La guerre en Ukraine soulève le risque d’un ordre international fragmenté

Les tentatives pour expulser la Russie de l’Assemblée générale de l’ONU ou de son Conseil de sécurité menacent d’ouvrir une boîte de Pandore, selon les experts. (AFP)
Les tentatives pour expulser la Russie de l’Assemblée générale de l’ONU ou de son Conseil de sécurité menacent d’ouvrir une boîte de Pandore, selon les experts. (AFP)
Short Url
Publié le Lundi 14 mars 2022

La guerre en Ukraine soulève le risque d’un ordre international fragmenté

  • La Fédération de Russie a hérité du siège de l’Union soviétique à l’ONU sans passer par le processus approprié de candidature et d’obtention du siège permanent au Conseil de sécurité
  • Le veto russe au Conseil de sécurité rend très difficile son expulsion ou sa suspension de l’Assemblée générale

NEW YORK: L’ONU fait face à un défi de taille, sans doute le plus important pour l’ordre mondial sur lequel repose l’organisation depuis sa fondation, il y a soixante-seize ans.
La guerre russo-ukrainienne menace de bouleverser l’ONU telle que nous la connaissons; elle annonce potentiellement la fin du multilatéralisme. L’Ukraine et ses alliés au sein de l’ONU tentent de priver la Russie de son vote au Conseil de sécurité et certains vont jusqu’à demander à ce que l’Assemblée générale expulse complètement la Russie de l’ONU.
Ces appels ont surpris les diplomates et les observateurs et ont conduit à des discussions effrénées sur la légalité d’une telle démarche, la probabilité que cela se produise et les répercussions sur l’avenir de l’organisation. Certains comparent même cette initiative à l’ouverture d’une boîte de Pandore. On ne sait pas quelles en seront les limites.
Le premier signe qui montre que les rapports sont ébranlés au sein même de l’ordre mondial s’est manifesté la nuit où la nouvelle de l’attaque russe contre l’Ukraine est parvenue au Conseil de sécurité. Ce dernier tenait alors une réunion présidée par le représentant permanent de la Russie auprès de l’ONU, Vassili Nebenzia, en sa qualité de président du Conseil de sécurité pour le mois de février.
Lors de cette réunion, Sergiy Kyslytsya, ambassadeur de l’Ukraine auprès de l'ONU, a remis en question la légitimité de l’adhésion de la Fédération de Russie à l’ONU et il a déclaré que l’ambassadeur de Russie devrait confier la présidence du Conseil de sécurité à un «membre légitime».
M. Kyslytsya s’est adressé au secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui assistait à la réunion et lui a demandé d’exiger du secrétariat de «partager avec les membres du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale deux décisions de décembre 1991 [qui] stipulent que la Fédération de Russie peut être membre de cette organisation et que l’Assemblée générale souhaite la bienvenue à la Fédération de Russie dans cette organisation».
Il soutient que «ce serait un miracle que le secrétariat puisse mettre en place de telles décisions». C’est parce qu’elles n’existent pas.
La Fédération de Russie a hérité du siège de l’Union soviétique à l’ONU sans passer par le processus approprié de candidature et d’obtention du siège permanent au Conseil de sécurité ou d’adhésion à l’Assemblée générale.
Les experts sont sceptiques quant au succès de la décision ukrainienne pour de nombreuses raisons. La principale d’entre elles est le droit de veto de la Russie, qui pourrait être rejointe par la Chine pour empêcher l’expulsion.
Cela ne décourage cependant pas les Ukrainiens de poursuivre leur campagne qui vise à expulser la Russie de l’ONU et à lui retirer son siège permanent au Conseil de sécurité.
Sur Twitter, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a annoncé que, lors d’un appel avec Antonio Guterres, il avait évoqué la possibilité de retirer le siège permanent de la Russie après que cette dernière a utilisé son veto pour bloquer l’adoption de la résolution du Conseil de sécurité condamnant son invasion de l’Ukraine.

onu
L’ONU a tenu une session extraordinaire d’urgence de l'Assemblée générale pour discuter de l’invasion de l'Ukraine par la Russie et elle a observé une minute de silence à la mémoire des personnes tuées lors du conflit. (AFP)

Dans ses Tweets, M. Kyslytsya surnomme l’ambassadeur de Russie «l’homme qui occupe le siège soviétique». Il fait allusion au fait que la charte de l’ONU n’a pas été modifiée après l’effondrement de l’Union soviétique.
Lorsque la charte nomme les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, dans l’article 23, elle mentionne toujours l’Union des républiques socialistes soviétiques comme membre permanent, et non la Fédération de Russie.
Il existe également des procédures d’admission ou d’expulsion d’un membre de l’ONU. Ces règles sont énoncées dans les articles 3, 4, 5 et 6 de la charte des Nations unies. L’article 5 stipule qu’un membre de l’ONU «contre lequel une action préventive ou coercitive a été entreprise par le Conseil de sécurité peut être suspendu par l’Assemblée générale, sur recommandation du Conseil de sécurité, de l’exercice des droits et privilèges inhérents à la qualité de membre».
L’article 6 propose l’expulsion par l’Assemblée générale d’un membre qui «viole de manière persistante» les principes de la charte, mais une telle décision ne peut être prise, là encore, que sur recommandation du Conseil de sécurité.
L’Afrique du Sud avait été suspendue de l’Assemblée générale en 1974 pour sa politique d’apartheid, mais sur recommandation du Conseil de sécurité.

onu
L’ambassadeur d’Ukraine à l’ONU, Sergiy Kyslytsya (à droite), s’entretient avec l’ambassadrice des États-Unis auprès de l’ONU, Linda Thomas-Greenfield, avant une réunion d’urgence du Conseil de sécurité, à New York, le 11 mars dernier. (AFP)

Le représentant de la Tunisie, en sa qualité de président du groupe des États africains à l’ONU, avait alors demandé à ce que le Conseil de sécurité se réunisse pour discuter de l’Afrique du Sud et il avait exhorté le conseil à invoquer l’article 6 de la charte et à expulser l’Afrique du Sud de l’ONU. Le représentant de l’URSS avait également soutenu cette demande.
Le veto russe au Conseil de sécurité rend très difficile son expulsion ou sa suspension de l’Assemblée générale.
Il existe un précédent d’utilisation du droit de veto pour arrêter toute action contre un membre impliqué dans une affaire qui porte atteinte à la paix et la sécurité. Il a été exercé deux fois par l’Union soviétique, la première lors de son vote sur la révolution hongroise, en 1956, et la deuxième lors de l’invasion de la Tchécoslovaquie, en 1968.
Par ailleurs, après que la Russie a utilisé son veto lors du vote du Conseil de sécurité sur la résolution ukrainienne, le mois dernier, Mona Juul, ambassadrice de la Norvège, a appelé la Russie à s’abstenir de voter dans la mesure où elle fait partie intégrante du conflit.
Elle déclare: «Le veto de l’agresseur sape l’objectif du Conseil de sécurité et, dans l’esprit de la charte, la Russie, en tant que partie au conflit, aurait dû s’abstenir de voter sur cette résolution.»
La Russie affirme qu’elle agit en état de légitime défense, en vertu de l’article 51 de la charte, et que la règle ne s’applique donc pas à son «opération militaire spéciale».
Il est étonnant que la remise en cause de la légitimité du siège russe soit intervenue trente ans après l’effondrement de l’Union soviétique, d’autant plus que personne à l’ONU n’a jamais contesté la transition de l’URSS à la Fédération de Russie.

onu
Le représentant permanent de la Fédération de Russie auprès des Nations unies, l’ambassadeur Vassili Nebenzia, prend la parole lors d’une conférence de presse hybride. (AFP)

Le 21 décembre 1991, onze des douze anciennes républiques soviétiques qui formaient la CEI (la Communauté des États indépendants, qui a remplacé l’Union soviétique) ont soutenu «l’adhésion de la Russie pour remplacer l’Union des républiques socialistes soviétiques à l’ONU», y compris le siège permanent au Conseil de sécurité, ainsi qu’une place au sein de toutes les organisations de l’ONU.
Boris Eltsine, alors président de la Russie, a informé le 15 décembre 1991 les Américains que la Russie voulait reprendre le siège soviétique au Conseil de sécurité. Il a envoyé une lettre au secrétaire général de l’ONU dans laquelle il déclarait que la Russie, soutenue par les États de la CEI, maintiendrait son adhésion pour remplacer l’Union soviétique.
En utilisant le mot «maintien», la Russie évite de passer par le processus formel de candidature d’adhésion à l’ONU, qui consiste à obtenir l’approbation du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale par un vote. L’Ukraine affirme aujourd’hui que la Russie aurait dû le faire.
Il convient de rappeler que la transition avait suscité à l’époque un débat juridique pour savoir si la Russie était le «prolongement» de l’Union soviétique ou son «successeur».
Le camp du «prolongement» soutient que la Russie est le noyau de l’Union soviétique. Si cette dernière a cessé d’exister, son noyau – la Russie – constitue un prolongement de l’entité précédente et peut donc hériter de tous ses droits et obligations.
D’autre part, ceux qui voient la Russie comme «successeur» pensent que, avec l’effondrement de l’Union soviétique, son siège au Conseil de sécurité n’existe plus et que la Russie ne peut donc en hériter. Mais peu s’y sont opposés et la Russie demeure à l’abri de toute contestation – jusqu’à ce jour.
Des voix s’élèvent maintenant pour demander d’appliquer la résolution «Union pour le maintien de la paix», qui autorise la tenue de sessions d’urgence de l’Assemblée générale lorsque le Conseil de sécurité est bloqué, afin de priver la Russie de son siège au Conseil de sécurité et même de son adhésion à l’ONU.
Cet appel a trouvé écho dans la capitale américaine, Washington, D.C. Un certain nombre de membres républicains du Congrès utilisent Twitter pour exiger que «la Russie soit expulsée du Conseil de sécurité de l’ONU». L’un de ces sénateurs «prévoit de soumettre une résolution au Congrès pour encourager l’ONU à retirer la Russie du Conseil de sécurité», selon Fox News.

onu
Cette image satellite, prise et publiée par Maxar le 11 mars dernier, présente un aperçu des bâtiments endommagés et des réservoirs de stockage de carburant en feu à l’aéroport Antonov de Hostomel. (Photo AFP/Image satellite ©2022 Maxar Technologies)

L’administration Biden ne semble pas prête à mener ce combat. Lorsque Linda Thomas-Greenfield, l’ambassadrice des États-Unis à l’ONU, a été interrogée à ce sujet sur CNN, elle a presque rejeté la question en affirmant: «La Russie est membre du Conseil de sécurité. C’est dans la charte des Nations unies.»
Les experts en matière de règles et de procédures de l’ONU sont très sceptiques «quant à la possibilité de priver la Russie de son adhésion à l’ONU», comme le déclare à Fox News Richard Gowan, directeur de l’ONG Crisis Group auprès de l’ONU. Il affirme: «La Russie pourrait réduire à néant le processus avec son veto.»
La question fera également face à une forte résistance de la part des membres de l’ONU, y compris le P5, puisqu’elle posera un précédent selon lequel tout membre du P5 pourrait subir le même sort à l’avenir.
Les diplomates, à l’ONU, s’accordent à dire que ce processus ne se développera pas. La Russie bénéficie toujours d’un soutien à l’Assemblée générale, bien que 141 membres aient voté en faveur de la résolution qui condamne son invasion de l’Ukraine.
De nombreux pays ont voté pour la résolution soit en raison de pressions politiques, soit pour soutenir les principes de la charte des Nations Unies. L'expulsion de la Russie du Conseil de sécurité ou de l’Assemblée générale est considérée comme une question politique qui divisera cette dernière et pourrait même mettre l’ONU elle-même et l’ordre international en danger.
Il est même fort peu probable que le monde en développement, quelles que soient les pressions exercées, envisage cette possibilité en l’absence de changements spectaculaires dans l’équilibre des forces sur le terrain dans ce conflit.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Des rapports internes concluent à un climat antisémite et anti-musulman à Harvard

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Short Url
  • Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël
  • Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants

NEW YORK: Deux rapports distincts sur Harvard publiés mardi par l'université ont établi qu'un climat antisémite et anti-musulman s'était installé sur le campus de la prestigieuse université américaine, dans le viseur de Donald Trump, et la pressent d'agir pour y remédier.

Ces deux rapports de plusieurs centaines de pages, construits notamment à partir de questionnaires et de centaines de témoignages d'étudiants et d'encadrants menés depuis janvier 2024, sont rendus au moment où l'université implantée près de Boston (nord-est) s'est attiré les foudres de Donald Trump, qui l'a dernièrement dépeinte en "institution antisémite d'extrême gauche", "foutoir progressiste" et "menace pour la démocratie".

Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël après l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants, a établi que les deux phénomènes "ont été alimentés, pratiqués et tolérés, non seulement à Harvard, mais aussi plus largement dans le monde universitaire".

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël".

Un autre groupe de travail distinct, lui consacré aux positions anti-musulmans, anti-arabes et anti-Palestiniens, a conclu à "un sentiment profondément ancré de peur parmi les étudiants, les enseignants et le personnel". Les personnes interrogées décrivent "un sentiment de précarité, d'abandon, de menace et d'isolement, ainsi qu'un climat d'intolérance omniprésent", écrivent ses auteurs.

"Harvard ne peut pas - et ne va pas - tolérer l'intolérance. Nous continuerons à protéger tous les membres de notre communauté et à les préserver du harcèlement", s'engage dans une lettre accompagnant les deux rapports le président de Harvard, Alan Garber, à l'initiative des deux rapports, en promettant de "superviser la mise en oeuvre des recommandations" préconisées.

Harvard, l'université la plus ancienne des Etats-Unis et une des mieux classées au monde, s'est distinguée en étant la première à attaquer en justice l'administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d'exigences du président.

Donald Trump, qui reproche aux universités d'être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d'admission des étudiants, les embauches d'enseignants ou encore les programmes.

L'accusation d'antisémitisme est fréquemment employée par son administration pour justifier ses mesures contre les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que contre certains étudiants étrangers liés aux manifestations contre la guerre à Gaza.


Canada: le libéral Mark Carney donné vainqueur après une campagne centrée sur Trump

Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
Short Url
  • Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays
  • Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti

OTTAWA: Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays.

Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti.

Il y a quelques mois encore, la voie semblait toute tracée pour permettre aux conservateurs canadiens emmenés par Pierre Poilievre de revenir aux affaires, après dix ans de pouvoir de Justin Trudeau.

Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et son offensive inédite contre le Canada, à coups de droits de douane et de menaces d'annexion, ont changé la donne.

A Ottawa, où les libéraux sont réunis pour la soirée électorale dans une aréna de hockey, l'annonce des résultats a provoqué une salve d'applaudissements et des cris enthousiastes.

"Je suis si heureuse", lâche sur place Dorothy Goubault, originaire de la région des Mille Iles en Ontario. "Je suis contente car nous avons quelqu'un qui peut parler à M. Trump à son niveau. M. Trump est un homme d'affaires. M. Carney est un homme d'affaires, et je pense qu'ils peuvent tous les deux se comprendre".

Pour le ministre Steven Guilbeault, "les nombreuses attaques du président Trump sur l'économie canadienne, mais aussi sur notre souveraineté et notre identité même, ont vraiment mobilisé les Canadiens", a-t-il déclaré sur la chaine publique CBC.

Et les électeurs "ont vu que le Premier ministre Carney avait de l'expérience sur la scène mondiale".

Mark Carney n'avait pas encore pris la parole à minuit locales (04H00 GMT), tandis que se poursuivait le dépouillement.

Dans les longues files devant les bureaux de vote toute la journée, les électeurs ont souligné l'importance de ce scrutin, parlant d'élections historiques et déterminantes pour l'avenir de ce pays de 41 millions d'habitants.

- "Chaos" -

À 60 ans, Mark Carney, novice en politique mais économiste reconnu, a su convaincre une population inquiète pour l'avenir économique et souverain du pays qu'il était la bonne personne pour piloter le pays en ces temps troublés.

Cet ancien gouverneur de la banque du Canada et de Grande-Bretagne n'a cessé de rappeler pendant la campagne que la menace américaine est réelle pour le Canada.

"Ils veulent nos ressources, notre eau. Les Américains veulent notre pays", a-t-il prévenu.

"Le chaos est entré dans nos vies. C'est une tragédie, mais c'est aussi une réalité. La question clé de cette élection est de savoir qui est le mieux placé pour s'opposer au président Trump?", a-t-il expliqué pendant la campagne.

Pour faire face, il a promis de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures de Washington seront en place.

Mais aussi de développer le commerce au sein de son pays en levant les barrières douanières entre provinces et de chercher de nouveaux débouchés, notamment en Europe.

En face, le chef conservateur, qui avait promis des baisses d'impôts et des coupes dans les dépenses publiques, n'a pas réussi à convaincre les électeurs de ce pays du G7, 9e puissance mondiale, de tourner le dos aux libéraux.

Pierre Poilievre aura aussi souffert jusqu'au bout de la proximité, de par son style et certaines de ses idées, avec le président américain, ce qui lui a aliéné une partie de l'électorat, selon les analystes.

Au QG des conservateurs à Ottawa, Jason Piche se dit toutefois "surpris" des résultats, "je pensais que ce serait plus serré que ça".

Un peu plus loin, Jean-Guy Bourguignon, homme d'affaires de 59 ans, se dit carrément "très triste". "Est-ce que c'est vraiment ça le pays dans lequel nous voulons vivre?", demande-t-il alors qu'il énumère les politiques des libéraux, qu'il juge liberticides.

Près de 29 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes dans ce vaste pays du G7 qui s'étend sur six fuseaux horaires. Et plus de 7,3 millions de personnes avaient voté par anticipation, un record.


Ukraine: Poutine annonce une trêve du 8 au 10 mai, «tentative de «manipulation»» répond Zelensky

Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
Short Url
  • Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai
  • Son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation"

MOSCOU: Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai, à l'occasion de la commémoration de la victoire sur l'Allemagne nazie, son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation".

Le président américain Donald Trump exhorte Kiev et Moscou à conclure un cessez-le-feu et un accord de paix, trois ans après le début de l'offensive russe ayant déjà fait des dizaines de milliers de morts civils et militaires.

"A partir de minuit entre le 7 et le 8 mai, et jusqu'à minuit entre le 10 et le 11 mai, la partie russe annonce un cessez-le-feu", a indiqué le Kremlin dans un communiqué. "Pendant cette période, toutes les opérations de combat seront arrêtées".

D'après la présidence russe, Vladimir Poutine a pris cette décision unilatérale "pour des raisons humanitaires" et à l'occasion des célébrations du 80e anniversaire de la victoire sur l'Allemagne nazie.

Pour M. Zelensky, au contraire, "il y a désormais une nouvelle tentative de manipulation". "Pour une raison, a-t-il dit dans son adresse quotidienne, tout le monde doit attendre le 8 mai et ne cesser le feu qu'ensuite pour garantir le silence" lors de la parade du 9 mai sur la place Rouge à Moscou.

La Russie commémore le 9 mai cet événement dont Vladimir Poutine a fait un marqueur essentiel de la puissance retrouvée du pays. Les dirigeants d'une vingtaine de pays sont attendus pour un défilé militaire en grande pompe sur la place Rouge à Moscou.

Le Kremlin a dit considérer que l'Ukraine "devrait suivre cet exemple", tout en prévenant que les forces russes "fourniront une réponse adéquate et efficace" en cas de violation de la trêve.

Vladimir Poutine avait déjà déclaré un bref cessez-le-feu de 30 heures les 19 et 20 avril à l'occasion de Pâques. Les deux camps s'étaient ensuite accusés de l'avoir violé, même si une baisse de l'intensité des combats avait été ressentie dans plusieurs secteurs du front.

"Accroître la pression sur la Russie"

La Maison Blanche a soutenu lundi que Donald Trump souhaitait un cessez-le-feu "permanent" en Ukraine et pas seulement une trêve temporaire.

Les Etats-Unis, jusque-là le premier soutien de l'Ukraine, veulent tourner la page aussi vite que possible quitte, craint Kiev, à accepter des dispositions très favorables à Moscou.

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a dit dimanche à son homologue russe, Sergueï Lavrov, qu'il était temps de mettre fin à une "guerre insensée" en Ukraine, selon un communiqué lundi.

De son côté, le président français Emmanuel Macron a affirmé que "dans les huit à dix jours prochains, nous allons accroître la pression sur la Russie", dans un entretien publié par le magazine Paris Match.

Il a estimé avoir "convaincu les Américains de la possibilité d’une escalade des menaces, et potentiellement de sanctions" contre Moscou.

Conditions maximalistes de Poutine 

La Russie maintient des conditions maximalistes concernant l'Ukraine, dont elle veut la reddition et le renoncement à rejoindre l'Otan, tout en s'assurant de pouvoir garder les territoires ukrainiens annexés.

La reconnaissance internationale de l'annexion russe de la Crimée et de quatre autres régions ukrainiennes est une condition "impérative" à la paix, a encore martelé lundi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov.

La Russie a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée en mars 2014, ce que la communauté internationale, Etats-Unis compris, n'a jamais reconnu.

En septembre 2022, quelques mois après le déclenchement de son assaut à grande échelle, elle a aussi revendiqué l'annexion de quatre régions ukrainiennes qu'elle occupe partiellement, celles de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia.

La Russie, qui a l'avantage sur le front, a revendiqué lundi la prise de Kamyanka, un village de la région de Kharkiv, dans le nord-est de l'Ukraine.

La Corée du Nord a pour la première fois reconnu lundi avoir envoyé des troupes en Russie et qu'elles avaient aidé Moscou à reprendre aux Ukrainiens les zones de la région de Koursk dont ils s'étaient emparés.

Trois personnes ont par ailleurs été tuées lundi dans une attaque russe contre un village de la région de Donetsk (est), selon les services du procureur régional.