Présidentielle: La question mémorielle France-Algérie dans le discours politique

Le président français Emmanuel Macron (à droite) pose avec l'historien français Benjamin Stora pour la remise d'un rapport sur la colonisation et la guerre d'Algérie à l'Elysée à Paris le 20 janvier 2021. CHRISTIAN HARTMANN / POOL / AFP
Le président français Emmanuel Macron (à droite) pose avec l'historien français Benjamin Stora pour la remise d'un rapport sur la colonisation et la guerre d'Algérie à l'Elysée à Paris le 20 janvier 2021. CHRISTIAN HARTMANN / POOL / AFP
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Publié le Jeudi 07 avril 2022

Présidentielle: La question mémorielle France-Algérie dans le discours politique

  • Le rapport de Benjamin Stora contient vingt-deux préconisations qui concernent l’histoire mémorielle de la France avec l’Algérie
  • En un an, souligne l’historien, plus de gestes ont été réalisés que pendant soixante ans, depuis l’indépendance de l’Algérie

PARIS: Demandé par Emmanuel Macron, un rapport sur la question mémorielle entre l’Algérie et la France a été rédigé par Benjamin Stora, historien, professeur des universités, spécialiste de l’histoire du Maghreb contemporain des XIXe et XXe siècles), de l’immigration maghrébine en Europe et des guerres de décolonisation. Remis à l’Élysée en janvier 2021, il contient vingt-deux préconisations qui concernent l’histoire mémorielle de la France avec l’Algérie. Le texte a été publié par Albin Michel sous le titre France-Algérie, les passions douloureuses.

Interrogé par Arab News en français sur l’élaboration de ce rapport, Benjamin Stora nous explique que la question de la mémoire est très importante pour les deux pays. «C’est un travail de longue haleine qui ne peut pas se régler instantanément par un seul discours ou un seul geste; cela nécessite la mise en œuvre d’un processus», nous fait savoir l’historien. «C’est pourquoi j’ai proposé une multiplication des gestes, comme la mise en place d’un processus pédagogique qui concernera aussi l’introduction de ce travail dans les manuels scolaires», explique-t-il.

Au sujet de la réaction de la classe politique devant le rapport remis au président Macron, l’historien nous révèle qu’aucun parti n’a répondu. «Les réponses de la droite et de l’extrême droite consistent dans le rejet de toutes les propositions qui ont été formulées. Ils étaient tous contre. Quant à la gauche, elle est muette», nous confie-t-il. «Le président de la République, Emmanuel Macron, est le seul qui a mis en application quelques-unes de mes vingt-deux préconisations.»

Six mois de travaux
L’auteur de ce rapport réalisé bénévolement et qui a nécessité six mois de travaux nous révèle que beaucoup de choses restent à entreprendre pour apaiser les mémoires. Il évoque, parmi d’autres thèmes, l’entrée de l’avocate féministe anticolonialiste Gisèle Halimi au Panthéon, les discussions autour des essais nucléaires dans le Sahara algérien – sujet qui nécessitera que soit étudiée la possibilité de réparations pour les populations civiles touchées –, la question de l’entretien des cimetières et l’élaboration d’un guide sur les disparus d’Algérie.» Mais, souligne-t-il, en un an, plus de gestes ont été réalisés que pendant soixante ans, depuis l’indépendance de l’Algérie.

«Aucune sollicitation»
Benjamin Stora soulève la question de la volonté politique dans la poursuite des travaux et des actes sur les questions mémorielles entre la France et l’Algérie. «Tout dépendra de l’élection présidentielle et du candidat qui sera élu le 24 avril prochain», estime-t-il. «À ce jour, aucun autre candidat n’a formulé de propositions sur la question mémorielle qui touche à l’histoire de la colonisation; je n’ai reçu aucune sollicitation ni la moindre réaction de leur part. Aucun député ou groupe de députés n’a suggéré une séance de débat sur ce rapport à l’Assemblée nationale», affirme-t-il.

 

Les préconisations du rapport Stora réalisées par le président Emmanuel Macron

  • Réception des petits enfants d’Ali Boumendjel; reconnaissance de l’assassinat de leur grand-père;
  • Ouverture des archives nationales sur la guerre d’Algérie avec quinze ans d’avance;
  • Cérémonie d’ hommage aux travailleurs algériens tués le 17 octobre 1961;
  • Dépôt d’une gerbe de fleurs en hommage aux huit victimes de la manifestation anti-OAS du 8 février 1962 au métro Charonne;
  • Installation d’une statue à l’effigie de l’émir Abdelkader à Amboise;
  • Pose d’une plaque en hommage aux milliers de militants algériens qui ont été assignés à résidence sans jugement dans le camp d’internement de Thol, dans l’Ain;
  • Hommage, rendu par l’ambassadeur de France à Alger, à Mouloud Feraoun et à ses compagnons assassinés par l’OAS le 15 mars 1962;
  • Discours du président de la république dans lequel il demande pardon aux harkis, ces troupes supplétives de l’armée française abandonnées par la France pendant l’été 1962;
  • Lancement du projet du Musée de l’histoire de la France et de l’Algérie à Montpellier;
  • Mise en œuvre d’un système de bourses André Mandouze destinées aux chercheurs algériens.

«Or, la question mémorielle est importante pour la jeunesse. De leur identité historique propre, c’est-à-dire de la question coloniale, personne ne parle. Cette jeunesse issue de l’immigration a besoin de forger son identité par rapport à la France; car cela concerne la vie de leurs pères, de leurs grands-pères, ce qui est fondamental», nous explique Benjamin Stora.

Il poursuit: «Des membres de l’ultragauche évoquent cette question dans des discours idéologiques radicaux condamnant le colonialisme et les crimes de guerre, mais ne proposent rien de concret.» Pour l’extrême droite, qui est très forte en France aujourd’hui, l’empire colonial de la France et les guerres de décolonisation, «on n’en parle pas, car cela se traduirait, selon elle, par de la repentance».

L’historien nous rappelle que cette question a été néanmoins évoquée dans les discours des anciens présidents français lors de leurs déplacements en Algérie, comme Nicolas Sarkozy à Constantine en 2008 ou François Hollande à Alger en 2012. Mais, considère-t-il, «les seuls actes politiques concrets ont été réalisés durant le quinquennat en cours d’Emmanuel Macron», conclut-il.

Discours clair et fort
Malika Rahal est historienne, chargée de recherche au CNRS et directrice de l’Institut de d’histoire du temps présent. Elle a écrit de nombreux ouvrages, dont Algérie 1962, une histoire populaire, paru aux éditions de La Découverte en 2022. Dans un dossier publié dans le journal en ligne Orient XXI à l’occasion de la commémoration du 60e anniversaire des accords d’Évian, elle considère que les politiques ne devraient pas déléguer aux historiens ni remettre à plus tard un discours clair et fort sur la question du passé algérien de la France. «Cela ne fonctionne pas; les livres sont là, nous n’avons jamais cessé d’en écrire», explique-t-elle.

L’historienne observe que nous sommes «dans un moment où l’instrumentalisation de ce passé a atteint un niveau qu’on n’avait pas forcement connu dans les dernières décennies, le moment ou cela devient une ressource très importante à la fois pour le président de la république, avec cette série de gestes qui découpent la question algérienne et la question coloniale en de multiples tâches ou de multiples discours adressés à de supposés groupes cohérents – très différents les uns des autres», affirme-t-elle.

Elle précise que cela se fait «sans grand souci de construire un discours cohérent». Selon elle, il y a en outre de la part de l’extrême droite – qu’on voit monter depuis longtemps, mais qui atteint des proportions encore jamais observées – une sorte de franchise et de «décomplexion» assumées dans le fait de pouvoir réécrire assez radicalement l’histoire et de se revendiquer comme l’acteur du passé. L’historienne ajoute: «Il y a vraiment un enjeu qui n’est saisi ni par les uns ni par les autres [ni le président de la république ni l’extrême droite]. Cette situation rend impossible, selon elle, le fait d’avoir un point de vue consensuel sur la question de la colonisation.


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.

 


Salon du Bourget : les députés et le président de la Seine-Saint-Denis boycotteront l'inauguration

L'équipe de démonstration de l'armée de l'air et de l'espace française « Patrouille de France » effectue des figures acrobatiques lors du Salon international de l'aéronautique et de l'espace (SIAE) à l'aéroport du Bourget, au nord de Paris, le 23 juin 2023. (Photo de Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
L'équipe de démonstration de l'armée de l'air et de l'espace française « Patrouille de France » effectue des figures acrobatiques lors du Salon international de l'aéronautique et de l'espace (SIAE) à l'aéroport du Bourget, au nord de Paris, le 23 juin 2023. (Photo de Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
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  • le président socialiste du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, et les députés du département ont fait part de leur refus de participer à l'inauguration du Salon du Bourget lundi.
  • « Il est inadmissible que ces entreprises et des représentants de l'État israélien soient reçus sous le haut patronage de l'État français a déclaré Stéphane Peu

BOBIGNY, FRANCE : Jeudi et vendredi, le président socialiste du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, et les députés du département ont fait part de leur refus de participer à l'inauguration du Salon du Bourget lundi, en raison de la présence d'entreprises israéliennes.

Organisé par le Gifas (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales), le plus ancien et le plus grand rendez-vous aérospatial au monde se tient du 16 au 22 juin au Bourget, en Seine-Saint-Denis.

La présence d'Israël, qui compte neuf exposants, a été vivement critiquée, et a même fait l'objet de recours en justice.

Mardi, le tribunal judiciaire de Bobigny a rejeté la requête d'associations qui lui demandaient d'exclure les entreprises israéliennes du Bourget au nom du risque de perpétuation de crimes internationaux. La cour d'appel de Paris a par la suite confirmé cette décision. 

« Des entreprises israéliennes d'armement y seront présentes. « Comment peut-on, d'un côté, se dire attaché aux droits humains et, de l'autre, dérouler le tapis rouge à un État mis en cause par la Cour pénale internationale pour actes génocidaires ? », a écrit jeudi sur X le président socialiste de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel.

« Je ne participerai pas à l'accueil protocolaire traditionnel du président de la République et du Premier ministre », a-t-il poursuivi.

La position est identique chez l'ensemble des députés de Seine-Saint-Denis, tous de gauche.

« Il est inadmissible que ces entreprises et des représentants de l'État israélien soient reçus sous le haut patronage de l'État français, alors que le gouvernement israélien poursuit ses violations du droit international en commettant un véritable génocide à Gaza », a déclaré Stéphane Peu (PCF) dans un communiqué de presse. 

Joint par l'AFP, Éric Coquerel, président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale et député LFI, a indiqué que c'était également la position des députés insoumis. « Nous allons même manifester contre », a-t-il ajouté.

Samedi, une manifestation est prévue au départ de la Bourse du travail de Bobigny à 13 heures, à l'appel d'une intersyndicale et d'une coalition d'associations.

Cette manifestation s'inscrit dans le cadre d'un week-end de mobilisation et d'un « village anti-guerre » organisé du 20 au 22 juin à Bobigny.

Israël est en guerre depuis près de 20 mois contre le Hamas, à la suite de l'attaque du 7 octobre 2023 menée par le mouvement islamiste palestinien.

Les accusations de génocide et de crimes de guerre contre Israël se multiplient, provenant d'experts de l'ONU, de groupes de défense des droits humains et de pays de plus en plus nombreux. Israël les rejette.