L'itinéraire de Franck Elong Abe, l'agresseur d'Yvan Colonna

Yvan Colonna, l'itinéraire de Franck Elong Abe est marqué par «des troubles du comportement» et un «parcours carcéral chaotique» (Photo, AFP).
Yvan Colonna, l'itinéraire de Franck Elong Abe est marqué par «des troubles du comportement» et un «parcours carcéral chaotique» (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 09 avril 2022

L'itinéraire de Franck Elong Abe, l'agresseur d'Yvan Colonna

  • La première condamnation pour vol tombe en 2006, d'autres suivront jusqu'en 2012, notamment pour menaces de mort
  • Après un an et demi dans les geôles américaines en Afghanistan, il est remis en mai 2014 aux autorités françaises qui l'incarcèrent

AJACCIO: Du Cameroun au Canada, d'Afghanistan à la prison d'Arles où il a agressé mortellement l'indépendantiste corse Yvan Colonna, l'itinéraire de Franck Elong Abe est marqué par "des troubles du comportement" et un "parcours carcéral chaotique", révèlent des documents d'enquête consultés par l'AFP.

Né le 15 août 1986 à Metet dans le centre du Cameroun, il y est élevé par ses grands-parents maternels, "protestants et conservateurs", raconte-t-il à une experte-psychiatre en 2014. 

Ses "troubles du comportement" apparaissent dès l'âge de 13 ans: son entourage familial évoque "une possession diabolique" quand lui décrit "des pulsions irrésistibles" qui l'amènent à consulter "voyants" et "prêtres".

A 15 ans, il rejoint ses parents en France. Il arrête sa scolarité en troisième, est suivi par le juge des enfants à partir de 16 ans et, mineur, est placé plusieurs fois en garde à vue.

A 18 ans, désormais de nationalité française, il ambitionne d'intégrer la Marine nationale, mais commet "une attaque à main armée" juste avant la visite d'incorporation. "Je n'étais pas maître de mes actes" et même "possédé", considère Franck Elong Abe. "J'avais aucune raison de le faire, je voulais rentrer dans l'armée", reconnait-il, "ça m'a troublé". Il bénéficiera d'un "non-lieu après expertise psychiatrique", précise la psychiatre.

Hospitalisé sous contrainte judiciaire "pendant plus d'un an" en Seine-Maritime, puis dans l'Eure, il dit avoir entendu "le diagnostic de schizophrénie".

La première condamnation pour vol tombe en 2006, d'autres suivront jusqu'en 2012, notamment pour menaces de mort. 

«Mauvais musulmans»

En 2008, il part au Canada où il se convertit à l'islam et se fait appeler "Zakaria": "Je cherchais quelque chose qui allait m'apaiser". Il échange avec des soldats rentrés d'Afghanistan: "C'est resté dans ma tête".

Mais en 2010, à 24 ans, il est expulsé du Canada pour avoir agressé "des fidèles d'une mosquée" à qui il reprochait d'être de "mauvais musulmans".

L'année suivante, installé à Bordeaux, il s'envole en octobre pour l'Afghanistan, avec un visa de travail de trois mois, pour se faire "son opinion sur les Talibans" et faire "de l'humanitaire".

Il séjourne auprès des Talibans d'abord dans un campement à Mir Ali (Pakistan), puis dans les montagnes pakistanaises d'Orakzai pendant six mois où il finit par être considéré comme "sûr".

Il fait le messager entre les Talibans du Waziristan pakistanais et ceux de la province afghane de Khost où il est arrêté en 2012 par un garde-frontière afghan qui le remet aux forces alliées internationales. S'il reconnait son engagement avec les Talibans dont il "occulte le caractère terroriste", il dénonce les "exactions" d'Al-Qaïda.

Après un an et demi dans les geôles américaines en Afghanistan, il est remis en mai 2014 aux autorités françaises qui l'incarcèrent. Il est condamné en avril 2016 à neuf ans de prison pour participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme.

Sa détention est émaillée d'incidents. En septembre 2015, il écope de 30 mois de prison pour avoir pris en otage avec une arme de fortune un personnel soignant de l'unité hospitalière spécialement aménagée de la maison d'arrêt de Lille-Sequedin (Nord).

«Le chien qui sommeille»

Dans son expertise en juillet 2014, la psychiatre conclut à une "structure de personnalité comportant des caractéristiques de la psychose", mais écarte toute "abolition du discernement" et recommande qu'il bénéficie "d'une réelle formation professionnelle". 

Célibataire sans enfant, Franck Elong Abe, qui était libérable en décembre 2023, est classé détenu particulièrement signalé (DPS) en novembre 2015 en raison de sa "grande dangerosité", de "son instabilité" et de "la persistance de son comportement violent". Un statut renouvelé en mai 2020.

Ne recevant ni visite, ni subside, il passe "l'essentiel de ses années de prison à l'isolement" et connait un "parcours carcéral chaotique" avec de multiples "incidents graves" et des "liens noués avec des individus radicalisés", selon l'enquête.

Transféré à la maison centrale d'Arles (Bouches-du-Rhône) en octobre 2019, il est placé à l'isolement jusqu'en avril 2020 puis en quartier spécifique d'intégration eu égard à "son comportement correct et respectueux" et à "l'absence d'incident disciplinaire depuis août 2019", selon l'administration pénitentiaire. 

Auxiliaire de nettoyage, il intègre une formation espaces verts entre juin 2020 et février 2021, mais est "déclassé" en raison d'absences.

Malgré plusieurs incidents en 2020, dont des violences contre des détenus et des menaces envers le personnel, il rejoint la détention ordinaire en février 2021. 

En mai 2021, l'administration pénitentiaire qui préconise à plusieurs reprises un placement en quartier d'évaluation de la radicalisation (QER) sans jamais le faire, rapporte qu'il dit vouloir "accéder au paradis" et "mourir en héros" avec l'ambition "d'être grand par l'islam".

Dans sa cellule, il a installé son bureau et le frigidaire sur le lit et dort par terre, observant "une pratique très assidue et rigoriste" de l'islam.

En janvier dernier, son projet à la sortie de prison est "d'élever des chèvres".

Le 28 février, quelques jours avant l'agression d'Yvan Colonna, avec qui il joue aux échecs et à la pétanque, Franck Elong Abe est décrit comme contestataire "pour tout".

En mai 2020, dans un courrier au juge d'application des peines, il demandait "que les juges prennent une décision encourageante plutôt qu'une décision qui enragerait le chien qui sommeille en moi..."


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
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  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.

 


Lecornu recevra les socialistes mercredi, annonce Olivier Faure

Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
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  • Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi
  • Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs

PARIS: Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure.

"On a rendez-vous mercredi matin et donc nous le verrons pour la première fois", a déclaré M. Faure lundi sur France 2. Les Ecologistes de Marine Tondelier et le Parti communiste de Fabien Roussel ont également indiqué à l'AFP être reçus mercredi, respectivement à 14H et 18H.

Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi.

Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs.

Au coeur de ce rendez-vous le projet de budget 2026 que le nouveau gouvernement devra présenter avant la mi-octobre au Parlement.

Les socialistes posent notamment comme conditions un moindre effort d'économies l'année prochaine que ce qu'envisageait François Bayrou et une fiscalité plus forte des plus riches, à travers la taxe sur les très hauts patrimoines élaborée par l'économiste Gabriel Zucman (2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros).

Mais Sébastien Lecornu, s'il s'est dit prêt samedi à "travailler sans idéologie" sur les questions "de justice fiscale" et de "répartition de l'effort", a déjà fait comprendre son hostilité à cette taxe Zucman, et notamment au fait de taxer le patrimoine professionnel "car c'est ce qui permet de créer des emplois".

"Quand on parle patrimoine professionnel, vous pensez à la machine outil ou aux tracteurs mais pas du tout. On parle d'actions, la fortune des ultrariches, elle est essentiellement en actions", lui a répondu M. Faure.

"Si vous dites que, dans la base imposable, on retire ce qui est l'essentiel de leur richesse, en réalité, vous n'avez rien à imposer", a-t-il argumenté.

"C'était déjà le problème avec l'Impôt sur la fortune (ISF, supprimé par Emmanuel Macron) qui touchait les +petits riches+ et épargnaient les +ultrariches+ parce que les +ultrariches+ placent leur argent dans des holdings", a-t-il reconnu.

 


Pour Sébastien Lecornu, un premier déplacement consacré à la santé

Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
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  • Déplacement symbolique à Mâcon : Pour son premier déplacement, Sébastien Lecornu met l'accent sur l'accès aux soins et le quotidien des Français
  • Conscient de l'absence de majorité, il consulte partis et syndicats, cherchant des terrains d'entente sur le budget, tout en laissant la porte ouverte à une fiscalité plus juste

PARIS: Sébastien Lecornu se rend samedi en province, à Mâcon, pour son premier déplacement en tant que Premier ministre consacré à la santé et à "la vie quotidienne" des Français, délaissant pendant quelques heures les concertations qu'il mène activement à Paris avant de former un gouvernement.

Quatre jours à peine après sa nomination, le nouveau et jeune (39 ans) locataire de Matignon va à la rencontre des Français, pour qui il reste encore un inconnu. Il échangera notamment avec des salariés d'un centre de santé de Saône-et-Loire dont le but est d'améliorer l'accès aux soins.

Lui-même élu local de l'Eure, où il a été maire, président de département et sénateur, ce fils d'une secrétaire médicale et d'un technicien de l'aéronautique avait assuré dès le soir de sa nomination "mesurer les attentes" de ses concitoyens et "les difficultés" qu'ils rencontraient.

Celles-ci sont souvent "insupportables" pour accéder à un médecin ou à un professionnel de santé, parfois "source d'angoisse", souligne son entourage. Le Premier ministre entend dans ce contexte "témoigner de la reconnaissance de la Nation à l’égard des personnels soignants" et "réaffirmer la volonté du gouvernement de faciliter l’accès aux soins".

Il s'agit aussi pour Sébastien Lecornu de convaincre l'opinion, autant que les forces politiques, du bien-fondé de sa méthode: trouver des terrains d'entente, en particulier sur le budget, permettant de gouverner sans majorité.

Sébastien Lecornu est très proche d'Emmanuel Macron, avec qui il a encore longuement déjeuné vendredi à l'Elysée.

- Mouvements sociaux -

Sa nomination coïncide avec plusieurs mouvements sociaux. Le jour de sa prise de fonction, une mobilisation lancée sur les réseaux sociaux pour "bloquer" le pays a réuni 200.000 manifestants, et une autre journée de manifestations à l'appel des syndicats est prévue jeudi.

"Il y a une grande colère" chez les salariés, a rapporté Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, premier syndicat de France, à l'issue d'une entrevue vendredi avec le nouveau Premier ministre, qui lui a dit travailler sur une "contribution des plus hauts revenus" dans le budget 2026.

C'est sur le budget que ses deux prédécesseurs, François Bayrou et Michel Barnier, sont tombés. Et Sébastien Lecornu cherche en priorité une forme d'entente avec les socialistes.

Mais il lui faut dans le même temps réduire les déficits, alors que l'agence de notation Fitch a dégradé vendredi soir la note de la dette française.

Le centre et la droite de la coalition gouvernementale se disent prêts à taxer plus fortement les ultra-riches sans pour autant aller jusqu'à l'instauration de la taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines, mesure phare brandie par les socialistes et dont LR ne veut pas.

Une telle mesure marquerait en tout cas une des "ruptures" au fond prônées par Sébastien Lecornu à son arrivée, puisqu'elle briserait le tabou des hausses d'impôts de la macronie.

- Méthode -

Sébastien Lecornu veut aussi des changements de méthode.

Il a d'abord réuni jeudi --pour la première fois depuis longtemps-- les dirigeants des partis du "socle commun", Renaissance, Horizons, MoDem et Les Républicains, afin qu'ils s'entendent sur quelques priorités communes.

Un format "présidents de parti" qui "permet de travailler en confiance, de façon plus directe, pour échanger sur les idées politiques, sur les arbitrages", salue un participant.

Avant les oppositions et à quelques jours d'une deuxième journée de manifestations, il a consulté les partenaires sociaux, recevant vendredi la CFDT et Medef, avant la CGT lundi.

En quête d'un compromis pour faire passer le budget, le chef de gouvernement pourrait repartir du plan de son prédécesseur François Bayrou délesté de ses mesures les plus controversées. A l'instar de la suppression de deux jours fériés.

L'hypothèse d'une remise sur les rails du conclave sur les retraites semble aussi abandonnée. Les partenaires sociaux refusent de toute façon de le rouvrir.

Des gestes sont attendus à l'égard des socialistes alors qu'à l'Elysée, on estime que le Rassemblement national, premier groupe à l'Assemblée nationale, se range désormais comme la France insoumise du côté du "dégagisme".

Cultivant une parole sobre voire rare, Sébastien Lecornu ne s'exprimera qu'à l'issue de ces consultations "devant les Français", avant la traditionnelle déclaration de politique générale, devant le Parlement.