«Inertie», «atonie»: début de quinquennat sans souffle pour Macron II

Le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre français Elisabeth Borne marchent côte à côte après la première réunion hebdomadaire du cabinet tenue par le nouveau Premier ministre français à l'Elysée à Paris le 23 mai 2022. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre français Elisabeth Borne marchent côte à côte après la première réunion hebdomadaire du cabinet tenue par le nouveau Premier ministre français à l'Elysée à Paris le 23 mai 2022. (AFP)
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Publié le Samedi 28 mai 2022

«Inertie», «atonie»: début de quinquennat sans souffle pour Macron II

  • Emmanuel Macron reste étonnamment en retrait, loin de son image de président pressé et de l'élan habituel d'une majorité en campagne
  • Le président a sans doute voulu jouer la montre afin de ne pas exposer trop tôt la nouvelle équipe avant les législatives, estiment des experts

PARIS: "Inertie" dénoncée par les oppositions, attente jusque dans son camp: cinq semaines après sa réélection, Emmanuel Macron reste étonnamment en retrait, loin de son image de président pressé et de l'élan habituel d'une majorité en campagne.


Si plusieurs déplacements ont ponctué la fin de son premier mandat, le président a surtout depuis beaucoup consulté pour mettre sa majorité en ordre de bataille en vue des législatives des 12 et 19 juin et préparer son action future.


La guerre en Ukraine a aussi continué à occuper une place importante dans son agenda, tout comme l'Europe avec un discours ambitieux sur l'avenir du projet européen le 9 mai à Strasbourg.


Après un discret weekend de l'Ascension, ponctué d'échanges téléphoniques internationaux, à sa résidence de Brégançon dans le Var, le chef de l'Etat reprendra le chemin de Bruxelles pour un sommet européen lundi et mardi, puis des déplacements de terrain dans l'Hexagone, indique-t-on dans son entourage, en récusant tout immobilisme.


Pour sa part, le président de l'institut Elabe, Bernard Sananès, se dit "surpris du décalage entre la volonté qui a été celle d'Emmanuel Macron avant la présidentielle de gouverner jusqu’au dernier moment, et l’impression aujourd'hui qu'au premier moment, ça tarde à redémarrer".


A la différence de François Mitterrand ou Jacques Chirac, il n'a certes pas été réélu au terme d'une cohabitation, et son second quinquennat s'inscrit donc assez naturellement dans la continuité du premier.

«Peupler le vide»
"Mais on ne sent pas cette impulsion nouvelle et on voit bien que les Français sont assez critiques", souligne Bernard Sananès, interrogé par l'AFP.


La nomination d'un nouveau gouvernement, censé donner le tempo, a pris quatre semaines après la victoire à la présidentielle, autre temps long inédit, laissant Jean-Luc Mélenchon et son union de la gauche quasi seuls sur le devant de la scène.


Le président a sans doute voulu jouer la montre afin de ne pas exposer trop tôt la nouvelle équipe avant les législatives, estiment des experts.


"Ca permet de ne pas donner prise à un certain nombre d'attaques, de peupler le vide, et d'avoir ensuite un effet de souffle" avec l'annonce du nouveau gouvernement, explique à l'AFP Benjamin Morel, maîtres de conférences à l'université Paris 2. 


Mais dans cette "période d'atonie relative", cette perspective s'est réduite "comme peau de chagrin", considère-t-il. 


Le gouvernement d'Elisabeth Borne, dont tous les poids lourds étaient déjà présents à l'Acte I, a été largement perçu comme celui du changement dans la continuité.


Il suscite peu l'enthousiasme des Français, qui se disent mécontents à 58% de sa composition, selon un sondage Ifop-Fiducial pour Sud-Radio publié vendredi.

«Vacance du pouvoir»
La plupart des nouveaux ministres ne sont pas connus, et, le plus souvent, leur nomination est perçue comme une mauvaise plutôt qu’une bonne décision, d'après une enquête Odoxa - Backbone Consulting réalisée pour Le Figaro.


A deux semaines des législatives, cette atonie inquiète dans la majorité. "Il n’y a pas de lead (direction, ndlr) politique", se désole une source parlementaire à La République en marche (LREM), en appelant à "muscler le jeu".


Les accusations de viol contre le nouveau ministre des Solidarités Damien Abad, prise de guerre LR destinée à capter l'électorat de droite, ont aussi jeté un froid.


Abad, "ça pollue tout, surtout la séquence de Borne", relève la source parlementaire, même si le parquet de Paris a fait savoir qu'il n'ouvrait pas d'enquête préliminaire "en l'état".


L'absence de "dynamique" se répercute dans les intentions de vote qui prédisent au camp du président une majorité se resserrant (295 à 335 sièges sur 577 selon un sondage OpinionWay pour Les Echos du 25 mai).


En attendant, l'opposition se frotte les mains. En campagne samedi à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), Marine Le Pen (RN) a pointé "un sentiment de vacance du pouvoir".


"Tout ça est extrêmement lent, alors même que la situation de nombre de Français est critique et urgente" en matière de pouvoir d'achat, a-t-elle lancé. 


Macron est "inerte", "son gouvernement est assez éteint", renchérit le centriste Jean-Christophe Lagarde (UDI), allié des Républicains.


France: un Ukrainien inculpé pour le meurtre d'une Franco-Russe dans un conflit de voisinage

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  • Selon le parquet, il y avait de la part de cette femme "une attitude régulièrement agressive avec des menaces de mort envers" ses voisins ukrainiens arrivés en France en mars 2022 pour fuir l'invasion de leur pays par la Russie
  • Née au Kazakhstan en 1967, alors en URSS, elle était arrivée en France en 2004, d'après la même source

EVREUX: Un Ukrainien de 69 ans a été inculpé pour meurtre et placé sous contrôle judiciaire après le décès mardi de sa voisine franco-russe à Evreux, dans le nord de la France, lors d'un différend de voisinage, a-t-on appris vendredi auprès du parquet local.

Un couple de retraités ukrainiens ainsi que leur amie avaient été agressés avec un couteau d'environ 20 cm par leur voisine franco-russe, vers 5H00 locales (7H00 GMT) dans la nuit de lundi à mardi, a expliqué le procureur de la République d'Evreux Rémi Coutin lors d'une conférence de presse.

Le mari du couple ukrainien aurait alors retourné l'arme blanche contre sa voisine la blessant à trois reprises, dont une mortelle à la cuisse, toujours selon le procureur.

"Pour nous c'est la victime, celle qui a reçu les coups de couteau et est décédée mardi matin, qui était venue agresser au moins à deux reprises cette nuit-là les personnes ukrainiennes qui se trouvaient dans l'appartement au-dessus d'elle", a déclaré Rémi Coutin, justifiant ainsi le non placement en détention de l'auteur présumé des faits.

Selon le parquet, il y avait de la part de cette femme "une attitude régulièrement agressive avec des menaces de mort envers" ses voisins ukrainiens arrivés en France en mars 2022 pour fuir l'invasion de leur pays par la Russie.

Née au Kazakhstan en 1967, alors en URSS, elle était arrivée en France en 2004, d'après la même source.

Un voisin a déclaré avoir passé la soirée à boire des bières chez la quinquagénaire avant que celle-ci ne décide "de monter le son de la musique, de donner des coups de balai dans le plafond afin d'embêter ses voisins du dessus", puis de se rendre chez eux pour une première altercation.

Déjà condamné à cinq reprises pour violences, ce voisin est mis en examen pour violences aggravées pour avoir frappé l'homme ukrainien lors cette première rencontre nocturne, a relevé le parquet.

Un habitant de l'immeuble a indiqué lors de son audition qu'il avait déjà demandé l'intervention à la police les 22 et 30 juin, parce que la victime était en train de donner des coups de poing dans la porte de l'appartement de ses voisins ukrainiens.

Entendu par la police, l'ex-mari de la femme franco-russe a relaté que s'agissant de la guerre entre la Russie et l'Ukraine, elle considérait que la Russie devait "se défendre, chasser les nazis d'Ukraine et lutter contre l'OTAN".

 


Audiovisuel public: Dati dégaine le «vote bloqué» pour accélérer les débats

Brigitte Macron et Rachida Dati. (AFP)
Brigitte Macron et Rachida Dati. (AFP)
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  • Vendredi matin, à la reprise, rien n'a laissé présager que les discussions puissent s'accélérer. Un peu plus d'une demi heure après le début des débats, Mme Dati a annoncé que le gouvernement demandait au Sénat "de se prononcer par un vote unique
  • Cette procédure très rarement utilisée permet d'accélérer les débats en n'organisant qu'un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver

PARIS: Fin de session chaotique au Sénat: face à l'"obstruction" de la gauche, la ministre de la Culture Rachida Dati a dégainé vendredi matin l'arme constitutionnelle du "vote bloqué" sur la réforme de l'audiovisuel public, pour tenter d'aboutir avant les congés parlementaires.

C'est une nouvelle vicissitude pour ce texte au parcours chaotique, porté à bout de bras par la ministre face à l'hostilité des syndicats, et qui pour l'essentiel prévoit de créer le 1er janvier 2026 une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l'Ina (Institut national de l'audiovisuel), sous l'autorité d'un président-directeur général.

L'examen du texte a avancé à très faible allure jeudi: suspensions de séance à répétition, rappels au règlement, motions de rejet préalable, invectives en pagaille... En plus de huit heures de débats, les sénateurs ont à peine démarré l'examen de l'article premier de la proposition de loi du sénateur Laurent Lafon.

A la manoeuvre, la gauche, bien décidée à jouer la montre, alors que la session extraordinaire doit théoriquement s'achever vendredi à minuit.

Vendredi matin, à la reprise, rien n'a laissé présager que les discussions puissent s'accélérer. Un peu plus d'une demi heure après le début des débats, Mme Dati a annoncé que le gouvernement demandait au Sénat "de se prononcer par un vote unique sur l'ensemble du texte", "en application de l'article 44 alinéa 3 de la Constitution".

Cette procédure très rarement utilisée permet d'accélérer les débats en n'organisant qu'un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver.

"Après plus de sept heures de débat, nous n'avons pu débattre que de 31 amendements sur ce texte. On a vu encore ce matin (...) de l'obstruction, toujours de l'obstruction et encore de l'obstruction", a-t-elle justifié. Il restait alors environ 300 amendements à débattre.

Les débats, suspendus vers 10H15, ont repris près de deux heures plus tard, et le président de séance Didier Mandelli (LR) a pris acte de la demande du gouvernement.

Débats "escamotés" 

Les orateurs de la gauche ont successivement protesté contre ce "coup de force", selon le mot de l'ancienne ministre socialiste Laurence Rossignol. "On parle de liberté de la presse. Mais commençons déjà par respecter les droits du Parlement", a-t-elle tonné, rappelant que le Sénat avait d'autres outils à sa disposition pour discipliner les discussions.

Et ce alors que les débats ont déjà été "escamotés" en première lecture à l'Assemblée le 30 juin, après le vote surprise d'un motion de rejet déposée par les écologistes, face aux bancs désertés de la coalition gouvernementale.

"C'est vous qui êtes responsables du fait que le débat ne peut pas avoir lieu. Ce n'est pas nous", leur a rétorqué le rapporteur du texte, Cédric Vial (LR).

Le président de la commission de la culture Laurent Lafon (UDI) a lui aussi défendu la décision du gouvernement, pointant une obstruction "caractérisée" destinée à "empêcher que le Sénat confirme son soutien" au texte.

Selon des sources parlementaires, la décision de déclencher le "vote bloqué" était sur la table depuis jeudi.

Mais, alors que le président du Sénat et le ministre des Relations avec le Parlement étaient enclins à laisser le débat se dérouler, "c'est bien Rachida Dati", en première ligne face à la gauche, qui "à un moment donné (...) a tranché pour tout le monde", selon un poids lourd.

Désormais, l'examen du texte devrait pouvoir "aller au bout" avant la fin de la session, selon cette source. Et revenir sans doute à l'automne à l'Assemblée, à une date indéterminée.


Trois députés contraints de démissionner après avoir été déclarés inéligibles par le Conseil constitutionnel

La ministre française de la Culture Rachida Dati et le Premier ministre français Gabriel Attal  s'adressent à la presse lors d'une visite de campagne pour soutenir la candidate du MoDem Maud Gatel  et le candidat de la Renaissance Jean Laussucq pour les élections législatives, sur un marché, à Paris, le 5 juillet 2024. (Photo d'archives AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati et le Premier ministre français Gabriel Attal s'adressent à la presse lors d'une visite de campagne pour soutenir la candidate du MoDem Maud Gatel et le candidat de la Renaissance Jean Laussucq pour les élections législatives, sur un marché, à Paris, le 5 juillet 2024. (Photo d'archives AFP)
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  • Les dépenses irrégulières "représentent 21% du montant des dépenses du compte et 10,2% du plafond des dépenses autorisées dans la circonscription" et s'élèvent à 7.030 euros, a précisé le Conseil constitutionnel
  • Brigitte Barèges a été épinglée pour avoir facturé la participation à sa campagne de deux collaborateurs de son cabinet à la mairie de Montauban, alors qu'elle en était la maire

PARIS: Trois députés, les élus Ensemble pour la République (EPR) Jean Laussucq et Stéphane Vojetta ainsi que celle de l'Union des droites (UDR) Brigitte Barèges, ont été déclarés inéligibles par le Conseil constitutionnel vendredi, en raison d'irrégularités dans leurs comptes de campagne.

Jean Laussucq, député de Paris, Brigitte Barèges, députée du Tarn-et-Garonne, et Stéphane Vojetta, député pour les Français établis hors de France, ont été déclarés inéligibles "pour une durée d'un an" et "démissionnaires d'office" de leurs mandats, a annoncé le Conseil constitutionnel.

Il est reproché à Jean Laussucq d'avoir réglé "des dépenses de campagne au moyen de son compte bancaire personnel" et d'avoir laissé des tiers régler "directement une part significative des dépenses exposées pour sa campagne électorale" de 2024.

Les dépenses irrégulières "représentent 21% du montant des dépenses du compte et 10,2% du plafond des dépenses autorisées dans la circonscription" et s'élèvent à 7.030 euros, a précisé le Conseil constitutionnel.

Brigitte Barèges a été épinglée pour avoir facturé la participation à sa campagne de deux collaborateurs de son cabinet à la mairie de Montauban, alors qu'elle en était la maire.

Enfin, le Conseil constitutionnel a reproché à Stéphane Vojetta, élu dans une circonscription comprenant notamment l'Espagne et le Portugal, d'avoir réglé "irrégulièrement" une "part substantielle des dépenses engagées", durant sa campagne, notamment des "frais de transport".

Des élections législatives partielles devront être organisées prochainement pour désigner des nouveaux députés.

Deux autres députés élus lors des législatives de juillet 2024 avaient dû remettre leurs sièges en jeu après des décisions du Conseil constitutionnel, dans le Jura et en Saône-et-Loire.