Sur les murs de Cotonou, des graffeurs peignent «le nouveau Bénin» et ses trésors

Le célèbre artiste brésilien Edgar Bernardo Dos Santos (Photo, AFP).
Le célèbre artiste brésilien Edgar Bernardo Dos Santos (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 21 mai 2022

Sur les murs de Cotonou, des graffeurs peignent «le nouveau Bénin» et ses trésors

  • Cette juridiction spéciale, mise en place en 2016 pour mettre fin à l'impunité au sein de la classe politique, est perçue par ses détracteurs comme le bras armé du pouvoir
  • Elle a notamment condamné à de très lourdes peines d'emprisonnement les principales figures de l'opposition au Bénin, mais le pouvoir dénie, lui, toute forme d'ingérence

COTONOU: Juché sur un échafaudage, le célèbre artiste brésilien Edgar Bernardo Dos Santos (Ed-Mun), bombe de peinture en main, scrute d'un regard minutieux l'oeuvre qu'il vient de graffer sur un mur de Cotonou, la capitale économique du Bénin.

Sur fond bleu et jaune, il retouche ensuite au pinceau sa représentation de la statue mi-homme mi-requin du roi Béhanzin, l'un des 26 trésors pillés par les troupes coloniales françaises à la fin du 19ème siècle et restitués fin 2021 au Bénin après plus de deux ans de négociation entre Paris et Cotonou.

A ses côtés, 25 autres graffeurs, dont 15 également venus de l'étranger, agitent bombes et pinceaux, pour raconter en peinture l'histoire et la culture du Bénin sur ce mur de plus d'un kilomètre longeant le port de Cotonou.

Leur objectif: réaliser la plus grande fresque murale du monde dans le cadre du festival Effet Graff, qui a retenu pour sa huitième édition le thème, le "Nouveau Bénin".

Plus de 700 mètres de mur ont été colorés depuis le 11 avril (Photo, AFP).
Plus de 700 mètres de mur ont été colorés depuis le 11 avril (Photo, AFP).

Plus de 700 mètres de mur ont été colorés depuis le 11 avril, et les organisateurs espèrent l'agrandir à 1 300 mètres lors de la neuvième édition qui doit se tenir début 2023. Ils espèrent ainsi battre le record de la plus longue fresque graffiti du monde.

"Pour réaliser le Bénin du futur, il faut garder le Bénin du passé sous nos yeux", explique Laurenson Djihouéssi, de son nom d'artiste Mr Stone, graffeur et promoteur du festival.

Alors nombreux sont les graffeurs qui ont choisi de représenter sur ce mur les 26 trésors restitués, présentés depuis février pour la première fois au Bénin au sein d'une exposition historique au palais présidentiel, situé à quelques centaines de mètres de là.

«L'art au public»

"Là-bas, le public va en direction de l'art, mais ici l'art va au public", explique le graffeur Mr Stone, qui a décidé de rendre hommage aux amazones, les troupes d'élite uniquement constituées de femmes du royaume du Dahomey (l'un des royaumes constituant le Bénin avant la colonisation).

Leurs tuniques guerrières sont désormais visibles au sein de l'exposition présentée à la présidence, mais Mr Stone a décidé de représenter une amazone avec une cape, sur laquelle sont dessinés les emblèmes du royaume du Dahomey.

"C'est une continuité de l'exposition (à la présidence) et nous misons ici sur le graffiti qui est un grand vecteur de communication pour nous reconnecter à notre histoire", ajoute le graffeur.

Avec cette oeuvre, l'artiste veut placer la femme béninoise "au coeur de l'action et du développement", dit-il, qu'elle "soit une amazone des temps modernes".

Mais ce n'est pas seulement l'histoire royale du Bénin peinte sur cette fresque qui attire les passants par dizaines. 

Soutenu par la fondation Claudine Talon, la Première dame du Bénin, et le ministère de la Culture, ce mur met également en avant les récentes réalisations entreprises dans le pays ouest-africain.

Modernisation 

Drusille Fagnibo, 32 ans, est l'une des rares femmes artistes participant au festival. Chapeau en raphia sur la tête, elle s'active sous un soleil de plomb pour terminer son oeuvre.

Des grues évoquant la réforme du port de Cotonou, poumon économique du pays, en passant par les machines agricoles, en référence à la modernisation du secteur de l'agriculture, ou encore les voies bitumées, symboles des centaines de kilomètres de routes construites, les principaux chantiers lancés par le président béninois Patrice Talon sont représentés sur cette fresque.

Depuis sa première élection en 2015, le chef de l'Etat réélu en 2021 a mené des dizaines de projets tous azimuts en vue d'engager son pays dans la voie du développement. Cette impressionnante modernisation de l'économie, aussi rapide qu'à marche forcée, s'est aussi accompagnée d'un important recul démocratique, selon l'opposition, réduite quasiment à néant aujourd'hui.

Sur son pan du mur, Drusille Fagnibo a également représenté le bâtiment de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet).

Cette juridiction spéciale, mise en place en 2016 pour mettre fin à l'impunité au sein de la classe politique, est perçue par ses détracteurs comme le bras armé du pouvoir. Elle a notamment condamné à de très lourdes peines d'emprisonnement les principales figures de l'opposition au Bénin, mais le pouvoir dénie, lui, toute forme d'ingérence.


Vers l’infini et au‑delà – Goldorak, 50 ans d’inspiration

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  •  50 ans après sa création, la série animée Goldorak continue de marquer l’imaginaire arabe
  • Arab News Japan s’entretient avec son créateur Go Nagai, des fans du Moyen-Orient, et revient sur l’histoire du robot OVNI chargé de protéger notre planète

​​​​​​LONDON: Peu d’importations culturelles ont franchi les frontières de manière aussi inattendue — et aussi puissante — que Goldorak, le robot géant japonais qui, il y a un demi-siècle, est devenu un héros de l’enfance à travers le monde arabe, et plus particulièrement en Arabie saoudite.

Créé au Japon au milieu des années 1970 par le mangaka Go Nagai, Goldorak s’inscrivait dans la tradition des « mecha », ces récits de robots géants. Le genre, façonné par l’expérience japonaise de la Seconde Guerre mondiale, explorait les thèmes de l’invasion, de la résistance et de la perte à travers le prisme de la science-fiction.

Si la série a rencontré un succès modéré au Japon, c’est à des milliers de kilomètres de là, au Moyen-Orient, que son véritable héritage s’est construit.

L’anime « UFO Robot Goldorak » est arrivé à la télévision dans la région en 1979, doublé en arabe et diffusé pour la première fois au Liban, en pleine guerre civile. L’histoire du courageux Actarus, prince exilé dont la planète a été détruite par des envahisseurs extraterrestres, a profondément résonné chez les enfants grandissant dans un contexte de conflits régionaux et d’occupation par Israël.

Ses thèmes — la défense de la patrie, la résistance à l’agression et la protection des innocents — faisaient douloureusement écho aux réalités de la région, transformant la série d’un simple divertissement en un véritable refuge émotionnel.

Une grande partie de l’impact de la série tenait à la réussite de son arabisation. Le doublage arabe puissant et le jeu vocal chargé d’émotion, notamment celui de l’acteur libanais Jihad El-Atrash dans le rôle d’Actarus, ont conféré à la série une gravité morale inégalée par les autres dessins animés de l'époque.

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Au début des années 1980, Goldorak s'était répandu à travers le Moyen-Orient, inspirant des communautés de fans en Arabie saoudite, au Koweït, en Irak et au-delà. (Fourni)

Le générique de la série, interprété par Sami Clark, est devenu un hymne que le chanteur libanais a continué à interpréter lors de concerts et de festivals jusqu’à son décès en 2022.

Au début des années 1980, Goldorak s’était répandu à travers le Moyen-Orient, inspirant des communautés de fans en Arabie saoudite, au Koweït, en Irak et au-delà. Pour beaucoup, il s’agissait non seulement d’un premier contact avec les anime japonais, mais aussi d’une source d’enseignements sur des valeurs telles que la justice et l’honneur.

L’influence de Goldorak dans la région a été telle qu’il a fait l’objet de recherches universitaires, qui ont non seulement mis en lumière la manière dont le sort des personnages résonnait auprès du public du Moyen-Orient, mais ont aussi relié sa popularité aux souvenirs générationnels de l’exil, en particulier à la Nakba palestinienne.

Un demi-siècle plus tard, Goldorak demeure culturellement vivant et pertinent dans la région. En Arabie saoudite, qui avait pleinement adopté la version originale de la série, Manga Productions initie aujourd’hui une nouvelle génération de fans à une version modernisée du personnage, à travers un jeu vidéo, The Feast of The Wolves, disponible en arabe et en huit autres langues sur des plateformes telles que PlayStation, Xbox et Nintendo Switch, ainsi qu’une nouvelle série animée en langue arabe, «  Goldorak U », diffusée l’an dernier.

Cinquante ans après les débuts de la série, « Goldorak » est de retour — même si, pour toute une génération de fans de la série originale, dont les étagères regorgent encore de produits dérivés et de souvenirs, il n’est en réalité jamais vraiment parti.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com
 


En ce Noël, unissons-nous pour souhaiter la paix dans toute la région

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  • Noël au Moyen-Orient incarne un message puissant d’harmonie interconfessionnelle, de résilience et de respect mutuel
  • De Bethléem à Riyad, les célébrations deviennent un acte d’espoir partagé et un appel sincère à la paix régionale

RIYAD : Fidèle à une tradition initiée en décembre 2022, Arab News souhaite un joyeux Noël à ses lecteurs chrétiens et à tous ceux qui célèbrent cette fête. Cette édition spéciale met cette année en lumière Noël à travers le Moyen-Orient, en soulignant l’harmonie interconfessionnelle, la résilience et l’intégration culturelle. Le tout est porté par un message particulier, sincère et plein d’espoir : voir la paix se diffuser dans toute la région en 2026.

En tête de cette couverture figure une tribune exclusive du grand érudit Dr Mohammad bin Abdulkarim Al-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique mondiale et président de l’Organisation des savants musulmans. Son message rappelle un principe essentiel : « Il n’existe aucun texte de la charia interdisant de féliciter les non-musulmans à l’occasion de leurs fêtes religieuses, y compris Noël. » Il présente cette bienveillance non comme un affaiblissement de la foi, mais comme l’expression de sa force — une force qui affirme la dignité humaine et favorise l’harmonie sociale si nécessaire aujourd’hui.

Ce même esprit de solidarité face à la souffrance résonne depuis Bethléem, où le pasteur palestinien, le révérend Dr Munther Isaac, explique que le christianisme palestinien est indissociable de l’identité nationale. En réponse à la dévastation de Gaza, sa communauté a érigé une crèche faite de gravats, l’enfant Jésus enveloppé dans un keffieh. « C’était un message de foi », affirme-t-il. « Le Christ est solidaire de ceux qui souffrent… parce qu’il est né dans la souffrance. »

De cette profondeur naissent aussi des récits de renouveau. À Damas, les illuminations festives réapparaissent alors que des Syriens de toutes confessions s’accrochent à une paix fragile. Au Liban, les célébrations percent la morosité politique par des instants de joie. En Jordanie, les espaces publics s’illuminent de sapins et des hymnes de Noël de Fairouz, tandis qu’aux Émirats arabes unis, la diaspora multiculturelle s’anime dans une effervescence festive et unitaire.

La profondeur historique et intellectuelle de l’héritage chrétien de la région est mise en lumière par le Dr Abdellatif El-Menawy, qui rappelle le rôle indispensable de l’Égypte dans la transformation du christianisme, passé d’un message spirituel à une véritable civilisation. Cet héritage ancien trouve aujourd’hui une expression moderne et dynamique.

En Arabie saoudite, la période des fêtes est reconnue à travers une hospitalité innovante, où des chefs réinventent les menus de Noël en y intégrant des saveurs locales et une identité culinaire créative.

Cette édition spéciale offre bien plus qu’une simple atmosphère festive. Elle dépeint un Moyen-Orient où les différentes confessions approfondissent leurs propres racines en respectant celles des autres, où les célébrations sont tissées de résistance historique, et où le message de Noël — espoir, paix et humanité partagée — résonne avec confiance et optimisme.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le prince héritier parraine le lancement d’un centre de calligraphie arabe à Médine

Le ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdullah ben Farhane, prend la parole lors de l'inauguration du Centre mondial pour la calligraphie arabe Prince Mohammed ben Salmane. (Fourni)
Le ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdullah ben Farhane, prend la parole lors de l'inauguration du Centre mondial pour la calligraphie arabe Prince Mohammed ben Salmane. (Fourni)
Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, placé sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes lundi à Médine. (Fourni)
Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, placé sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes lundi à Médine. (Fourni)
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  • Le Centre mondial Prince Mohammed ben Salmane pour la calligraphie arabe a été inauguré par le prince Salman ben Sultan ben Abdulaziz

RIYAD : Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes à Médine lundi.

Le Centre mondial Prince Mohammed ben Salmane pour la calligraphie arabe a été inauguré par le prince Salman ben Sultan ben Abdulaziz, gouverneur de la région de Médine.

Il était accompagné du ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdallah ben Farhane, qui a visité les espaces d’exposition du nouveau centre et assisté à des présentations sur la programmation culturelle et les réalisations du centre.

Ils ont également découvert des collections mettant en valeur l’importance artistique et historique de la calligraphie arabe.

Lors de l’inauguration, le prince Badr a déclaré : « Depuis cette terre d’érudition et de savoir, nous lançons fièrement une plateforme mondiale dédiée à la calligraphie arabe, un patrimoine culturel inestimable. »

Il a ajouté que le soutien « généreux et illimité » du prince héritier envers le secteur culturel avait rendu ce projet possible.

Le ministre a précisé que le centre montrait au monde l’héritage de la calligraphie arabe tout en soulignant l’engagement de l’Arabie saoudite à préserver son identité et son patrimoine culturel.

Selon le prince Badr, le centre représente une vision ambitieuse visant à élever la calligraphie arabe comme outil universel de communication et élément central de l’héritage, de l’art, de l’architecture et du design arabes.

Le centre a également pour objectif de renforcer l’identité culturelle du Royaume et sa présence internationale, en ciblant calligraphes, talents émergents, artistes visuels, chercheurs en arts islamiques, institutions éducatives et culturelles, ainsi que les passionnés d’art et de patrimoine à travers le monde.

Il proposera des programmes spécialisés, incluant services de recherche et d’archivage, enseignement de la calligraphie, bourses académiques, musée permanent, expositions itinérantes, association internationale de calligraphie et incubateur soutenant les entreprises liées à la calligraphie.

D’autres initiatives incluent des programmes de résidence d’artistes, des ateliers dirigés par des experts, l’élaboration de programmes pédagogiques standardisés, ainsi que des partenariats éducatifs internationaux visant à la conservation du patrimoine et à la promotion mondiale de cet art ancestral.

L’établissement du centre à Médine revêt une signification particulière, compte tenu du rôle historique de la ville comme berceau de la calligraphie arabe et de son association avec la transcription du Coran et la préservation du savoir islamique.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com