Frankly Speaking: «Les Saoudiens se sentent trahis par les États-Unis», affirme le prince Turki al-Faisal

Le prince Turki al-Faisal, l’ancien chef de la Direction générale du renseignement de l’Arabie saoudite,  sur Frankly Speaking. (Photo, AN)
Le prince Turki al-Faisal, l’ancien chef de la Direction générale du renseignement de l’Arabie saoudite, sur Frankly Speaking. (Photo, AN)
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Publié le Lundi 02 mai 2022

Frankly Speaking: «Les Saoudiens se sentent trahis par les États-Unis», affirme le prince Turki al-Faisal

Le prince Turki al-Faisal, l’ancien chef de la Direction générale du renseignement de l’Arabie saoudite,  sur Frankly Speaking. (Photo, AN)
  • Le prince Turki impute la pénurie d’énergie aux États-Unis à la politique du président Biden et déclare que les Saoudiens veulent seulement servir de médiateur dans le conflit entre la Russie et l’Ukraine
  • Il estime que la relation entre l’Arabie saoudite et la Turquie « devrait être l’une des meilleures en termes d’avantages pour les deux pays », que ce soit pour le commerce ou les investissements transfrontaliers

DJEDDAH : Les Saoudiens se sentent abandonnés à un moment où ils pensent que les États-Unis et l’Arabie saoudite doivent faire face ensemble aux menaces qui pèsent sur la stabilité et la sécurité de la région du Golfe, déclare à Arab News le prince Turki al-Faisal, ancien chef de la Direction générale du renseignement saoudien et ancien ambassadeur du Royaume à Londres et à Washington.

Il définit ces menaces comme étant l’influence iranienne au Yémen et leur utilisation des Houthis comme outil « non seulement pour déstabiliser l'Arabie saoudite mais aussi pour compromettre la sécurité et la stabilité des voies maritimes internationales » le long de la mer Rouge, du Golfe et de la mer d’Arabie.

« Le fait que le président Biden ait retiré les Houthis de la liste des terroristes a enhardi les Houthis et les a rendus encore plus agressifs dans leurs attaques contre l’Arabie saoudite et contre les Émirats arabes unis (EAU) », explique le prince Turki à Katie Jensen, nouvelle présentatrice de l’émission Frankly Speaking d’Arab News. Il faisait allusion à la révocation par la nouvelle administration démocrate, le 12 février 2021, de la désignation de la milice soutenue par l’Iran comme organisation terroriste étrangère.

Frankly Speaking présente des entretiens avec des décideurs politiques et des chefs d’entreprise de premier plan, plongeant au cœur des plus grands titres de l’actualité au Moyen-Orient et dans le monde. Lors de son apparition dans l’émission, le prince Turki donne son avis sur les relations saoudo-américaines, la guerre entre la Russie et l’Ukraine et la dynamique toujours changeante de la géopolitique du Moyen-Orient à l’heure de la hausse des prix du pétrole et des tensions diplomatiques.

« Nous avons toujours considéré notre relation avec les États-Unis comme étant stratégique », répond-il à la question de savoir si de nombreux Saoudiens ont le sentiment d’avoir été trahis par l’un de leurs plus proches alliés.

« Nous avons eu des hauts et des bas au fil des ans et peut-être qu’en ce moment, c’est plutôt un bas, en particulier depuis que le président des États-Unis a déclaré, lors de sa campagne électorale, qu'il ferait de l'Arabie saoudite un paria. Bien sûr, il a mis en pratique ce qu’il prêchait : tout d’abord, en arrêtant les opérations conjointes entre les États-Unis et le Royaume visant à faire face à la rébellion menée par les Houthis au Yémen contre le peuple yéménite. Ensuite, parmi d’autres actions similaires, en refusant de rencontrer le prince héritier saoudien et en déclarant publiquement qu’il ne le rencontrerait pas et, à un moment donné, en retirant les batteries de missiles anti-aériens du Royaume alors que nous étions confrontés à une augmentation des attaques par les Houthis qui utilisaient du matériel iranien comme des missiles et des drones. »

Soulignant que l’Arabie saoudite « appelle, depuis le début du conflit au Yémen, à une solution pacifique », le prince Turki indique : « Malheureusement, les Houthis n’ont jamais répondu à cet appel, l’ont simplement ignoré ou s’y sont opposés. Comme nous pouvons le voir maintenant, un soi-disant cessez-le-feu a été instauré par l’ONU, mais les Houthis continuent à enfreindre ce cessez-le-feu et à en profiter pour repositionner leurs forces et les renforcer. »

« Donc, en gros, c’est ainsi que la situation en est arrivée à ce stade », poursuit-il, faisant référence à l’état actuel des relations saoudo-américaines. « J’espère que nous nous en remettrons comme nous nous sommes remis de tant d’autres obstacles dans nos relations. »

À première vue, Washington semble tout à fait désireux de maintenir ouverts ses canaux de communication avec Riyad, avec des appels téléphoniques et des visites de responsables, mais, selon le prince Turki, « il ne faut pas se fier qu’à une seule chose. »

« C’est le ton général de l’atmosphère qui compte, et les États-Unis, par exemple, ont affirmé, ou plutôt les responsables américains ont affirmé qu’ils soutenaient l’Arabie saoudite et qu’ils l’aideront à se défendre contre les agressions extérieures, entre autres. Nous sommes reconnaissants pour ces déclarations, mais nous devons voir davantage en termes de relations entre les dirigeants des deux pays. »

Il rejette l’affirmation selon laquelle l'Arabie saoudite n'a pas réagi à la question des problèmes pétroliers auxquels Washington est confronté, la contrant avec l’argument que les États-Unis eux-mêmes « sont responsables de l’état dans lequel ils se trouvent en raison de leur politique énergétique. »

« Le président Biden a fait en sorte que le gouvernement américain ait pour politique de couper tous les liens avec ce qu’on appelle l’industrie pétrolière et gazière. Il a réduit la production de pétrole et de gaz aux États-Unis et, comme nous le savons, les États-Unis ont été ces dernières années le plus grand producteur de ces deux sources d’énergie », ajoute le prince Turki.

Pourtant, précise-t-il, leur réduction a contribué à faire remonter les prix du pétrole et à créer l’Opep+ après le début de la pandémie de Covid-19. Il s’agissait d’un « accord pour réduire la production afin de stabiliser les prix, dans l’intérêt de tout le monde et de la stabilité des prix du pétrole. »

Le prince Turki insiste sur le fait que l’Arabie saoudite ne veut pas être « un instrument ou une raison de l’instabilité des prix du pétrole», indiquant que des actions comme l’embargo de 1973 appartiennent au passé.

« C'est pourquoi le Royaume, les autres membres de l’Opep et les membres de l’Opep+ s’en tiennent aux quotas de production qu’ils se sont fixés. J’ai lu que la récente décision de l’Opep+ d’augmenter progressivement la production de pétrole tant que l’accord est en vigueur est une réponse aux difficultés actuelles rencontrées dans le secteur de l’énergie. Un autre facteur qui s’ajoute à tout cela est bien sûr la question de la sécurité, les taux d’assurance élevés qui résultent de la guerre en Ukraine, ainsi que les restrictions et les sanctions européennes et américaines imposées à l’industrie pétrolière russe. Tous ces éléments ont contribué à la hausse des prix du pétrole. »

À cet égard, le prince Turki exprime par ailleurs son vif mécontentement à l’égard des commentaires formulés par Hillary Clinton, l’ancienne secrétaire d’État américaine, dans l’émission « Meet the Press » de la chaîne NBC, en faveur d’une approche «de la carotte et du bâton » visant à forcer l’Arabie saoudite à accroître sa production de pétrole afin de réduire les prix durant cette période qu’elle a qualifiée de « crise existentielle ».

Réitérant qu’il ne pouvait pas parler au nom de tous les Saoudiens, le prince Turki lance : « Nous ne sommes pas des écoliers que l’on traite avec une carotte et un bâton. Nous sommes un pays souverain et lorsque nous sommes traités de manière juste et équitable, nous répondons de la même manière. Il est donc regrettable que de telles déclarations soient faites par des politiciens, où qu’ils soient. Tout ce que je peux dire, c’est que j’espère que les relations entre le Royaume et les États-Unis ne s’articuleront pas autour de ce principe ou ne seront pas fondées sur celui-ci. »

De même, le prince Turki rejette l’accusation selon laquelle Riyad a choisi de se ranger du côté de Moscou dans le conflit ukrainien, notant que « Le Royaume a publiquement déclaré et voté à l’Assemblée générale de l’ONU en faveur de la condamnation de l’agression contre l’Ukraine. Cette résolution a été adoptée par l’Assemblée générale. »

Rappelant que le Royaume a proposé de servir de médiateur entre la Russie et l’Ukraine, il souligne : « En tant que médiateur, il devra maintenir un certain lien et être capable de parler aux deux parties. Voilà donc la position du Royaume et sa façon de traiter de la question de l’Ukraine. Nous entretenons de bonnes relations avec les deux pays depuis des années, et en général, comme je l’ai mentionné, le Royaume est contre l’agression en Ukraine. Mais aussi, plus récemment, le Royaume a contribué au fonds qui a été établi par l’ONU pour fournir un soutien aux réfugiés ukrainiens en Europe. Voilà donc la position du Royaume. »

Il décrit l’offre de médiation saoudienne comme « l’offre d’un ami à des amis — l’Ukraine et la Russie — avec lesquels nous entretenons d’excellentes relations depuis quelque temps. »

Passant à ce qu’il considère comme une hypocrisie internationale exposée par le conflit russo-ukrainien, le prince Turki estime que cela a été prouvé « par la façon dont les réfugiés d’Ukraine sont décrits en termes de civilisation comme faisant partie de l’Occident et de l’Europe, comme si les autres réfugiés du Moyen-Orient ou d’autres parties du monde n’étaient pas aussi humains que les Ukrainiens. C’est une des différences dans la manière dont les médias occidentaux dépeignent la question des réfugiés. »

« Un autre exemple d’hypocrisie est le fait que l’ONU ait imposé des sanctions à la Russie pour avoir envahi l’Ukraine, mais qu’aucune sanction n’ait été imposée à Israël lorsqu’il a envahi les pays arabes il y a quelques années. Ce sont les deux poids deux mesures et les injustices qui, selon moi, ont eu lieu au fil des ans. »

Sur la question de savoir si Israël doit être traité sur un pied d’égalité avec la Russie en matière de sanctions, le prince Turki ne mâche pas ses mots. « Absolument. Je ne vois pas quelle est la différence entre les deux », répond-il. « Une agression est une agression, qu’elle soit commise par la Russie ou par Israël. »

En outre, le prince Turki remet en question la théorie selon laquelle la normalisation des relations avec Israël — la voie empruntée par un plusieurs pays arabes, dont l’Égypte, la Jordanie, les EAU et Bahreïn — pourrait être une politique plus productive. « Je n’en ai pas vu la preuve », dit-il. « Le peuple palestinien est toujours sous occupation et il est toujours emprisonné bon gré mal gré par le gouvernement israélien. Les attaques et les assassinats de Palestiniens ont lieu presque quotidiennement. Le pillage des terres palestiniennes par Israël se poursuit malgré les assurances données par Israël aux signataires de l’accord de paix entre les EAU et Israël. Il n’y a donc aucun signe qu’apaiser Israël va changer son attitude. »

En ce qui concerne des questions plus locales, le prince Turki considère la récente visite du président turc, Recep Tayyip Erdogan, comme une évolution positive. « Je pense que les dirigeants turcs ont pris conscience que leur ancienne animosité à l’égard du Royaume ne servait le bien-être et les intérêts de personne, en particulier ceux du peuple turc », observe-t-il, faisant référence aux différends et aux désaccords de ces dernières années.

« Des liens historiques nous unissent à la Turquie, non seulement en termes de géographie mais aussi en termes de relations humaines, de liens familiaux entre les deux pays. Ma propre grand-mère était d’origine turque, circassienne. »

À l’avenir, selon le prince Turki, cette relation « devrait être l’une des meilleures en termes d’avantages pour les deux pays », que ce soit sur le plan commercial, de la construction, des projets de développement, ou des investissements de l’Arabie Saoudite et de la Turquie.

« J'espère donc que tout cela sera rétabli maintenant que la relation est, je l’espère, revenue à la normale », ajoute-t-il.

Il exprime un optimisme prudent similaire quant à la probabilité de parvenir à un accord de paix durable au Yémen sur la base de l’accord de Riyad récemment conclu et du cessez-le-feu instauré pendant le ramadan.

« J’ai toujours soutenu que les accords de cessez-le-feu, tels que ceux tentés par l’ONU, notamment en ce qui concerne le Yémen, manquaient d’un aspect crucial qui ne leur a pas permis de porter leurs fruits, à savoir un mécanisme permettant de faire respecter les cessez-le-feu. »

« Nous avons constaté, après la réunion du Koweït en 2016, qu’il y avait un cessez-le-feu mais qu’il ne menait nulle part. Ensuite, il y a eu la tentative de cessez-le-feu sous l’égide de la Suède en 2018, qui n’a pas abouti non plus. Les propres efforts de l’Arabie saoudite en matière de cessez-le-feu unilatéraux ces dernières années n’ont mené nulle part parce qu’il n’y avait pas de mécanisme pour les mettre en œuvre. »

Néanmoins, le prince Turki espère qu’avec le nouvel élan international pour mettre fin aux combats au Yémen, une sorte d’instrument pourra être mis en œuvre afin que toute partie qui ne respecte pas les termes du cessez-le-feu soit publiquement déshonorée par la communauté internationale.

« Cela ne s’est pas encore produit. Je n’ai pas encore entendu l’ONU dire que les Houthis ne respectent pas le cessez-le-feu », précise-t-il avant de poursuivre : « J’espère qu’ils auront le courage et le courage moral de se lever et de dire qui est fautif ici. »

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le président libanais juge le monopole des armes à l'Etat "nécessaire et inévitable"

le président libanais Joseph Aoun s'adressant à la nation à la veille de la fête de l'indépendance dans un discours télévisé depuis le quartier général du commandement du secteur sud du Litani de l'armée libanaise à Tyr, le 21 novembre 2025. (AFP)
le président libanais Joseph Aoun s'adressant à la nation à la veille de la fête de l'indépendance dans un discours télévisé depuis le quartier général du commandement du secteur sud du Litani de l'armée libanaise à Tyr, le 21 novembre 2025. (AFP)
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  • Le président libanais Joseph Aoun affirme que le monopole des armes par l’État est “nécessaire et inévitable”, alors que l’armée prévoit de démanteler la présence militaire du Hezbollah au sud du Liban conformément au cessez-le-feu
  • Ce message intervient dans un contexte de fortes pressions américaines, de frappes israéliennes récurrentes et d’appels libanais à un soutien et un encadrement international pour sécuriser la mise en œuvre de ces engagements

BEYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun, sous forte pression des Etats-Unis pour désarmer le Hezbollah, a jugé dans un discours prononcé vendredi dans le sud du Liban "nécessaire et inévitable" le monopole des armes à l'Etat.

Depuis le cessez-le-feu qui a mis fin il y a un an à une guerre meurtrière entre Israël et le mouvement pro-iranien, le Liban est sous forte pression de Washington pour qu'il pousse le Hezbollah à remettre ses armes à l'armée libanaise.

Conformément à l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, à une trentaine de kilomètres plus au nord.

L'armée a ainsi soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque d'ici la fin de l'année, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais.

Dans son discours, prononcé à la veille de la fête nationale, le président libanais a jugé le monopole de l'Etat sur les armes "nécessaire et inévitable" tout en appelant le comité chargé de surveiller la trêve regroupant Etats-Unis, France, ONU, Liban et Israël, à "s'assurer que les forces armées libanaises contrôlent seules" le sud du pays.

Il a répété que le Liban était prêt à négocier, sous parrainage américain ou international, "tout accord qui mettra fin à ces agressions transfrontalières".

Joseph Aoun a enfin exhorté "les amis du Liban et les pays frères à superviser l'ensemble de ce processus en établissant un calendrier clair et en mettant en place un mécanisme international de soutien à l'armée libanaise".

Au cours des dernières semaines, l'armée israélienne a multiplié les frappes sur le sud du Liban, accusant le Hezbollah de chercher à y reconstruire les infrastructures militaires détruites lors de sa guerre contre ce mouvement soutenu pro-iranien et allié au Hamas palestinien.

Selon le ministère de la Santé, une personne a été tuée lors d'une frappe vendredi dans le sud du Liban. Plus de 330 personnes ont été tuées au Liban et 945 blessées depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, selon la même source.

Morris Tidball-Binz, rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a dénoncé vendredi dans un communiqué le "schéma répété de meurtres illégaux et de violations du cessez-le-feu par Israël".


L'armée israélienne affirme que l'attaque au Liban a tué 13 militants du Hamas

Des personnes en deuil portent les cercueils des victimes de la frappe aérienne israélienne de mardi, lors d'un cortège funèbre dans le camp de réfugiés palestiniens d'Ein El-Hilweh, dans la ville portuaire de Sidon, au sud du Liban, jeudi. (AP)
Des personnes en deuil portent les cercueils des victimes de la frappe aérienne israélienne de mardi, lors d'un cortège funèbre dans le camp de réfugiés palestiniens d'Ein El-Hilweh, dans la ville portuaire de Sidon, au sud du Liban, jeudi. (AP)
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  • L’armée israélienne affirme avoir tué 13 membres du Hamas, dont Jihad Saïdaoui, dans une frappe sur le camp d’Aïn el-Héloué, tandis que le Hamas dénonce un « massacre » visant des civils
  • Le lieu de la frappe est au cœur d’un récit contradictoire : Israël parle d’un camp d’entraînement, tandis que des témoins et le Hamas évoquent un terrain de sport fréquenté par des jeunes du camp

JERUSALEM: L'armée israélienne a affirmé vendredi avoir tué "13 terroristes du Hamas" dans sa frappe menée mardi soir sur le camp de réfugiés palestiniens d'Aïn el-Héloué au Liban, dans laquelle les autorités libanaises ont annoncé 13 morts, sans préciser leur identité.

"Treize terroristes du Hamas ont été éliminés" dans cette frappe, "dont Jihad Saïdaoui, impliqué dans la formation de terroristes destinés à mener des attaques" contre Israël et ses soldats à partir territoire libanais, écrit dans un communiqué en hébreu l'armée qui avait aussi utilisé la graphie de "Jaouad Sidaoui".

A l'AFP qui lui demandait de lui fournir la liste nominative des douze autres personnes qu'elle dit avoir éliminées dans la frappe, l'armée israélienne a répondu n'avoir rien à ajouter à ce qui a été publié dans son communiqué.

Dans un avis de décès ayant circulé mercredi au Liban, le Hamas a publié la liste des noms des treize morts, en commençant par celui de Jihad Saïdaoui, avant de publier le lendemain sur Telegram, un message avec les photos de treize hommes d'apparence jeune, voire juvénile, accompagné d'un texte qualifiant la frappe "d'horrible massacre" ayant causé la mort de "plusieurs civils innocents".

Mardi, peu de temps après la frappe, l'armée israélienne avait annoncé avoir visé "des terroristes en opération dans un camp d'entraînement du Hamas".

"Les allégations (d'Israël) selon lesquelles le lieu ciblé serait un complexe d'entraînement appartenant au mouvement ne sont que pure calomnie (et visent) à justifier son agression criminelle et à inciter à la haine contre les camps et notre peuple palestinien", avait répliqué le Hamas, affirmant n'avoir "aucune installation militaire dans les camps palestiniens au Liban".

- "Terrain de sport" -

L'armée israélienne a diffusé ce qu'elle a présenté comme une vidéo de sa frappe montrant une attaque sur un bâtiment.

Mais le mouvement islamiste palestinien affirme que "ce qui a été pris pour cible est un terrain de sport ouvert fréquenté par les jeunes du camp (...) et que ceux qui ont été visés étaient un groupe de jeunes présents sur le terrain au moment de l'attaque".

"On a entendu trois explosions, nos maisons ont vacillé et les enfants tremblaient de peur", a déclaré à l'AFP au lendemain de l'attaque Mohammad Moustafa, habitant d'Aïn al-Heloué, le plus grand des camps de réfugiés palestiniens du Liban, près de la ville de Saïda, dans le sud du pays.

Agé de 67 ans, M. Moustafa a assuré que les morts étaient en majorité "des jeunes du camp qui jouaient au foot dans un terrain à l'intérieur du hangar" visé, dans lequel un correspondant de l'AFP a vu mercredi matin des taches de sang maculant le sol et des secouristes rassemblant des restes humains.

Lors des funérailles organisées à l'intérieur du camp pour 11 des 13 personnes tuées, un correspondant de l'AFP a vu des drapeaux aux couleurs du mouvement islamiste du Hamas, mais aussi des drapeaux palestiniens, sur les cercueils.

Les deux autres, dont une personne identifiée comme étant Jihad Saïdaoui, ont été enterrées dans un cimetière à l'extérieur du camp.

Le Liban "s'est engagé à désarmer les factions armées dans les camps palestiniens, mais les organisations terroristes continuent d'exploiter cyniquement la population et les infrastructures civiles" à leurs fins, écrit vendredi l'armée israélienne.

La frappe sur Aïn el-Héloué est survenue sur fond de trêve entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza et alors que l'armée israélienne intensifie ses tirs sur le sud du Liban malgré un cessez-le-feu avec le Hezbollah, allié du Hamas, qu'elle accuse de chercher à se réarmer.


Nouvelles frappes israéliennes sur Gaza, cinq morts selon les autorités locales

Cinq personnes dont un bébé ont été tuées jeudi dans la bande de Gaza, selon les autorités locales, au lendemain de la reprise de bombardements israéliens dans le territoire palestinien où Israël et le Hamas s'accusent de violer mutuellement la trêve. (AFP)
Cinq personnes dont un bébé ont été tuées jeudi dans la bande de Gaza, selon les autorités locales, au lendemain de la reprise de bombardements israéliens dans le territoire palestinien où Israël et le Hamas s'accusent de violer mutuellement la trêve. (AFP)
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  • Le bilan de ce nouvel accès de violence s'élève à 32 morts, selon les annonces des autorités locales confirmées par les hôpitaux
  • Dans la bande de Gaza, la reprise des bombardements fait peur aux habitants

GAZA: Cinq personnes dont un bébé ont été tuées jeudi dans la bande de Gaza, selon les autorités locales, au lendemain de la reprise de bombardements israéliens dans le territoire palestinien où Israël et le Hamas s'accusent de violer mutuellement la trêve.

Mercredi a été l'une des journées les plus meurtrières à Gaza depuis le 10 octobre et l'entrée en vigueur du cessez-le-feu.

Le bilan de ce nouvel accès de violence s'élève à 32 morts, selon les annonces des autorités locales confirmées par les hôpitaux.

Dans la bande de Gaza, la reprise des bombardements fait peur aux habitants.

"Ma petite fille n'a cessé de me demander toute la nuit : la guerre va-t-elle revenir ?" a déclaré à l'AFP Lina Karaz à Gaza-ville.

"Nous sommes inquiets [...] Cette nuit, le bruit des bombardements et des explosions [...] était terrifiant", a-t-elle ajouté, "quand ce cauchemar prendra-t-il fin ?"

Pour Mohammed Hamdouna, déplacé de 36 ans vivant dans un camp de tentes dans la région de Khan Younès, dans le sud de la bande, "rien n'a changé, concrètement", depuis le 10 octobre.

 "Toujours sous la tente" 

"Les villes sont en ruines (et) nous vivons toujours sous la tente malgré le froid et la pluie qui a inondé (les tentes) il y a deux jours", déplore-t-il alors que la situation humanitaire reste catastrophique, selon l'ONU.

Selon la Défense civile de Gaza, organisation de premiers secours opérant sous l'autorité du Hamas, cinq personnes ont été tuées dans des bombardements israéliens sur le sud du territoire, dans la partie du territoire restant sous le contrôle israélien à ce stade de la mise en oeuvre de l'accord de trêve.

L'hôpital Nasser de Khan Younès a confirmé avoir enregistré le décès de trois personnes de la même famille, dont une fillette d'un an.

"Nous dormions paisiblement, nous sommes pacifiques et nous ne voulons pas la guerre", a dit à l'AFP Sabri Abou Sabt, qui a perdu son fils et sa petite-fille dans une frappe à l'est de Khan Younès.

Sollicitée par l'AFP, une porte-parole de l'armée israélienne a confirmé que l'armée avait mené une frappe visant à "démanteler des infrastructures terroristes". "Rien d'inhabituel", a-t-elle affirmé.

"Israël a pris la décision de mener ces frappes aériennes de manière indépendante", a précisé la porte-parole du Premier ministre israélien, Shosh Bedrosian lors d'un point presse jeudi.

Néanmoins, "les Etats-Unis ont été prévenus (par Israël) avant les frappes", a indiqué un responsable américain à l'AFP sous le couvert de l'anonymat.

"Nous sommes profondément préoccupés par les frappes aériennes israéliennes que nous avons vues, au cours desquelles des civils auraient été tués et blessés hier, y compris des enfants", a déclaré jeudi soir Stéphane Dujarric, le porte-parole du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.

"Cela rappelle de façon frappante à quel point le cessez-le-feu est fragile. Nous avons besoin que chacun veille à ce que le cessez-le-feu tienne et continue de tenir", a-t-il ajouté.

"Escalade dangereuse" 

"Israël est sous pression internationale, les Américains mobilisent toute la région, liant la question de Gaza à celle de la normalisation et des accords d'Abraham avec l'Arabie Saoudite", a noté Eran Ortal, chercheur au Centre d'études stratégiques de Bar Ilan.

"Donc bien que le Hamas n'ait pas été désarmé, et qu'il y ait de fortes chances qu'il parvienne également à éviter le désarmement dans un avenir proche, le potentiel de reprise de la guerre à Gaza ne semble pas élevé", a-t-il estimé.

Deux autres personnes ont été tuées dans des frappes, également à l'est de Khan Younès, selon la Défense civile.

L'armée israélienne a affirmé jeudi avoir tiré jeudi en direction  de "deux terroristes" dans le sud de la bande de Gaza.

Le Hamas a dénoncé une "escalade dangereuse" et appelé les Etats-Unis, pays médiateur, à "exercer une pression immédiate" sur Israël.

Le Qatar, autre pays médiateur, a condamné "fermement les attaques brutales" qui menacent selon lui de compromettre la trêve.

La guerre à Gaza avait été déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023 qui a entraîné la mort de 1.221 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles.

Plus de 69.500 Palestiniens ont été tués par la campagne militaire israélienne de représailles selon le ministère de la Santé de Gaza, des chiffres fiables selon l'ONU.