Enquête contre Abad, vote de confiance: équation compliquée pour Borne

"Je prendrai ma décision à l'issue des consultations et je ferai connaître ce choix le moment venu", a déclaré à la presse la cheffe du gouvernement à l'issue d'une visite au siège du Planning familial. (Photo, AFP)
"Je prendrai ma décision à l'issue des consultations et je ferai connaître ce choix le moment venu", a déclaré à la presse la cheffe du gouvernement à l'issue d'une visite au siège du Planning familial. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 29 juin 2022

Enquête contre Abad, vote de confiance: équation compliquée pour Borne

  • Un décret paru au Journal officiel annonce la convocation du Parlement en session extraordinaire à partir du 5 juillet et liste les textes au menu, dont le pouvoir d'achat et la sécurité sanitaire
  • Pressé par les Insoumis de demander un vote de confiance après sa déclaration de politique générale, la Première ministre n'a pas encore décidé, sachant qu'un vote négatif entraîne la démission du gouvernement

PARIS :L'équation s'est un peu plus compliquée mercredi pour Élisabeth Borne avec l'ouverture d'une enquête pour tentative de viol contre le ministre Damien Abad, alors qu'elle doit aussi décider si elle prend le risque ou non de solliciter la confiance des députés.

La nouvelle Assemblée nationale a continué par ailleurs de s'organiser dans la douleur, avec la distribution très disputée par les oppositions de quelques postes-clés, avant l'élection jeudi du puissant président de la commission des Finances.

Un décret paru mercredi au Journal officiel a annoncé la convocation du Parlement en session extraordinaire à partir du 5 juillet et listé les textes au menu, dont le pouvoir d'achat et la sécurité sanitaire.

La Première ministre doit formuler pour la fin de la semaine des propositions "pour une feuille de route" et la composition d'un nouveau gouvernement prévu pour début juillet.

L'avenir du ministre des Solidarités Damien Abad apparaît désormais très compromis après l'annonce de l'ouverture d'une enquête par le parquet de Paris sur la base d'une plainte déposée lundi par une femme pour tentative de viol remontant à 2010.

"Une non information", selon les avocats de M. Abad lequel "prend acte de cette suite logique et pourra rapidement démontrer son innocence".

Pressée par les Insoumis de demander un vote de confiance après sa déclaration de politique générale, Elisabeth Borne n'a pas encore décidé, sachant qu'un vote négatif entraîne la démission du gouvernement, conformément à l'article 50 de la Constitution.

"Je prendrai ma décision à l'issue des consultations (avec les différents groupes parlementaires) et je ferai connaître ce choix le moment venu", a déclaré à la presse la cheffe du gouvernement à l'issue d'une visite au siège du Planning familial.

Selon un sondage Elabe pour BFMTV, près de 3 Français sur 4 souhaitent ce vote de confiance qui est un usage mais pas une obligation.

Tous les Premiers ministres de la Vème République se sont pliés à l'exercice de la déclaration de politique générale, mais quatre d'entre eux, dont Edith Cresson et Michel Rocard, ne l'ont pas fait suivre d'un vote de confiance.

«Mains dans le cambouis»

Élisabeth Borne a poursuivi ses consultations auprès des chefs des groupes parlementaires à l'Assemblée nationale en recevant à Matignon André Chassaigne (PCF) puis la cheffe de file des députés RN, Marine Le Pen.  Les "indépendants" Bertrand Pancher et Christophe Naegelen étaient également attendus dans la soirée. Le rendez-vous avec Mathilde Panot (LFI) a été reporté à jeudi.

Le chef des députés communistes a promis, en sortant de Matignon, que ses troupes étaient "adeptes de mettre les mains dans le cambouis", de "voter ce qui peut aller dans le bon sens et nous opposer fermement à ce qui est régressif ou insuffisant".

Marine Le Pen a laissé entendre de son côté que son groupe ne voterait pas forcément une motion de censure. "Nous n'usons pas de ces motions avec légèreté", a-t-elle dit, en soulignant qu'un fait "d'une particulière gravité" devait justifier une telle "déstabilisation des institutions".

«Les masques tombent»

Pendant ce temps-là, l'Assemblée nationale, désormais présidée par Yaël Braun-Pivet, votait pour élire son bureau et, avant-goût peut-être des mois à venir, l'affaire a rapidement tourné à la foire d'empoigne entre gauche et majorité.

Six vice-présidents et trois questeurs ont pu être élus. Il s'agit pour les premiers de Valérie Rabault (PS), Elodie Jacquier-Laforge (MoDem), Naïma Moutchou (Horizonssv  b), Caroline Fiat (LFI), Sébastien Chenu (RN) et Hélène Laporte (RN). Et pour les questeurs ont été élus Marie Guévenoux et Eric Woerth (LREM), ainsi que Eric Ciotti (LR).

La gauche a accusé des membres de la majorité d'avoir voté pour des candidats d'extrême droite, lors des scrutins à bulletins secrets. Un choix assumé par la cheffe de file des députés LREM Aurore Bergé qui a défendu l'importance que "toutes les sensibilités" puissent être représentées au bureau.

"LREM a appelé à voter pour le Front national. Les masques tombent", a dénoncé Julien Bayou, coprésident du groupe écologiste.

"M. Bayou voudrait quasiment que certains représentants (les RN) n'aient pas le droit de siéger dans l'hémicycle. Ce n'est pas ma conception de la démocratie", a répondu le président des députés LR Olivier Marleix.

Renaissance (ex-La République en marche) compte 172 députés dont quatre apparentés, le MoDem 48, Horizons 30 dont deux apparentés, le RN 89 dont une apparentée, LR 62 dont trois apparentés, LFI 75, le PCF et ses alliés ultramarins 22, le PS 31, les écologistes 23 et le groupe "Libertés, indépendants, outre-mer, territoires" 16. Neuf députés sont non-inscrits.

La majorité présidentielle peut donc tabler sur 250 députés, toujours loin des 289 de la majorité absolue.

L'élection prévue jeudi du président de la commission des Finances, réservée à un membre de l'opposition, fait elle aussi l'objet d'autant de convoitises que de spéculations. Elle devrait se jouer entre le député LFI Éric Coquerel, qui compte sur les voix de l'ensemble de la Nupes (outre les mélenchonistes, le PS, le PCF, EELV) et le député RN Jean-Philippe Tanguy, en quête d'alliés à droite.


Policiers lynchés en 2020 dans le Val-d'Oise: 25 ans de prison pour les trois protagonistes

En condamnant les trois hommes à la même sanction, la cour a tranché pour une unité de responsabilité face à une scène unique de crime (Photo, AFP).
En condamnant les trois hommes à la même sanction, la cour a tranché pour une unité de responsabilité face à une scène unique de crime (Photo, AFP).
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  • A l'annonce de la décision, seuls quelques discrets soupirs de soulagement se sont fait entendre dans la salle d'audience des assises du Val-d'Oise, remplie de policiers venus soutenir leurs collègues
  • «C’était une décision qui était attendue par mes clients et par toute la police», a réagi Me Pierre Salem-Cormier, avocat d’une des victimes.

PONTOISE: Parce qu'ils n'ont pas daigné désigner l'auteur parmi eux des tirs qui ont grièvement blessé en 2020 deux policiers à Herblay, dans le Val-d'Oise, trois jeunes hommes ayant participé à leur lynchage ont écopé vendredi de la même peine : 25 ans de prison.

A l'annonce de la décision, seuls quelques discrets soupirs de soulagement se sont fait entendre dans la salle d'audience des assises du Val-d'Oise, remplie de policiers venus soutenir leurs collègues.

Dans le box, Stanley Coumba, 32 ans, Bakary Dabo, 33 ans, et Lyess Souid, 31 ans, n’ont pas dit mot alors que leurs proches pleuraient en silence, avant de laisser éclater leurs sanglots à l'extérieur.

"C’était une décision qui était attendue par mes clients et par toute la police", a réagi Me Pierre Salem-Cormier, avocat d’une des victimes.

«Massacrer des policiers»

Les peines sont légèrement inférieures aux réquisitions de l’avocate générale qui avait demandé 30 ans de réclusion criminelle assortis des deux tiers de sûreté à l’encontre des accusés qui "se sont sentis autorisés à massacrer des policiers".

Le soir du 7 octobre 2020, deux fonctionnaires de la police judiciaire de Cergy se rendent dans une zone industrielle d'Herblay où se trouve l'entrepôt d'un gérant, agressé le matin-même par des hommes lourdement armés.

Les policiers y vont en civil, en voiture banalisée, ce qui amène les trois hommes à douter de leur identité, disant les prendre pour des membres de la communauté des gens du voyage se faisant passer pour des policiers malgré les preuves exhibées par les fonctionnaires (carte professionnelle, arme).

Le ton monte, une violente bagarre éclate. Les agresseurs s'emparent d'une arme d'un policier. Dix balles sont tirées, deux dans les jambes d'un policier, quatre dans le corps de son collègue.

Les témoignages des policiers, venus raconter à la barre leurs lourdes séquelles physiques et psychologiques et la fin de leur carrière sur le terrain, avait été un moment fort.

"Je ne comprendrai jamais pourquoi on a subi ce tel déchaînement de violence", "ma vie a volé en éclats", a pudiquement déclaré le major de police, blessé aux jambes.

Omerta

En condamnant les trois hommes à la même sanction, la cour a tranché pour une unité de responsabilité face à une scène unique de crime.

Avocat de Stanley Coumba, Yann Le Bras a estimé que ce verdict était "terrible, pour les accusés mais aussi pour les parties civiles qui n'ont pas la vérité judiciaire sur l'identité du tireur."

Tentant de justifier cette omerta, son client, 32 ans, avait fait valoir à la cour que "ceux qui disent la vérité (...) sont très mal accueillis en prison."

Questionné pendant de longues heures par la cour, il n'avait à l'instar de ses co-accusés, pas voulu révéler les circonstances précises de l'agression.

Le major, seul policier à avoir souvenir des faits, a affirmé que Lyess Souid avait prononcé la phrase "prenez leurs armes et butez-les ces sales flics", chose que ce dernier a toujours niée.

Saïd Harir, son avocat, a indiqué qu'il allait faire appel.

"Toute l'instruction a démontré qu'il n'avait pas participé aux violences et aux tirs", a-t-il souligné, rappelant que son client s'était rendu le surlendemain des faits, contrairement aux deux autres qui ont passé cinq moins en cavale.


Après la bataille des retraites, l'intersyndicale acte une nouvelle «phase»

"C'est la transformation de l'intersyndicale", a confié Cyril Chabanier (CFTC) après une rencontre entre syndicats (Photo d'illustration, AFP).
"C'est la transformation de l'intersyndicale", a confié Cyril Chabanier (CFTC) après une rencontre entre syndicats (Photo d'illustration, AFP).
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  • Une nouvelle série de négociations va s'ouvrir notamment sur l'emploi des seniors, le Compte épargne temps universel ou la pénibilité
  • La discussion entre les leaders syndicaux a été «calme, posée», ont assuré plusieurs participants

PARIS: Après les six mois d'union sans faille affichée au printemps par les syndicats lors de la mobilisation contre la réforme des retraites, ces derniers ont acté vendredi une nouvelle "phase" de l'intersyndicale qui se réunira ponctuellement pour préparer l'agenda social.

"C'est la transformation de l'intersyndicale", a confié Cyril Chabanier (CFTC) après une rencontre entre syndicats, rappelant qu'"on n'est plus dans le même moment que pendant la mobilisation contre les retraites".

"On était d'accord pour se dire que ce qu'on a crée, cette confiance, ce respect... Il fallait le poursuivre" mais force est de constater, selon ce leader réélu en novembre, qu'"il n'y a plus de grande thématique en ce moment".

"On ne met pas tout dans un placard", insiste-t-il, mais "il n'y aura pas d'intersyndicale comme on en a connue pendant six mois".

Pour Frédéric Souillot (FO), "l'intersyndicale de mobilisation est un bel outil mais pour l'instant, le bel outil on le range dans la caisse à outils".

"On a acté qu'on n'était plus dans la même phase", a confirmé Simon Duteil, co-délégué général de Solidaires.

"Ça n'existe pas des intersyndicales permanentes, quand on en fait une, c'est sur un sujet précis", a rappelé Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT.

"On s'est demandé en intersyndicale comment avoir une nouvelle phase de travail unitaire", "en se disant clairement qu'il y a des sujets sur lesquels on ne sera pas tous signataires et ce n'est pas grave", a-t-elle ajouté.

La discussion entre les leaders syndicaux a été "calme, posée", ont assuré plusieurs participants alors que certains s'étaient quelque peu agacés en amont, accusant la CGT d'attitude parfois hégémonique.

Alors qu'une nouvelle série de négociations va s'ouvrir notamment sur l'emploi des seniors, le Compte épargne temps universel ou la pénibilité, l'intersyndicale a souligné "la nécessité d'essayer de travailler de façon unitaire entre organisations représentatives pour définir quelques lignes rouges communes et quelques revendications communes", rapporte Mme Binet.

Les leaders "continueront de se voir de façon régulière", assure-t-elle, et préparent la journée européenne de mobilisation du 12 décembre à Bruxelles pour les salaires et contre les politiques d'austérité, à laquelle devraient participer "plusieurs milliers de Français", selon les syndicats.


Nantes: La justice administrative valide l'interdiction du concert de Freeze Corleone

L'interdiction du concert vendredi du rappeur controversé Freeze Corleone par la préfecture de Loire-Atlantique, pour des accusations d'antisémitisme, a été validée (Photo d'illustration, Capture d'écran Youtube).
L'interdiction du concert vendredi du rappeur controversé Freeze Corleone par la préfecture de Loire-Atlantique, pour des accusations d'antisémitisme, a été validée (Photo d'illustration, Capture d'écran Youtube).
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  • Me Sanjay Mirabeau, avocat de Freeze Corleone, a annoncé à l'AFP faire appel de cette décision devant le Conseil d'Etat
  • La préfecture avait justifié jeudi l'interdiction du concert en pointant des «références antisémites et haineuses envers la communauté juive»

NANTES: L'interdiction du concert vendredi du rappeur controversé Freeze Corleone par la préfecture de Loire-Atlantique, pour des accusations d'antisémitisme, a été validée par le tribunal administratif de Nantes, selon une décision consultée par l'AFP.

"La tenue du concert litigieux ferait naître un risque avéré de commission d'une infraction susceptible de porter atteinte au respect de la dignité humaine et de caractériser un trouble à l'ordre public dans un contexte prégnant de tensions et de sécurité renforcée", estime dans sa décision le juge des référés, saisi par le rappeur.

En interdisant le concert au Zénith de Nantes, dans la commune voisine de Saint-Herblain, le préfet de Loire-Atlantique n'a donc "pas commis, dans l'exercice de ses pouvoirs de police administrative, d'illégalité grave et manifeste", poursuit-il.

Me Sanjay Mirabeau, avocat de Freeze Corleone, a annoncé à l'AFP faire appel de cette décision devant le Conseil d'Etat.

"Le concert de Freeze Corleone est, en attente de la décision du Conseil d'Etat, reporté au 28 février 2024", a fait savoir le Zénith Nantes métropole sur son site internet en début de soirée.

La préfecture avait justifié jeudi l'interdiction du concert en pointant des "références antisémites et haineuses envers la communauté juive" dans les titres de l'artiste.

Le concert intervenait de plus dans un contexte "de vives tensions à l'égard de la communauté juive" depuis le début de la guerre entre le Hamas et Israël, et également d'"accentuation des débordements de groupuscules d'ultradroite", selon la préfecture.

Le 24 novembre, le tribunal administratif de Paris avait de son côté annulé l'interdiction par la préfecture de police de deux concerts de Freeze Corleone, estimant que celle-ci portait "une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'expression et de réunion".

En mars, le Conseil d'Etat avait déjà rejeté le recours de la ville de Rennes qui voulait interdire au rappeur de 31 ans de se produire.

Figure marquante du rap français, Freeze Corleone (Issa Lorenzo Diakhaté de son vrai nom) a été lâché en septembre 2020 par son label Universal Music, qui dénonçait des "propos racistes inacceptables".

Sur YouTube, ses clips totalisent plusieurs millions de vues.