Ukraine: Moscou s'enracine dans le Sud occupé en délivrant des passeports

Cette distribution de passeports, qui se déroule également dans d'autres zones ukrainiennes sous occupation, participe de la stratégie de Moscou visant à rendre sa domination irréversible. (AFP).
Cette distribution de passeports, qui se déroule également dans d'autres zones ukrainiennes sous occupation, participe de la stratégie de Moscou visant à rendre sa domination irréversible. (AFP).
Short Url
Publié le Mardi 19 juillet 2022

Ukraine: Moscou s'enracine dans le Sud occupé en délivrant des passeports

  • Cette distribution de passeports, qui se déroule également dans d'autres zones ukrainiennes sous occupation, participe de la stratégie de Moscou visant à rendre sa domination irréversible
  • Parmi les autres mesures servant cet objectif: le paiement des salaires municipaux et des retraites en roubles, l'ouverture de lignes de train et de bus avec la péninsule de Crimée annexée en 2014, ou encore l'école en langue russe

MELITOPOL : "On attendait ça": lorsque les autorités d'occupation ont commencé à distribuer des passeports russes à Melitopol, ville du sud-est de l'Ukraine conquise par les forces de Moscou, Olessia Novitskaïa dit ne pas avoir hésité.

L'AFP a rencontré cette maquilleuse professionnelle de 31 ans dans le cadre d'un voyage de presse strictement encadré par le ministère russe de la Défense pour montrer l'accueil réservé aux occupants par la population.

Les journalistes n'étaient pas autorisés à se déplacer librement dans la ville et à aller à la rencontre des habitants sans escorte militaire russe.

C'est dans une file d'attente d'une vingtaine de personnes que Mme Novitskaïa, venue demander ses papiers russes en compagnie de ses deux fils, explique sa démarche.

"Je pense que nous allons tous vivre en Russie, donc j'ai besoin d'un passeport russe. Pour pouvoir vivre ici de manière officielle et normale", dit-elle à l'AFP, son petit dernier dans les bras.

Car les autorités d'occupation de la région de Zaporijjia, où se situe Melitopol, prévoient dès l'automne un référendum pour formaliser l'annexion par la Russie.

Après quelques semaines d'attente, Mme Novitskaïa devrait recevoir ses nouveaux papiers à l'occasion d'une cérémonie où retentira l'hymne russe et organisée dans une salle où trônera un portrait de Vladimir Poutine.

Cette distribution de passeports, qui se déroule également dans d'autres zones ukrainiennes sous occupation, participe de la stratégie de Moscou visant à rendre sa domination irréversible.

Parmi les autres mesures servant cet objectif: le paiement des salaires municipaux et des retraites en roubles, l'ouverture de lignes de train et de bus avec la péninsule de Crimée annexée en 2014, ou encore l'école en langue russe.

Habitants «divisés»

Melitopol a été prise par les Russes au début de leur offensive, quasiment sans combattre, ce qui lui a épargné de lourdes destructions. A l'époque, l'armée ukrainienne était concentrée sur la défense de Kiev, la capitale, et de Marioupol, cité portuaire à 200 km de là qui a été ravagée par des semaines de siège.

En ce mois de juillet, la présence militaire russe semble assez discrète, mais des barrages routiers sont installés aux sorties de l'agglomération.

Mme Novitskaïa assure être ravie de cette situation.

"Pour être honnête, on attendait ça en 2014", année de l'annexion de la Crimée voisine et lorsque des séparatistes ont, à l'instigation de Moscou, déclenché le conflit armé dans l'Est ukrainien.

Mais elle reconnaît que la population est loin d'être acquise à ses idées. "Aujourd'hui, tout le monde est divisé", relate-t-elle. "Certains sont pour la Russie, d'autres pour l'Ukraine."

Elle-même se dit Russe, comme de nombreux habitants de cette région où la langue russe est dominante.

"Pour mon fils qui était en deuxième année d'école primaire, c'était difficile d'étudier en ukrainien", dit Mme Novitskaïa. "Ce sera plus facile d'apprendre en russe à partir de maintenant".

Dans la file d'attente, casquette grise sur la tête, il y a aussi Damir Kadyrov, un retraité de 65 ans, qui estime qu'après l'arrivée des Russes à Melitopol, obtenir un passeport russe est devenu "nécessaire".

"Comme ils ont décidé d’anéantir les fascistes, les choses seront plus calmes, comme à l'époque soviétique", dit-il, reprenant à son compte la propagande de Moscou qui affirme combattre en Ukraine des "fascistes" et des "nazis".

Mais au regard des chiffres, cet enthousiasme est loin d'être partagé par tous les habitants de Melitopol, qui avant l'offensive russe comptait quelque 150 000 habitants.

Le chef de l'administration régionale d'occupation, Evguéni Balitski, reconnaît que seuls 20 à 30 passeports sont distribués ici chaque jour, et "environ une centaine" dans toute la région.

Le rythme "n'est pas encore à la hauteur", regrette-t-il, tout en relevant que les vérifications des services de sécurité russes freinaient le processus.

A cela s'ajoute un climat de méfiance généralisé: ceux qui soutiennent l'Ukraine craignent la répression russe, et ceux qui préfèrent la Russie craignent d'être vus comme des "traîtres" ou des "collabos" par les partisans de Kiev.

D'ailleurs, à l'arrivée des caméras de télévision avec un cortège militaire russe devant le bâtiment administratif de Melitopol, où l'on effectue les demandes de passeports, une bonne partie de la foule faisant la queue a préféré partir.

L'obtention de passeports russes, "on n'en parle pas entre nous", témoigne Galina Vladimirovna, une habitante de 58 ans rencontrée dans un autre quartier de Melitopol. "C'est encore tabou, tout le monde a peur."


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Short Url
  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Short Url
  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Short Url
  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.