PARIS: L'accusation a requis jeudi soir six et huit ans de prison à l'encontre de deux hommes jugés à Paris pour avoir participé au système de propagande du groupe Etat islamique (EI) sur les réseaux sociaux en 2016 et 2017.
Soupçonnés d'avoir contribué au "jihad médiatique" en traduisant et diffusant les communiqués, vidéos et bulletins radiophoniques du groupe jihadiste sur la messagerie Telegram, ils comparaissent depuis mardi pour "association de malfaiteurs terroriste".
Le groupe EI "revendique sa nature étatique" et sa "branche médiatique" était "hiérarchisée", "son fonctionnement était martial", a décrit la procureure en ouverture de son réquisitoire.
Selon elle, le premier prévenu, Abdel Khalik K., a été "la pierre angulaire de l'édifice propagandiste An-Nûr", l'organe d'information francophone de Daech.
Elle a dépeint un "fonctionnaire zélé" qui, sous le nom "d'Abou Bara", a supervisé une équipe d'une quinzaine de "mounassirs" (traducteurs, diffuseurs) dont les rôles respectifs ont été détaillés dans un document retrouvé au cours de l'instruction.
"La propagande, c'est le prélude à l'engagement. C'est le venin que l'on instille au quotidien, l'étincelle qui allume la mèche" a martelé la magistrate, demandant huit ans de prison pour le prévenu.
Cet habitant de Wattrelos (nord) aujourd'hui âgé de 34 ans, sans casier judiciaire et qui entamait à l'époque une reconversion professionnelle, a dit avoir été pris dans un "engrenage" et avoir "honte". Mais il a contesté être "Abou Bara" et avoir eu un rôle hiérarchique.
"Pierre angulaire" ? "Permettez-moi d'en douter !", a lancé son avocate dans sa plaidoirie. A d'autres personnes condamnées, "on a reproché aussi d'avoir été ce maillon essentiel", a souligné Clémence Cottineau, parlant d'une "aggravation artificielle" des faits.
En 2016, il était en pleine "rupture" avec sa compagne et n'avait "rien d'autre auquel se raccrocher", a aussi rappelé le conseil, demandant au tribunal de requalifier les faits en "provocation au terrorisme".
Le second prévenu, Yann T., un ancien chauffeur-livreur de 35 ans qui habitait à Dijon (est), a été décrit comme le "bras droit" d'"Abou Bara" par un autre propagandiste, a déclaré la procureure, requérant six ans de prison à son encontre.
En détention provisoire depuis son arrestation mi-2018, cet homme au casier vierge a reconnu avoir "fait n'importe quoi", disant "regretter" ses actes.
"S'il n'avoue pas, on a rien contre lui, rien !", a plaidé son avocat Wenceslas Ferrence, contestant le rôle de leader attribué à son client. Il a lu de longs extraits d'une enquête disciplinaire réalisée en détention, concluant selon lui qu'il n'y a plus chez cet homme "aucun risque" de prosélytisme violent.
Le tribunal doit rendre sa décision vendredi après-midi.







