L'Ukraine s'efforce d'évacuer les civils dans l'Est, Zelensky annonce le pire à Borodianka

Le président ukrainien Volodymr Zelensky lors d'une session de la Chambre des représentants de Chypre, au centre de conférence Filoxenia, à Nicosie, le 7 avril 2022 (Photo, AFP).
Le président ukrainien Volodymr Zelensky lors d'une session de la Chambre des représentants de Chypre, au centre de conférence Filoxenia, à Nicosie, le 7 avril 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 08 avril 2022

L'Ukraine s'efforce d'évacuer les civils dans l'Est, Zelensky annonce le pire à Borodianka

  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé que les destructions à Borodianka, près de Kiev, étaient pires par rapport à Boutcha
  • Vingt-six corps ont été extraits par les secouristes ukrainiens des décombres de deux immeubles d'habitation à Borodianka, au nord-ouest de Kiev

SYEVERODONETS'K: Les autorités ukrainiennes s'efforcent d'évacuer les civils des régions de l'Est, menacées par une offensive russe, le président Volodymyr Zelensky affirmant que les destructions à Borodianka, près de Kiev, sont pires encore que celles constatées récemment à Bouthca, toujours près de la capitale, après le départ des forces russes.

Alors que la Russie multiplie ses attaques dans le sud et l'est, Kiev -- où sont attendus vendredi la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le chef de la diplomatie de l'UE Josep Borrell --, constate la véritable étendue des dégâts dans des régions désormais abandonnées par les forces de Moscou.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé que les destructions à Borodianka, près de Kiev, étaient pires par rapport à Boutcha, où les images de cadavres dans les rues ont suscité une indignation internationale.

Vingt-six corps ont été extraits par les secouristes ukrainiens des décombres de deux immeubles d'habitation à Borodianka, au nord-ouest de Kiev, a annoncé jeudi sur Facebook la procureure générale d'Ukraine Iryna Venediktova.

Dans un message vidéo jeudi soir, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a assuré que la situation à Borodianka est "bien plus horrible" qu'à Boutcha. "Il y a plus de victimes".

Mais c'est aussi à l'est du pays, désormais cible prioritaire de Moscou, que l'attention se porte. Le porte-parole du Kremlin a reconnu jeudi que les forces russes avaient déjà subi dans cette région "des pertes militaires importantes", évoquant une "immense tragédie".

Redoutant une offensive contre ces régions, les autorités ukrainiennes ont à nouveau appelé la population civile à les quitter.

Les évacuations par train, interrompues en raison d'une partie de la voie ferrée endommagée, ont repris dans la nuit de jeudi à vendredi, a indiqué le gouverneur de la région de Lougansk, Serguiï Gaïdaï.

"Trois trains d'évacuation transportant des habitants de la région de Lougansk et de Donetsk ont pu partir vers l'ouest. La voie a été réparée,", a-t-il précisé tôt vendredi.

"Toutes les horreurs que nous avons connues risquent d'empirer. Ne vous condamnez par à la mort vous-mêmes! Partez! Les prochains jours seront la dernière chance" pour une évacuation, avait-il lancé plus tôt jeudi.

«Ca tombe de partout»

Un autre nouvel appel concernait notamment la ville de Severodonetsk, la plus à l'est tenue par les forces ukrainiennes, pilonnée par les troupes russes et où des journalistes de l'AFP ont vu jeudi des civils évacués par cars, pendant que des explosions retentissaient régulièrement à sa périphérie.

"Ça tombe de partout. Ce n'est plus possible", raconte Denis, un quadragénaire pâle comme un linge, le visage émacié, à qui on donnerait la soixantaine.

Un "grand nombre" d'évacués sont déjà arrivés à Dnipro, a annoncé jeudi le maire de cette ville industrielle d'un million d'habitants sur le Dniepr, le fleuve qui marque la limite des régions orientales du pays.

Selon le ministère britannique de la Défense, les forces russes qui avaient été déployés dans le nord de l'Ukraine se sont "totalement retirés" au Belarus ou en Russie.

"Au moins une partie" seront "redéployées dans l'est pour combattre dans le Donbass, mais ont besoin d'un "réapprovisionnement significatif" et une telle opération prendrait "au moins une semaine", a estimé le ministère dans un communiqué publié vendredi sur Twitter.

Accusée de "crimes de guerre" en Ukraine, la Russie a fait l'objet jeudi d'un embargo de l'UE sur son charbon. C'est la première fois que les Européens frappent le secteur énergétique russe, dont ils sont très dépendants.

L'UE importe 45% de son charbon de Russie pour une valeur de 4 milliards d'euros par an. Cet embargo entrera en vigueur début août.

Bruxelles prévoit l'interdiction d'exportations vers la Russie à hauteur de 10 milliards d'euros, de nouvelles sanctions contre des banques russes ainsi que la fermeture des ports européens aux navires russes.

Parallèlement, l'UE est prête à débloquer 500 millions d'euros de plus pour financer des armes pour l'Ukraine.

De leur côté les pays du G7 ont annoncé de nouvelles sanctions, dont une interdiction de tout nouvel investissement dans des secteurs clefs de la Russie.

Washington a ouvert la voie à des droits de douane punitifs contre la Russie et le Belarus, en leur révoquant jeudi le statut commercial par un vote au Congrès.

«Insulte à l'humanité»

Dans un communiqué, Joe Biden a estimé que "les mensonges de la Russie ne tiennent pas face aux preuves incontestables de ce qui se passe en Ukraine."

Les indications de viols, de tortures, d'exécutions sont une "insulte à l'humanité", a-t-il ajouté. 

Ces initiatives font suite à la vague d'indignation après la découverte de dizaines de morts, portant des vêtements civils et pour certains les mains attachées dans le dos, dans les zones d'où s'est retirée l'armée russe et notamment à Boutcha, près de Kiev.

L'Ukraine et ses soutiens accusent les troupes russes d'être responsables de ces "crimes de guerre".

La Russie dément toute exaction, dénonçant une "provocation" ukrainienne.

Jeudi soir, un missile russe a frappé des infrastructures dans la région d'Odessa, a indiqué sur Telegram le Conseil municipal de cette ville du sud de l'Ukraine, sans faire dans l'immédiat état de victimes.

A Marioupol (sud-est), cité portuaire assiégée et dévastée par l'armée russe depuis fin février et où se terrent toujours quelque 100 000 habitants, le "nouveau maire" proclamé par les forces pro-russes a annoncé jeudi qu'"environ 5 000 personnes" étaient mortes parmi la population civile. 

"Environ 60 à 70% du parc de logements a été détruit ou partiellement détruit", a ajouté Konstantin Ivachtchenko, nommé à la tête de la ville mercredi par Denis Pouchiline, dirigeant des séparatistes de Donetsk.

Les autorités ukrainiennes ont avancé des bilans beaucoup plus lourds.

«Soutien significatif» en armes de l'Otan

Et pour se préparer à contrer l'offensive attendue dans le Donbass, Kiev réclame l'aide des Occidentaux.

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères s'est rendu à Bruxelles pour demander des livraisons immédiates d'armes à ses homologues de l'Alliance atlantique.

Le secrétaire général de l'Alliance, Jens Stoltenberg, a évoqué un "soutien significatif", estimant "préférable de ne pas se montrer trop précis sur les armements qui seront fournis".

Le volet diplomatique de la crise ne laisse transparaître aucun signe de progrès. La Russie a affirmé jeudi que l'Ukraine était revenue sur certaines des propositions qu'elle avait faites au cours de pourparlers fin mars à Istanbul et que la Russie avait dit accueillir positivement.

Kiev a immédiatement répliqué, en appelant Moscou à "réduire son degré d'hostilité" dans les négociations. Et M. Kouleba a accusé son homologue russe Sergueï Lavrov de se rendre "complice des crimes" commis par l'armée russe en les justifiant.

Ukraine: au moins 35 morts dans l'attaque sur la gare de Kramatorsk

Au moins 35 personnes ont été tuées et 100 blessées vendredi après que deux missiles se sont abattus sur la gare de Kramatorsk, dans l'Est de l'Ukraine, par laquelle des milliers de personnes sont évacuées depuis plusieurs jours.

Selon un volontaire humanitaire participant à l'évacuation des corps, rassemblés sous des plastiques sur un côté du parvis de la gare, au moins 35 personnes sont mortes dans la frappe.

"J'ai vu une quinzaine de blessés, mais c'est difficile de dire combien il y en a eu, beaucoup ont été évacué peu après dans des voitures vers des hôpitaux", a-t-il expliqué.

Au moins une trentaine de corps gisaient sur le sol, dans des sacs mortuaires et sous des bâches, que des militaires et policiers embarquaient à bord d'un camion.

Le patron de la compagnie ferroviaire ukrainienne Ukrzaliznytsia, Oleksandre Kamychine, a lui évoqué 30 morts et plus de 100 blessés, dénonçant sur sa chaîne Telegram une "frappe délibérée".

Des milliers de personnes ont été évacuées ces derniers jours par train depuis la gare de Kramatorsk, capitale du Donbass sous contrôle ukrainien sous la menace d'une offensive russe majeure.

Environ une heure avant la frappe, ils étaient déjà des dizaines de civils -personnes âgées, femmes et enfants- à faire la queue devant la gare à front rouge et blanc, en attendant de prendre le train.


L'aide américaine n'est pas une «baguette magique» pour l'Ukraine

Des militants brandissent des drapeaux ukrainiens devant le Capitole américain à Washington, DC, le 23 avril 2024. (AFP)
Des militants brandissent des drapeaux ukrainiens devant le Capitole américain à Washington, DC, le 23 avril 2024. (AFP)
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  • «Cela a été un parcours difficile. Cela aurait dû être plus facile. Cela aurait dû arriver plus vite», a reconnu Joe Biden mercredi
  • Jake Sullivan a averti qu'il était "possible que la Russie réalise des avancées tactiques supplémentaires dans les semaines à venir", alors que Kiev s'attend à une nouvelle offensive russe prochaine

WASHINGTON: Un soutien massif, pas une "baguette magique": l'aide américaine à l'Ukraine ne résoudra pas tous les problèmes sur les fronts, et les Etats-Unis sont les premiers à le reconnaître.

"Cela a été un parcours difficile. Cela aurait dû être plus facile. Cela aurait dû arriver plus vite", a reconnu Joe Biden mercredi.

Il venait de promulguer une loi, âprement débattue pendant des mois au Congrès américain, qui prévoit 61 milliards de dollars d'aide militaire et économique pour Kiev.

"C'est un montant important", mais "ce délai a coûté cher", souligne Garret Martin, chercheur à l'American University de Washington.

Le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Jake Sullivan, en a convenu lui-même.

"Il va falloir du temps pour sortir du fossé creusé par les six mois d'attente" au Congrès, a-t-il dit lors d'une conférence de presse.

Il a averti qu'il était "possible que la Russie réalise des avancées tactiques supplémentaires dans les semaines à venir", alors que Kiev s'attend à une nouvelle offensive russe prochaine.

"Le chemin qui est devant nous n'est pas facile", mais "nous pensons que l'Ukraine peut, et va, gagner", a encore indiqué" Jake Sullivan, en se gardant bien toutefois de définir ce que serait une "victoire" ukrainienne.

Au-delà du montant très conséquent voté par le Congrès, les Etats-Unis ont aussi décidé d'aller plus loin dans la nature des armes fournies.

Ils ont ainsi commencé, discrètement, à livrer aux Ukrainiens des missiles longue portée de type "ATACMS", et vont continuer à le faire.

Mobilisation

L'Ukraine avait utilisé pour la première fois en octobre contre la Russie des missiles américains ATACMS, mais ceux dont il est question désormais peuvent frapper plus loin, jusqu'à 300 km de distance.

"Cela aura un impact", mais "ce n'est pas un seul équipement qui résoudra tout", a dit le conseiller à la sécurité nationale.

Par ailleurs, "il y a une chose que cette aide ne peut pas faire, à savoir résoudre le problème du manque de combattants" de Kiev, souligne Garret Martin, même s'il estime que le vote du Congrès américain pourrait doper le moral des troupes ukrainiennes.

Ce sujet de la mobilisation a fait l'objet de discussions entre Joe Biden et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, selon la Maison Blanche.

L'Ukraine est confrontée à une pénurie de soldats volontaires, après plus de deux ans de guerre contre l'envahisseur russe, qui ont fait des dizaines de milliers de morts.

Kiev vient d'élargir la mobilisation, abaissant l'âge des Ukrainiens pouvant être appelés de 27 à 25 ans.

Le pays, qui cherche à faire revenir sur son territoire ses citoyens en âge de combattre, ne délivrera par ailleurs plus de passeports à l'étranger aux hommes âgés de 18 à 60 ans, selon un texte publié par le gouvernement mercredi.

Max Bergmann, Directeur au Centre des études stratégiques et internationales (CSIS), souligne lui que l'impact de l'aide américaine dépendra aussi, en partie, de l'attitude des Européens.

Ces derniers "doivent doper dès maintenant la production" d'armement, écrit-il dans une note récente, avec pour "objectif de pouvoir combler la lacune que laisseraient les Etats-Unis" si le financement américain devait s'arrêter pour de bon, par exemple en cas de victoire du républicain Donald Trump à la présidentielle de novembre.

Pour l'expert, l'Ukraine devra s'attacher en 2024 à "tenir ses positions, fatiguer les forces russes, reconstruire et restaurer ses propres forces et ses capacités de défense civile", avant, éventuellement, de repartir "à l'offensive" l'an prochain.


Pakistan: Malala critiquée pour une comédie musicale produite avec Hillary Clinton

La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu'elle produit avec Hillary Clinton. (AFP).
La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu'elle produit avec Hillary Clinton. (AFP).
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  • Sur X, anonymes et commentateurs lui reprochent d'être apparue à Broadway aux côtés de l'ex-secrétaire d'Etat américaine -sous le mandat de laquelle des frappes de drones ont tué des civils au Pakistan- et de ne pas se prononcer sur la guerre à Gaza
  • Si Malala Yousafzai, 26 ans, est une militante obstinée des droits des femmes louée à travers le monde, les cercles islamistes et une partie importante de l'opinion publique pakistanaise voient en elle un "agent des Etats-Unis"

LAHORE: La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu'elle produit avec Hillary Clinton.

Sur X, anonymes et commentateurs lui reprochent d'être apparue à Broadway aux côtés de l'ex-secrétaire d'Etat américaine -sous le mandat de laquelle des frappes de drones ont tué des civils au Pakistan- et de ne pas se prononcer sur la guerre à Gaza, y voyant un "deux poids, deux mesures".

Si Malala Yousafzai, 26 ans, est une militante obstinée des droits des femmes louée à travers le monde, les cercles islamistes et une partie importante de l'opinion publique pakistanaise voient en elle un "agent des Etats-Unis" créé pour corrompre la jeunesse.

Après la première représentation de "Suffs", le cercle des critiques semble s'être élargi à des figures du féminisme au Pakistan.

"J'ai défendu bec et ongle Malala toutes ces années mais, là, je ne la suis pas. C'est vraiment difficile de la défendre depuis six mois", écrit ainsi la militante Leena Ghani, en référence à la guerre lancée par Israël à Gaza en réponse à l'attaque meurtrière du Hamas sur son sol le 7 octobre.

"J'admire Malala depuis 2011", affirme l'éditorialiste Mehr Tarar sur X, mais "sa collaboration théâtrale avec Hillary Clinton -qui défend le soutien infaillible de l'Amérique au génocide des Palestiniens- est un vrai coup à sa crédibilité comme défenseuse des droits humains".

« Tu nous as laissés tomber »

Mme Clinton a dit soutenir la guerre contre le Hamas et rejeté des appels au cessez-le-feu à Gaza. Elle a aussi réclamé la protection des civils dans le petit territoire contrôlé par le mouvement islamiste depuis 2007.

"Quelle déception Malala, tu nous as laissés tomber", écrit de son côté la professeure et militante féministe Nida Kirmani.

De nombreuses voix au Pakistan ont accusé Malala Yousafzai de ne pas avoir exprimé sa solidarité avec les Palestiniens. La jeune femme avait pourtant précédemment publiquement condamné la mort de civils à Gaza et réclamé un cessez-le-feu.

Le New York Times rapporte qu'elle portait un pin's rouge et noir pour la première représentation de "Suffs", un signe de soutien au cessez-le-feu.

Après ces critiques, la jeune femme a affirmé mardi sur le réseau social X son soutien aux habitants de Gaza et condamné la guerre menée par Israël.

"Je veux qu'il n'y ait aucune confusion quant à mon soutien à la population de Gaza", a écrit Malala Yousafzai.

"Nous n'avons pas besoin de voir davantage de cadavres, d'écoles bombardées et d'enfants affamés pour comprendre qu'un cessez-le-feu est urgent et nécessaire".

"J'ai condamné et je continuerai à condamner le gouvernement israélien pour ses violations du droit international et ses crimes de guerre", a-t-elle ajouté.

La jeune fille originaire de la verdoyante vallée de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan, avait été blessée par balle au visage en 2012 par des islamistes.

Soignée en urgence en Grande-Bretagne, elle est ensuite devenue un symbole mondial de résistance à l'extrémisme religieux et la porte-voix des filles privées d'instruction, puis en 2014 la plus jeune prix Nobel de la Paix de l'histoire.

Depuis qu'elle a été attaquée, elle n'est revenue que deux fois dans son pays.


Gaza: montée des tensions entre étudiants et la police sur les campus américains

La colère d'étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux Etats-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie. (AFP).
La colère d'étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux Etats-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie. (AFP).
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  • "Si la situation n'est pas maîtrisée rapidement et si les menaces et intimidations ne cessent pas, il sera alors temps de faire appel à la Garde nationale"
  • Depuis le regain de tensions la semaine dernière à Columbia, le mouvement s'est étendu à d'autres campus

AUSTIN: La colère d'étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux Etats-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie.

En visite à l'université Columbia à Manhattan -- d'où est parti cette dernière vague de manifestations étudiantes commencées en octobre -- le président républicain de la Chambre des représentants du Congrès, Mike Johnson, a menacé: "si la situation n'est pas maîtrisée rapidement et si les menaces et intimidations ne cessent pas, il sera alors temps de faire appel à la Garde nationale".

Pour "rétablir l'ordre sur ces campus", a martelé le dirigeant conservateur.

Un avertissement qui résonne douloureusement aux Etats-Unis: le 4 mai 1970, la Garde nationale de l'Ohio avait ouvert le feu à l'université d'Etat de Kent sur des manifestants étudiants pacifiques, dont quatre avaient été tués.

M. Johnson, proche de l'ex-président républicain Donald Trump candidat à sa réélection, a averti qu'il exigerait du président démocrate Joe Biden d'"agir" et jugé que les manifestations pro-palestiniennes "mettaient une cible sur le dos d'étudiants juifs aux Etats-Unis", qui comptent le plus de juifs au monde (quelque six millions) après Israël.

« Liberté d'expression »

Depuis le début du conflit à Gaza en octobre, les universités américaines sont secouées par des débats parfois violents sur la liberté d'expression et des accusations d'antisémitisme et d'antisionisme qui ont coûté leurs postes cet hiver aux présidentes de Harvard et de l'université de Pennsylvanie.

"Profitez de votre liberté d'expression", a lancé, provocateur, M. Johnson, hué par des centaines d'étudiants de Columbia vent debout contre la guerre d'Israël contre le Hamas qui a tué quelque 34.200 personnes, la plupart des civils, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste palestinien.

L'attaque sans précédent du 7 octobre 2023 menée par le Hamas a fait 1.170 morts, essentiellement civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles.

Mercredi, la Maison Blanche a réaffirmé que le président Biden, qui espère être réélu en novembre, "soutenait la liberté d'expression, le débat et la non discrimination" dans les universités.

Depuis le regain de tensions la semaine dernière à Columbia, le mouvement s'est étendu à d'autres campus.

Alliance Etats-Unis-Israël 

Notamment dans les Etats de la Nouvelle-Angleterre, dans le nord-est, où des prestigieuses universités ont demandé à la police d'interpeller des manifestants étudiants qui dénoncent l'alliance militaire, diplomatique et économique des Etats-Unis avec Israël et critiquent les conditions actuelles des Palestiniens.

"En tant que Palestinien, est-ce de ma responsabilité d'être là et de montrer ma solidarité avec la population de Gaza? Absolument!", a répondu à l'AFP Yazen, un Américain de 23 ans d'origine palestinienne qui campe depuis quelques jours dans des tentes montées sur le campus de Columbia.

La présidence de l'université a salué "des progrès importants" dans les discussions avec des étudiants pour évacuer ce campement d'ici vendredi.

Dans la nuit de lundi à mardi, 120 personnes avaient été brièvement interpellées devant l'université de New York (NYU), au coeur de Manhattan. A Yale, dans le Connecticut, une cinquantaine de manifestants ont aussi été interpellés.

Sa concurrente Harvard, la plus ancienne des Etats-Unis, en banlieue de la cité historique de Boston, a vu aussi mercredi se monter sur son campus arboré un campement.

Police anti-émeute 

A l'autre bout du pays, l'université du Texas à Austin a été le théâtre d'un face-à-face, finalement bon enfant, entre des centaines d'étudiants pro-palestiniens et la police, dont nombre d'officiers à cheval et en tenue anti-émeute.

Certains brandissaient des drapeaux palestiniens et portaient le keffieh, d'autres, encadrés par des policiers, s'étaient enveloppés dans des drapeaux d'Israël.

Et à l’université de Californie du sud (USC), plusieurs centaines d’étudiants ont manifesté aux cris de "libérez la Palestine", "révolution par l'intifada".

Dans la foule très diverse, certains agitaient des drapeaux palestiniens, d'autres portaient des keffiehs et des pancartes appelant à "arrêter le génocide" et à un  "cessez-le-feu".

Des centaines de manifestants s'étaient rassemblés mardi soir à Brooklyn, le plus grand arrondissement de New York, à l'appel de Jewish Voice for Peace, un groupe d'Américains juifs de gauche pro-palestiniens, à l'occasion du séder, le rituel de la Pâque juive. Nombre d'entre eux ont été interpellés.

"Nous sommes (les Américains) les instigateurs d'une telle violence, d'une telle haine, c'est terrible", a tonné sur place Rebecca Lurie.