Grève des juges: le Liban face à une paralysie judiciaire

Les juges se plaignent du manque d’électricité, du non-fonctionnement des ascenseurs et de l’absence de fournitures de bureau (Photo, Reuters).
Les juges se plaignent du manque d’électricité, du non-fonctionnement des ascenseurs et de l’absence de fournitures de bureau (Photo, Reuters).
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Publié le Mercredi 24 août 2022

Grève des juges: le Liban face à une paralysie judiciaire

  • Les discussions avec les dirigeants politiques «n’ont pas permis d’obtenir leurs revendications minimales»
  • L’effondrement de la livre libanaise a grandement affecté les salaires des fonctionnaires qui ont perdu environ 95% de leur pouvoir d’achat

BEYROUTH: Les juges au Liban poursuivent leur protestation mardi à la suite d’une réunion infructueuse visant à passer en revue leurs problèmes.

Environ 400 de 550 juges ont arrêté de travailler la semaine dernière après l’échec des discussions avec les leaders politiques ayant pour but de répondre à leurs demandes minimales.

Ces juges comprennent le président du Conseil supérieur de la Magistrature du Liban, les membres du Conseil, les juges des cours de cassation et d’appel, des parquets, des tribunaux et des départements judiciaires.

Ils  ont tenu une assemblée générale fermée mardi au palais de justice de Beyrouth afin de discuter des résultats des pourparlers.

Des magistrats de différents rangs et positions sont en grève, à l’exception de ceux du Bureau d’audit et du Conseil de la Choura l’État.

Le Conseil supérieur de la Magistrature a déclaré avoir veillé «au bon fonctionnement, à la dignité et à l’indépendance du pouvoir judiciaire» et tenir à garantir les droits des juges.

Il a indiqué avoir adopté les demandes de tous les juges, notamment le maintien de la grève jusqu’à la mise en œuvre de solutions.

«La détérioration de la situation judiciaire est en majeure partie le résultat de la non-adoption de la loi sur l’indépendance du pouvoir judiciaire», a-t-il ajouté.

L’ancien procureur général, le juge Hatem Madi, a déclaré à Arab News: «La suspension du travail des juges signifie que tous les parquets du pays sont paralysés et que tous les examens judiciaires sont suspendus.»

«Ce n’est pas la première fois que le Conseil supérieur de la Magistrature ne garde pas sa neutralité et est au centre d’une protestation.

«Mon salaire vaut maintenant 300 euros et j’occupe un rang judiciaire élevé, sans parler des juges juniors, dont le salaire s’élève à moins de 75 euros. Ce qui se passe reflète l’effondrement du pays. C’est la première fois que le système judiciaire libanais est perturbé de la sorte.

«Pendant la guerre, nous travaillions et nos salaires étaient suffisants. Toutefois, aujourd’hui, ils n’ont pas seulement volé nos dépôts et contribué à l’effondrement de nos salaires, ils ont également imposé de nouvelles taxes.»

Selon une source judiciaire, les juges se plaignaient des tentatives de les soumettre aux «désirs de la classe dirigeante et de monter des dossiers contre eux».

La source judiciaire a ajouté: «Les juges libanais sont qualifiés, mais la classe politique utilise ses pouvoirs pour les soumettre à ses intérêts. L’un des principaux exemples est ce qui s’est passé avec le dossier de l’explosion du port de Beyrouth et la destitution du juge Tarek Bitar juste parce qu’il a accusé des politiciens de négligence.»

Les juges exigent une solution radicale à leur demande d’augmentation de salaire. Leur salaire vaut aujourd’hui 221 euros selon le taux de change du marché noir. Il valait 5 000 euros avant la crise économique qui a frappé le pays il y a trois ans.

Les palais de justice manquent désormais de tous les éléments de travail. Les juges se plaignent du manque d’électricité et d’eau, du non-fonctionnement des ascenseurs et de l’absence de fournitures de bureau de base, comme les stylos à bille, les papiers et l’encre.

D’après le greffier en chef du palais de justice de Beyrouth, «nous utilisons désormais le recto et le verso des papiers pour réduire les coûts. Parfois, ceci mène à un arrêt forcé du travail en raison de l’impossibilité financière résultant du manque d’équipement nécessaire au travail de tous les greffes.»

Le mois dernier et pour une seule fois, la Banque centrale libanaise a versé les salaires des juges au taux de 8 000 livres libanaises pour un dollar américain, après qu’un juge a soumis une demande au ministère de la Justice, qui l’a transmise à la Banque centrale pour approbation.

Cette mesure a provoqué des tensions au sein de l’autorité judiciaire parce qu’elle a été perçue comme une corruption du gouverneur de la Banque centrale envers les juges, d’autant plus qu’il est poursuivi sur fond d’accusations financières.

La décision a également mis en colère les fonctionnaires, auxquels a été attribué une indemnité de cherté de vie, une aide et une compensation productive pour les apaiser.

Les professeurs de l’Université libanaise poursuivent leur grève ouverte, exigeant de recevoir le même traitement que les juges.

L’effondrement de la livre libanaise a considérablement affecté les salaires des fonctionnaires qui ont perdu environ 95% de leur pouvoir d’achat, les poussant à arrêter de travailler et à se mettre en grève depuis juin.

Le Conseil de la Choura de l’État s’est plaint des conditions vécues par ses magistrats.

«Les implications de ces conditions pourraient affecter le pouvoir des juges d’effectuer leurs fonctions normalement et d’une manière qui assure la continuité du travail dans cet établissement vital», a-t-il averti.

Il a mentionné «des infractions et des fabrications visant les juges du Conseil par de nombreuses parties, notamment certains de ceux qui occupent des postes à responsabilité dans l’État et qui sont censés se conformer aux lois et règlements régissant le fonctionnement des institutions de l’État».

Le Conseil a ajouté: «Les choses sont devenues intolérables. L’indépendance du pouvoir judiciaire vis-à-vis des pouvoirs exécutif et législatif doit être réalisée maintenant, car elle symbolise la démocratie de la société et l’État de droit.»

Il a appelé à «rééquilibrer les salaires des juges en les rendant équitables, dignes du statut des juges, appropriés aux fonctions importantes qui leur sont demandées, aux charges qu’ils supportent et aux exigences de leur vie quotidienne».

L’Administration centrale des statistiques a déclaré que l’indice des prix à la consommation au Liban pour juillet 2022 a enregistré une augmentation de 168,45% par rapport à juillet 2021.

Elle a ajouté que l’inflation des prix à la consommation au cours des sept derniers mois de cette année a atteint 50%.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'armée israélienne dit se préparer à une «  offensive décisive » contre le Hezbollah libanais

Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources. (AFP)
Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources. (AFP)
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  • "Quand le moment viendra et que nous passerons à l'offensive, ce sera une offensive décisive"
  • Dans un discours prononcé lors d'un déplacement dans le nord, le général israélien Ori Gordin, a déclaré aux soldats: "nous avons déjà éliminé plus de 500 terroristes au Liban, la grande majorité d'entre eux appartenant au Hezbollah"

JERUSALEM: Un commandant de l'armée israélienne a indiqué vendredi que les troupes dans le nord du pays, où Israël à une frontière avec le Liban, se préparaient à une "offensive décisive" contre le Hezbollah, après des mois d'échanges de tirs transfrontaliers.

Le mouvement islamiste libanais Hezbollah et l'armée israélienne échangent des tirs quasi quotidiennement depuis l'attaque le 7 octobre du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël, qui a déclenché la guerre dans la bande de Gaza.

Dans un discours prononcé lors d'un déplacement dans le nord, le général israélien Ori Gordin, a déclaré aux soldats: "nous avons déjà éliminé plus de 500 terroristes au Liban, la grande majorité d'entre eux appartenant au Hezbollah", selon un communiqué de l'armée.

Les troupes israéliennes dans le nord sont actuellement en opération pour protéger les habitants de cette partie du pays et "préparer la transition vers l'offensive", a ajouté le général Gordin, commandant les forces israéliennes dans le nord.

"Quand le moment viendra et que nous passerons à l'offensive, ce sera une offensive décisive", a-t-il encore dit.

Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources.

La plupart d'entre eux, 342 personnes, ont été confirmés comme étant des combattants du Hezbollah, mais le bilan comprend également 104 civils. M. Gordin n'a pas mentionné de victimes civiles. Dans le nord d'Israël, au moins 18 soldats israéliens et 13 civils ont été tués, selon l'armée.

Le Hezbollah, soutenu par l'Iran, affirme que ses attaques contre Israël depuis le 8 octobre ont pour objectif de soutenir son allié du Hamas.

Des dizaines de milliers d'habitants ont depuis été déplacés au Liban et en Israël en raison de cette flambée de violence transfrontalière.


Polio, eaux usées, hôpitaux surchargés: la crise sanitaire à Gaza

Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés". (AFP)
Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés". (AFP)
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  • L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait état de vives inquiétudes face à une possible épidémie de polio dans la bande de Gaza
  • De son côté, l'armée israélienne a annoncé dimanche avoir lancé une campagne de vaccination de ses soldats contre la polio

GENEVE: L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait état de vives inquiétudes face à une possible épidémie de polio dans la bande de Gaza, alors que la crise sanitaire y est déjà très grave.

Voici un aperçu de certains des défis sanitaires auxquels est confronté le territoire palestinien, selon l'OMS.

Polio dans les eaux usés

Menace largement répandue voici encore une quarantaine d'années, la poliomyélite - qui peut entraîner en quelques heures des paralysies irréversibles - a très largement disparu dans le monde grâce aux vaccins.

Mais il existe une autre forme de poliovirus qui peut se propager: le poliovirus qui a muté à partir de la source contenue à l'origine dans le vaccin antipoliomyélitique oral (VPO). C'est ce poliovirus dérivé d'une souche vaccinale (PVDVc) qui a été retrouvé à Gaza.

Lorsqu'elles se répliquent dans le tube digestif, les souches de VPO changent génétiquement et peuvent se propager dans les communautés qui ne sont pas complètement vaccinées contre la poliomyélite, en particulier dans les zones où les conditions d'hygiène et d'assainissement sont mauvaises, ou dans des zones surpeuplées.

Le 16 juillet, le Réseau mondial de laboratoires de lutte contre la poliomyélite a isolé le poliovirus de type 2 dérivé d'une souche vaccinale (PVDVc2) dans six échantillons d'eaux usées à Deir al-Balah et Khan Younès.

Aucun prélèvement humain n'a encore été effectué à Gaza de sorte que l'OMS ne sait toujours pas si quelqu'un y a été infecté par le poliovirus. L'OMS et le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) espèrent collecter cette semaine les premiers échantillons humains.

De son côté, l'armée israélienne a annoncé dimanche avoir lancé une campagne de vaccination de ses soldats contre la polio.

Manque d'eau et d'assainissement

L'OMS et ses partenaires espèrent achever l'évaluation des risques liés à la polio cette semaine. Mais l'OMS a prévenu qu'il y a "un risque élevé" de propagation du poliovirus à Gaza et au niveau international "si cette épidémie ne fait pas l'objet d'une réponse rapide et optimale".

Le Dr Ayadil Saparbekov, chef d'équipe à l'OMS pour les urgences sanitaires dans les territoires palestiniens, espère que des recommandations pourront être publiées dimanche.

Mais "étant donné les limites actuelles en matière d'hygiène et assainissement de l'eau à Gaza, il sera très difficile pour la population de suivre le conseil de se laver les mains et de boire de l'eau salubre", a-t-il relevé mardi, lors d'un point de presse.

"Avec le système de santé paralysé, le manque d'eau et d'assainissement, ainsi que le manque d'accès de la population aux services de santé... la situation s'annonce très mauvaise", a-t-il souligné.

Au-delà de la polio, l'OMS est "très inquiète" face à de possibles épidémies dans la bande de Gaza.

Système de santé dévasté 

Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés" dans le complexe médical Nasser après de nouveaux bombardements lundi à Khan Younès, dans un contexte de "grave pénurie de réserves de sang, de fournitures médicales et de lits d'hôpitaux".

Avant le conflit à Gaza, déclenché le 7 octobre par les attaques du Hamas, il y avait environ 3.500 lits d'hôpitaux dans le territoire palestinien. Aujourd'hui, l'OMS estime qu'il y en a 1.532.

Seulement 45 des 105 établissements de soins de santé primaires sont opérationnels. Huit des dix hôpitaux de campagne sont opérationnels, dont quatre seulement partiellement.

Dans une telle situation, "il se peut que davantage de personnes meurent de maladies transmissibles que des blessures" liées à la guerre, a averti le Dr Saparbekov.

Selon ce responsable de l'OMS, "jusqu'à 14.000 personnes pourraient" avoir besoin d'une évacuation médicale hors de Gaza.


Les EAU proposent une mission internationale temporaire pour l'après-guerre à Gaza

Reem bint Ebrahim Al-Hashimy, ministre d'État émiratie pour la coopération internationale, a déclaré que la mission contribuerait à rétablir l'ordre public et à répondre à la crise humanitaire dans Gaza d'après-guerre. (Archive/AFP)
Reem bint Ebrahim Al-Hashimy, ministre d'État émiratie pour la coopération internationale, a déclaré que la mission contribuerait à rétablir l'ordre public et à répondre à la crise humanitaire dans Gaza d'après-guerre. (Archive/AFP)
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  • Elle a souligné le rôle clé des États-Unis dans le succès de la mission
  • La mission ouvrirait la voie à la réunification de Gaza et de la Cisjordanie occupée sous une Autorité palestinienne unique et légitime

ABOU DHABI : Les Émirats arabes unis ont appelé à l'établissement d'une mission internationale temporaire pour poser les jalons d'une nouvelle gouvernance à Gaza après la guerre.

Jeudi, dans un communiqué relayé par l'agence de presse nationale, Reem Al-Hashimy, ministre d'État pour la coopération internationale,  a déclaré que cette mission viserait à rétablir l'ordre et à faire face à la crise humanitaire dans Gaza post-conflit.
Selon la ministre, la mission devrait être déployée à l'invitation du gouvernement palestinien, sous la houlette d'un "nouveau Premier ministre crédible et indépendant", pour répondre aux besoins des Palestiniens et reconstruire Gaza. 

Elle préparerait le terrain pour la réunification de Gaza et de la Cisjordanie occupée sous une Autorité palestinienne unique et légitime.

Al-Hashimy a souligné qu'un retour à la situation d'avant le 7 octobre ne garantirait pas une paix durable, cruciale pour la stabilité régionale. 

Elle a exhorté les États-Unis à mener les efforts internationaux pour reconstruire Gaza, parvenir à la solution à deux États et faciliter les réformes palestiniennes, autant d'éléments qui contribueraient au succès de la mission internationale.

Israël, a-t-elle ajouté, doit également respecter le droit humanitaire international.

"Gaza ne peut se relever sous un blocus continu, ou si l'Autorité palestinienne légitime est empêchée d'assumer ses responsabilités", a-t-elle affirmé, appelant à l'arrêt des colonies israéliennes illégales et des violences en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. 

La ministre a réitéré le soutien des EAU aux efforts internationaux pour la solution à deux États.
"Notre ambition dépasse les frontières de Gaza et exige une collaboration internationale. L'établissement de la paix n'est pas seulement une nécessité régionale, mais un enjeu global qui profiterait à tout le Moyen-Orient et au monde entier", a-t-elle souligné pour conclure.