Un ex-jihadiste et ses quatre «épouses» jugés à Paris comme «revenants» de Syrie

Ce croquis judiciaire réalisé le 14 mars 2022 montre Kevin Guiavarch, un djihadiste français parti combattre en Syrie, et ses quatre épouses, lors de son procès au palais de justice de Paris (Photo, AFP).
Ce croquis judiciaire réalisé le 14 mars 2022 montre Kevin Guiavarch, un djihadiste français parti combattre en Syrie, et ses quatre épouses, lors de son procès au palais de justice de Paris (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 15 mars 2022

Un ex-jihadiste et ses quatre «épouses» jugés à Paris comme «revenants» de Syrie

  • Il dit s'être installé en Syrie pour pouvoir vivre sa polygamie, mais pour l'accusation il est un combattant jihadiste
  • Guiavarch et ses quatre «épouses» encourent 20 ans de réclusion

PARIS : Un procès inédit s'est ouvert lundi devant la cour d'assises spéciale de Paris, celui de "revenants" de l'organisation Etat islamique (EI): un jihadiste français, Kevin Guiavarch, qui se dit repenti, et ses quatre "épouses" sont jugés pour "association de malfaiteurs terroriste".

Il dit s'être installé en Syrie pour pouvoir vivre sa polygamie, mais pour l'accusation il est un combattant jihadiste.

"Oui, je reste profondément croyant mais j'ai rompu avec le jihadisme", a assuré Kevin Guiavarch, 29 ans, devant la cour. Arrivé en Syrie au début 2013, il a fui le pays avec sa famille en juin 2016.

Kevin Guiavarch partage le box des accusés avec sa "dernière" épouse, Sahra R., seule femme actuellement détenue dans cette affaire. Agée de 27 ans, elle est enceinte de huit mois.

"Je suis allé en Syrie pour venir en aide à la population", a affirmé Kevin Guiavarch, en soulignant qu'il avait d'abord combattu dans les rangs de l'Armée syrienne libre (ASL) avant que son groupe rejoigne l'EI.

"Traumatisé" par la mort au combat d'un de ses camarades, il a indiqué n'avoir eu de cesse ensuite de quitter la Syrie avec sa famille qui comptait six enfants, dont quatre dont il est le père.

Issu d'une famille déchirée - son père était violent et alcoolique, sa mère est psychologiquement fragile et a effectué plusieurs séjours en psychiatrie - Kevin Guiavarch s'est converti seul à l'islam, "via internet et des lectures", à l'âge de 13 ans.

A 16 ans, il se marie une première fois avec une Française convertie. Il devient aussi adepte du groupuscule islamiste radical Forsane Alizza qui prône le jihad armé et souhaite instaurer un califat en France.

C'est dans ce groupe qu'il rencontre une autre femme, de douze ans son aînée, Salma O., à qui il propose de rejoindre son foyer.

Coralie, avec qui il a eu un enfant, refuse la polygamie. Kevin Guiavarch, "profondément déprimé" par ce refus, quitte la France avec Salma O. pour la Syrie, via la Tunisie d'où elle est originaire.

Installé dans une zone contrôlée par l'EI, le jeune homme se retrouve assez rapidement à la tête d'un foyer de quatre épouses.

Outre Salma O., Kevin Guiavarch épouse Parveen L. (née en 1994), puis Sally D. (1990) et enfin Sahra R. (1994), toutes originaires de France et recrutées depuis la Syrie via un compte Facebook.

« Vivre librement sa polygamie »

"La polygamie a une origine dans l'islam mais ce n'est pas compatible avec la République française, les lois l'interdisent", a expliqué Kevin Guiavarch lors de l'audience. "Avec mes trois anciennes épouses, nous avons décidé d'un commun accord de nous séparer pour ne pas être en marge de ces lois", a-t-il ajouté. Il reste aujourd'hui légalement marié à Salma.

Guiavarch et ses quatre "épouses" encourent 20 ans de réclusion.

Une cinquième femme, Camélia M., est elle jugée pour "financement d'entreprise terroriste" et risque 10 ans d'emprisonnement. Elle est accusée d'avoir cherché à faciliter le départ en Syrie d'une mineure radicalisée qui aurait dû épouser Kevin Guiavarch une fois là-bas.

Si Guiavarch est parti en Syrie, "c’est pour pouvoir vivre librement (sa) polygamie", a dit, hors de la salle d'audience, son avocat Vincent Brengarth.

Mais alors pourquoi avoir demandé à sa mère, restée en France, de lui envoyer des vêtements et du matériel militaires, s'interroge l'avocat général. "Je voulais être habillé comme les gens là-bas", répond Kevin Guiavarch.

Selon l'accusation, le jihadiste, devenu Abou Ayoub, a été "combattant" au sein de l'EI. De nombreux clichés le montrent en tenue de combat et en possession d'armes de guerre.

Kevin Guiavarch était "au cœur d'une mouvance jihadiste combattante particulièrement brutale, du moins au cours des premiers mois de l'année 2014", affirme l'accusation.

Il était constamment en possession d'armes de guerre et de ceintures explosives et a formé plusieurs de ses épouses au maniement de ces armes et explosifs, énumère l'accusation.

Mais l'intéressé conteste cette version. Au cours de ses auditions, il a assuré jouer "un jeu de rôle" auprès de l'EI et qu'il songeait à déserter ses rangs dès 2014 mais qu'il était resté sur zone "par résignation".

Le procès doit s'achever le 25 mars.


Amiante dans les écoles: plus de 50 personnes et sept syndicats portent plainte à Marseille

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
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  • "La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu
  • Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent"

MARSEILLE: Ils sont parents d'élèves, enseignants, agents municipaux: une cinquantaine de personnes, toutes exposées à l'amiante dans des écoles des Bouches-du-Rhône, vont déposer mercredi à Marseille une plainte contre X pour "mise en danger délibérée de la vie d'autrui".

Sept syndicats et trois associations de victimes de l'amiante sont aussi plaignants dans ce dossier, qui concerne 12 établissements scolaires, la plupart à Marseille.

"La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu, qui représente ces plaignants d'une douzaine d'établissements scolaires et dont la plainte va être déposée à 14h.

Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent".

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire.

"Une collègue est décédée en avril 2024 des suites d’un cancer lié à l’amiante, reconnu comme maladie professionnelle", a expliqué dans un dossier de presse le collectif stop amiante éducation, dans lequel sont réunis les syndicats et associations plaignants.

Le collectif dénonce "de nombreuses défaillances", notamment une absence d'information sur l'amiante, malgré les obligations réglementaires, ou encore une absence de protection pendant les travaux.

En mars, les syndicats enseignants avaient révélé que plus de 80% des bâtiments scolaires en France étaient potentiellement concernés par la présence d'amiante.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, prévoit que d’ici 2050, 50.000 à 75.000 décès par cancer du poumon dus à l’amiante aient lieu, auxquels s’ajoutent jusqu'à 25.000 décès par mésothéliome (un autre type de cancer).

 


Assassinat de Mehdi Kessaci: «Non, je ne me tairai pas» face au narcotrafic, dit son frère dans une tribune au Monde

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  • "Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic"
  • "On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement"

PARIS: "Non, je ne me tairai pas" face au narcotrafic, a déclaré mercredi dans une tribune publiée dans le journal Le Monde Amine Kessaci, le frère de Mehdi, abattu jeudi à Marseille par deux personnes à moto.

"Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic", a également écrit le militant écologiste de 22 ans, engagé dans la lutte contre le narcobanditisme. En 2020, cette famille de six enfants avait déjà été endeuillée par l'assassinat d'un autre de ses frères, Brahim, 22 ans, dont le corps avait été retrouvé carbonisé dans un véhicule.

"On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement", a encore déclaré Amine Kessaci, qui a enterré mardi son frère Mehdi. "Voici ce que font les trafiquants : ils tentent d’annihiler toute résistance, de briser toute volonté, de tuer dans l’œuf tout embryon de révolte pour étendre leur pouvoir sur nos vies", a-t-il ajouté.

La protection policière qui lui a été accordée ne l'a pas été à ses proches, a souligné le militant écologiste de 22 ans. "Pourtant, qui ignorait que ma famille avait déjà payé un tribut de sang? Comment ne pas savoir que ma famille pouvait être touchée ?", s'est-il interrogé.

"Face à un tel ennemi, l’Etat doit prendre la mesure de ce qu'il se passe et comprendre qu'une lutte à mort est engagée", a-t-il encore prévenu.

"Il est temps d’agir, par exemple de faire revenir les services publics dans les quartiers, de lutter contre l’échec scolaire qui fournit aux trafiquants une main-d’œuvre soumise, de doter les enquêteurs et les forces de police des moyens dont ils ont besoin, de renforcer, de soutenir réellement les familles de victimes du narcotrafic. Nous comptons nos morts, mais que fait l’Etat ?"

Medhi Kessaci, 20 ans, a été assassiné jeudi à Marseille près d'une salle de concert par deux hommes à moto, activement recherchées, un "crime d'intimidation" et "un assassinat d'avertissement" pour les autorités.


Accord UE-Mercosur: semaines décisives à Bruxelles, la France risque l'isolement

Des agriculteurs et des membres de la Fédération nationale bovine manifestent près de l'ambassade du Brésil à Paris le 9 juillet 2025 pour montrer leur opposition à un éventuel accord de libre-échange entre l'Union européenne (UE) et le Marché commun du Sud (MERCOSUR). (AFP)
Des agriculteurs et des membres de la Fédération nationale bovine manifestent près de l'ambassade du Brésil à Paris le 9 juillet 2025 pour montrer leur opposition à un éventuel accord de libre-échange entre l'Union européenne (UE) et le Marché commun du Sud (MERCOSUR). (AFP)
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  • La Commission européenne vise à obtenir le feu vert des États membres pour l’accord commercial UE-Mercosur d’ici le 20 décembre, malgré l’opposition française et des agriculteurs inquiets
  • La ratification finale dépendra du Parlement européen, où le vote pourrait être serré, avec une opposition notable de l’extrême gauche, de l’extrême droite et de nombreux députés français et polonais

BRUXELLES: La Commission européenne veut agir vite. Elle se donne jusqu'au 20 décembre pour obtenir le feu vert des États européens sur l'accord commercial avec les pays latino-américains du Mercosur, que la France aura du mal à bloquer.

Le vote des Vingt-Sept, à la majorité qualifiée, pourrait même intervenir début décembre, selon une source au sein de la Commission.

Les agriculteurs européens sont toujours vent debout contre cet accord qu'ils jugent "inacceptable" et voient comme une menace directe pour des filières comme la viande et le sucre.

Mais Bruxelles estime avoir fait ce qu'il fallait pour les rassurer et... amadouer Paris.

La Commission a annoncé en septembre des mesures de sauvegarde renforcées pour les produits agricoles les plus sensibles, promettant une intervention en cas de déstabilisation du marché.

Les diplomates des pays européens devraient d'ailleurs approuver cette clause de sauvegarde ce mercredi.

Elle "sera efficace pour résoudre les problèmes", martèle le commissaire européen à l'Agriculture Christophe Hansen.

Ce Luxembourgeois insiste au passage sur les "opportunités" que représente ce traité de libre-échange avec l'Argentine, le Brésil, l'Uruguay et le Paraguay pour les exportations européennes de vins et de produits laitiers. "Nous avons besoin d'exporter", a-t-il souligné après une réunion avec les ministres de l'Agriculture lundi.

Ce rendez-vous à Bruxelles a permis à chacun de réaffirmer ses positions.

Dans le camp des thuriféraires de l'accord, l'Allemagne et l'Espagne appellent à soutenir les exportateurs européens, notamment industriels, au moment où l'UE souffre sur le plan économique.

Ils jugent indispensables de diversifier les partenariats commerciaux depuis l'imposition de taxes douanières dans les États-Unis de Donald Trump.

"Je pense que l'accord avec le Mercosur progresse et qu'il sera ratifié. Nous espérons qu'il pourra entrer en vigueur au début de l'année prochaine", a déclaré le ministre espagnol Luis Planas.

La valse-hésitation des Français commence d'ailleurs à irriter à Bruxelles.

"Plutôt positif" lors d'un déplacement au Brésil, le président Emmanuel Macron avait semblé faire un pas en avant en faveur de l'accord, avant de rétropédaler après le tollé provoqué par ses propos parmi les agriculteurs français comme dans la classe politique.

Depuis, Paris assure que ce traité n'est toujours pas acceptable en l'état et fixe ses conditions.

- Un Parlement européen divisé -

La France voudrait des "mesures miroirs" pour que tous les pesticides interdits dans l'Union européenne "soient véritablement interdits dans les productions issues des pays du Mercosur", a dit la ministre Annie Genevard.

Paris réclame aussi des contrôles plus efficaces pour garantir que les produits importés respectent les normes européennes.

Dans un exercice d'équilibriste, le Premier ministre Sébastien Lecornu a répété l'opposition de la France à l'accord, mais "il ne faut pas qu’on se mente entre nous. Il y a bien des filières françaises qui vont bénéficier du Mercosur. On ne les entend pas beaucoup pour être honnête", a-t-il relevé lundi.

La France semble avoir compris qu'elle aurait du mal à bâtir une coalition suffisamment large pour s'opposer à l'accord, l'Italie penchant plutôt en faveur du traité désormais.

En attendant, Paris multiplie les échanges avec Bruxelles afin d'obtenir des concessions.

Les Français espèrent un geste sur les "limites maximales de résidus" (LMR) de pesticides autorisés, via un texte sur la sécurité alimentaire que doit présenter la Commission mi-décembre.

Sur l'accord en tant que tel, Bruxelles n'a pas l'intention de modifier sa copie en dépit des critiques. Tout juste est-il évoqué d'éventuelles communications ou échanges de lettres pour rassurer une dernière fois les récalcitrants comme la Pologne et la Hongrie.

L'Union européenne vise un feu vert des pays européens avant le sommet du Mercosur du 20 décembre au Brésil.

Mais la ratification devra ensuite passer par un vote du Parlement européen, où la partie pourrait s'avérer serrée.

"Ca ne va pas être facile. L'extrême gauche et l'extrême droite voteront" contre l'accord et dans les autres camps, "tous les Français et la plupart des Polonais" seront contre également, indique une source parlementaire, qui compte 300 opposants potentiels sur un total de 720 élus.

Environ 150 eurodéputés ont déjà appelé le Parlement à se tourner vers la Cour de justice de l'Union européenne pour contester ce traité. Un vote sur ce point pourrait avoir lieu en plénière dans les semaines qui viennent.