Le monde arabe fait ses adieux à la reine Elizabeth II, une amie indéfectible

Le monde arabe pleure le décès de la reine Elizabeth II, alliée indéfectible de la région tout au long de son règne de soixante-dix ans. (Photo, AFP)
Le monde arabe pleure le décès de la reine Elizabeth II, alliée indéfectible de la région tout au long de son règne de soixante-dix ans. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 09 septembre 2022

Le monde arabe fait ses adieux à la reine Elizabeth II, une amie indéfectible

  • Pour la région, la mort ne marque pas seulement le décès d'une reine, mais aussi d'une alliée de longue date
  • Au cours de son règne de soixante-dix ans, les monarques saoudiens ont effectué pas moins de quatre visites d'État en Grande-Bretagne

LONDRES: Le monde arabe pleure le décès de la reine Elizabeth II de Grande-Bretagne, amie indéfectible de la région et de ses habitants pendant les sept décennies de son règne.

Il y a seulement trois mois, Sa Majesté a célébré son jubilé de platine, marquant le 70e anniversaire de son accession au trône.

En juin, le roi Salmane et le prince héritier, Mohammed ben Salmane, lui ont souhaité «de sincères félicitations et les meilleurs santé et bonheur», alors qu'ils se joignaient à d'autres chefs d'État de la région pour envoyer des messages de félicitations à l'occasion de son jubilé.

Ils ont maintenant la triste tâche d'envoyer leurs plus sincères condoléances à la famille royale britannique et au peuple du Royaume-Uni.

Pour de nombreuses familles régnantes du Moyen-Orient, la mort de la reine ne marque pas seulement le décès d'une reine, mais aussi d'une amie, et la triste fin d'une histoire d'amitié qui remonte aux premiers jours de son règne.

Ce règne a commencé le 6 février 1952, le jour où son père, le roi George VI, est décédé à Sandringham House, dans le Norfolk, alors qu'Elizabeth, âgée de 25 ans, et son mari, Philip, le duc d'Édimbourg, se trouvaient au Kenya lors d'une tournée en Afrique.

Ayant quitté l'Angleterre en tant que princesse, la fille du roi rentre au pays en deuil sous le nom de reine Elizabeth II. Son couronnement a lieu à l'abbaye de Westminster le 2 juin de l'année suivante, en 1953.

Parmi les invités à la cérémonie figuraient les membres de quatre familles royales du Golfe: Les dirigeants, ou leurs représentants, de ce qui était alors les protectorats britanniques de Bahreïn, du Koweït et du Qatar, ainsi que le prince Fahd ben Abdelaziz al-Saoud, représentant le roi Abdelaziz, 78 ans, fondateur et premier roi d'Arabie saoudite, qui n'avait plus que cinq mois à vivre.

Les liens entre les monarchies britannique et saoudienne ne peuvent être mesurés par la seule fréquence des occasions officielles, bien qu'une analyse de l'histoire des visites d'État organisées par le palais de Buckingham révèle une distinction éclairante.

Le roi Abdallah avec la reine et le duc d'Édimbourg lors de la visite du roi saoudien. (Photo, AFP/Archives)

Au cours de son règne, pas moins de quatre visites officielles de chefs d'État saoudiens ont été effectuées en Grande-Bretagne, un nombre égal à celui de seulement quatre autres pays dans le monde, dont les proches voisins du Royaume-Uni, la France et l'Allemagne.

 

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Le premier monarque saoudien à se rendre à Londres fut le roi Faisal, accueilli en grande pompe par l'État britannique au début de sa visite de huit jours en mai 1967.

Accueilli par Sa Majesté, d'autres membres de la famille royale britannique et des personnalités politiques de premier plan, dont le Premier ministre Harold Wilson, le roi s'est rendu au palais de Buckingham avec la reine et le duc d'Édimbourg dans une calèche tirée par des chevaux, qui a traversé les rues de Londres sous les acclamations de la foule.

Malgré un emploi du temps chargé, le roi a trouvé le temps de visiter et de prier au centre culturel islamique de Londres. Son fils, le prince Bandar, qui a obtenu cette année-là son diplôme du Royal Air Force College de Cranwell, dans le Lincolnshire, a remplacé son père lors d'une visite d'inspection des avions de combat English Electric Lightning, prêts à être envoyés en Arabie saoudite.

La reine rencontre le roi Salmane et le prince héritier, Mohammed ben Salmane. (Photo, AFP/Archives)

Le prince pilotera plus tard ces avions de chasse Lightning en tant que pilote de l'armée de l'air royale saoudienne.

Les successeurs du roi Faisal lui ont emboîté le pas en effectuant leurs propres visites d'État au Royaume-Uni: Le roi Khaled en 1981, le roi Fahd en 1987 et le roi Abdallah en 2007.

D'autres monarques de la région ont également rendu des visites officielles à la reine au fil des ans. Le premier fut le roi Faisal II, le dernier roi d'Irak, qui s'est rendu en Grande-Bretagne en juillet 1956. Deux ans plus tard, lui, son épouse et d'autres membres de la famille royale ont été assassinés lors du coup d'État qui a fait de l'Irak une république.

En 1966, Sa Majesté a accueilli le roi Hossein de Jordanie et son épouse d'origine britannique, Toni Avril Gardiner, qui, lors de son mariage, a changé son nom en princesse Mouna al-Hossein.

La reine Elizabeth II de Grande-Bretagne en compagnie du prince héritier d'Abu Dhabi de l'époque, Cheikh Mohammed ben Zayed al-Nahyan, et du vice-président des Émirats arabes unis et dirigeant de Dubaï, Cheikh Mohammed ben Rachid al-Maktoum. (Photo, AFP/Archives)

D'autres visites d'État ont été effectuées par les chefs d'État d'Oman, de Bahreïn, du Qatar, des Émirats arabes unis, d'Égypte et du Koweït.

La reine, quant à elle, a visité le Moyen-Orient à plusieurs reprises. En février 1979, elle s'est rendue dans la région à bord du jet supersonique Concorde et a visité Riyad et Dhahran au cours d'une tournée du Golfe qui l'a également conduite au Koweït, à Bahreïn, au Qatar, aux Émirats arabes unis et à Oman.

En Arabie saoudite, elle a été accueillie par le roi Khaled et a participé à une série d'événements, dont un pique-nique dans le désert et un dîner d'État au palais Maathar à Riyad. En retour, la reine et le prince Philip ont organisé un dîner pour la famille royale saoudienne à bord du yacht de Sa Majesté, le Britannia.

Fait poignant, le Britannia ne retournera dans le Golfe qu'une seule fois, en janvier 1997, lors de sa dernière tournée avant qu’il ne soit mis hors service en décembre de la même année.

En 2010, la reine est retournée dans la région et a rencontré le Sultan Qabous d'Oman. (Photo, AFP)

En 2010, la reine est retournée dans la région pour rencontrer le Cheikh Khalifa, dirigeant des EAU, et le Sultan Qabous d'Oman.

Toutefois, les relations entre la famille royale britannique et ses homologues du Golfe ne se sont pas limitées aux grandes occasions officielles. L'analyse de la circulaire régulière de la Cour publiée par Buckingham Palace révèle que des membres de la famille royale ont rencontré des monarques du Golfe ou des membres de leur famille plus de 200 fois entre 2011 et 2021 seulement. Quarante de ces réunions informelles ont eu lieu avec des membres de la Maison des Saoud.

La fréquence de ces rencontres avec les chefs d'État du Moyen-Orient, soit près d'une tous les quinze jours, témoigne des liens d'amitié solides qui existent entre Sa Majesté et la région.

Une de ces rencontres a eu lieu en mars 2018, lorsque le prince héritier, Mohammed ben Salmane, a eu une audience privée et un déjeuner avec la reine au palais de Buckingham. Plus tard, il a dîné avec le prince de Galles et le duc de Cambridge à Clarence House, lors d'une visite au Royaume-Uni qui comprenait des rencontres avec la Première ministre britannique de l'époque, Theresa May, et son ministre des Affaires étrangères, Boris Johnson.

Des questions sérieuses, telles que les accords commerciaux et de défense, sont souvent les sujets de discussion de ces réunions. Mais les rencontres privées entre les familles royales ont toujours été marquées par la bonne humeur et non par une formalité rigide, comme le rappellera plus tard Sir Sherard Cowper-Coles, ambassadeur britannique en Arabie saoudite de 2003 à 2006.

En 2003, par exemple, le prince héritier Abdallah, futur roi d'Arabie saoudite, était l'invité de la reine au château de Balmoral, sa propriété en Écosse. C'était la première visite du prince à Balmoral et, acceptant avec joie une invitation à visiter le vaste domaine, il s'est installé sur le siège passager d'un Land Rover, pour découvrir que son chauffeur et guide n'était autre que la reine elle-même.

Sa Majesté, qui a servi pendant la Seconde Guerre mondiale en tant que chauffeur de l'armée, a toujours conduit elle-même à Balmoral, où les habitants ont l'habitude de la voir se déplacer au volant de l'une de ses Land Rover préférées. Elle était également connue pour s'amuser, aux dépens de ses invités, en s'élançant sur les petites routes de campagne et sur le terrain accidenté du domaine.

Dans le sens des aiguilles d'une montre, à partir de la gauche: La reine Elizabeth avec l'émir du Koweït, Cheikh Sabah al-Ahmad al-Sabah; avec l'émir du Qatar, Cheikh Tamim ben Hamad al-Thani; avec le roi Abdallah II et la reine Rania de Jordanie. (Photo, AFP/Archives)

Selon le récit de Sir Sherard, le prince Abdallah a bien supporté ce tour de montagnes russes improvisé, même si à un moment donné, «par l'intermédiaire de son interprète», le prince héritier s'est senti obligé d'«implorer la reine de ralentir et de se concentrer sur la route».

Outre leur statut royal, la reine et les monarques du Golfe se sont liés par leur amour mutuel des chevaux, un intérêt commun qui remonte au moins à 1937, lorsqu'Elizabeth était une princesse de onze ans.

À l'occasion du couronnement de son père cette année-là, le roi Abdelaziz d'Arabie saoudite a offert au roi George VI une jument arabe. Une statue de bronze grandeur nature du cheval, Turfa, a été dévoilée en 2020 au Musée du cheval arabe de Diriyah. À l'époque, Richard Oppenheim, alors ambassadeur adjoint du Royaume-Uni en Arabie saoudite, a raconté comment les deux familles royales ont toujours partagé cet intérêt commun.

«La reine possède de nombreux chevaux, et le roi Salmane et la famille royale saoudienne ont également un amour de longue date pour les chevaux», a indiqué Sherard.

La reine a également partagé cette appréciation des chevaux avec le Cheikh Mohammed al-Maktoum, souverain de Dubaï et vice-président des Émirats arabes unis, qui possède les écuries et le haras de Godolphin, de renommée internationale, à Newmarket, le berceau des courses hippiques britanniques.

La reine Elizabeth - 1926-2022. (Photo fournie/Famille royale)

Ils ont souvent été vus ensemble lors des grands événements du calendrier hippique, comme la réunion annuelle de cinq jours de Royal Ascot, considérée comme le joyau de la saison sociale britannique. L'équipe Godolphin a eu plusieurs gagnants à Royal Ascot, et les chevaux de la reine y ont remporté plus de 70 courses depuis son couronnement.

Cette année, 10 des chevaux de la reine ont couru à Ascot. Cependant, souffrant de plus en plus de problèmes de mobilité, elle n'a pas assisté à l'événement. C'était la première fois qu'elle le manquait en soixante-dix ans de règne.

Pas moins de 16 Premiers ministres britanniques ont servi sous le règne de la reine. Lorsqu'elle est montée sur le trône en 1952, Winston Churchill, le leader vénéré de la guerre, était Premier ministre. Son successeur, Anthony Eden, nommé par la reine en 1955, a été le premier des 15 qui recevront sa bénédiction officielle au palais de Buckingham.

La reine n'a rompu avec cette tradition qu'une seule fois, et seulement à la toute fin de son règne. De plus en plus fragile, ses médecins lui ont conseillé de ne pas quitter sa résidence écossaise de Balmoral pour se rendre à Londres. C'est donc là, mardi de cette semaine, qu'elle a rencontré Liz Truss, la nouvelle chef du parti conservateur, et lui a demandé de former un gouvernement.

Pendant le week-end du jubilé, en juin, des drapeaux ont flotté dans les maisons et les bâtiments publics du Royaume-Uni et du Commonwealth, qui compte 150 millions de personnes, des milliers de fêtes de rue ont été organisées, des phares ont été allumés dans tout le pays et des voix britanniques ont entonné partout l'hymne national.

Aujourd'hui, alors que les drapeaux sont en berne et que le bâton royal est transmis au fils aîné de la reine, Charles, le peuple britannique, après avoir chanté pendant soixante-dix ans les mots «God Save The Queen» (Que Dieu protège la reine), doit maintenant apprendre à chanter à nouveau «God Save The King» (Que Dieu protège le roi).

Le jour de son 21e anniversaire, dans un discours diffusé à la radio depuis Le Cap, alors qu'elle n'était encore que la princesse Elizabeth, la future reine a pris un engagement solennel.

«Je déclare devant vous tous, affirme-elle, que ma vie entière, qu'elle soit longue ou courte, sera consacrée à votre service.»

Heureusement, sa vie a été longue et sa dévotion à son devoir était totale.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Comment l’initiative diplomatique saoudo-française a rapproché la Palestine d’un pas vers la reconnaissance d’un État

Le résultat du vote sur une résolution approuvant la Déclaration de New York est affiché à l'écran lors de la deuxième séance plénière de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la question de la Palestine au siège de l'ONU à New York, le 12 septembre 2025. (Photo de l'ONU)
Le résultat du vote sur une résolution approuvant la Déclaration de New York est affiché à l'écran lors de la deuxième séance plénière de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la question de la Palestine au siège de l'ONU à New York, le 12 septembre 2025. (Photo de l'ONU)
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  • Les deux pays ont obtenu un large soutien à l’Assemblée générale de l’ONU : 142 nations ont approuvé leur déclaration en faveur de la solution à deux États
  • La Déclaration de New York, issue d’une conférence saoudo-française en juillet, exige un cessez-le-feu à Gaza, le désarmement du Hamas et la reconnaissance d’un État palestinien

DUBAÏ : Lors d’un vote historique vendredi, 142 pays ont soutenu une déclaration saoudo-française à l’Assemblée générale de l’ONU appelant à la création d’un État palestinien indépendant, signalant que l’offensive diplomatique menée par Riyad mobilise un consensus mondial sans précédent en faveur d’une solution à deux États pour résoudre un conflit vieux de plusieurs décennies.

Le vote en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », qui appelle à une solution à deux États sans implication du Hamas, représente une nouvelle étape dans la pression internationale croissante sur Israël pour qu’il mette fin à sa guerre à Gaza. Ce conflit a fait plus de 64 000 morts, selon les autorités sanitaires locales, des dizaines de milliers de blessés, et provoqué des conditions de famine dans un contexte de catastrophe humanitaire croissante.

Le président français Emmanuel Macron a déclaré que l’adoption de la déclaration par l’Assemblée générale de l’ONU montre que la communauté internationale est en train de « tracer une voie irréversible vers la paix au Moyen-Orient ».

« Un autre avenir est possible. Deux peuples, deux États : Israël et Palestine, vivant côte à côte en paix et en sécurité », a-t-il écrit vendredi dans un post sur X.

Le ministère saoudien des Affaires étrangères a salué l’adoption de la déclaration, affirmant qu’elle « confirme le consensus international pour avancer vers un avenir pacifique dans lequel le peuple palestinien obtient son droit légitime à établir un État indépendant sur la base des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale ».

La « Déclaration de New York », issue d’une conférence internationale organisée par l’Arabie saoudite et la France en juillet au siège de l’ONU, appelle à un cessez-le-feu à Gaza, à la libération de tous les otages, au désarmement du Hamas et au transfert de ses armes à l’Autorité palestinienne sous supervision internationale, ainsi qu’à la création d’un État palestinien indépendant.

Elle aborde également la normalisation des relations entre Israël et les pays arabes, et propose le déploiement d’une « mission internationale temporaire de stabilisation » en Palestine, sous mandat du Conseil de sécurité de l’ONU, afin de soutenir la population civile palestinienne et de transférer les responsabilités sécuritaires à l’Autorité palestinienne.

Ce vote ouvre désormais la voie à une conférence d’une journée à l’ONU sur la solution à deux États, coprésidée par Riyad et Paris, prévue pour le 22 septembre, au cours de laquelle plusieurs pays — dont la France, le Royaume-Uni, le Canada, la Belgique et l’Australie — se sont engagés à reconnaître formellement l’État de Palestine.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été adoptée vendredi avec un soutien massif : 142 pays ont voté pour, seuls 10, dont Israël et son principal allié, les États-Unis, ont voté contre, tandis que 12 nations se sont abstenues.

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La liste des nations qui ont voté en faveur de la résolution approuvant la Déclaration de New York est affichée à l'écran lors de la deuxième séance plénière de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la question de la Palestine au siège de l'ONU à New York, le 12 septembre 2025. (Photo de l'ONU)

La déclaration, qui incarne les efforts diplomatiques croissants de l’Arabie saoudite en faveur d’un État palestinien, avait déjà été approuvée par la Ligue arabe et cosignée en juillet par 17 États membres de l’ONU, dont plusieurs pays arabes.

Le résultat du vote de vendredi a été fermement condamné par les États-Unis et Israël. Le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Oren Marmorstein, a qualifié l’adoption de la déclaration de « honteuse », affirmant que son pays la « rejette catégoriquement » et qualifiant l’Assemblée générale de l’ONU de « cirque politique déconnecté de la réalité ».

De même, Morgan Ortagus, vice-envoyée spéciale américaine pour le Moyen-Orient, a dénoncé l’action de l’Assemblée générale comme « une nouvelle opération de communication malavisée et mal chronométrée », accusant l’ONU de récompenser le Hamas et de saper les efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre à Gaza. Elle a ajouté que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé pour mettre un terme au conflit.

Le Hamas, de son côté, a déclaré qu’il refusait de déposer les armes tant qu’un État palestinien souverain ne serait pas établi.

Ces appels croissants en faveur d’un État palestinien interviennent alors que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou continue d’intensifier le conflit. Mardi, il a autorisé des frappes aériennes contre des cibles du Hamas au Qatar, lors d’une réunion examinant une proposition de cessez-le-feu américaine — une décision largement condamnée au Moyen-Orient et au-delà, pour avoir sapé les efforts de paix et violé la souveraineté du Qatar.

Sous son autorité, Israël poursuit une offensive militaire majeure à Gaza-ville, malgré l’indignation internationale. Jeudi, la veille du vote à l’ONU, Netanyahou a déclaré qu’« il n’y aura pas d’État palestinien », en signant un accord pour avancer sur le projet controversé d’expansion des colonies dans la zone E1, qui diviserait la Cisjordanie et compromettrait davantage la possibilité d’un État palestinien.

Des analystes ont averti que, bien que symbolique sans mesures concrètes immédiates, l’adoption de la déclaration à l’ONU représente une défaite diplomatique stratégique pour Israël, même si ce dernier revendique des victoires militaires.

Hani Nasira, écrivain, universitaire et analyste politique égyptien, estime que le large soutien à la déclaration reflète le rejet international croissant des pratiques du gouvernement d’extrême droite de Netanyahou, ainsi que l’embarras grandissant pour les États-Unis, son principal allié.

« Israël a perdu son image sur la scène internationale, et l’opposition au gouvernement Netanyahou s’est intensifiée tant à l’échelle mondiale qu’au sein même du pays. Ceux qui le soutiennent aujourd’hui se retrouvent dans une position profondément embarrassante », a déclaré Nasira à Arab News.

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Des Palestiniens déplacés évacuant la ville de Gaza vers le sud se déplacent à pied et en véhicule le long de la route côtière à Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 13 septembre 2025. (AFP)

Il a déclaré que la décision de Netanyahou de persister dans cette voie semble intenable pour les citoyens israéliens, la région et le monde dans son ensemble.

« L’inquiétude aujourd’hui ne concerne pas seulement la Palestine, mais la menace s’est étendue à la sécurité du Golfe. Les dernières attaques ont compromis le rôle du Qatar comme médiateur et ébranlé l’image de Washington en tant qu’allié fiable » », a affirmé Nasira, avertissant que les actions d’Israël sont facteurs de déstabilisation régionale.

Si la création d’un État palestinien est considérée comme la solution, cette perspective reste hors de portée à court terme.

Nasira a souligné que l’agression continue d’Israël dans la région, le discours provocateur de Netanyahou, y compris sa vision d’un « Grand Israël », ainsi que les profondes divisions internes au sein des factions palestiniennes, constituent des obstacles majeurs au plan de paix.

Il a averti que la région se trouve à un « tournant » nécessitant l’exploration d’alternatives réalistes, « sans se laisser entraîner par l’extrémisme de Netanyahou, qui menace non seulement le processus de paix, mais toute la région ».

Nasira a conclu en affirmant que les violations commises par Israël à Gaza mettent en lumière la nécessité d’un ordre mondial multipolaire, plutôt qu’un ordre dominé par les États-Unis — en particulier sous une seconde présidence de Donald Trump.

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Des manifestants participent à une manifestation sur la "place des otages" à Tel Aviv le 13 septembre 2025, appelant Israël à un cessez-le-feu dans sa guerre contre Gaza afin de ne pas mettre en danger la vie des captifs encore aux mains des militants palestiniens. (AFP)

La lourde défaite diplomatique d’Israël à l’Assemblée générale de l’ONU reflète un net changement de ton de plusieurs pays européens à l’égard de sa conduite à Gaza et dans les territoires occupés.

Cinq pays européens, dont l’Espagne, les Pays-Bas et l’Irlande, ont désormais interdit toutes les importations en provenance des colonies israéliennes illégales, tandis que les institutions de l’UE appellent à la suspension de certaines parties de l’accord d’association UE-Israël et envisagent des sanctions.

La Slovénie, l’Allemagne et l’Espagne ont commencé à imposer un embargo sur les armes à destination d’Israël. Cette vague de soutien en faveur de la reconnaissance de la Palestine est également perçue comme un moyen d’accroître la pression sur Israël pour qu’il mette fin à sa guerre à Gaza, déclenchée par l’attaque menée par le Hamas le 7 octobre 2023.

Nasira a déclaré que ce vote historique reflète aussi l’influence diplomatique croissante de l’Arabie saoudite, tant sur le plan régional qu’international, en particulier concernant la cause palestinienne.

« L’influence de l’Arabie saoudite repose sur son statut mondial, sa puissance économique, son symbolisme islamique, la notoriété du prince héritier Mohammed ben Salmane sur la scène internationale, ainsi que sur une diplomatie équilibrée et efficace du Royaume, qui résonne au niveau régional et international », a déclaré Nasira à Arab News.

Les efforts diplomatiques du Royaume ont été salués par les observateurs et analystes pour avoir relancé l’élan mondial en faveur de la solution à deux États, après des années de moindre attention avant la guerre à Gaza.

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Cette photo prise le 16 octobre 2024 montre le président français Emmanuel Macron (G) et le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman à Bruxelles. La France et l'Arabie saoudite ont initié ce qui est désormais connu comme la Déclaration de New York, appelant à un État palestinien indépendant, que l'Assemblée générale de l'ONU a adopté vendredi. (AFP)

L’élan s’appuie sur l’Initiative de paix arabe menée par l’Arabie saoudite, adoptée lors du sommet de la Ligue arabe à Beyrouth en 2002, qui proposait la normalisation entre les États arabes et Israël en échange d’un retrait complet d’Israël des territoires occupés — notamment la Cisjordanie, Gaza et le plateau du Golan — la création d’un État palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale, ainsi qu’une résolution juste de la question des réfugiés palestiniens.

La « Déclaration de New York » est perçue comme un consensus mondial autour de cette initiative, la positionnant efficacement comme la base d’un dialogue international renouvelé sur la solution à deux États.

Depuis le déclenchement de la guerre à Gaza, le Royaume a mené une action internationale pour obtenir un cessez-le-feu et jeter les bases d’une paix durable et stable en Palestine.

Au cours des deux dernières années, le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal, a porté l’engagement diplomatique du Royaume en parrainant des conférences internationales, en construisant de larges alliances avec des nations partenaires, et en fournissant un financement crucial pour l’aide alimentaire et médicale aux Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie.

En septembre 2024, le prince Faisal a annoncé la création de l’Alliance mondiale pour la mise en œuvre de la solution à deux États, mobilisant 90 États dans le but de mettre fin au conflit israélo-palestinien de longue date.

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Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Faisal bin Farhan Al-Saud, (G) et le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, président une conférence sur la Palestine et la solution à deux États à l'ONU, le 29 juillet 2025 à New York. (AFP)

Le Royaume a tenu des réunions de suivi à Riyad, Bruxelles et Oslo dans les mois suivants, se concentrant sur des points d’action concrets identifiés par les participants.

Ce même mois, le prince héritier Mohammed ben Salmane a exclu tout accord de normalisation saoudien avec Israël sans la création d’un « État palestinien indépendant ».

Ces efforts diplomatiques ont culminé lors de la conférence saoudo-française à l’ONU en juillet, qui visait à établir un cadre politique clair, au-delà des simples déclarations, pour mettre fin à la guerre à Gaza et faire pression en faveur de la reconnaissance d’un État palestinien conformément aux résolutions de l’ONU.

Le succès de cette initiative a été souligné par le prince héritier Mohammed ben Salmane lors de son allocution mercredi devant le Conseil consultatif saoudien (Shoura), où il a déclaré que « la conférence internationale sur la mise en œuvre de la solution à deux États, tenue à New York, a permis une mobilisation sans précédent et renforcé le consensus mondial » autour de l’Initiative de paix arabe.

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Des manifestants brandissent des drapeaux palestiniens et tiennent une banderole sur laquelle on peut lire "Arrêtez d'affamer Gaza" au Palais de Westminster, qui abrite les Chambres du Parlement, dans le centre de Londres, le 4 juin 2025, lors d'une manifestation de soutien à Gaza. (AFP)

Il a déclaré que les efforts du Royaume ont porté leurs fruits en incitant davantage de pays à reconnaître la Palestine et en recueillant un soutien international accru en faveur de la mise en œuvre d'une solution à deux États, appelant d'autres pays à suivre cet exemple.

Condamnant les « crimes de famine et de déplacement forcé » d’Israël à Gaza, il a réitéré la position du Royaume selon laquelle « la terre de Gaza est palestinienne, et les droits de son peuple sont inébranlables, ne pouvant être ni ôtés par l’agression ni annulés par les menaces », tout en soulignant un soutien indéfectible au Qatar suite aux attaques israéliennes.

La région attend désormais les résultats du sommet d’urgence arabo-islamique, organisé par le Qatar dimanche, pour discuter d’une réponse collective à l’attaque israélienne contre Doha.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Sommet à Doha pour discuter de la riposte arabo-islamique à l’attaque israélienne contre le Qatar

Une photo prise le 15 octobre 2022 montre une vue de la ligne d'horizon de la capitale qatarie Doha. (AFP)
Une photo prise le 15 octobre 2022 montre une vue de la ligne d'horizon de la capitale qatarie Doha. (AFP)
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  • Un sommet arabo-islamique extraordinaire discutera de l’attaque israélienne contre l’État du Qatar ciblant des hauts responsables du Hamas

DUBAÏ : Le ministère des Affaires étrangères du Qatar a déclaré samedi qu’un sommet arabo-islamique d’urgence, qui se tiendra dans la capitale Doha, discutera d’un projet de résolution concernant l’attaque israélienne contre l’État du Golfe, selon l’Agence de presse du Qatar (QNA).

« Le sommet examinera un projet de résolution sur l’attaque israélienne contre l’État du Qatar, présenté par la réunion préparatoire des ministres des Affaires étrangères arabes et islamiques, prévue demain dimanche », a déclaré à la QNA le porte-parole du ministère, Majid ben Mohammed Al Ansari.

Le ministère avait annoncé plus tôt que Doha accueillerait un sommet arabo-islamique extraordinaire pour débattre de l’attaque israélienne contre l’État du Qatar visant des dirigeants de haut rang du Hamas.

Al Ansari a souligné que « la tenue de ce sommet arabo-islamique à ce moment précis revêt une importance particulière, car elle reflète la large solidarité arabe et islamique avec l’État du Qatar face à l’agression israélienne lâche ».

La réunion préparatoire des ministres des Affaires étrangères se tiendra dimanche. Le sommet débutera lundi.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Gaza : Israël affirme que 250 000 habitants ont fui la ville, 32 morts dans de nouvelles frappes

Les habitants de Gaza ont déclaré que le coût du voyage vers le sud était prohibitif et qu'il n'y avait plus d'espace pour planter des tentes dans les zones désignées. (AFP)
Les habitants de Gaza ont déclaré que le coût du voyage vers le sud était prohibitif et qu'il n'y avait plus d'espace pour planter des tentes dans les zones désignées. (AFP)
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  • Plus de 250 000 habitants auraient fui Gaza-ville ces dernières semaines, selon l'armée israélienne qui multiplie les frappes et ordonne des évacuations massives, malgré les risques humanitaires
  • La guerre, déclenchée après l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, a causé plus de 64 000 morts à Gaza selon le ministère de la Santé local

Jérusalem: L'armée israélienne a affirmé samedi que plus de 250.000 habitants avaient quitté ces dernières semaines la ville de Gaza vers d'autres secteurs du territoire palestinien, après une intensification des bombardements et raids israéliens.

De son côté, la Défense civile dans la bande de Gaza a fait état de cinq Palestiniens tués depuis l'aube dans les bombardements israéliens, au lendemain de la mort selon elle d'au moins 50 personnes à travers le territoire assiégé et dévasté par 23 mois de guerre.

"Selon les estimations de l'armée, plus d'un quart du million d'habitants de la ville de Gaza l'ont quittée pour leur propre sécurité", a déclaré le porte-parole arabophone de l'armée israélienne, Avichay Adraee, sur X.

Selon des estimations récentes de l'ONU, environ un million de Palestiniens vivent dans et autour de la ville de Gaza, la plus grande du territoire.

Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

L'armée dit vouloir prendre le contrôle de Gaza-ville, qu'elle présente comme l'un des derniers bastions du mouvement islamiste palestinien Hamas.

Samedi, l'armée de l'air israélienne a largué des tracts exhortant les habitants des quartiers ouest de la ville à les évacuer, alors que la Défense civile locale a fait état de frappes aériennes continues.

"L'armée agit avec force dans votre secteur et est déterminée à démanteler et à vaincre le Hamas", pouvait-on lire dans le tract. "Pour votre sécurité, évacuez immédiatement via la rue al-Rachid vers le sud (du territoire). Vous avez été prévenus."

Les forces israéliennes ont détruit plusieurs tours d'habitation à Gaza-ville ces derniers jours, l'armée affirmant son intention d'"intensifier le rythme (de ses) frappes ciblées (...) afin de nuire aux infrastructures terroristes du Hamas (...) et réduire la menace pour (ses) troupes".

De nombreux acteurs humanitaires jugent que le déplacement une nouvelle fois de la population du nord vers le sud du territoire est impossible et dangereux.

La guerre à Gaza a été déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre 2023 en Israël, qui a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des sources officielles israéliennes.

L'offensive israélienne menée en riposte à fait au moins 64.756 morts dans la bande de Gaza, selon des données du ministère de la Santé de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas. Elle a aussi dévasté le territoire palestinien et provoqué un désastre humanitaire.

L'ONU a déclaré la famine à Gaza. Israël, qui assiège le territoire, dément.