L'ascension irrésistible de Giorgia Meloni hante les marchés et Bruxelles

La chef du parti Frères d'Italie, Giorgia Meloni, le 22 septembre 2022, lors d'un rassemblement commun des partis de droite italiens Frères d'Italie (FdI), Ligue (Lega) et Forza Italia sur la Piazza del Popolo à Rome, en vue des élections générales du 25 septembre. (Photo par Andreas Solaro / AFP)
La chef du parti Frères d'Italie, Giorgia Meloni, le 22 septembre 2022, lors d'un rassemblement commun des partis de droite italiens Frères d'Italie (FdI), Ligue (Lega) et Forza Italia sur la Piazza del Popolo à Rome, en vue des élections générales du 25 septembre. (Photo par Andreas Solaro / AFP)
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Publié le Vendredi 23 septembre 2022

L'ascension irrésistible de Giorgia Meloni hante les marchés et Bruxelles

  • Bien placée pour devenir la prochaine Première ministre, la pasionaria de la droite italienne milite pour une «Europe confédérale» qui «respecte la souveraineté des Etats membres»
  • Elle réclame la renégociation du plan de relance post-Covid italien, financé à hauteur de près de 200 milliards d'euros par l'Europe, pour tenir compte de la flambée des coûts de l'énergie dans la foulée de la guerre en Ukraine

MILAN : La victoire apparemment inéluctable aux élections législatives en Italie de Giorgia Meloni, dirigeante du parti post-fasciste Fratelli d'Italia, préoccupe au plus haut point les marchés et Bruxelles, qui redoutent des remous dus à son discours eurosceptique et l'envolée du coût de l'énorme dette du pays.

Elle a eu beau afficher sa volonté de rompre avec un passé encombrant et enterrer son rêve de voir l'Italie sortir de l'euro, les inquiétudes persistent, d'autant qu'elle vient de réitérer son soutien au régime hongrois dirigé par l'ultranationaliste Viktor Orban.

«Je ne connais pas de souverainistes qui ne soient pas anti-institutions européennes. Donc ce qu'ils disent aujourd'hui n'a aucune importance», a assuré le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans début septembre dans un entretien au journal La Repubblica.

Si Giorgia Meloni s'affirme désormais «pro-européenne», elle a changé de ton lors d'un meeting électoral mi-septembre à Milan: «La fête est finie», l'Italie «va commencer à défendre ses intérêts nationaux» auprès de Bruxelles, «comme le font les autres».

- Renégocier le plan de relance -

Bien placée pour devenir la prochaine Première ministre, la pasionaria de la droite italienne milite pour une «Europe confédérale» qui «respecte la souveraineté des Etats membres» en leur laissant le soin de décider de la «politique de proximité» concernant directement les citoyens.

Dans cette optique, elle réclame la renégociation du plan de relance post-Covid italien, financé à hauteur de près de 200 milliards d'euros par l'Europe, pour tenir compte de la flambée des coûts de l'énergie dans la foulée de la guerre en Ukraine.

Or, le déboursement des fonds est lié à une série de réformes dont la mise en œuvre a été scrupuleusement respectée par le gouvernement sortant de Mario Draghi et qui semblent désormais compromises.

«Nous pourrions nous retrouver avec un sérieux conflit d'idées entre l'Italie, qui est de loin le plus grand bénéficiaire du plan de relance, et l'UE», redoute Nicola Nobile du cabinet Oxford Economics.

«Il y a beaucoup de risques, mais tout dépendra de savoir quelle Meloni dirigera le gouvernement, celle qui a attaqué l'Europe dans le passé ou celle qui prône désormais une approche plus modérée et pourrait poursuivre le statu quo en matière budgétaire», commente-t-il.

- Dérapage de la dette? -

Les inquiétudes sur un relâchement dans la mise en œuvre des réformes et un dérapage de la dette publique après les élections de dimanche ont déjà amené les agences de notation Standard & Poor's et Moody's à dégrader la perspective liée à la note de solvabilité du pays.

L'Italie croule sous une dette de plus de 2.700 milliards d'euros, soit quelque 150% du PIB, le ratio le plus élevé de la zone euro derrière la Grèce.

Sans surprise, la coalition des droites réclame une «révision des règles du Pacte de stabilité», suspendues en raison de la crise sanitaire, qui fixent un plafond de 3% du PIB pour le déficit et de 60% pour la dette.

S'il est légitime d'assouplir certains critères jugés obsolètes, «il serait politiquement suicidaire de se moquer de toutes les règles existantes», prévient Peter Bofinger, professeur d'économie de l'université de Würzburg.

«Au cas où l'Italie s'écarte du consensus européen» et ne respecte pas un minimum de discipline budgétaire, «même la Banque centrale européenne ne pourra pas l'aider», a-t-il déclaré.

- Promesses coûteuses -

Les promesses électorales de la coalition entre Fratelli d'Italia, la Ligue anti-immigration de Matteo Salvini et Forza Italia du conservateur Silvio Berlusconi pourraient avoir un effet néfaste sur les comptes publics.

«Leur programme est très vague et n'explique pas comment financer ces mesures», estime Nicola Nobile. Si elles étaient pleinement appliquées, le déficit public dépasserait 6% du PIB pendant les cinq prochaines années, «propulsant la dette publique déjà élevée à des niveaux insoutenables», d'après Oxford Economics.

La mesure phare, un impôt à taux unique, soit 15% pour la Ligue et 23% pour Forza Italia, pourrait coûter entre 20 et 58 milliards d'euros, selon l'Observatoire des comptes publics italiens. S'y ajoutent d'autres baisses d'impôts, des mesures de «paix fiscale» (amnisties) et le relèvement de la pension minimum.

Les investisseurs craignent qu'un tel gouvernement populiste termine comme ses prédécesseurs: celui de Silvio Berlusconi a ainsi dû démissionner en 2011, sous la pression des marchés et d'une envolée du coût de la dette.

Des craintes pour les droits civiques avec Meloni au pouvoir

De l'avortement au mariage de personnes de même sexe, les militants des droits civiques en Italie craignent un recul significatif avec la victoire attendue aux législatives de dimanche d'un parti d'extrême droite défendant des «valeurs familiales et traditionnelles».

Giorgia Meloni, 45 ans, qui a fait campagne sous la devise «Dieu, patrie et famille», pourrait devenir la première femme cheffe de gouvernement si son parti post-fasciste Fratelli d'Italia (FdI) l'emporte conformément aux sondages.

«Oui aux familles naturelles, non au lobby LGBT! Oui à l'identité sexuelle, non à l'idéologie du genre! Oui à la culture de la vie, non à l'abîme de la mort!», a crié une Giorgia Meloni survoltée lors d'un discours en juin.

Elle a par la suite ajusté un peu le tir, affirmant qu'elle «changerait le ton, pas le contenu» de ce discours prononcé lors d'un rassemblement du parti espagnol d'extrême droite Vox.

Une série de célébrités de la mouvance de gauche, dont l'influenceuse Chiara Ferragni, ont tiré la sonnette d'alarme concernant FdI et ses alliés, la Ligue anti-immigrés de Matteo Salvini et Forza Italia, le parti conservateur de Silvio Berlusconi.

«Il ne suffit pas de demander de nouveaux droits, nous devons nous battre pour nous assurer de garder ceux que nous avons déjà», a ainsi lancé jeudi dans le quotidien La Repubblica Pierpaolo Piccioli, directeur créatif de la maison de mode Valentino.

- Peppa Pig -

La récente attaque d'un haut responsable de FdI contre le dessin animé britannique Peppa Pig, qui a introduit un couple de mères lesbiennes dans un épisode, a suscité malaise et ironie.

Alessia et Eleonora, mères d'un garçon d'un an à Rome, racontent leur désarroi: «Nous faisons les mêmes choses que tous les parents (...) mais nous ne sommes pas reconnus comme une famille en Italie», a confié à l'AFP Alessia, préférant ne pas donner son nom de famille.

Le Parti démocrate (PD, centre-gauche) assure que le mariage homosexuel et l'adoption par des personnes du même sexe sont des priorités, et son leader Enrico Letta que le plus important pour les enfants est «d'être aimé».

Ils ont besoin «d'un père et d'une mère», a rétorqué Mme Meloni.

Le PD veut aussi donner la nationalité italienne aux enfants nés en Italie de parents migrants, une idée à laquelle la droite s'oppose.

- Droit à l'avortement -

Les craintes qu'un gouvernement dirigé par Mme Meloni puisse violer des principes fondamentaux de l'UE, comme cela s'est produit en Hongrie et en Pologne, sont probablement «exagérées», estime pour l'AFP Mabel Berezin, sociologue de l'université américaine Cornell.

Les risques pourraient être plus subtils, selon l'ex-commissaire européenne Emma Bonino, cheffe du parti +Europa.

L'avortement est ainsi devenu l'un des sujets les plus controversés de la campagne électorale, après les déclarations de Mme Meloni affirmant vouloir offrir un choix aux femmes hésitant à avorter: «Nous ne toucherons pas à la loi sur l'avortement, nous voulons juste que (les femmes) sachent qu'il y a d'autres options».

Giorgia Meloni va probablement tenir parole et ne pas criminaliser l'avortement, estime Mme Bonino, qui a fait de la prison dans les années 1970 en raison de son combat pour le légaliser.

Mais elle craint qu'elle «ne fasse pression pour que la loi (sur l'avortement) soit ignorée», exacerbant des problèmes qui existent déjà: difficulté à se procurer des pilules abortives ou à trouver des gynécologues disposés à effectuer l'avortement.

«Il y a des régions entières où (...) tous les gynécologues sont objecteurs de conscience» et refusent de pratiquer l'avortement, a rappelé Mme Bonino, citant la région des Marches (centre), dirigée par FdI.

- Valoriser les femmes -

Les partisans de Giorgia Meloni la voient comme un symbole de l'émancipation des femmes: une mère active, vivant en concubinage et sur le point de briser le plafond de verre politique.

Laura Boldrini, ex-présidente de la Chambre des députés, ne pense cependant pas qu'avec Mme Meloni au gouvernement «la vie des femmes va s'améliorer».

«Mme Meloni n'a jamais parlé d'affirmer les droits des femmes, de valoriser les femmes ou de briser les préjugés dont elles sont victimes», a-t-elle déploré cette semaine.

Giorgia Meloni, «violente» par nature, «a appris à parler de manière rassurante», a analysé Michela Murgia, écrivaine et activiste politique. L'Italie ferait bien de se souvenir de la Meloni «qui semblait possédée» au rassemblement de Vox et pourrait introduire «la même violence dans son pouvoir politique».


Allemagne: l'auteur syrien de l'attaque au couteau de Solingen condamné à perpétuité

Au premier soir du festival d'été de Solingen, l'agresseur avait frappé au hasard devant la scène où se déroulait un concert, visant "le cou et le haut du corps" des spectateurs, "principalement par derrière", selon l'accusation.  Il a ensuite pris la fuite, avant de se rendre le lendemain aux autorités. Le même jour, l'organisation Etat Islamique a revendiqué l'attaque. (AFP)
Au premier soir du festival d'été de Solingen, l'agresseur avait frappé au hasard devant la scène où se déroulait un concert, visant "le cou et le haut du corps" des spectateurs, "principalement par derrière", selon l'accusation. Il a ensuite pris la fuite, avant de se rendre le lendemain aux autorités. Le même jour, l'organisation Etat Islamique a revendiqué l'attaque. (AFP)
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  • Le condamné est originaire de la région de Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, bastion de cette organisation jihadiste pendant la guerre civile ayant démarré en 2011
  • Issa al Hasan était passé aux aveux à l'ouverture de son procès fin mai, admettant dans une déclaration lue par son avocat avoir "commis un crime grave"

DUSSELDORF: L'auteur syrien de l'attaque jihadiste au couteau dans la ville allemande de Solingen, qui avait fait trois morts lors de festivités en août 2024, a été condamné à la prison à perpétuité mercredi par le tribunal de Düsseldorf.

Cet attentat, et d'autres commis par des ressortissants étrangers, avait pesé sur les élections législatives de l'hiver suivant, qui ont vu un essor record du parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD).

Le tribunal a retenu la motivation islamiste de l'attaque, revendiquée par l'organisation jihadiste Etat islamique (EI), qui avait également fait huit blessés graves.

Selon le président du tribunal, Issa al Hasan, âgé de 27 ans, "approuvait les objectifs de l'État islamique" et a agi "en raison de ses convictions islamistes radicales".

Il voulait "répondre à l'appel des dirigeants de l'EI à commettre des attentats en Europe de l'Ouest", et ce afin notamment de "se venger pour les combattants de l'EI morts au combat", a-t-il aussi déclaré.

Le condamné est originaire de la région de Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, bastion de cette organisation jihadiste pendant la guerre civile ayant démarré en 2011.

Issa al Hasan était passé aux aveux à l'ouverture de son procès fin mai, admettant dans une déclaration lue par son avocat avoir "commis un crime grave".

"J'ai tué et blessé des innocents, pas des infidèles", avait-il déclaré.

En plus de la prison à vie, le tribunal a retenu la reconnaissance de la "gravité particulière de sa culpabilité", ce qui rend peu probable une éventuelle libération.

C'est la peine qu'avait requise le parquet fédéral, compétent pour les affaires de terrorisme.

Failles du règlement 

Au premier soir du festival d'été de Solingen, l'agresseur avait frappé au hasard devant la scène où se déroulait un concert, visant "le cou et le haut du corps" des spectateurs, "principalement par derrière", selon l'accusation.

Il a ensuite pris la fuite, avant de se rendre le lendemain aux autorités. Le même jour, l'organisation Etat Islamique a revendiqué l'attaque.

Celle-ci avait aussi mis en lumière les failles du règlement européen de Dublin, selon lequel le premier pays de l'Union dans lequel est entré un étranger est responsable de sa demande d'asile.

Issa Al Hassan se trouvait en situation illégale en Allemagne et aurait dû être expulsé vers la Bulgarie où son arrivée avait été enregistrée en 2022, selon les lois européennes.

Mis sous pression par l'extrême droite et les conservateurs, le gouvernement de centre-gauche d'Olaf Scholz avait, après l'attentat, durci la législation sur le port de couteaux et rétabli des contrôles à l'ensemble de ses frontières pour lutter contre l'immigration illégale.

L'immigration et la sécurité ont été des thèmes majeurs de la campagne législative qui a suivi.

Selon un sondage pour le compte de la chaîne publique WDR, près d'un habitant de Solingen sur quatre assure avoir durci ses positions sur l'immigration de réfugiés après l'attaque.

Vent favorable pour l'AfD 

Depuis un an, d'autres attaques au couteau ou à la voiture-bélier ont choqué l'Allemagne et favorisé les discours anti-immigration.

Pour les attaques au couteau visant un rassemblement anti-Islam à Mannheim (ouest), qui a fait un mort en mai 2024, et celle visant un groupe d'écoliers, qui avait fait deux morts en janvier 2025 à Aschaffenbourg (sud), les suspects sont des ressortissants afghans.

Si les conservateurs (CDU) du chancelier Friedrich Merz ont remporté les législatives de février, le scrutin a été marqué par le score record du parti d'extrême droite AfD, arrivé deuxième avec un cinquième des voix.

Aujourd'hui, la formation anti-immigration fait quasiment jeu égal avec la CDU dans les sondages.

Pour enrayer cette ascension, Friedrich Merz a opéré un nouveau tour de vis sur la politique migratoire, instaurant notamment le refoulement des demandeurs d'asile aux frontières.

En juillet, sa coalition a organisé le rapatriement de 81 condamnés afghans dans leur pays, malgré la présence au pouvoir des talibans. L'initiative a aussitôt été dénoncée par l'ONU.


Deal avec Trump: von der Leyen attendue au tournant au Parlement européen

Le président américain Donald Trump (à droite) et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen (à gauche) s'adressent à la presse après avoir convenu d'un accord commercial entre les deux économies à l'issue de leur rencontre, à Turnberry, au sud-ouest de l'Écosse, le 27 juillet 2025. (AFP)
Le président américain Donald Trump (à droite) et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen (à gauche) s'adressent à la presse après avoir convenu d'un accord commercial entre les deux économies à l'issue de leur rencontre, à Turnberry, au sud-ouest de l'Écosse, le 27 juillet 2025. (AFP)
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  • Les eurodéputés attendent des explications de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen mercredi à Strasbourg sur l'accord commercial avec Donald Trump

STRASBOURG: Les eurodéputés attendent des explications de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen mercredi à Strasbourg sur l'accord commercial avec Donald Trump qui laisse nombre d'entre eux amers.

Elle devrait aussi s'exprimer sur la situation géopolitique particulièrement tendue, après des opérations de la Pologne d'interception de drones "hostiles" entrés dans son espace aérien au cours d'une attaque russe contre l'Ukraine voisine.

Sur l'accord commercial avec Trump, la cheffe de l'exécutif européen aura fort à faire pour rassurer les parlementaires lors de ce traditionnel "discours sur l'état de l'Union" durant lequel elle doit présenter ses grandes orientations politiques.

"C'est une rentrée difficile. L'Europe est perçue comme assez faible", convient une source au sein de la Commission. Mais "sur Trump, le juge de paix, ce n'est pas l'accord, c'est l'après. S'il ne respecte pas l'accord, il faudra être très dur", insiste ce responsable, sous couvert d'anonymat.

La fébrilité reste de mise à Strasbourg comme à Bruxelles plus d'un mois après la poignée de main entre Donald Trump et Ursula von der Leyen.

D'autant que le milliardaire américain multiplie les menaces contre la législation européenne sur le numérique, dont l'amende géante infligée par la Commission européenne à Google vendredi, qu'il a fustigée.

Ursula von der Leyen aura "probablement un ton plus offensif" pour "essayer de faire passer la pilule, de vendre son accord" aux eurodéputés, grince Marina Mesure, membre du groupe de la gauche radicale.

- "Humiliation" -

Le Parlement européen a très mal accueilli ce "deal" avec Donald Trump scellé fin juillet: 15% de taxes américaines avec des exceptions pour des produits de l'UE comme l'aéronautique, assorties de promesses de l'Europe d'acheter massivement de l'énergie américaine et de réduire des taxes sur une série de produits made in USA.

"Tout le monde s'accorde sur le fait que c'est un mauvais deal" qui "traduit la faiblesse de l'Europe", tranche la cheffe du groupe centriste Valérie Hayer.

Mais Ursula von der Leyen avait un "mandat" d'Etats membres comme l'Allemagne et l'Italie, et les industriels voulaient de la prévisibilité pour les mois qui viennent, reconnaît-elle.

Plus de la moitié des Européens (52%) ont ressenti de "l'humiliation" avec cet accord, selon un sondage publié dans le média Le Grand Continent et réalisé par l'institut Cluster17 dans cinq pays.

Les eurodéputés devront se prononcer dans les semaines qui viennent sur l'un des volets de l'accord, la baisse des taxes européennes. Les centristes entretiennent le suspense et les sociaux-démocrates menacent de voter contre.

L'argument "selon lequel un mauvais accord vaut mieux que rien du tout est totalement inacceptable", a tonné mardi la cheffe du groupe social-démocrate, Iratxe Garcia Pérez.

La droite, dont est issue Ursula von der Leyen, assume quant à elle un vote en faveur de cet accord, même à contrecœur. Les droits de douane, "ça ne nous fait pas plaisir", mais il faut de la stabilité et s'adapter à la "réalité" voulue par le président américain, a défendu le chef du Parti populaire européen (PPE), Manfred Weber.

Même position chez les eurodéputés italiens du parti de Giorgia Meloni, qui siègent dans l'un des trois groupes d'extrême droite du Parlement.

En matière diplomatique, Ursula von der Leyen sera également très attendue sur la guerre à Gaza, au lendemain de raids israéliens au Qatar visant des responsables du Hamas, mouvement islamiste palestinien.

Depuis des mois, l'Union européenne semble paralysée diplomatiquement tant ses divisions sont nombreuses.

Les dissonances se manifestent jusqu'au sein de la Commission, où la socialiste espagnole Teresa Ribera a qualifié la situation à Gaza de "génocide", déplorant l'inaction des 27 Etats membres.

"Débattre des mots divise l'Europe. Ca ne nous aide pas, ça ne nous apporte pas plus de crédibilité", lui a rétorqué Manfred Weber.

Sur le dossier ukrainien, Ursula von der Leyen ne manquera pas à l'inverse de souligner la mobilisation des Européens.

Une série de pays dont la France et l'Allemagne ont promis des garanties de sécurité à Kiev si le conflit avec la Russie s'arrête: un soutien militaire au sol, en mer ou dans les airs afin de dissuader Moscou d'attaquer à nouveau.

En attendant, l'UE prépare un 19e paquet de sanctions, qui pourrait cibler certains pays achetant des hydrocarbures russes, selon des diplomates à Bruxelles.


La flottille pour Gaza déterminée à partir malgré une «attaque de drone» au large de Tunis

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  • La Garde nationale tunisienne, l'équivalent de la gendarmerie, a elle démenti toute frappe de drone, assurant que selon ses premières constatations, "aucun" engin n'avait été détecté
  • Elle a jugé possible que le feu ait été déclenché par un mégot de cigarette

TUNIS: La flottille pour Gaza s'est dite mardi plus déterminée que jamais à mettre le cap vers le territoire palestinien assiégé par Israël, malgré "une attaque de drone" dont elle affirme avoir été victime dans la nuit au large de Tunis.

Vidéos à l'appui, la "Global Sumud Flotilla", qui doit prendre la mer avec des militants et de l'aide humanitaire afin de "briser le blocus israélien", a dit qu'un de ses bateaux avait été visé par un drone alors qu'il était ancré au large de Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La Garde nationale tunisienne, l'équivalent de la gendarmerie, a elle démenti toute frappe de drone, assurant que selon ses premières constatations, "aucun" engin n'avait été détecté. Elle a jugé possible que le feu ait été déclenché par un mégot de cigarette.

La flottille a affirmé que les six personnes à bord du "Family" étaient saines et sauves, dénonçant "des actes d'agression visant à faire dérailler (sa) mission".

Charge explosive 

Interrogé par l'AFP sur l'origine de l'attaque rapportée par la flottille, le militant palestinien Saif Abukeshek a indirectement impliqué Israël.

"Aucune partie n'a intérêt à empêcher la flottille (de partir), à part l'Etat occupant", a-t-il déclaré.

L'AFP a sollicité l'armée israélienne pour un commentaire, sans réponse dans l'immédiat.

La Belgique a réclamé une enquête "complète et transparente" sur l'incident.

Le militant portugais Miguel Duarte, qui se trouvait à bord du "Family", a affirmé mardi à la presse dans le centre-ville de Tunis avoir vu un drone lâcher une charge explosive.

"J'étais sur le pont, à l'arrière du navire, et j’ai entendu un drone. Je suis sorti (...) et j'ai vu un drone qui planait à environ 3 ou 4 mètres au-dessus de ma tête", a-t-il décrit.

"J'ai appelé les autres membres de l'équipage. Puis nous avons vu le drone se déplacer vers l'avant du pont. Il est resté quelques secondes au-dessus d'un paquet de gilets de sauvetage, puis a lâché une bombe. La bombe a explosé et il y a eu de grandes flammes, un incendie s'est déclaré immédiatement", a-t-il ajouté.

Dans l'une des vidéos publiées par la flottille, présentée comme ayant été prise depuis un autre bateau, on voit une masse lumineuse frapper un navire.

Dans une autre vidéo, provenant d'une caméra de surveillance du bateau lui-même selon la flottille, on entend un vrombissement. Puis on peut voir un homme lever les yeux, s'exclamer et reculer avant qu'une explosion ne se fasse entendre. Un éclair de lumière illumine ensuite la zone.

"Le message est très clair: nous restons soudés et déterminés à partir demain" mercredi, a dit à Tunis l'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan, tandis qu'un organisateur tunisien, Ghassen Henchiri, affirmait que les militants étaient "plus déterminés (que jamais) à briser le blocus contre Gaza".

"Sûreté de l'Etat" 

Interrogés par la presse sur la version de l'incident donnée par les autorités tunisiennes, les membres de la flottille ont dit préférer ne pas s'exprimer en raison de la sensibilité du sujet.

"Nous n'allons pas présenter de données sur cette affaire (...) qui touche la sûreté de l'Etat", a ainsi dit le militant tunisien Wael Naouar.

"S'il est confirmé qu'il s'agit d'une attaque de drone, ce serait (...) une agression contre la Tunisie et la souveraineté tunisienne", a dit dans la nuit la rapporteure de l'ONU Francesca Albanese, qui vit à Tunis, devant des journalistes au port.

Le port de Sidi Bou Saïd se trouve non loin du palais présidentiel de Carthage.

La bande de Gaza est le théâtre d'une guerre dévastatrice, déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023.

Les Nations unies ont déclaré en août l'état de famine à Gaza, avertissant que 500.000 personnes se trouvent en situation "catastrophique".

Des navires de la Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe) sont arrivés ces derniers jours en Tunisie d'où ils doivent partir cette semaine pour Gaza.

Ils avaient initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre afin d'y acheminer de l'aide humanitaire et "briser le blocus israélien", après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.