Au Liban, les pluies portent le coup de grâce aux maisons ravagées par l'explosion

Un ancien bâtiment de Beyrouth déjà gravement endommagé par l’explosion au port en août dernier (Photo, Joseph EID/AFP).
Un ancien bâtiment de Beyrouth déjà gravement endommagé par l’explosion au port en août dernier (Photo, Joseph EID/AFP).
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Publié le Dimanche 08 novembre 2020

Au Liban, les pluies portent le coup de grâce aux maisons ravagées par l'explosion

  • Quelques structures touchées par l'explosion qui se sont effondrées cette semaine avec le début des vents violents et des fortes pluies
  • Au moins 90 autres maisons traditionnelles endommagées par l'explosion sont menacées par les intempéries, a indiqué le ministre démissionnaire de la Culture, Abbass Mortada

BEYROUTH: Norma Mnassakh quittait son appartement de Beyrouth lorsqu'un nuage de poussière s'est élevé d'un immeuble voisin. En retournant sur ses pas, elle a constaté qu'une bâtisse traditionnelle, très endommagée par l'explosion tragique du 4 août, s'était partiellement effondrée en raison des pluies.

« Je suis née et j'ai grandi ici. Ce quartier c'est chez moi. J'en connais chaque recoin. Je perds tous les repères avec lesquels j'ai grandi », raconte cette quinquagénaire, émue, quelques heures seulement après l'effondrement du bâtiment, devant un trottoir couvert de gravats.

Rmeil 24, bâtiment de l'époque ottomane situé dans le quartier d'Achrafieh, fait partie des quelques structures touchées par l'explosion qui se sont effondrées cette semaine avec le début des vents violents et des fortes pluies. 

Au moins 90 autres maisons traditionnelles endommagées par l'explosion sont menacées par les intempéries, a indiqué le ministre démissionnaire de la Culture, Abbass Mortada. 

La catastrophe du port, causée de l'aveu des autorités par le stockage sans mesures de précaution de grandes quantités de nitrate d'ammonium, a fait plus de 200 morts et ravagé des quartiers entiers de la capitale, endommageant ou détruisant 70 000 unités résidentielles, selon l'ONU. 

Les pluies hivernales pourraient achever ces structures brinquebalantes. 

« C'est notre héritage, notre patrimoine. C'est tellement dommage qu'il soit anéanti de cette manière », regrette Carla, 52 ans, qui a grandi près du bâtiment Rmeil 24.

Trop tard

Quasiment abandonné depuis plus de 40 ans, le bâtiment abritait encore au rez-de-chaussée la boutique Hanna Mitri, un des glaciers artisanaux les plus réputés de la capitale libanaise. 

Prisée par les touristes et les habitants du quartier, cette enseigne traditionnelle avait dû se délocaliser après l'effondrement du plafond sous l'effet de l'explosion. 

Les fortes intempéries jeudi soir ont élargi les « cavités des toitures » causant une « destruction partielle » du bâtiment, explique l'architecte Yasmine Macaron, membre de l'Association pour la protection des sites et anciennes demeures au Liban (APSAD). 

« Nous avons eu dix jours d'accalmie et de soleil. Nous aurions pu entamer les premières actions de sauvetage et probablement pu le sauver partiellement » si le propriétaire n'avait pas tardé à accorder son feu vert aux travaux de consolidation, affirme l'architecte. 

Face à une crise économique sans précédent, l'Etat libanais compte plus que jamais sur un financement externe pour sauver son patrimoine. 

Mais les donateurs, sous la houlette de la France, se sont engagés à contourner les institutions publiques, accusées de corruption et d'incompétence.  

Les aides, transférées à des ONG locales, arrivent au compte-goutte et sont insuffisantes, voire décevantes, déplore Mortada. Et « en tant que ministère, nous souffrons d'un manque de capacités », notamment en matière de ressources humaines, admet-il. 

« Se tourner vers Dieu »

Dans le quartier sinistré de Gemmayzé, situé à quelques encablures du site de l'explosion, des camions chargés de panneaux d'aluminium traversent une rue essaimée de bâtisses en ruines. 

Ici, les ouvriers sont plus nombreux que les piétons qui passent à la hâte devant des structures vacillantes. 

Postés devant un bâtiment très médiatisé en septembre car une équipe de secouristes chiliens avait cru détecter un signe de vie sous les décombres, les travailleurs s'attèlent à déblayer les gravats. 

Les pluies diluviennes lui ont assené le coup de grâce. 

À quelques kilomètres de là, le quartier populaire de Karantina est désormais une zone à très haut risque. 

Soufflées par l'explosion, quelques bâtisses tiennent à peine debout. Mercredi, l'une d'elles s'est écroulée en raison des intempéries. 

Deux jours plus tard, des bénévoles d'une association caritative locale s'attelaient à déloger de grands blocs de béton échoués au sol. 

Des policiers dépêchés sur les lieux observaient les ouvriers fortifier les murs d'un autre bâtiment frappé de plein fouet par l'explosion. 

Le secteur a été bouclé à l'aide de rubans jaune et rouge, tandis que des panneaux placés aux entrées d'immeubles avertissent les passants contre un possible effondrement. 

Les larmes aux yeux, un réfugié syrien ayant requis l'anonymat pleure la perte de son appartement. « Il n'y a rien à dire. Nous ne pouvons nous tourner que vers Dieu. »


Bethléem renoue avec l'esprit de Noël à la faveur de la trêve à Gaza

Vue générale de la place de la Nativité avec des pèlerins et des fidèles avant la messe de minuit à l'église de la Nativité à Bethléem, en Cisjordanie occupée par Israël, le 24 décembre 2025. (AFP)
Vue générale de la place de la Nativité avec des pèlerins et des fidèles avant la messe de minuit à l'église de la Nativité à Bethléem, en Cisjordanie occupée par Israël, le 24 décembre 2025. (AFP)
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  • À Bethléem, Noël retrouve une dimension festive après deux ans de guerre, porté par un message de paix, de solidarité et de renouveau, malgré une crise humanitaire persistante à Gaza
  • Du Vatican au Moyen-Orient, les célébrations de Noël sont marquées par des appels forts à la justice, à la trêve et à l’espérance dans un monde traversé par les conflits

BETHLÉEM: Bethléem, ville de Cisjordanie occupée et berceau du christianisme, a célébré mercredi son premier Noël festif depuis le début de la guerre à Gaza, alors qu'à des milliers de kilomètres de là, le pape Léon XIV célébrait au Vatican la première messe de Noël de son pontificat.

Sous les ors de la basilique Saint-Pierre de Rome, devant les cardinaux, évêques, diplomates et environ 6.000 fidèles, le pape a délivré dans son homélie un message de "charité et d'espérance" face aux dérives d'une "économie faussée".

Le chef de l'Eglise catholique devrait renouveler jeudi, en prononçant sa bénédiction "Urbi et Orbi" (à la ville et au monde) ses appels à la paix. Mardi soir, il avait demandé une trêve d'un jour pour Noël dans le monde entier, disant regretter le fait que "la Russie semble avoir rejeté la demande de trêve".

A Bethléem, des centaines de fidèles se sont massés à l'approche de minuit dans la basilique de la Nativité, comble au point qu'ils étaient nombreux à être assis à même le sol.

Les célébrations de Noël de ces deux dernières années y avaient été ternies par la guerre dévastatrice à Gaza déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas le 7 octobre 2023.

Par solidarité avec les Palestiniens du territoire, les festivités avaient été annulées mais cette année, avec la trêve entrée en vigueur à Gaza en octobre, l'immense sapin de Noël s'est de nouveau illuminé devant la basilique de la Nativité, construite sur la grotte où la tradition chrétienne situe la naissance du Christ.

- "Solidarité" et "justice" -

Le patriarche latin de Jérusalem, le cardinal Pierbattista Pizzaballa, arrivé mercredi, y a délivré lors de la messe une homélie pour la paix, l'espoir et le renouveau, face aux décisions politiques et équilibres de pouvoirs qui "semblent souvent déterminer le destin des peuples".

"Noël, cependant, nous invite à regarder au-delà de la logique de la domination, à redécouvrir le pouvoir de l'amour, de la solidarité et de la justice", a dit le cardinal, qui avait célébré une messe à Gaza dimanche.

Le vice-président de l'Autorité palestinienne, Hussein al-Cheikh, était présent à la messe de Bethléem.

Dans la journée, des centaines de personnes ont envahi les rues de la ville pour assister au défilé des scouts sur l'emblématique place de la Mangeoire, égrenant les chants traditionnels.

"C'est une journée pleine de joie, parce qu'avant on ne pouvait pas célébrer à cause de la guerre", dit à l'AFP Milagros Anstas, 17 ans, dans son uniforme bleu et jaune.

Des hommes déguisés en Père Noël vendaient des pommes d'amour et des jouets, tandis que des familles se faisaient photographier devant une crèche encadrée par une étoile géante.

"Je suis venue en Terre sainte pour réaliser le rêve de toute une vie : passer Noël ici", a déclaré Ursula Whalen, venue de Caroline du Nord, aux Etats-Unis.

- Crise humanitaire -

Comme ailleurs au Moyen-Orient, les chrétiens représentent une minorité en Terre sainte, avec une communauté de 185.000 personnes en Israël et 47.000 dans les Territoires palestiniens.

Malgré l'esprit de fête qui règne dans la ville, la municipalité de Bethléem a tenu à tempérer le faste des célébrations. Car en dépit du cessez-le-feu, les Palestiniens de Gaza restent frappés par une grave crise humanitaire.

La grande majorité des plus de 2 millions de Gazaouis ont été déplacés par le conflit et vivent dans des conditions très difficiles. Des centaines de milliers d'entre eux sont encore sous des tentes, impuissants face aux pluies hivernales.

Carmelina Piedimonte, venue d'Italie avec un groupe catholique, a estimé qu'il était essentiel que les pèlerins et les touristes reviennent dans la ville sainte afin d'aider à relancer son économie en difficulté, qui dépend quasi exclusivement du tourisme.

En Syrie, la communauté chrétienne de Damas a fêté Noël sous haute surveillance dans la vieille ville, après un attentat suicide perpétré en juin dans une église de la capitale.

En Australie, les festivités sont particulièrement assombries par l'attentat antisémite survenu le 14 décembre sur la plage de Bondi, à Sydney.

"Noël sera différent cette année", a écrit sur X le Premier ministre Anthony Albanese, évoquant "une profonde tristesse".


Le chef d'état-major libyen est mort dans un "accident" d'avion en Turquie (officiel)

Photo prise et diffusée par le ministère turc de la Défense le 23 décembre 2025, montrant le chef d'état-major libyen, le général Muhammad Ali Ahmad Al-Haddad. (AFP/ministère turc de la Défense)
Photo prise et diffusée par le ministère turc de la Défense le 23 décembre 2025, montrant le chef d'état-major libyen, le général Muhammad Ali Ahmad Al-Haddad. (AFP/ministère turc de la Défense)
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  • Le chef d’état-major libyen Mohamed al-Haddad et plusieurs hauts responsables militaires sont morts dans un accident d’avion après leur départ d’Ankara
  • Les autorités turques évoquent une urgence liée à un dysfonctionnement électrique ; la Libye observe trois jours de deuil national et a dépêché une délégation pour enquêter

TRIPOLI: Le chef d'état-major libyen et plusieurs autres responsables militaires sont morts dans un "accident" d'avion après avoir quitté la capitale turque Ankara, où ils étaient en visite, a annoncé mardi soir le Premier ministre libyen, Abdelhamid Dbeibah.

"C'est avec une profonde tristesse et une grande affliction que nous avons appris la nouvelle du décès du chef d'état-major général de l'armée libyenne, le général de corps d'armée Mohamed Al-Haddad (...), à la suite d'une tragédie et d'un accident douloureux lors de (son) retour d'une mission officielle dans la ville turque d'Ankara", a déclaré M. Dbeibah sur sa page officielle sur Facebook.

Les autorités turques ont annoncé que l'épave de l'avion qui le transportait avait été retrouvée. Elles avaient auparavant indiqué que le contact avait été perdu avec l'appareil moins de 40 minutes après son décollage d'Ankara.

Le général Mohamad al-Haddad, originaire de Misrata (ouest), avait été nommé à ce poste en août 2020 par l'ancien chef du gouvernement Fayez al-Sarraj.

Plusieurs autres responsables militaires se trouvaient à bord selon le Premier ministre libyen: le chef d'état-major de l'armée de terre, le général Al-Fitouri Ghraybel, le directeur de l'Autorité de l'industrie militaire, Mahmoud Al-Qatioui, et le conseiller du chef d'état-major, Mohamed Al-Assaoui Diab.

Un photographe, Mohamed Omar Ahmed Mahjoub, les accompagnait.

M. Dbeibah a déploré une "grande perte pour la patrie"". "Nous avons perdu des hommes qui ont servi leur pays avec loyauté et dévouement", a-t-il noté.

Le gouvernement d'union nationale (GNU) de M. Dbeibah, basé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale, a décrété un deuil national de trois jours.

Il a aussi demandé au ministère de la Défense d'envoyer une délégation officielle à Ankara pour faire la lumière sur les circonstances de l'incident, selon un communiqué du gouvernement.

L'appareil "a signalé une urgence due à un dysfonctionnement électrique au contrôle aérien et a demandé un atterrissage d'urgence", a précisé la présidence turque.

Le maréchal Khalifa Haftar, l'homme fort de l'Est libyen, a de son côté présenté ses condoléances et dit sa "profonde tristesse".


Le ministre israélien de la Défense promet de ne "jamais quitter" Gaza

Des enfants jouent dans le camp de Nuseirat pour Palestiniens déplacés, dans le centre de la bande de Gaza, le 22 décembre 2025. (Photo : Eyad Baba / AFP)
Des enfants jouent dans le camp de Nuseirat pour Palestiniens déplacés, dans le centre de la bande de Gaza, le 22 décembre 2025. (Photo : Eyad Baba / AFP)
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  • Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré qu’Israël « ne quitterait jamais Gaza » et évoqué la création d’avant-postes, avant que son ministère ne précise qu’il n’y a aucune intention de recolonisation
  • Ces propos interviennent alors qu’une trêve fragile est en vigueur et que les médiateurs appellent à la mise en œuvre du plan Trump, qui prévoit un retrait complet israélien de Gaza

JERUSALEM: Le ministre de la Défense israélien Israël Katz a affirmé mardi qu'Israël "ne quitterait jamais Gaza", évoquant la possible création d'avant-postes dans le territoire palestinien ravagé par la guerre, avant que ses services ne modèrent ses propos.

"Nous sommes au cœur de Gaza et nous ne quitterons jamais Gaza", a déclaré M. Katz en déplacement dans la colonie de Beit-El en Cisjordanie occupée, lors d'un discours filmé par des médias israéliens.

"Nous sommes là-bas pour empêcher ce qui s'est passé" de se reproduire, a-t-il ajouté, en référence à l'attaque meurtrière du Hamas palestinien en Israël le 7 octobre 2023.

M. Katz a évoqué l'installation d'avant-postes dans le nord de Gaza, pour remplacer des colonies évacuées par Israël lors de son retrait unilatéral de 2005, citant le modèle de "Nahal", associant présence militaire et implantation agricole.

"Au moment opportun (...) nous établirons dans le nord de Gaza, des avant-postes Nahal à la place des communautés (des anciennes colonies) qui ont été déracinées", a-t-il dit.

Ses services ont rapidement tempéré ses propos, assurant qu'ils "s'inscrivaient exclusivement dans un contexte sécuritaire."

"Le gouvernement n'a aucune intention d'établir des colonies dans la bande de Gaza", selon un communiqué.

Les déclarations du ministre interviennent dans le contexte d'une fragile trêve entrée en vigueur le 10 octobre entre Israël et le Hamas, sous l'égide de Washington et de médiateurs régionaux.

Les pays médiateurs --Qatar et Égypte-- appellent à la mise en œuvre de la deuxième phase du plan de paix du président américain Donald Trump. Cette étape prévoit notamment un retrait complet des forces israéliennes de la bande de Gaza, et le plan stipule qu'"Israël ne va ni occuper ni annexer Gaza."

Les propos de M. Katz ont suscité de vives critiques dans l'opposition.

"Le gouvernement vote d'une main en faveur du plan Trump, et de l'autre il vend des fables sur des centres de peuplement isolés à Gaza", a assené sur X Gadi Eizenkot, ancien ministre et ancien chef d'état-major.

Jeudi dernier, quelques dizaines d'Israéliens ont pénétré illégalement dans la bande de Gaza, en violation des consignes de l'armée, et y ont planté symboliquement un drapeau israélien, pour appeler à la réoccupation et à la recolonisation du territoire palestinien, réclamée notamment par les ministres d'extrême droite du gouvernement Netanyahu.