Climat: Un «sursaut» indispensable pour atteindre les objectifs 2030

Sur la dernière décennie 2010-2019, les émissions ont diminué de 1,9% par an en moyenne, conduisant à une baisse de 23,1% en 2021 par rapport à 1990 (Photo, AFP).
Sur la dernière décennie 2010-2019, les émissions ont diminué de 1,9% par an en moyenne, conduisant à une baisse de 23,1% en 2021 par rapport à 1990 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 30 juin 2022

Climat: Un «sursaut» indispensable pour atteindre les objectifs 2030

  • Des progrès, mais doit mieux faire: c'est en substance le message du rapport annuel du Haut Conseil pour le climat
  • La France s'est engagée à réduire ses émissions de 40% d'ici à 2030 par rapport à 1990

PARIS: Malgré une tendance à la baisse des émissions, l'action climatique de la France est toujours "insuffisante", juge mercredi le Haut Conseil pour le climat, réclamant un "sursaut" pour éviter le "risque majeur" de ne pas atteindre les objectifs renforcés pour 2030.

Des progrès, mais doit mieux faire: c'est en substance le message du rapport annuel du HCC, autorité indépendante qui, depuis sa création par Emmanuel Macron, souligne chaque année la réponse "insuffisante" de l'Etat face au réchauffement climatique. Ce dernier fait sentir ses impacts grandissants en France avec une multiplication des canicules, sécheresses ou pluies extrêmes.

"Bravo pour ce qui a été fait jusqu'à maintenant. Maintenant il faut vraiment changer de niveau, il faut un sursaut dans l'action climatique", résume pour l'AFP sa présidente, la climatologue Corinne Le Quéré.

Un sursaut nécessaire parce que "des risques majeurs de ne pas atteindre les objectifs fixés par la France pour la réduction des gaz à effet de serre persistent", souligne le texte. Et "d’autant plus important" dans le contexte de guerre en Ukraine qu’il "permettrait de réduire la forte dépendance de la France aux importations d’énergies fossiles et d’engrais minéraux".

La France s'est engagée à réduire ses émissions de 40% d'ici à 2030 par rapport à 1990. Dans cette optique, la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) fixe des plafonds d'émissions mais le premier "budget carbone" 2015-2018 a été dépassé. Et le gouvernement a remonté les plafonds pour 2019-2023, reportant de fait l'effort à accomplir.

Dans ce contexte, sur la période 2019-2021, malgré un "rebond partiel" en 2021 avec la reprise post-Covid, une baisse de 1,7% permet de rester sous le budget carbone prévu, mais "principalement" en raison de la pandémie et du relèvement des plafonds, fait remarquer le HCC.

Le rapport note toutefois des mesures positives, notamment de nouvelles règles de performance énergétique des bâtiments neufs ou le développement d'énergies décarbonées dans l'agriculture. Et pour la première fois en 2021, les émissions de tous les grands secteurs sont en baisse (par rapport à 2019, hors rebond Covid), même si pour l'agriculture et les transports cette diminution récente "reste à confirmer".

«Une marche haute»

Sur la dernière décennie 2010-2019, les émissions ont diminué de 1,9% par an en moyenne, conduisant à une baisse de 23,1% en 2021 par rapport à 1990.

Une trajectoire de réduction "modeste", et inférieure à la moyenne européenne, note le HCC. Et encore loin de l'objectif de 2030 qui va être renforcé par le nouveau plan climat de l'UE prévoyant une baisse des émissions européennes d'au moins 55%.

Le nouvel objectif de la France devrait ainsi être de -50% d'ici 2030, selon le HCC et le gouvernement.

Alors "il faudrait que la baisse d'émissions soit plus que doublée sur la période qui nous reste jusqu'à 2030 pour atteindre 4,7% de réduction d'émissions par année", insiste Corinne Le Quéré. Soit une diminution de 16 millions de tonnes équivalent CO2 par an en moyenne contre 8 millions par an sur la dernière décennie. La SNBC, qui va être révisée, ne prévoit qu'une baisse de 12 Mt éqCO2 par an (-3,2% par an en moyenne).

"Une marche haute", reconnaît-t-on à Matignon en promettant de nouvelles mesures. "On aura mis sur la table d'ici le mois de septembre l'ensemble des briques nouvelles qui permettront d'atteindre cet l'objectif 2030 et cela fera l'objet de concertations".

"Plus que jamais, la sobriété apparaît comme le grand défi des années à venir", a réagi l'ONG France Nature Environnement, dénonçant le "tableau sombre" dressé par le HCC.

Au-delà des critiques, le Haut Conseil se félicite que la Première ministre soit désormais directement chargée de la planification écologique, et recommande notamment, pour rendre cette planification "opérationnelle", une programmation pluriannuelle des financements climat.

Pour apporter une "visibilité nécessaire aux entreprises, aux ménages, aux acteurs publics qui vont mettre en oeuvre la transition", souligne Benoît Leguet, membre du HCC.

Le rapport plaide également pour une "forte restructuration" de la filière forêt-bois, s'inquiétant d'une dégradation importante des forêts françaises, puits de carbone essentiels pour espérer atteindre la neutralité carbone en 2050.

Leurs capacités de stockage ont chuté entre 2013 et 2019, avant une reprise en 2020, absorbant sur la période 60% de moins qu'anticipé par la SNBC.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.


Droits de douane: la France déçue de l'accord UE-USA

Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
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  • La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir
  • Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission"

PARIS: La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir sur ses modalités d'application.

Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission".

Se projetant vers la suite, le ministre de l'Economie Eric Lombard a lui estimé lundi soir que "cet accord n'est pas complet" et que "le travail continue". Car "l'accord n'est pas finalisé et nous veillerons à ce qu'il soit amélioré", a-t-il dit dans une interview à Libération.

"Les discussions doivent se poursuivre pour les produits pharmaceutiques - on comprend que certains génériques seront exemptés -, sur l'acier, sur l'aluminium, sur les produits chimiques, sur les semi-conducteurs et sur les vins et les produits agricoles", précise-t-il.

"Il ne faudrait pas que cet accord soit la fin de l'histoire, auquel cas nous nous serions tout simplement juste affaiblis", avait estimé sur France Inter dès lundi matin le ministre français délégué au Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin.

"Maintenant, il va y avoir une négociation technique" et "nous pouvons nous saisir de cette séquence pour nous renforcer", a-t-il ajouté.

Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ont annoncé dimanche en Ecosse un accord douanier prévoyant que les produits européens exportés aux Etats-Unis soient taxés à 15%.

Avec l'espoir d'éviter une escalade commerciale, l'UE s'est aussi engagée à 750 milliards de dollars d'achats d'énergie - visant notamment à remplacer le gaz russe - et à 600 milliards d'investissements supplémentaires aux Etats-Unis.

A Paris, si on concède que cet accord va apporter de la "stabilité" aux entreprises, on insiste surtout sur son caractère "déséquilibré", selon les termes utilisés par plusieurs membres du gouvernement.

"Notre responsabilité aujourd'hui, c'est de faire en sorte que cet accord, in fine, soit le moins déséquilibré possible", a déclaré sur RTL le ministre de l'Industrie et de l'Energie Marc Ferracci.

- Prochains jours déterminants -

MM. Ferracci et Saint-Martin ont plaidé pour un "rééquilibrage" portant sur les services, en particulier le numérique, en rappelant que si la balance commerciale des Etats-Unis avec l'Europe est déficitaire pour les biens, celle des services est excédentaire.

Concernant les échanges de biens, la France affichait en 2024 un excédent commercial de 16,4 milliards de dollars à l'égard des Etats-Unis selon les Américains, mais les Douanes françaises évoquent pour la même période un déficit de 4,2 milliards d'euros.

Les négociateurs européens devront utiliser "l'ensemble des outils qui sont à leur disposition" et notamment envisager "de limiter l'accès des entreprises américaines aux marchés publics européens", a insisté M. Ferracci.

Du côté des entreprises, Patrick Martin, le président du Medef, première organisation patronale française, a estimé que "si les choses sont bien ce qui nous a été annoncé, ce n'est pas admissible". "Il faut continuer à négocier", selon lui.

La CPME, deuxième organisation patronale, a dit anticiper "des répercussions désastreuses" pour les petites et moyennes entreprises. Et le mouvement des ETI (Meti) a évoqué "des conséquences particulièrement préoccupantes pour les entreprises de taille intermédiaire".

Selon les secteurs, les sentiments sont ambivalents.

"Il y a du soulagement parce que cet accord donne de la visibilité", a déclaré à l'AFP Emmanuel Guichard, délégué général de la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA). Mais "ce n'est pas un bon accord pour nous, tout simplement parce qu'on avait 0% de droits de douane en janvier vers les Etats-Unis et maintenant on va être à 15%."

"La catastrophe est évitée", en référence aux 30% de droits de douane évoqué par M. Trump, "mais les prochains jours seront déterminants pour le secteur français des vins et spiritueux", déclare dans un communiqué la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS), à laquelle se joint l’ensemble des interprofessions françaises (CNIV) et de la filière.

Dans l'agroalimentaire, l'organisation patronale du secteur, l'Ania, a dénoncé un "accord clairement inéquitable (...) qui fragilise notre position".

Seuls les secteurs qui pourraient bénéficier d'une exemption de droits de douane, comme l'aéronautique, se sont montrés complètement soulagés.

Le Gifas (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) a salué dans une déclaration transmise à l'AFP une exonération "bonne pour une industrie équilibrée entre la France et les Etats-Unis" et qui permettra de "conserver des emplois qualifiés en France à tous les niveaux de la chaîne de sous-traitance."

Les organisations patronales et les fédérations des filières économiques affectées par cet accord seront reçues mercredi à Bercy.