Les débats sur l'immigration relancés par Darmanin avant même la rentrée

En soulevant une polémique sur l'expulsion d'un imam, Gérald Darmanin a lancé, avant même la rentrée, le débat sur l'immigration (AFP)
En soulevant une polémique sur l'expulsion d'un imam, Gérald Darmanin a lancé, avant même la rentrée, le débat sur l'immigration (AFP)
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Publié le Jeudi 11 août 2022

Les débats sur l'immigration relancés par Darmanin avant même la rentrée

  • En attendant une décision définitive du Conseil d'Etat, attendue fin août, Gérald Darmanin en a profité pour défendre son intention de légiférer pour faciliter l'expulsion d'étrangers condamnés pour des délits
  • Son projet de loi immigration, qu'il espérait faire examiner au Parlement dès la rentrée, a été freiné et n'arrivera pas au Sénat avant décembre

PARIS: En soulevant une polémique sur l'expulsion d'un imam, Gérald Darmanin a lancé, avant même la rentrée, le débat sur l'immigration, un thème cher à la droite et l'extrême droite qui l'accusent d'immobilisme et dont s'est aussi emparé l'aile gauche de la majorité pour défendre le droit de vote des étrangers.

Au beau milieu de l'été, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a exhumé dans un tweet les "discours haineux" d'un imam marocain, Hassan Iquioussen, pour annoncer son expulsion.

Il s'est d'ailleurs dit "plus déterminé que jamais" à le renvoyer au Maroc, selon une source proche du gouvernement, malgré un premier veto à l'expulsion opposé la semaine dernière par le tribunal administratif de Paris.

En attendant une décision définitive du Conseil d'Etat, attendue fin août, Gérald Darmanin en a profité pour défendre son intention de légiférer pour faciliter l'expulsion d'étrangers condamnés pour des délits, après avoir dit fin juillet assumer une forme de "double peine".

Car son projet de loi immigration, qu'il espérait faire examiner au Parlement dès la rentrée, a été freiné et n'arrivera pas au Sénat avant décembre. Il devra être précédé d'un "grand débat" sur l'immigration, "à la demande" de la Première ministre Elisabeth Borne.

SOS Racisme s'était réjoui d'un "recadrage" de la Première ministre. Selon le Canard Enchaîné, Emmanuel Macron a justifié le report en appelant à "prendre le temps" et à "ne pas foncer tête baissée".

Le chef de l'Etat "est en désaccord sur la forme: il trouve que Darmanin va trop loin", croit savoir Aurélien Taché, ancien député macroniste passé à la Nupes, pour qui le ministre "pense à 2027" et "cherche à faire de l'esbroufe".

De quoi déclencher le courroux de l'extrême droite qui, à l'instar de la cheffe des députés RN Marine Le Pen, dénonce "des années de lâcheté des gouvernements et la soumission à des traités iniques" européens. Mais aussi de la droite, sur laquelle la macronie devra compter pour faire adopter de nouvelles mesures, faute de majorité absolue au Parlement.

Le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, a mis en garde contre "une réforme cosmétique", en estimant que le report de la loi est "la conséquence de l'immobilisme auquel conduit le +en même temps+ macroniste sur les sujets régaliens".

"La macronie, c'est un peu l'auberge espagnole: on y trouve tout et son contraire. Et au final, c'est souvent l'impuissance qui triomphe", a renchéri jeudi le député LR Eric Ciotti dans Le Figaro.

"Embrasser l'intégralité des sujets" 

Un "en même temps" qui s'est incarné, à l'autre bout de la majorité, par une proposition de loi constitutionnelle visant à accorder le droit de vote aux étrangers extra-européens aux élections municipales.

Cette promesse historique de la gauche a été déposée par le député Renaissance et président de la commission des Lois Sacha Houlié, qui a reçu le soutien de la Nupes.

Une réponse au ministre ? "Le fait que Gérald Darmanin soit tout de suite monté au créneau contre la proposition de Sacha Houlié montre que le débat sera compliqué dans la majorité", relève Bruno Cautrès, chercheur CNRS au Cevipof.

M. Houlié assure pourtant auprès de l'AFP ne pas être inquiet: "Pouvoir embrasser l'intégralité des sujets qui touchent de près ou de loin les étrangers en France, c'est une façon de donner un peu de hauteur" au débat, défend-il.

Une ligne néanmoins "minoritaire" dans la majorité aujourd'hui, estime François Gemenne, professeur à Sciences-Po et spécialiste des migrations internationales - par ailleurs membre de l'équipe du candidat à la présidentielle EELV Yannick Jadot.

Le chef de l'Etat a progressivement musclé son programme en la matière, souhaitant rester entre "fermeté" vis-à-vis des clandestins et "conditions dignes" d'accueil pour les réfugiés. Pour François Gemenne, Emmanuel Macron a "surtout délégué ce dossier à son ministre de l'Intérieur" sur fond de "droitisation des politiques migratoires".

Un pari risqué, selon Bruno Cautrès: "Si, au fur et à mesure du mandat d'Emmanuel Macron, on voit dans deux-trois ans que les arbitrages sont plutôt rendus en faveur de la ligne Darmanin que de la ligne du pôle social-démocrate, cela peut aboutir à de vraies tensions comme lors du premier mandat".


La défiance à l'égard de Macron et de Bayrou au plus haut, selon un sondage Paris, France

Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
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  • La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat
  • Le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi

PARIS: La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat, tandis que le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi.

Près des trois quarts des Français interrogés (73%) affirment ne pas faire confiance au chef de l'Etat et la moitié (49%) va jusqu'à "ne pas lui faire du tout confiance", le niveau le plus élevé atteint de son second mandat, qu'il n'a dépassé qu'une seule fois depuis son arrivée à l'Elysée en 2017 au plus fort de la crise des gilets jaunes en décembre 2018.

Selon le sondage, seuls 21% des Français font confiance à Emmanuel Macron, soit un point de moins qu'en juin et 6 de perdus par rapport à mars.

Pour François Bayrou, qui a présenté à la mi-juillet les mesures d'économie prévues par le gouvernement dans son projet de budget pour l'année prochaine, la chute se poursuit avec seulement 12% des Français qui disent lui faire confiance, soit un nouveau record d'impopularité (-2 points).

La défiance à l'égard du chef du gouvernement a progressé, avec 80% des Français (+5 points en un mois) qui disent ne pas lui faire confiance et 56% qui affirment ne pas lui faire "du tout" confiance, soit un bond de 9 points depuis juin.

Au classement des personnalités, le RN Jordan Bardella conserve la première place avec 39% des Français (+3 points) qui ont une image positive de lui, devant l'ancien Premier ministre Edouard Philippe (37%) et Marine Le Pen (35%).

A gauche, le mieux classé est l'ancien président François Hollande qui s'installe en huitième position grâce à un bond de 6 points en un mois.

Sondage réalisé par internet les 29 et 30 juillet auprès d'un échantillon de 1.000 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. Marge d'erreur entre 1,4 et 3,1 points.


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".