Jugement jeudi au procès des mutilations dentaires à Marseille

Selon un calcul du parquet de Marseille, ce jeune dentiste décrit comme avenant avait dévitalisé 3.900 dents saines, sans aucune justification thérapeutique, sur 327 patients. Il saura jeudi s'il va désormais passer par la case prison(AFP).
Selon un calcul du parquet de Marseille, ce jeune dentiste décrit comme avenant avait dévitalisé 3.900 dents saines, sans aucune justification thérapeutique, sur 327 patients. Il saura jeudi s'il va désormais passer par la case prison(AFP).
Short Url
Publié le Mardi 06 septembre 2022

Jugement jeudi au procès des mutilations dentaires à Marseille

  • A l'issue des audiences, à Marseille, du 28 février au 5 avril, une peine de dix ans de prison, le maximum prévu par le code pénal, avait été requise contre Lionel Guedj
  • Placé sous contrôle judiciaire depuis sa mise en examen en novembre 2012, le dentiste n'a jamais fait un seul jour de détention provisoire

MARSEILLE: Accusé d'avoir mutilé ses patients en s'enrichissant au passage sur la Sécurité sociale et des mutuelles, Lionel Guedj, ex-dentiste marseillais, saura jeudi s'il va désormais passer par la case prison. Un jugement attendu par quelque 350 plaignants, après une décennie de souffrances.

A l'issue des audiences, à Marseille, du 28 février au 5 avril, une peine de dix ans de prison, le maximum prévu par le code pénal, avait été requise contre Lionel Guedj, 42 ans, jugé pour violences volontaires ayant entraîné une mutilation, des faits commis entre 2006 et 2012.

"Quelle circonstance atténuante la société est-elle prête à tolérer pour adoucir la peine légalement encourue? Aucune!", avait asséné la procureure Marion Chabot. La magistrate avait également réclamé une amende de 375.000 euros, le maximum encouru pour l'infraction d'escroquerie, l'autre chef de poursuites.

Placé sous contrôle judiciaire depuis sa mise en examen en novembre 2012, le dentiste n'a jamais fait un seul jour de détention provisoire.

Finalement radié de l'Ordre des pharmaciens en 2016, Lionel Guedj s'était installé en 2005 dans les quartiers Nord, parmi les plus pauvres de Marseille, en installant son cabinet à Saint-Antoine. "Il est venu gratter la CMU" (couverture médicale universelle), avait asséné le parquet à l'audience, soulignant qu'en 2010 ce praticien était devenu le dentiste le mieux rémunéré de France avec 2,9 millions d'euros d'honoraires.

Selon un calcul du parquet de Marseille, ce jeune dentiste décrit comme avenant avait dévitalisé 3.900 dents saines, sans aucune justification thérapeutique, sur 327 patients, dans le seul but de leur poser des bridges très rémunérateurs. Selon la Sécurité sociale, il posait 28 fois plus de prothèses que la moyenne des dentistes français.

Dénonçant une "politique industrielle", l'accusation avait détaillé un plan monté par Lionel Guedj et son père Carnot --dit Jean-Claude-- Guedj, 71 ans, ancien dentiste mutualiste venu épauler son fils. "L'argent, c'est le carburant de Lionel et Jean-Claude Guedj ne cherche que la réussite de son fils, quel qu'en soit le prix", avait lâché Marion Chabot.

« Projet criminel »

Une peine de cinq ans de prison, dont un an avec sursis probatoire pendant trois ans, assortie de l'obligation d'indemniser les parties civiles, ainsi qu'une amende de 150.000 euros, ont été réclamées contre le père.

Un mandat de dépôt et une interdiction définitive d'exercer ont été sollicités contre les deux prévenus. "Ils ne sont qu'un pour ce qui n'est ni plus ni plus ni moins qu'un projet criminel", avait asséné la procureure.

"Jamais au grand jamais, je n'ai voulu blesser, faire mal ", s'était défendu Lionel Guedj qui, au terme d'un mois d’audience, avait fini par reconnaître des fautes de jeunesse.

"Campé dans ses certitudes, se sentant invincible, il a pratiqué ce traitement car il pensait qu'il était dans le vrai, il y croyait", avait plaidé son défenseur, Me Frédéric Monneret, en demandant au tribunal de requalifier les faits en blessures involontaires.

Le jugement est tout autant attendu par les nombreuses parties civiles, des patients originaires des quartiers populaires de Marseille, dont une centaine avaient livré au tribunal leurs vies saccagées par des douleurs dentaires épouvantables, des kystes à répétition, des bridges qui tombent, voire des pertes de dents totales, provoquant divorces et isolement social.

Certaines victimes n'étaient pourtant venues consulter Lionel Guedj que pour de simples caries.

"Sur notre groupe WhatsApp, on sent que tout le monde a peur qu'il s'en tire à bon compte", témoigne Ouassila, à la veille de ce jugement, en résumant les conséquences des interventions de Lionel Guedj dans sa bouche: "A 45 ans, j'avais perdu la moitié de mes dents. A 55 ans, je n'en ai plus aucune, je n'ai plus que des implants".

Quelle que soit la décision du tribunal, cette femme qui préfère taire son nom, comme beaucoup d'autres, a vécu les audiences comme "un moment intense": "Le procès a acté notre souffrance, nos douleurs. Le tribunal nous a permis de prendre conscience qu'on est victime alors que beaucoup d'entre nous se sentaient coupables".

Dans un courrier collectif adressé au tribunal au dernier jour des débats, les victimes avaient témoigné leur satisfaction: "Si vous saviez combien nos larmes ont coulé, combien nos vies ont été détruites, combien nos familles ont souffert, mais tout ce mois (de procès), nous avons été écoutés et soulagés de savoir qu'on pensait à nous, plaignants, qui pendant des années ont gardé le silence".


Macron va fixer de nouvelles ambitions en matière de défense face aux menaces

Le président français Emmanuel Macron tient une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre britannique Keir Starmer (non présent sur la photo) à l'issue d'une réunion de la Coalition des volontaires à la base militaire du quartier général de Northwood, au nord-ouest de Londres, le 10 juillet 2025. (Photo de Leon Neal / POOL / AFP)
Le président français Emmanuel Macron tient une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre britannique Keir Starmer (non présent sur la photo) à l'issue d'une réunion de la Coalition des volontaires à la base militaire du quartier général de Northwood, au nord-ouest de Londres, le 10 juillet 2025. (Photo de Leon Neal / POOL / AFP)
Short Url
  • Lors de sa traditionnelle allocution aux armées, à la veille de la fête nationale, dans les jardins du ministère des Armées, à l'hôtel de Brienne, le chef de l'État fera des « annonces majeures », selon l'Élysée.
  • Le plus haut gradé français a évoqué la menace « durable » de la Russie contre les pays européens, le désengagement américain, l'Ukraine où « se joue (…) aussi la place des pays européens dans le monde de demain ».

PARIS : Malgré des finances publiques au plus mal, le président français, Emmanuel Macron, s'exprimera dimanche soir sur les « efforts de défense » à consentir face à l'aggravation des menaces et à un ordre mondial déliquescent.

Lors de sa traditionnelle allocution aux armées, à la veille de la fête nationale, dans les jardins du ministère des Armées, à l'hôtel de Brienne, le chef de l'État fera des « annonces majeures », selon l'Élysée.

Pour préparer les esprits, le chef d'état-major des armées, le général Thierry Burkhard, a brossé vendredi un sombre tableau des menaces lors d'une rare conférence de presse, quelques jours après une autre intervention inédite à la télévision du directeur de la DGSE, le service de renseignement extérieur, Nicolas Lerner.

Sur la base des conclusions de la Revue nationale stratégique qui doit être publiée dimanche, le plus haut gradé français a évoqué la menace « durable » de la Russie contre les pays européens, le désengagement américain, l'Ukraine où « se joue (…) aussi la place des pays européens dans le monde de demain », la désinformation et les attaques hybrides, ou encore la lutte contre le terrorisme.

Selon lui, « faire le dos rond » ne résoudra rien ; « il faut qu'on intègre qu'on est bien face à un changement de référentiel stratégique ».

« Nous ne sommes pas là pour agiter les peurs ou les inquiétudes, nous sommes là pour les documenter et y apporter des réponses », a défendu le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, dans un entretien accordé à La Tribune dimanche.

Avec un modèle de défense autonome, « si l'on ne veut dépendre de personne, cela passe forcément par un effort nouveau, pas seulement budgétaire, mais aussi intellectuel, moral et industriel », selon lui.

Ces « bascules » posent la question de l'adéquation des ressources militaires françaises, selon l'Élysée, qui rappelle que le budget de la défense est passé de 32,2 à 50,5 milliards d'euros entre 2017 et 2025.

En l'état, la loi de programmation militaire (LPM) française prévoit 413 milliards d'euros pour les armées entre 2024 et 2030, avec des augmentations budgétaires annuelles d'un peu plus de 3 milliards d'euros pour atteindre 67,4 milliards en 2030.

La France peut-elle se contenter de réviser ses priorités dans le cadre de l'enveloppe prévue ou ira-t-elle plus loin, alors que le gouvernement cherche à réaliser des économies budgétaires ?

- Efforts européens -

La seule charge de la dette s'élève cette année à 62 milliards d'euros et menace d'exploser, selon le Premier ministre, François Bayrou, qui doit dévoiler ses orientations pour le budget 2026 mardi.

Le chef du gouvernement a déjà sanctuarisé le budget de la défense, qu'il a qualifié de « sacré ».

Certains pays européens n'ont pas attendu l'objectif fixé par les pays membres de l'OTAN en juin, qui consiste à consacrer 5 % de leur PIB à leur sécurité (3,5 % pour les seules dépenses militaires) d'ici 2035, pour rehausser leurs ambitions.

Londres prévoit de porter son budget de défense à 2,5 % d'ici 2027, puis à 3 % après 2029. L'Allemagne prévoit d'atteindre un budget de défense de 162 milliards d'euros en 2029, soit 3,5 % de son PIB, tandis que la Pologne y consacre déjà 4,7 % de sa richesse nationale. 

« Très clairement, nous devons aujourd'hui réviser notre programmation et notre stratégie, les réviser à la lumière du changement de la nature du risque », a admis jeudi Emmanuel Macron.

Sébastien Lecornu avait estimé cet hiver que « le poids de forme de l'armée française se situait à un peu moins de 100 milliards d'euros ». Début juillet, devant les sénateurs, il a esquissé des pistes d'efforts : défense sol-air, munitions, moyens de guerre électronique, ou encore le spatial, domaine dans lequel l'Europe risque de « décrocher ».

« Ce qui nous préoccupe le plus et crée un besoin budgétaire nouveau, ce sont les ruptures technologiques » (intelligence artificielle, quantique, furtivité des avions, etc.), a-t-il affirmé à La Tribune dimanche.

Alors que la « cohésion nationale » constitue un « élément-clé de la résilience » du pays face aux crises, selon le général Burkhard, le président abordera également la question de la mobilisation de la jeunesse, à qui il faut donner « l'occasion de servir », selon l'Élysée. 


France: un Ukrainien inculpé pour le meurtre d'une Franco-Russe dans un conflit de voisinage

Short Url
  • Selon le parquet, il y avait de la part de cette femme "une attitude régulièrement agressive avec des menaces de mort envers" ses voisins ukrainiens arrivés en France en mars 2022 pour fuir l'invasion de leur pays par la Russie
  • Née au Kazakhstan en 1967, alors en URSS, elle était arrivée en France en 2004, d'après la même source

EVREUX: Un Ukrainien de 69 ans a été inculpé pour meurtre et placé sous contrôle judiciaire après le décès mardi de sa voisine franco-russe à Evreux, dans le nord de la France, lors d'un différend de voisinage, a-t-on appris vendredi auprès du parquet local.

Un couple de retraités ukrainiens ainsi que leur amie avaient été agressés avec un couteau d'environ 20 cm par leur voisine franco-russe, vers 5H00 locales (7H00 GMT) dans la nuit de lundi à mardi, a expliqué le procureur de la République d'Evreux Rémi Coutin lors d'une conférence de presse.

Le mari du couple ukrainien aurait alors retourné l'arme blanche contre sa voisine la blessant à trois reprises, dont une mortelle à la cuisse, toujours selon le procureur.

"Pour nous c'est la victime, celle qui a reçu les coups de couteau et est décédée mardi matin, qui était venue agresser au moins à deux reprises cette nuit-là les personnes ukrainiennes qui se trouvaient dans l'appartement au-dessus d'elle", a déclaré Rémi Coutin, justifiant ainsi le non placement en détention de l'auteur présumé des faits.

Selon le parquet, il y avait de la part de cette femme "une attitude régulièrement agressive avec des menaces de mort envers" ses voisins ukrainiens arrivés en France en mars 2022 pour fuir l'invasion de leur pays par la Russie.

Née au Kazakhstan en 1967, alors en URSS, elle était arrivée en France en 2004, d'après la même source.

Un voisin a déclaré avoir passé la soirée à boire des bières chez la quinquagénaire avant que celle-ci ne décide "de monter le son de la musique, de donner des coups de balai dans le plafond afin d'embêter ses voisins du dessus", puis de se rendre chez eux pour une première altercation.

Déjà condamné à cinq reprises pour violences, ce voisin est mis en examen pour violences aggravées pour avoir frappé l'homme ukrainien lors cette première rencontre nocturne, a relevé le parquet.

Un habitant de l'immeuble a indiqué lors de son audition qu'il avait déjà demandé l'intervention à la police les 22 et 30 juin, parce que la victime était en train de donner des coups de poing dans la porte de l'appartement de ses voisins ukrainiens.

Entendu par la police, l'ex-mari de la femme franco-russe a relaté que s'agissant de la guerre entre la Russie et l'Ukraine, elle considérait que la Russie devait "se défendre, chasser les nazis d'Ukraine et lutter contre l'OTAN".

 


Audiovisuel public: Dati dégaine le «vote bloqué» pour accélérer les débats

Brigitte Macron et Rachida Dati. (AFP)
Brigitte Macron et Rachida Dati. (AFP)
Short Url
  • Vendredi matin, à la reprise, rien n'a laissé présager que les discussions puissent s'accélérer. Un peu plus d'une demi heure après le début des débats, Mme Dati a annoncé que le gouvernement demandait au Sénat "de se prononcer par un vote unique
  • Cette procédure très rarement utilisée permet d'accélérer les débats en n'organisant qu'un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver

PARIS: Fin de session chaotique au Sénat: face à l'"obstruction" de la gauche, la ministre de la Culture Rachida Dati a dégainé vendredi matin l'arme constitutionnelle du "vote bloqué" sur la réforme de l'audiovisuel public, pour tenter d'aboutir avant les congés parlementaires.

C'est une nouvelle vicissitude pour ce texte au parcours chaotique, porté à bout de bras par la ministre face à l'hostilité des syndicats, et qui pour l'essentiel prévoit de créer le 1er janvier 2026 une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l'Ina (Institut national de l'audiovisuel), sous l'autorité d'un président-directeur général.

L'examen du texte a avancé à très faible allure jeudi: suspensions de séance à répétition, rappels au règlement, motions de rejet préalable, invectives en pagaille... En plus de huit heures de débats, les sénateurs ont à peine démarré l'examen de l'article premier de la proposition de loi du sénateur Laurent Lafon.

A la manoeuvre, la gauche, bien décidée à jouer la montre, alors que la session extraordinaire doit théoriquement s'achever vendredi à minuit.

Vendredi matin, à la reprise, rien n'a laissé présager que les discussions puissent s'accélérer. Un peu plus d'une demi heure après le début des débats, Mme Dati a annoncé que le gouvernement demandait au Sénat "de se prononcer par un vote unique sur l'ensemble du texte", "en application de l'article 44 alinéa 3 de la Constitution".

Cette procédure très rarement utilisée permet d'accélérer les débats en n'organisant qu'un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver.

"Après plus de sept heures de débat, nous n'avons pu débattre que de 31 amendements sur ce texte. On a vu encore ce matin (...) de l'obstruction, toujours de l'obstruction et encore de l'obstruction", a-t-elle justifié. Il restait alors environ 300 amendements à débattre.

Les débats, suspendus vers 10H15, ont repris près de deux heures plus tard, et le président de séance Didier Mandelli (LR) a pris acte de la demande du gouvernement.

Débats "escamotés" 

Les orateurs de la gauche ont successivement protesté contre ce "coup de force", selon le mot de l'ancienne ministre socialiste Laurence Rossignol. "On parle de liberté de la presse. Mais commençons déjà par respecter les droits du Parlement", a-t-elle tonné, rappelant que le Sénat avait d'autres outils à sa disposition pour discipliner les discussions.

Et ce alors que les débats ont déjà été "escamotés" en première lecture à l'Assemblée le 30 juin, après le vote surprise d'un motion de rejet déposée par les écologistes, face aux bancs désertés de la coalition gouvernementale.

"C'est vous qui êtes responsables du fait que le débat ne peut pas avoir lieu. Ce n'est pas nous", leur a rétorqué le rapporteur du texte, Cédric Vial (LR).

Le président de la commission de la culture Laurent Lafon (UDI) a lui aussi défendu la décision du gouvernement, pointant une obstruction "caractérisée" destinée à "empêcher que le Sénat confirme son soutien" au texte.

Selon des sources parlementaires, la décision de déclencher le "vote bloqué" était sur la table depuis jeudi.

Mais, alors que le président du Sénat et le ministre des Relations avec le Parlement étaient enclins à laisser le débat se dérouler, "c'est bien Rachida Dati", en première ligne face à la gauche, qui "à un moment donné (...) a tranché pour tout le monde", selon un poids lourd.

Désormais, l'examen du texte devrait pouvoir "aller au bout" avant la fin de la session, selon cette source. Et revenir sans doute à l'automne à l'Assemblée, à une date indéterminée.