La livre turque atteint son plus bas niveau historique en raison du contentieux d’Erdogan

La livre turque a atteint son plus bas niveau historique dans un contexte d’escalade de la confrontation politique et économique du pays avec la France et les États-Unis. (Reuters)
La livre turque a atteint son plus bas niveau historique dans un contexte d’escalade de la confrontation politique et économique du pays avec la France et les États-Unis. (Reuters)
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Publié le Jeudi 29 octobre 2020

La livre turque atteint son plus bas niveau historique en raison du contentieux d’Erdogan

  • La monnaie se négocie pour la première fois à plus de 8,3 pour un dollar, franchissant ainsi un nouveau seuil inquiétant, avec une parité de près de 10 livres turques pour un euro
  • Les investisseurs s'inquiètent de la gestion de l'économie turque, alors que le président Recep Tayyip Erdogan intensifie sa guerre des mots contre les alliés occidentaux du pays

ANKARA : La livre turque a poursuivi sa chute libre mercredi et a atteint son plus bas niveau historique dans un contexte d'escalade de la confrontation politique et économique du pays avec la France et les États-Unis. 

La monnaie se négocie pour la première fois à plus de 8,3 pour un dollar, franchissant ainsi un nouveau seuil inquiétant, avec une parité de près de 10 livres turques pour un euro.

Les experts appellent à hausser les taux d’intérêt, à ralentir la croissance et à accélérer l'ajustement des comptes courants en vue de mettre un terme à la récession.

Par ailleurs, les investisseurs s'inquiètent de la gestion de l'économie turque, alors que le président Recep Tayyip Erdogan intensifie sa guerre des mots contre les alliés occidentaux du pays.

Le gouverneur de la Banque centrale turque, Murat Uysal, a annoncé mercredi que la banque n’a pas d'objectif en matière de taux de change.

Nikolay Markov, économiste principal chez Pictet Asset Management, a attribué l'accélération de la baisse de la livre à plusieurs facteurs.

« La banque centrale n'a pas accordé la hausse des taux tant attendue et nécessaire la semaine dernière. D'autre part, les réserves en devises étrangères sont en chute libre et sont désormais inférieures au niveau critique du Fonds monétaire international (FMI) qui correspond à deux mois d'importations », a-t-il confié à Arab News.

Selon M. Markov, « l'inflation des prix des produits alimentaires continue de s'accélérer et les prévisions d'inflation restent incertaines, alors que les risques géopolitiques croissants constituent eux aussi un facteur clé ». 

Erdogan a appelé lundi les Turcs à boycotter les produits français, après avoir lancé une attaque personnelle contre le président français Emmanuel Macron.

Samedi, Erdogan a critiqué sévèrement Macron, disant qu'il « a besoin d'un traitement mental ». Ces commentaires ont amené la France à rappeler son ambassadeur à Ankara.

Dans le cadre de la dispute qui s'intensifie, certains responsables turcs ont attaqué le système laïc, qui est au cœur de l'identité nationale française. Cependant, l'économie turque risque de souffrir d'une éventuelle guerre commerciale. Selon les chiffres officiels, la France est la dixième source d'importations de la Turquie et le septième marché pour ses exportations.

Markov affirme que la chute de la livre constitue un facteur décisif sur le plan politique et pourrait susciter un appel à l'aide du FMI à l'avenir.

Pour lui, « nous avons certainement atteint le point de non-retour. Si la Banque centrale turque ne prend pas de mesures vigoureuses sur le court terme, la situation deviendra incontrôlable et nécessitera éventuellement de recourir soit à des contrôles de capitaux, soit à un programme d'assistance du FMI ». 

M. Markov indique qu'une forte hausse des taux, avec la possibilité de nouvelles augmentations de ces taux, serait une réponse appropriée à court terme. Le problème le plus pressant est de prévenir une nouvelle dépréciation et une éventuelle inflation, a-t-il dit.

« Une nouvelle vague de sanctions est peu probable avant les élections américaines. Les nouvelles sanctions dépendront alors du gagnant aux élections. Je pense qu'elles seront beaucoup plus probables si Joe Biden est élu que si le mandat de Donald Trump est renouvelé », a-t-il ajouté.

M. Erdogan est confronté à une pression croissante due à la valeur de la livre, et pourtant il s'oppose farouchement à la hausse des taux d'intérêt.

Les entreprises turques qui ont un niveau élevé d'endettement extérieur devront désormais composer avec une plus grande vulnérabilité face aux devises étrangères si elles veulent rembourser leurs emprunts.

En outre, l'économie turque risque également de se trouver confrontée à de nouvelles sanctions américaines, explique M. Markov. La décision américaine dépendra du progrès de l'accord turc avec la Russie pour se procurer le système russe de défense aérienne S-400.

Le mois dernier, l'agence de notation financière Moody's a averti qu'Ankara avait « pratiquement épuisé les stocks régulateurs qui lui permettraient d'éviter une éventuelle crise de la balance des paiements ».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com 

 


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.