Deux ex-dentistes en prison pour des centaines de patients mutilés et désormais «sans sourire»

Les ex-dentistes français Lionel (à droite) et son père Carnot Guedj (à gauche), accusés d'escroquerie et de mutilation dentaire, arrivent au palais de justice le jour du vote du procès et du prononcé de la sentence à Marseille, dans le sud de la France, le 8 septembre 2022. (AFP).
Les ex-dentistes français Lionel (à droite) et son père Carnot Guedj (à gauche), accusés d'escroquerie et de mutilation dentaire, arrivent au palais de justice le jour du vote du procès et du prononcé de la sentence à Marseille, dans le sud de la France, le 8 septembre 2022. (AFP).
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Publié le Jeudi 08 septembre 2022

Deux ex-dentistes en prison pour des centaines de patients mutilés et désormais «sans sourire»

  • Se tenant le bras, dissimulés derrière des masques chirurgicaux, le fils, 42 ans, et le père, 71 ans, ont écouté la longue et accablante motivation du tribunal correctionnel de Marseille
  • Pour les magistrats, les deux hommes avaient mis en place un «système» de «traitements uniformes et systématisés», sans justification médicale, avec pour seule finalité de «détourner des profits»

MARSEILLE : Au procès des mutilations dentaires, Lionel et Carnot Guedj, le fils et le père, ex-dentistes marseillais, ont été lourdement condamnés jeudi et placés immédiatement en détention. La sanction de centaines de "vies détruites", désormais "sans sourire", avec des "douleurs intolérables".

Se tenant le bras, dissimulés derrière des masques chirurgicaux, le fils, 42 ans, et le père, 71 ans, ont écouté la longue et accablante motivation du tribunal correctionnel de Marseille. Pour les magistrats, les deux hommes avaient mis en place un "système" de "traitements uniformes et systématisés", sans justification médicale, avec pour seule finalité de "détourner des profits".

Et la peine a été à la hauteur: huit ans pour Lionel Guedj, cinq pour son père. Une décision accueillie par les applaudissements de la centaine de plaignants sur les bancs du public. Mais cette réaction a été aussitôt interrompue par la présidente, Céline Ballerini, pour qui on ne devrait "jamais se réjouir d'une peine d'emprisonnement".

Puis la magistrate a continué sa longue motivation, avec beaucoup de pédagogie, expliquant que ces peines se justifient par "le nombre de victimes", la durée des faits (NDLR: six ans), "le très grave préjudice" à la Sécurité sociale et les "très fortes sommes engagées pour réparer" ces patients.

En prononçant une interdiction définitive d'exercer, elle a estimé qu'ils avaient "abusé" d'un "statut respectable de sachant qui accable" leurs cas.

Si ce jugement est jugé "difficile" du côté de la défense, qui va faire appel, du côté des victimes "un poids est parti".

"La sanction est lourde et critiquable sur le plan de la proportionnalité", a commenté l'avocat de Lionel Guedj, Me Frédéric Monneret.

Mais pour Noël Kouici, qui a "déjà" un dentier, à 52 ans, "on nous a rendu justice, on ne nous a pas laissé comme des gens des quartiers Nord, on nous a respectés".

Messaouda a eu elle 12 dents dévitalisées dans le cabinet Guedj: "C'est une bonne justice à laquelle je ne croyais plus", commente-t-elle, soulagée.

"Ils se sont réconciliés avec l'institution", a commenté Me Marc Ceccaldi, avocat d'une soixantaine de victimes, pour qui la "sévérité" des peines est "proportionnelle avec la gravité des faits".

Un sentiment d'avoir été écouté donc, dans le public, mais également du soulagement, car ces condamnations ouvrent la voie à des indemnisations, après dix ans d'attente, d'autant que les Guedj ne feront pas appel sur les intérêts civils.

Dentiste le mieux rémunéré du pays

Placés sous contrôle judiciaire depuis leur mise en examen, en novembre 2012, Lionel et Carnot Guedj n'avaient jamais fait un seul jour de détention provisoire. Jeudi soir ils passeront leur première nuit derrière les barreaux, à la prison de Draguignan, où ils seront placés à l'isolement.

Car ils valaient mieux les éloigner de Marseille. Là où Lionel Guedj s'était installé en 2005, dans les quartiers Nord, parmi les plus pauvres de la ville.

Il était venu "gratter la CMU" (NDLR: Couverture médicale universelle), avait asséné le parquet à l'audience, au printemps, soulignant que dès 2010 ce praticien était devenu le dentiste le mieux rémunéré de France, avec 2,9 millions d'euros d'honoraires.

Selon un calcul du parquet, ce jeune dentiste décrit comme avenant avait dévitalisé 3.900 dents saines entre 2006 et 2012, sans aucune justification thérapeutique, sur 327 patients, dans le seul but de leur poser des bridges très rémunérateurs. Il posait 28 fois plus de prothèses que la moyenne des dentistes français, a estimé la Sécurité sociale.

Et le père "ne freinait pas" le fils", "au contraire il lui emboitait le pas", a estimé jeudi la présidente.

Le parquet avait réclamé dix ans de prison contre Lionel Guedj, la peine maximale, et cinq ans de prison dont un an avec sursis probatoire contre son père.

En quittant l'ancienne caserne où s'est tenu ce procès hors norme, le véhicule de police les transportant vers leurs cellules a été accompagné par les huées. Loin de la sérénité des six semaines de débats, il y a cinq mois.


Macron met en garde contre la mort de l'Europe

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Le président français a évoqué une Europe «dans une situation d'encerclement» face aux grandes puissances régionales
  • Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a appelé l'UE à renforcer encore sa défense au sein de l'Otan

PARIS: "Notre Europe est mortelle, elle peut mourir". Emmanuel Macron a dressé jeudi un portrait alarmiste à un mois et demi d'élections européennes compliquées pour son camp, en exhortant à un sursaut des Vingt-Sept pour bâtir une "Europe puissance" et une défense "crédible".

"Cela dépend uniquement de nos choix mais ces choix sont à faire maintenant" car "à l'horizon de la prochaine décennie, (...) le risque est immense d'être fragilisé, voire relégué", a-t-il asséné devant 500 invités, dont les ambassadeurs des 26 autres Etats membres de l'UE, des étudiants, des chercheurs et le gouvernement au complet.

Le président français a évoqué dans un discours-fleuve une Europe "dans une situation d'encerclement" face aux grandes puissances régionales et a jugé que les valeurs de la "démocratie libérale" étaient "de plus en plus critiquées" et "contestées".

"Le risque, c'est que l'Europe connaisse le décrochage et cela, nous commençons déjà à le voir malgré tous nos efforts", a averti le chef de l'Etat, en plaidant pour une "Europe puissante", qui "se fait respecter", "assure sa sécurité" et reprend "son autonomie stratégique".

Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a annoncé qu'il inviterait les Européens à se doter d'un "concept stratégique" de "défense européenne crédible", en évoquant la possibilité pour elle de se doter d'un bouclier antimissiles.

Il a aussi appelé l'Europe à renforcer son industrie de défense et plaidé pour un "emprunt européen", sujet tabou notamment en Allemagne, pour investir dans l'armement en appliquant le principe de "préférence européenne".

Entrée en campagne

Face aux débats sur l'immigration portés par la droite et l'extrême droite, il a affirmé que l'UE devait "retrouver la maîtrise" de ses "frontières" et "l'assumer", proposant "une structure politique" continentale pour prendre des décisions sur les sujets de migration, de criminalité et de terrorisme.

Sur le plan économique, pour aboutir à une "Europe de prospérité", Emmanuel Macron a défendu un "choc d'investissements commun", en doublant la capacité financière de l'UE pour faire face aux défis de défense, climatique, numérique et industriel.

Devant les pratiques commerciales chinoises et américaines, le président français a également demandé une "révision" de la politique européenne "en défendant nos intérêts".

"Ca ne peut pas marcher si on est les seuls au monde à respecter les règles du commerce telles qu'elles avaient été écrites il y a 15 ans, si les Chinois, les Américains, ne les respectent plus en subventionnant les secteurs critiques", a-t-il déclaré.

Réagissant peu après, le chancelier allemand Olaf Scholz, pas toujours sur la même longueur d'ondes que son homologue, a salué les "bonnes impulsions" du discours pour que "l'Europe reste forte" et promis de continuer à la "faire avancer ensemble".

Le discours d'Emmanuel Macron est largement considéré comme une entrée en campagne du chef de l'Etat français, alors que son camp patine à six semaines des élections européennes du 9 juin, pour lesquelles le Rassemblement national (RN, extrême droite) fait largement course en tête.

Selon un récent sondage Opinionway, la liste de la majorité présidentielle, à 19%, se situait toujours loin derrière celle du RN (29%), mais gardait une nette avance sur celle des socialistes (12%).

"Sur la scène européenne, cela fait sept ans qu'Emmanuel Macron confond ses incantations et ses gesticulations avec des réalisations", a ironisé Marine Le Pen, cheffe de file des députés du RN, sur X, accusant le chef de l'Etat de "brader des pans entiers de souveraineté" nationale.

Le palais présidentiel de l'Elysée a réfuté toute tactique électoraliste et affirmé que M. Macron ambitionnait d'"influer sur l'agenda" de la prochaine Commission européenne à l'issue des élections de juin.

Une légitimité qui sera mesurée à l'aune des réactions européennes. Et aux retours des Français, qui estiment à 57% que le président n'a pas eu "d'influence réelle" sur l'UE depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi.

Vendredi, le président prendra aussi la température lors d'un échange avec des étudiants à Strasbourg (Est), où il signera un nouveau contrat triennal pour conforter la stature européenne de la capitale alsacienne qui accueille le parlement européen.

 

 


UE: une majorité de Français doute de l'influence réelle de Macron, selon un sondage

Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
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  • 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas «s'impliquer davantage dans la campagne» car «ce n'est pas son rôle en tant que président de la République»
  • Pour autant 61% des Français jugent qu'une «défaite nette» de la liste Renaissance serait un «échec personnel» pour le président

PARIS: Une majorité de Français (57%) doute de l'influence réelle d'Emmanuel Macron sur le fonctionnement et les décisions prises par l'Union européenne depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi pour BFMTV.

Alors qu'Emmanuel Macron va mettre en avant son bilan européen lors d'un discours jeudi matin à la Sorbonne, seuls 42% des Français estiment que le chef de l'État a eu "une influence réelle sur le fonctionnement et les décisions prises par l’Union européenne" depuis 2017.

L'électorat d’Emmanuel Macron porte un regard très positif sur son rôle (70%), alors que la majorité des électeurs de gauche (56%) et d'extrême droite (68%) sont plutôt négatifs.

A un mois et demi des européennes, 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas "s'impliquer davantage dans la campagne" car "ce n'est pas son rôle en tant que président de la République".

Pour autant 61% des Français jugent qu'une "défaite nette" de la liste Renaissance serait un "échec personnel" pour le président.

En cas de large défaite du camp présidentiel, une majorité (61%) souhaite qu'Emmanuel Macron "change significativement d'orientation politique", une opinion partagée par 43% des électeurs du président au premier tour de l'élection présidentielle en 2022.

Pour autant, seule une minorité de Français (46% contre 54%) réclame une dissolution de l’Assemblée nationale et l'organisation d'élections législatives anticipées. Encore moins (39% contre 61%) souhaitent un changement de Premier ministre.

Si 58% des sondés déclarent tenir compte avant tout d'enjeux de politique européenne dans leur décision de vote, 41% concèdent qu'ils feront leur choix avant tout sur des enjeux nationaux, surtout parmi les électeurs RN (61%).

Ce sondage a été réalisé par internet du 23 au 24 avril à partir d'un échantillon de 1.001 personnes, représentatif des résidents de France métropolitaine âgés de 18 ans et plus. Selon les résultats, la marge d'erreur est comprise entre +/- 1,4 point et +/-3,1 points.


Evénements climatiques extrêmes: la Croix-Rouge souhaite un sac d'urgence par Français

Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
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  • Le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge
  • «75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule», selon un sondage OpinionWay

PARIS: Un "sac d’urgence" pour chaque Français en cas d’évacuation face aux événements climatiques extrêmes: c’est l’une des préconisations de la Croix-Rouge française dans un rapport sur la résilience de la société française, qui fait état d'un manque de préparation.

Canicule, sécheresse, incendies de forêt, inondations: le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge, en collaboration avec le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc), publiée jeudi.

"75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule", selon un sondage OpinionWay pour la Croix-Rouge française.

"La préparation face aux crises est l'affaire de tous. Elle concerne bien entendu les pouvoirs publics, mais aussi les acteurs associatifs et privés, ainsi que les citoyens", déclare à l'AFP Philippe Da Costa, président de la Croix-Rouge française.

Pour affronter "l’inévitable", l’association a dix recommandations. Dont la constitution du "Catakit", un sac d'urgence par personne, prêt en cas d'évacuation et comprenant par exemple de la nourriture non périssable, de l'eau, une trousse de secours, des vêtements et une lampe torche, pour attendre l'arrivée de l'aide.

"Seuls 11% des Français disposent d’un sac d’urgence prêt, et moins de la moitié connaît les objets indispensables qu’il faut y glisser", détaille le sondage OpinionWay.

Autre recommandation: la formation aux gestes et aux comportements qui sauvent. "On estime aujourd’hui à seulement 40% le nombre de Français ayant récemment suivi une formation aux gestes qui sauvent, contre 95% Norvège ou 80% en Allemagne", note le rapport.

Or, rappelle la Croix-Rouge, "si les individus sont informés et formés, l’impact des événements climatiques extrêmes sur les populations sera moindre et les dégâts matériels réduits".

L'association suggère que chaque Français ait a minima connaissance des réflexes vitaux: "savoir identifier les alertes sonores, avoir les bons comportements en cas de catastrophes" en plus de la maîtrise des gestes qui sauvent.

"Les événements climatiques extrêmes se manifestent de manière plus fréquente, plus intense, plus longue, et plus étendue géographiquement, rappelle Philippe Da Costa. "Tous les territoires de l'Hexagone et d’Outre-mer sont concernés".

Pour la Croix-Rouge, "il n’y a pas de fatalité". "Se préparer pour savoir comment agir avant les crises et comment réagir pendant les crises" pourra limiter l'impact des évènements climatiques extrêmes sur les populations.