Budget: Bataille rangée à l'Assemblée, avec le couperet du 49.3

Une vue générale lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris le 4 octobre 2022. (Photo de Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
Une vue générale lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris le 4 octobre 2022. (Photo de Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
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Publié le Mardi 11 octobre 2022

Budget: Bataille rangée à l'Assemblée, avec le couperet du 49.3

  • Les députés démarrent lundi dans l'hémicycle l'examen tumultueux du projet de budget 2023, un texte que le gouvernement se prépare déjà à faire passer sans vote, faute de majorité absolue pour les macronistes
  • C'est tout un marathon budgétaire qui s'engage jusqu'à décembre, nimbé des incertitudes de cette nouvelle Assemblée bouillonnante, depuis les élections législatives de juin qui ont privé Emmanuel Macron de majorité absolue

PARIS: Quand le couperet du 49.3 tombera-t-il? L'Assemblée nationale a entamé lundi l'examen du projet de budget 2023, que le gouvernement se prépare à faire adopter sans vote en cas de "blocage", un "passage en force" dénoncé d'avance par les oppositions.

En l'absence de majorité absolue pour les macronistes, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a appelé à "discuter intensément et sereinement cette semaine" afin d'éviter une "bataille rangée" dans l'hémicycle.

Le locataire de Bercy a insisté sur la "protection" des Français face à l'inflation. Il a aussi défendu la poursuite de la "politique de l'offre" par la baisse des "impôts de production" des entreprises, dans un long développement sur les dangers que fait peser la flambée des prix de l'énergie sur l'industrie française.

Dans un hémicycle pas tout à fait rempli, M. Le Maire s'est tourné sans les nommer vers les députés de droite LR, leur suggérant de "rester fidèles à leurs convictions, plutôt que de faire bloc avec la Nupes ou le Rassemblement National". Et il a reproché aux oppositions l'adoption en commission de "plus de 7 milliards d'euros de dépenses supplémentaires".

Avec plus de 3.000 amendements sur ce premier volet du budget dédié aux recettes, son collègue des Comptes publics, Gabriel Attal, a pointé un risque de "blocage": "Nous ne pouvons accepter que le débat s'enlise", a-t-il prévenu.

Le président de la commission des Finances, l'insoumis Eric Coquerel, a demandé "solennellement au gouvernement de ne pas mettre en œuvre le 49.3", cet outil de la Constitution qui permet à l'exécutif de faire passer un texte sans vote, à moins qu'une motion de censure ne soit adoptée.

"Le débat doit avoir lieu", a martelé le député LFI, en dénonçant "la plus grande austérité de la Ve République". La coalition de gauche Nupes appelle à une "marche contre la vie chère" dimanche prochain à Paris.

"Quand est-ce qu'une manifestation a rempli le frigo des Français?", a rétorqué Gabriel Attal.

Dans une ambiance parfois agitée, les députés ont repoussé d'entrée deux motions de rejet déposées par LFI.

Les élus LR s'y sont opposés, pour "aller au bout des débats", selon Véronique Louwagie, qui s'alarme du "dérapage de la dépense publique".

À l'extrême droite, Marine Le Pen a revendiqué une "opposition constructive", tout en reprochant au gouvernement de "subir l'inflation", dans une "atmosphère de fin de règne".

«On avisera»

Avant de s'atteler au projet de loi de finances (PLF) lui-même, l'Assemblée nationale se penche sur la trajectoire budgétaire 2023-2027. Ce texte de programmation a été rejeté la semaine dernière en commission au grand dam du gouvernement, qui redoute des conséquences pour les versements de fonds européens à la France.

Les députés commenceront au mieux mardi à s'attaquer aux amendements du PLF, qui comprend notamment un "bouclier tarifaire" de 45 milliards d'euros face à l'explosion des prix de l'énergie.

Les oppositions ont exclu de soutenir ce budget. Et les "dialogues de Bercy", organisés en septembre par le gouvernement avec des députés de tous bords, n'y ont rien changé.

Le recours à l'article 49.3 de la Constitution semble donc inéluctable. Interrogée sur RTL, la Première ministre Elisabeth Borne a assuré être "dans une posture de dialogue", mais "s'il doit y avoir des blocages (...), on avisera".

Le cap fixé est de contenir le déficit public à 5% du PIB, malgré le "bouclier tarifaire", une augmentation des enseignants ou la création de plus de 10.000 postes de fonctionnaires, dont 3.000 policiers et gendarmes.

«Profiteurs de crise»

L'idée de taxer les "profiteurs de crise" va de nouveau électriser l'hémicycle. La gauche propose une taxe sur les bénéfices exceptionnels des plus grandes entreprises.

Le RN pousse également pour la taxation des "superprofits", mais la majorité écarte l'idée d'un nouvel impôt visant tous les secteurs économiques et renvoie à l'accord européen pour mettre à contribution les énergéticiens.

Le gouvernement porte deux amendements afin de le transcrire en France : le plafonnement des revenus de production de l'électricité et "la création d'une contribution temporaire de solidarité" des entreprises du pétrole, du charbon, du raffinage et du gaz.

A propos des jets privés, de plus en plus décriés, l'exécutif compte soutenir un amendement de la majorité visant à aligner la taxation avantageuse du kérosène de ces avions sur celle des autres carburants.

Et face à la grogne des collectivités, alarmées par l'inflation, Elisabeth Borne a promis vendredi une hausse de leur dotation globale de fonctionnement (DGF), à 320 millions d'euros au lieu des 210 millions annoncés initialement.


Droit du travail: le gouvernement se donne jusqu'en septembre pour cadrer la négociation

Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
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  • Le gouvernement lance des négociations larges sur le droit du travail et l’assurance chômage, avec une lettre de cadrage attendue la semaine prochaine
  • Parmi les mesures envisagées : monétisation de la cinquième semaine de congés, suppression de deux jours fériés, lutte contre les temps partiels subis et assouplissement des CDD et intérim

PARIS: Le ministère du Travail a indiqué vendredi que la feuille de route de la négociation sur le droit du travail, avec notamment la possible monétisation de la cinquième semaine de congés payés, serait envoyée en septembre pour poursuivre "la concertation préalable".

Plaidant qu'"il faut travailler plus", le Premier ministre François Bayrou avait souhaité le 15 juillet que les partenaires sociaux ouvrent des négociations sur une nouvelle réforme de l'assurance chômage et sur le droit du travail pour participer à l'effort budgétaire.

Le ministère doit adresser "dans le courant de la semaine prochaine" la "lettre de cadrage" fixant le cadre de la négociation d'une nouvelle réforme de l'assurance chômage avec des discussions prévues "jusqu’à la mi-novembre", ainsi que le document d'orientation concernant la suppression de deux jours fériés pour une négociation qui doit durer "jusqu’à la fin du mois de septembre".

Mais les autres mesures ayant trait à "la modernisation du marché du travail et la qualité du travail" feront l'objet d'un document d'orientation à la rentrée. Outre la monétisation de la cinquième semaine de congés payés, il s'agit notamment de lutter contre les temps partiels subis, de "fluidifier" le marché du travail avec des assouplissements sur les CDD et les contrats d'intérim ou encore de dispositions sur l’indemnisation des arrêts maladie.

"Un envoi en septembre plutôt que début août répond à une demande de certains des partenaires sociaux de pouvoir poursuivre la concertation préalable à l’envoi de ce document d’orientation", a expliqué le ministère, ajoutant que cela "permettra de continuer à recueillir leurs avis, leurs idées et leurs priorités pour enrichir ce document".

Le calendrier de cette négociation doit s'étendre "sur plusieurs mois, au minimum jusqu’à la fin de l’année 2025", selon la même source.


Paris salue la conférence de New York et poursuit l’initiative avec Riyad

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
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  • Paris et Riyad poussent pour une reconnaissance collective de l’État palestinien
  • La France appelle à un cessez-le-feu, la levée du blocus et le désarmement du Hamas

PARIS: Sur fond de crise humanitaire d’une cruauté inqualifiable dans la bande de Gaza, le président Emmanuel Macron a annoncé une opération de largage de vivres conduite par la France, avec le soutien de la Jordanie, des Émirats arabes unis et de l’Allemagne.

« Face à l’urgence absolue, nous venons de conduire une opération de largage de vivres à Gaza », a déclaré le chef de l’État sur X, en remerciant les partenaires impliqués et saluant l’engagement des forces armées françaises.

Mais, de son point de vue, ces largages restent insuffisants : « Il faut qu’Israël ouvre un plein accès humanitaire », a-t-il insisté, réitérant l’exigence française d’une levée immédiate du blocus des aides.

Au-delà de la réponse d’urgence, Paris entend porter une initiative diplomatique structurante : la conférence internationale co-présidée à New York par la France et l’Arabie saoudite a marqué un tournant en posant un cadre politique ambitieux.

Cette conférence, tenue en l’absence des États-Unis et d’Israël, a réuni plus de 40 ministres et 120 participants, aboutissant à l’adoption d’un plan d’action en 42 points.

Malgré les réticences et le scepticisme ambiants, elle a permis l’émergence d’une dynamique inédite vers la reconnaissance de l’État palestinien et un processus de paix régional.

Le plan d’action validé à New York constitue désormais un socle politique partagé entre acteurs européens, puissances arabes, Union européenne et Ligue arabe.

Ce texte appelle à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, à la libération de tous les otages, à l’acheminement massif de l’aide humanitaire, mais surtout à la mise en œuvre concrète de la solution à deux États.

Il prévoit notamment un processus progressif de désarmement du Hamas, condition indispensable à la stabilisation durable de la région.

Pour la France, ce texte marque une rupture avec l’impasse diplomatique des dernières décennies et propose pour la première fois un mécanisme concerté de démilitarisation et de réintégration de Gaza dans le giron de l’Autorité palestinienne.

Le document évoque même la possibilité de confier les armes du Hamas à une tierce partie sous supervision internationale, afin de garantir qu’elles ne soient plus utilisées.

Ce volet, essentiel pour Israël, est aussi le fruit d’un consensus entre les États arabes partenaires, y compris ceux perçus comme proches du Hamas.

Sur le front politique, Paris se réjouit de l’effet de levier de la conférence : peu après, plusieurs pays — Portugal, Royaume‑Uni, Canada — ont annoncé leur volonté de reconnaître l’État palestinien, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre.

Une coalition de volontaires est en train de se constituer : quinze États, aux côtés de la Ligue arabe et de l’Union européenne, ont d’ores et déjà signé une déclaration commune en ce sens.

La France espère ensuite entraîner d’autres partenaires européens, notamment l’Allemagne. « Nous continuons à travailler en E3 avec nos partenaires allemands et britanniques », indique une source haut placée.

Si Berlin reste prudent, des signes d’évolution apparaissent dans les récentes déclarations de sa ministre des Affaires étrangères. Paris entend maintenir ces échanges diplomatiques jusqu’à septembre.

Contrairement aux critiques israéliennes et américaines, la France affirme que cette dynamique de reconnaissance ne constitue pas un obstacle à la paix, mais un levier pour la relancer.

Le président Macron estime que cette reconnaissance, inscrite dans un cadre politique exigeant — avec une gouvernance palestinienne réformée et un désarmement du Hamas — peut rebâtir les conditions d’une solution durable.

Les ruptures des négociations avec le Hamas sont antérieures aux annonces de Paris, souligne-t-on à l’Élysée, et ne peuvent donc pas lui être imputées.

La reconnaissance collective envisagée en septembre serait également un signal fort en direction des modérés palestiniens, en particulier l’Autorité palestinienne, qui s’est engagée début juin à respecter une série d’exigences posées par la communauté internationale en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption.

Un des apports majeurs de la conférence de New York est l’introduction formelle de la question du désarmement du Hamas dans un cadre diplomatique multilatéral.

Jusqu’ici marginalisée ou qualifiée d’irréaliste, cette exigence est clairement codifiée dans le plan d’action. Des discussions sont en cours, y compris sur l’exil éventuel de certains cadres du mouvement auprès d’États tiers.

Le Hamas n’a pas accepté ces conditions, mais le message politique est clair : son isolement au sein du monde arabe s’accentue et sa marge de manœuvre se rétrécit.

Face à cette dynamique, Israël et l’administration américaine ont haussé le ton, estimant qu’une reconnaissance unilatérale de la Palestine constituerait une « insulte » aux victimes israéliennes du 7 octobre.

Le président américain Donald Trump a même imposé des sanctions ciblées contre certains membres de l’Autorité palestinienne et de l’OLP, en contradiction avec les efforts en cours pour renforcer cette autorité.

La position américaine révèle un décalage croissant avec une partie de la communauté internationale, y compris des alliés traditionnels, en raison de son soutien inconditionnel à Israël, malgré l’ampleur des pertes civiles à Gaza et la persistance de la colonisation en Cisjordanie.

Cet état de fait suscite déjà des interrogations en Europe, où des pays comme la Suède exigent, par exemple, le gel de la partie commerciale de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël.

La France, de son côté, entend poursuivre cette dynamique au-delà de la conférence de New York. Un sommet est prévu les 21 et 22 septembre, juste avant l’Assemblée générale de l’ONU, pour réunir les États prêts à reconnaître collectivement la Palestine et à faire vivre ce nouveau cadre politique.

« Il s’agit d’une coalition inédite, qui repose sur un équilibre entre exigences sécuritaires et reconnaissance des droits politiques du peuple palestinien », souligne-t-on à Paris.

En réaffirmant l’exigence d’un cessez-le-feu immédiat, la levée du blocus humanitaire, la libération des otages, mais aussi le désarmement du Hamas et la mise en place d’un État palestinien souverain, la France, de concert avec l’Arabie saoudite, tente de reconstruire une architecture de paix.


La défiance à l'égard de Macron et de Bayrou au plus haut, selon un sondage Paris, France

Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
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  • La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat
  • Le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi

PARIS: La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat, tandis que le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi.

Près des trois quarts des Français interrogés (73%) affirment ne pas faire confiance au chef de l'Etat et la moitié (49%) va jusqu'à "ne pas lui faire du tout confiance", le niveau le plus élevé atteint de son second mandat, qu'il n'a dépassé qu'une seule fois depuis son arrivée à l'Elysée en 2017 au plus fort de la crise des gilets jaunes en décembre 2018.

Selon le sondage, seuls 21% des Français font confiance à Emmanuel Macron, soit un point de moins qu'en juin et 6 de perdus par rapport à mars.

Pour François Bayrou, qui a présenté à la mi-juillet les mesures d'économie prévues par le gouvernement dans son projet de budget pour l'année prochaine, la chute se poursuit avec seulement 12% des Français qui disent lui faire confiance, soit un nouveau record d'impopularité (-2 points).

La défiance à l'égard du chef du gouvernement a progressé, avec 80% des Français (+5 points en un mois) qui disent ne pas lui faire confiance et 56% qui affirment ne pas lui faire "du tout" confiance, soit un bond de 9 points depuis juin.

Au classement des personnalités, le RN Jordan Bardella conserve la première place avec 39% des Français (+3 points) qui ont une image positive de lui, devant l'ancien Premier ministre Edouard Philippe (37%) et Marine Le Pen (35%).

A gauche, le mieux classé est l'ancien président François Hollande qui s'installe en huitième position grâce à un bond de 6 points en un mois.

Sondage réalisé par internet les 29 et 30 juillet auprès d'un échantillon de 1.000 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. Marge d'erreur entre 1,4 et 3,1 points.