Au Kurdistan d'Irak, le fléau des féminicides et des violences domestiques

Sur cette photo d'archive prise le 19 novembre 2008, des femmes irakiennes assistent à une conférence sur la violence contre les femmes dans la ville d'Arbil, au nord du Kurdistan, à quelque 350 km de la capitale. (AFP)
Sur cette photo d'archive prise le 19 novembre 2008, des femmes irakiennes assistent à une conférence sur la violence contre les femmes dans la ville d'Arbil, au nord du Kurdistan, à quelque 350 km de la capitale. (AFP)
Short Url
Publié le Dimanche 20 mars 2022

Au Kurdistan d'Irak, le fléau des féminicides et des violences domestiques

  • En décembre dernier, une jeune fille de 16 ans a été défigurée à l'acide à Bagdad par un adulte qu'elle avait refusé d'épouser
  • Depuis des années, des militants dénoncent aussi excisions et mariages forcés dans une société irakienne largement conservatrice et patriarcale

SOULEIMANIYEH: Une femme brûlée vive par son époux, d'autres tuées par balle par un père ou un frère: au Kurdistan d'Irak, les autorités locales et des ONG tirent la sonnette d'alarme sur les féminicides et les violences domestiques.


Dans cette région autonome du nord de l'Irak qui veut présenter une image de stabilité et de tolérance, l'assassinat d'une personne par son frère a provoqué en février une vague de haine contre la victime sur les réseaux sociaux, même si certains ont défendu les droits des minorités.


"Ces deux derniers mois, il y a une hausse des féminicides en comparaison avec l'année dernière", indique Hiwa Karim Jwamir, porte-parole à Souleimaniyeh du Département gouvernemental de lutte contre les violences faites aux femmes.


En janvier et février, 11 femmes ont déjà été tuées au Kurdistan, la majorité d'entre elles par balle, selon le responsable. Pour l'ensemble de l'année 2021, le nombre de victimes était de 45 dans la région, contre 25 l'année précédente, ajoute-t-il.


Vendredi, une adolescente de 15 ans a été tuée de "six balles" par son père dans le village de Soran. L'homme a dit à la police que sa fille "était sortie avec deux garçons à une heure tardive de la nuit", selon une unité de lutte contre les violences domestiques.


Depuis des années, des militants dénoncent aussi excisions et mariages forcés dans une société irakienne largement conservatrice et patriarcale. 


Le reste du pays connaît aussi son lot de violences faites aux femmes: en décembre dernier, une jeune fille de 16 ans a été défigurée à l'acide à Bagdad par un adulte qu'elle avait refusé d'épouser.


Au Kurdistan, "les cas de violences envers les femmes sont en hausse", confirme Bahar Munzir, directrice de l'ONG locale People's development organization. "La plupart des femmes qui sont tuées sont victimes d'un membre de leur famille".


Début mars, le cadavre de Maria Sami, 20 ans, connue pour ses discours féministes, a été retrouvé en bord de route à Erbil, capitale du Kurdistan.

Climat d'impunité 
La police de Kirkouk a arrêté son frère le 9 mars. Avant son interpellation, l'adolescent joint par une télévision se justifiait en disant que sa soeur n'obéissait pas à la famille.


En février, Shinyar Houner Rafik, mère de deux enfants, est, elle, décédée à l'hôpital.


"Son mari était rentré soûl un soir. Il a recouvert son corps d'essence et y a mis le feu", raconte à l'AFP le père de la victime, Houner Rafik. Le mari a été arrêté.


Le Premier ministre du Kurdistan Masrour Barzani a dénoncé une "affaire horrible". "Le gouvernement doit imposer le châtiment le plus lourd possible aux auteurs" de ces crimes, a-t-il insisté. "Ces crimes dits d'honneur n'ont rien à avoir avec l'honneur".


Hana Shwan, de l'ONG Civil Development Organization, pointe toutefois du doigt un climat d'impunité qui serait responsable de cette hausse des violences.


"Il y a des manquements dans l'application de la loi et l'absence de procédures judiciaires contre les accusés", dit-elle.


En 2011, le Kurdistan avait voté une loi criminalisant l'excision et les violences domestiques. Le texte, prévoyant jusqu'à la perpétuité pour les auteurs de crimes dits d'honneur, a été salué par les ONG.


Mais son application reste inégale, malgré certains cas médiatisés.

«Dépression, suicide»
"Quand une femme est tuée, la façon dont les services de sécurité (puis judiciaires) traitent le cas n'est pas la même que si c'est un homme", affirme la militante Bahar Munzir.


"Certaines affaires n'arrivent même pas devant les tribunaux. Elles font l'objet d'un arrangement entre la famille" de l'auteur des violences et celle de sa victime.


Début février, la police de Dohouk a retrouvé le corps de Doski Azad, 23 ans, ostracisée par sa famille.


Un mandat d'arrêt a été émis pour retrouver son frère, accusé du meurtre. Mais celui-ci a fui l'Irak, selon les autorités.


Le drame a été condamné par la mission de l'ONU en Irak et des consulats occidentaux à Erbil.


Entre 2020 et 2021, dans tout l'Irak, les violences basées sur le genre ont augmenté de 125%, dépassant les 22 000 cas, selon l'Unicef.


L'agence évoque aussi "une augmentation inquiétante de la dépression et des suicides parmi les femmes et les filles, en particulier chez les déplacées et les réfugiées."                


En Syrie, les prisonniers sortent de l'enfer de la prison de Saydnaya

A Saydnaya, à une trentaine de kilomètres de Damas, libérer les prisonniers s'annonce redoutable. (AFP)
A Saydnaya, à une trentaine de kilomètres de Damas, libérer les prisonniers s'annonce redoutable. (AFP)
Short Url
  • Aucun mobilier n'est visible si ce n'est quelques maigres couvertures jetées au sol. Et des murs rongés par l'humidité et la saleté
  • "Que s'est-il passé?". La question revient sur les lèvres des prisonniers désormais libres

BEYROUTH: Un homme immortalise la scène avec son téléphone: des hommes armés font sauter les verrous des cellules de Saydnaya, la prison syrienne témoin des pires exactions du pouvoir de Bachar al-Assad. Des hommes, des femmes et des enfants hagards en sortent, peinant à croire que le président est vraiment tombé.

"Vous êtes des hommes libres, sortez! C'est fini, Bachar est parti, on l'a écrabouillé!", crie l'homme au portable, quelques heures après l'entrée des rebelles dans Damas, et la fuite en Russie du président Bachar al-Assad.

Par la porte, des dizaines d'hommes, visages émaciés, certains portés par des camarades car trop faibles pour avancer seuls, sortent de la cellule carrelée.

Aucun mobilier n'est visible si ce n'est quelques maigres couvertures jetées au sol. Et des murs rongés par l'humidité et la saleté.

"Que s'est-il passé?". La question revient sur les lèvres des prisonniers désormais libres.

Dès la chute d'Assad, les rebelles ont foncé vers les prisons.

"J'ai peur" 

A Saydnaya, à une trentaine de kilomètres de Damas, libérer les prisonniers s'annonce redoutable.

Le groupe de secours des Casques blancs dit chercher des "cellules souterraines cachées". Pour le moment, en vain. Malgré des informations contradictoires, ses volontaires défoncent depuis dimanche murs et recoins à coups de masse ou de barres de fer pour tenter de les localiser.

Les équipes utilisent aussi des capteurs audio, des chiens : "Nous travaillons de toute notre énergie, mais jusqu'à présent, il n'y a aucune preuve confirmant la présence de détenus à l'intérieur des sous-sols et labyrinthes", a indiqué sur X le chef des casques blancs Raed Saleh, après avoir annoncé devoir "se préparer au pire".

Le groupe a promis une récompense de 3.000 dollars à toute personne permettant d'identifier l'emplacement des prisons secrètes, et appelé les anciens officiers de sécurité et ceux en fonction à fournir leur aide, tout en garantissant de ne pas divulguer leur identité.

"Il y a des centaines, peut-être des milliers de prisonniers retenus deux ou trois étages sous terre, derrière des verrous électroniques et des portes hermétiques", prévient Charles Lister, du Middle East Institute.

Dans une autre aile, ce sont des cellules de femmes. Devant la porte de l'une d'elles, un enfant attend, perdu.

"J'ai peur", hurlent plusieurs femmes à la suite, visiblement apeurées à l'idée d'être piégées ou de nouveau violentées par les hommes en armes qui sillonnent les coursives.

"Il est tombé, vous pouvez sortir", ne cessent de marteler ceux qui viennent les délivrer.

Depuis le début en 2011 de la "révolution", plus de 100.000 personnes ont péri dans ses prisons, notamment sous la torture, estimait en 2022 l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

A la même époque, l'OSDH rapportait qu'environ 30.000 personnes avaient été détenues à Saydnaya, dont seulement 6.000 avaient été relâchées.

"Abattoir humain" 

Amnesty International, de son côté, a recensé des milliers d'exécutions et dénonce "une véritable politique d'extermination" à Saydnaya, un "abattoir humain".

Dans les rues de la capitale, aujourd'hui, ils déferlent par vagues. Reconnaissables de loin parce qu'ils portent encore les stigmates de ce qui a fait la triste notoriété de Saydnaya, comme d'autres prisons avant elle en Syrie: la torture, la maladie et surtout la faim.

Certains sont incapables de dire un mot. Pas même leur nom ou leur ville d'origine. D'autres répètent en boucle des borborygmes, traumatisés par la torture, assurent leurs compagnons d'infortune.

Certains sont là depuis peu. D'autres avaient disparu depuis l'époque d'Hafez al-Assad.

Dans le chaos, peu savent où aller, qui retrouver.

Aida Taher, 65 ans, est toujours à la recherche de son frère arrêté en 2012. Elle a raconte qu'elle "a couru dans les rues comme une folle" en allant à Saydnaya : "Mais j'ai découvert que certains prisonniers étaient toujours dans les sous-sols, il y a trois ou quatre sous-sols" et "ils ont dit que les portes ne s'ouvrent pas car ils n'ont pas les bons codes".

Elle s'emporte: "Nous avons été opprimés assez longtemps, on veut que nos enfants reviennent".

Le groupe des casques blancs a appelé les proches des victimes à "la patience et à ne pas creuser les prisons par eux-même, ceci conduisant à la destruction des preuves matérielles potentiellement essentielles pour révéler les faits et soutenir les efforts de justice".

En ligne, des familles ressortent les photos en noir et blanc de jeunes hommes fringants ou celles de manifestants sous les drapeaux de la "révolution" qui ont fleuri dans les provinces rebelles en 2011. Elles demandent si quelqu'un a vu ces hommes. S'ils étaient à Saydnaya.

Ou s'ils sont vraiment morts, emportés dans les 14 années de chaos en Syrie, sans espoir de les voir ressurgir au coin de la rue, amaigris mais en vie.


L'armée libanaise fait état d'un mort et de quatre soldats blessés dans une frappe israélienne dans le sud du pays

Des soldats libanais conduisent un véhicule blindé dans la ville de Tyr, au sud du Liban, le 7 décembre 2024, alors que la trêve entre Israël et le Hezbollah est fragile. (Photo AFP)
Des soldats libanais conduisent un véhicule blindé dans la ville de Tyr, au sud du Liban, le 7 décembre 2024, alors que la trêve entre Israël et le Hezbollah est fragile. (Photo AFP)
Short Url
  • « L'ennemi israélien a pris pour cible une voiture près du poste de contrôle militaire de Saf al-Hawa - Bint Jbeil, tuant un citoyen et blessant modérément quatre soldats », a-t-elle indiqué dans un communiqué.
  • L'Agence nationale libanaise d'information (Ani, officielle) a également fait état d'une « frappe israélienne visant une voiture sur la route de Saf al-Hawa - Bint Jbeil, près d'un poste de contrôle de l'armée, tuant le conducteur du véhicule, un civil ».

BEYROUTH : L'armée libanaise a indiqué qu'une personne avait été tuée et que quatre de ses soldats avaient été blessés lundi dans une frappe israélienne visant un véhicule dans le sud du pays, où un fragile accord de cessez-le-feu entre le Hezbollah et Israël est entré en vigueur le 27 novembre.

« L'ennemi israélien a pris pour cible une voiture près du poste de contrôle militaire de Saf al-Hawa - Bint Jbeil, tuant un citoyen et blessant modérément quatre soldats », a-t-elle indiqué dans un communiqué.

L'Agence nationale libanaise d'information (Ani, officielle) a également fait état d'une « frappe israélienne visant une voiture sur la route de Saf al-Hawa - Bint Jbeil, près d'un poste de contrôle de l'armée, tuant le conducteur du véhicule, un civil ».

L'armée israélienne a à plusieurs reprises demandé aux habitants du sud du Liban de ne pas se rendre dans plusieurs localités situées le long de la frontière, dont Bint Jbeil.

Une trêve a mis fin le 27 novembre à une guerre ouverte de plus de deux mois entre le Hezbollah libanais et Israël, qui a fait plus de 4 000 morts au Liban et dévasté des bastions de cette formation pro-iranienne.

Les deux parties s'accusent régulièrement de violer la trêve.

L'accord de cessez-le-feu prévoit le retrait de l'armée israélienne du Liban dans un délai de 60 jours et stipule que seuls l'armée libanaise et les Casques bleus doivent être déployés dans le sud du pays.

Le 2 décembre, les frappes israéliennes sur le sud du pays ont tué 11 personnes, selon le ministère de la Santé, après que le Hezbollah a revendiqué sa première attaque contre une position israélienne depuis le début de la trêve.

Le lendemain, le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a menacé de pénétrer « plus en profondeur » au Liban si le fragile accord de cessez-le-feu devait être rompu.

« Si nous repartons en guerre, nous agirons avec plus de force encore et pénétrerons plus en profondeur », « l'immunité de l'État libanais sera levée » et « Israël ne fera plus de distinction entre le Liban et le Hezbollah », a affirmé le ministre lors d'une visite à des troupes.


Syrie : Israël assure que son avancée dans la zone tampon du Golan est «limitée et temporaire»

Lundi, le ministre des Affaires étrangères israélien, Gideon Saar, a assuré que l'avancée des troupes israéliennes en Syrie dans la zone tampon est "une mesure limitée et temporaire". (AFP)
Lundi, le ministre des Affaires étrangères israélien, Gideon Saar, a assuré que l'avancée des troupes israéliennes en Syrie dans la zone tampon est "une mesure limitée et temporaire". (AFP)
Short Url
  • L'avancée des troupes israéliennes en Syrie dans la zone tampon à la lisière de la partie du plateau du Golan occupée et annexée par Israël est "une mesure limitée et temporaire"
  • La Jordanie a dénoncé lundi le déploiement la veille de l'armée israélienne dans la zone tampon du Golan dans le sud-ouest de la Syrie, adjacente à la partie occupée par Israël du plateau syrien depuis 1967

JERUSALEM: L'avancée des troupes israéliennes en Syrie dans la zone tampon à la lisière de la partie du plateau du Golan occupée et annexée par Israël est "une mesure limitée et temporaire", a assuré lundi le ministre des Affaires étrangères israélien Gideon Saar.

"J'insiste là-dessus: il s'agit d'une mesure limitée et temporaire que nous avons prise pour des raisons de sécurité", a déclaré M. Saar lors d'une conférence de presse à Jérusalem. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu avait annoncé dimanche avoir ordonné à l'armée de "prendre le contrôle" de cette zone tampon après la chute du président syrien Bachar al-Assad.