit, selon lui, sortir du commandement intégré. 

« Affamer » le peuple russe  

Un retour à la France des années 1960? « Même de Gaulle n'a jamais voulu sortir de l'Alliance. Ce sont des propositions pavloviennes, plus gaullistes que le Général », avait contesté lundi Hubert Védrine. 

« La France ne peut s'isoler des Etats-Unis et de ses partenaires européens. C'est insensé, débile, et cela tombe au pire moment », avait encore tancé l'ancien ministre des Affaires étrangères. 

Mais ce sont aussi l'efficacité et les conséquences des décisions économiques qui sont interrogés par ces candidats, reprenant leurs critiques d'il y a huit ans lorsqu'il s'agissait de fustiger les mesures de rétorsion de l'UE et la France après l'invasion de la Crimée. 

Marine Le Pen, qui veut également sortir la France du commandement intégré de l'Otan, a expliqué qu'elle ne « croyait pas » dans les sanctions économiques et exprimé sa « crainte » qu'elles « aient comme conséquence de sanctionner le peuple français » et « d'affaiblir » le pays, en considérant d'ailleurs que les sanctions de 2014 « n'ont pas fonctionné ». 

Nicolas Dupont-Aignan a pour sa part réclamé « des sanctions qui ne touchent pas les peuples européens et qui ne se retourne pas contre les Français ». 

La candidate Lutte ouvrière, Nathalie Arthaud, a elle aussi fustigé les sanctions, cette fois parce qu'elles vont selon elle « affamer » le peuple russe. 

Sarkozy et la « guerre froide »  

Les critiques de ces cinq candidats n'échappent pourtant pas à l'ambiguïté pour certains d'entre eux. 

Si les eurodéputés du Rassemblement national et ceux de la France insoumise ont voté mardi en faveur d'une résolution condamnant l'offensive militaire russe, ceux issus du RN ayant rallié Eric Zemmour se sont abstenus. 

La ligne de fracture concerne la droite dans son ensemble, tant Les Républicains se sont divisés depuis de nombreuses années, et a fortiori depuis l'annexion de la Crimée en 2014, sur le cas russe. 

A l'époque, une majorité de ténors de la feue UMP avait condamné les sanctions prises par l'Union européenne, certains parlementaires issus de leurs troupes, emmenés par Thierry Mariani (depuis passé au RN), ayant même fait le voyage à Moscou. 

« Nous étions un certain nombre de responsables politiques à penser que pousser Vladimir Poutine dans les bras de la Chine était une mauvaise idée. C'est exactement ce qui est en train de se passer », a déploré mardi Marine Le Pen. 

Une difficulté de plus pour Valérie Pécresse: soutien des mesures prises depuis la semaine dernière par la France, la candidate LR a également pris ses distances avec François Fillon, longtemps chantre du rapprochement avec Poutine. 

Elle doit également faire oublier que la tentation avait gagné en 2015 Nicolas Sarkozy, qui disait refuser « la résurgence de la guerre froide », tempérant alors son atlantisme et prenant ses distances avec l'UE, dans une énième référence à Charles de Gaulle. 

« Du gaullisme mal digéré et dévoyé », s'étaient alors étranglés les modérés du parti, Alain Juppé en tête. 


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.