En attendant le 49.3, la rude semaine des macronistes à l'Assemblée

La Première ministre française Elisabeth Borne lit des dossiers lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris, le 11 octobre 2022 (Photo, AFP).
La Première ministre française Elisabeth Borne lit des dossiers lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris, le 11 octobre 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 15 octobre 2022

En attendant le 49.3, la rude semaine des macronistes à l'Assemblée

  • Dans une ambiance parfois agitée, les macronistes repoussent sans difficulté deux motions de rejet des textes budgétaires, déposées par LFI
  • Les LR s'y sont opposés «pour aller au bout des débats»

PARIS: Ils s'y attendaient, mais l'épreuve n'en est pas moins pénible: l'exécutif et les députés du camp présidentiel ont enchaîné les déconvenues à l'Assemblée cette semaine lors de l'examen du budget pour 2023, qui doit reprendre lundi.

Retour sur un baptême du feu budgétaire mouvementé, avant le couperet attendu la semaine prochaine de l'article 49.3 de la Constitution, qui permet l'adoption d'un texte sans vote.

Lundi: «Dialoguons»

"Pas de bataille rangée": A l'ouverture des débats budgétaires lundi, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, veut donner des gages de bonne volonté aux députés, les invitant à "dialoguer".

Le gouvernement se tourne en particulier vers les LR: "Je les appelle à rester fidèles à leurs convictions, plutôt que de faire bloc avec la Nupes ou le Rassemblement National", lance M. Le Maire.

Dans une ambiance parfois agitée, les macronistes repoussent sans difficulté deux motions de rejet des textes budgétaires, déposées par LFI. Les LR s'y sont opposés "pour aller au bout des débats".

Mardi: «Insolent»

Premier morceau: la programmation budgétaire 2023-2027. Et premiers revers: dans un hémicycle surchauffé malgré l'heure tardive, les oppositions rejettent sous les hourras plusieurs articles, détricotant une bonne partie du texte.

Furieux, le ministre des Comptes publics Gabriel Attal s'emporte contre la "coalition de l'irresponsabilité" des oppositions. "C'est grave ce que vous êtes en train de faire".

"Vous vous comportez comme un insolent qui ne respecte pas la représentation nationale", lui renvoie le patron des députés communistes André Chassaigne.

Le texte est certes moins crucial que le budget, mais ces votes pourraient priver la France de certains "fonds européens", argue M. Attal. "C'est du pipeau", lancent des députés LFI dans les couloirs.

Mercredi: «Damoclès»

C'est chose faite: le Conseil des ministres autorise le gouvernement à actionner l'article 49.3, "si la situation devait exiger qu'on y ait recours".

"Nous voyons déjà l'épée de Damoclès poindre", lance le patron du groupe PS Boris Vallaud dans l'hémicycle quelques heures plus tard, alors que s'engage l'examen du budget 2023.

Les oppositions infligent au gouvernement une défaite d'entrée, avec le rejet de l'article "liminaire" du PLF. Celui où figurait l'objectif-clé de contenir le déficit public à 5% du PIB en 2023.

"Vous êtes réunis Nupes, Rassemblement national, LR, pour priver la France de tout cap", dénonce Gabriel Attal.

Ce n'est que le début: l'Assemblée adopte dans la nuit une majoration de la taxation des "super-dividendes" contre l'avis du gouvernement.

Ce revers est d'autant plus fâcheux que la proposition émane d'un groupe de la majorité, le Modem, avec le soutien de la Nupes, du RN mais aussi d'une vingtaine de députés Renaissance. "Le Parlement est assez divisé comme ça pour qu'on ne se divise pas entre nous", s'agace un élu du parti présidentiel.

Jeudi: Déjeuner

A la table de Franck Riester, ministre des Relations avec le Parlement, un déjeuner réunit Bruno Le Maire, Gabriel Attal et les présidents des groupes de la majorité. Au menu, une grande question: que faire des amendements adoptés en séance? Le gouvernement doit-il les inclure dans la version du budget qu'il fera passer par le 49.3, ou les laisser de côté?

"Est-ce qu'il y a un débat parallèle?" à celui dans l'hémicycle, interroge l'Insoumis David Guiraud.

Une source gouvernementale fait peu de mystère du sort qu'il souhaite réserver à l'amendement superdividendes: "Nous ne changeons pas de ligne économique : pas d'augmentation d'impôt". Mais c'est "difficile de tout balayer d'un revers de la main", met en garde un cadre de la majorité.

Les déconvenues continuent: l'Assemblée adopte le rétablissement de l'"exit tax" concernant l'exil fiscal des entrepreneurs, qu'Emmanuel Macron avait en partie supprimée. Et se prononce pour un coûteux crédit d'impôt pour tous les résidents en Ehpad.

Vendredi: «A quoi ça sert ?»

Rebelote. Plusieurs amendements passent contre l'avis du gouvernement, notamment un crédit d'impôt pour encourager la rénovation énergétique de logements.

Mais avec le couperet du 49.3, "je me demande à quoi ça sert tout ça", s'interroge un député de la majorité.

La semaine s'est terminée de façon houleuse, la gauche reprochant à l'exécutif de faire jouer la montre jusqu'à minuit pour éviter une éventuelle adoption d'amendements de rétablissement de l'ISF.

Les débats doivent reprendre lundi à 16h, pour une nouvelle séance pleine d'incertitudes.


Déficit: LFI dénonce une «omission d'Etat» après la révélation d'une lettre de Le Maire à Macron

Le député insoumis Eric Coquerel a dénoncé lundi une "omission d'Etat" après la révélation du contenu d'une lettre d'alerte secrète concernant le déficit public envoyé au printemps 2024 par Bruno Le Maire, alors ministre de l'Economie, à Emmanuel Macron. (AFP)
Le député insoumis Eric Coquerel a dénoncé lundi une "omission d'Etat" après la révélation du contenu d'une lettre d'alerte secrète concernant le déficit public envoyé au printemps 2024 par Bruno Le Maire, alors ministre de l'Economie, à Emmanuel Macron. (AFP)
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  • Mettant en avant la chute des recettes fiscales, il y demandait des mesures d'économies pour limiter le déficit à 4,9% en 2024 et proposait une loi de finances rectificative (LFR)
  • Ses recommandations n'avaient pas été suivies par Emmanuel Macron à l'époque. Le déficit public avait lui atteint 5,8% du PIB cette année-là

PARIS: Le député insoumis Eric Coquerel a dénoncé lundi une "omission d'Etat" après la révélation du contenu d'une lettre d'alerte secrète concernant le déficit public envoyé au printemps 2024 par Bruno Le Maire, alors ministre de l'Economie, à Emmanuel Macron.

Dans cette missive, datée du 6 avril 2024 et portant la mention "secret", Bruno Le Maire alertait le président sur le dérapage des comptes publics, selon un reportage de l'émission C Dans L'Air diffusé dimanche sur France 5.

Mettant en avant la chute des recettes fiscales, il y demandait des mesures d'économies pour limiter le déficit à 4,9% en 2024 et proposait une loi de finances rectificative (LFR).

Ses recommandations n'avaient pas été suivies par Emmanuel Macron à l'époque. Le déficit public avait lui atteint 5,8% du PIB cette année-là.

"Il y a une omission d'Etat", a réagi lundi Eric Coquerel, président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, interrogé sur BFMTV.

"Rétrospectivement, ça veut dire que le budget qui était présenté était insincère", a-t-il ajouté.

L'Insoumis a jugé que le gouvernement avait reçu "des alertes en tout sens", y compris de Bruno Le Maire, sur la gravité de la situation des comptes publics, mais que "rien n'a été suivi d'effet".

Dans sa lettre de 2024 adressée deux mois avant les élections européennes à l'origine de la dissolution, Bruno Le Maire affirmait que sans loi de finances rectificative, le gouvernement ouvrirait "un contentieux avec toutes les oppositions" et pourrait être accusé d'"insincérité".

"Nous risquons de nous faire accuser de cacher notre copie", avait-il écrit, prévenant Emmanuel Macron que "toute stratégie d'évitement est vouée à l'échec".

Bruno Le Maire, ministre de l'Economie jusqu'en 2024, avait ensuite été accusé d'être responsable des problèmes budgétaires de la France, étant même surnommé "l'homme aux 1.000 milliards" de dette.

L'actuel ministre de l'Economie Roland Lescure, questionné lundi sur France Info, a dit qu'il n'avait jusque-là pas connaissance de cette lettre d'alerte de son prédécesseur.

"Je me sens aussi responsable que lui et que tous les autres de la situation dans laquelle on est", a-t-il dit.


Emmanuel Macron reçoit mardi Mahmoud Abbas à Paris

Le président français Emmanuel Macron entend, au cours de cette rencontre avec Mahmoud Abbas, rappeler la nécessité d'"un accès continu de l'aide humanitaire à Gaza". Mais aussi réaffirmer la nécessité pour l'Autorité palestinienne de se réformer. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron entend, au cours de cette rencontre avec Mahmoud Abbas, rappeler la nécessité d'"un accès continu de l'aide humanitaire à Gaza". Mais aussi réaffirmer la nécessité pour l'Autorité palestinienne de se réformer. (AFP)
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  • "Cette rencontre s'inscrit dans la continuité de la reconnaissance de l'État palestinien par la France et du travail engagé pour la mise en œuvre d'un plan de paix et de sécurité pour tous au Moyen-Orient", a déclaré l'Elysée
  • Les deux dirigeants "évoqueront les prochaines étapes du plan de paix, notamment dans les domaines de la sécurité, de la gouvernance et de la reconstruction, en lien avec les partenaires arabes et internationaux, afin de préparer le 'jour d'après'"

PARIS: Emmanuel Macron recevra mardi à Paris le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas pour discuter de la "pleine application" de l'accord de cessez-le-feu à Gaza, a annoncé la présidence française dans un communiqué.

Ce communiqué qualifie Mahmoud Abbas de "président de l'Etat de Palestine", la France ayant officiellement reconnu en septembre l'Etat palestinien lors de l'Assemblée générale de l'ONU.

"Cette rencontre s'inscrit dans la continuité de la reconnaissance de l'État palestinien par la France et du travail engagé pour la mise en œuvre d'un plan de paix et de sécurité pour tous au Moyen-Orient", a déclaré l'Elysée.

Les deux dirigeants "évoqueront les prochaines étapes du plan de paix, notamment dans les domaines de la sécurité, de la gouvernance et de la reconstruction, en lien avec les partenaires arabes et internationaux, afin de préparer le 'jour d'après'", ajoute le communiqué.

Le président américain Donald Trump a affirmé jeudi dernier qu'une force internationale serait déployée "très bientôt" à Gaza, au lendemain de l'annonce par les Etats-Unis d'un projet de résolution du Conseil de sécurité de l'ONU destinée à soutenir les efforts de paix.

Le président français Emmanuel Macron entend, au cours de cette rencontre avec Mahmoud Abbas, rappeler la nécessité d'"un accès continu de l'aide humanitaire à Gaza". Mais aussi réaffirmer la nécessité pour l'Autorité palestinienne de se réformer.

"Le président de la République et le président Abbas aborderont la question de la réforme de l'Autorité palestinienne, condition essentielle au retour durable de la stabilité et à l'émergence d'un État palestinien viable, démocratique et souverain, vivant en paix et en sécurité aux côtés d'Israël", a ajouté l'Elysée.

Le plan de paix de Donald Trump, qui a permis un cessez-le-feu depuis le 9 octobre entre Israël et le Hamas palestinien, ainsi que l'initiative de paix franco-saoudienne évoquent la possibilité que l'Autorité palestinienne, une fois réformée, prenne en charge la gouvernance de Gaza.

 


France: la sortie de prison de l'ex-président Sarkozy entre les mains de la justice

La cour d'appel de Paris a commencé lundi matin l'examen de la demande de mise en liberté de l'ex-président français, Nicolas Sarkozy, incarcéré depuis 20 jours à la prison de la Santé à Paris après sa condamnation dans l'affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle en 2007. (AFP)
La cour d'appel de Paris a commencé lundi matin l'examen de la demande de mise en liberté de l'ex-président français, Nicolas Sarkozy, incarcéré depuis 20 jours à la prison de la Santé à Paris après sa condamnation dans l'affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle en 2007. (AFP)
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  • M. Sarkozy n'a pas été extrait pour l'audience, qui a débuté à 08h30 GMT, et comparaît en visioconférence, offrant par écran interposé la première image de l'histoire d'un ancien président de la République en prison, en veste bleu foncé, pull et chemise
  • Son épouse, l'ancienne mannequin Carla Bruni, et deux de ses fils, Pierre et Jean, ont pris place sur les bancs du public

PARIS: La cour d'appel de Paris a commencé lundi matin l'examen de la demande de mise en liberté de l'ex-président français, Nicolas Sarkozy, incarcéré depuis 20 jours à la prison de la Santé à Paris après sa condamnation dans l'affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle en 2007.

M. Sarkozy n'a pas été extrait pour l'audience, qui a débuté à 08h30 GMT, et comparaît en visioconférence, offrant par écran interposé la première image de l'histoire d'un ancien président de la République en prison, en veste bleu foncé, pull et chemise.

Son épouse, l'ancienne mannequin Carla Bruni, et deux de ses fils, Pierre et Jean, ont pris place sur les bancs du public. La décision devrait être rendue dans la journée, selon une source judiciaire.

En cas de feu vert de la justice, Nicolas Sarkozy, 70 ans, pourrait être libéré dans la foulée. Contactés par l'AFP, ses avocats, qui avaient déposé la demande de mise en liberté dans les minutes qui ont suivi l'incarcération de leur client, n'ont pas souhaité faire de commentaire à l'approche de cette audience.

L'ancien champion de la droite française est incarcéré en raison de sa condamnation à cinq ans de prison ferme avec mandat de dépôt assorti d'une exécution provisoire pour association de malfaiteurs dans le procès libyen, une détention inédite pour un ex-président dans l'histoire de la République française et qui a suscité de vifs débats.

Il s'agit aussi d'une première dans l'Union européenne, où aucun ancien chef d'Etat n'a connu l'emprisonnement.

Différents critères 

Le 25 septembre, le tribunal correctionnel de Paris l'a reconnu coupable d'avoir sciemment laissé ses collaborateurs démarcher la Libye de Mouammar Kadhafi pour solliciter un financement occulte de sa campagne présidentielle victorieuse de 2007. Il a aussitôt fait appel.

Plus que la condamnation, c'est le mandat de dépôt l'envoyant en prison, non susceptible de recours, qui avait suscité la stupeur. Pour les juges, il est justifié par la "gravité exceptionnelle" des faits. Pour Nicolas Sarkozy, il a été motivé par "la haine".

Pour la demande de mise en liberté, les magistrats de la cour d'appel ne s'appuieront cependant pas sur les mêmes critères que ceux du mandat de dépôt. L'appel de Nicolas Sarkozy replace son incarcération dans les critères de la détention provisoire, qui diffèrent de ceux de l'exécution de peine.

Selon l'article 144 du code de procédure pénale, le maintien en détention n'est alors possible que s'il est l'"unique moyen" de protéger des preuves, d'empêcher pressions ou concertations, de prévenir fuite ou récidive, ou de le protéger.

Sinon, Nicolas Sarkozy devra être remis en liberté sous contrôle judiciaire, éventuellement assigné à résidence avec un bracelet électronique.

En attendant, en prison, l'ex-président est placé à l'isolement, mais deux officiers de sécurité sont installés dans une cellule voisine. Des dispositions justifiées par "son statut" et les "menaces qui pèsent sur lui", selon le ministre de l'Intérieur français Laurent Nuñez.

Fin octobre, il a reçu la visite du ministre français de la Justice, Gérald Darmanin, une entrevue qui a suscité des critiques, notamment de magistrats.

"Risques de pression" 

Dans une rare prise de position, le plus haut procureur de France, Rémy Heitz, y avait vu un "risque d'obstacle à la sérénité" et donc "d'atteinte à l'indépendance des magistrats" avant le procès en appel.

Parmi les trois condamnés avec mandat de dépôt par le jugement du 25 septembre, la cour d'appel a déjà mis en liberté sous contrôle judiciaire l'ex-banquier Wahib Nacer, 81 ans, mais a maintenu en détention l'intermédiaire Alexandre Djouhri.

Pour ce dernier, condamné à six ans d'emprisonnement avec incarcération immédiate et trois millions d'euros d'amende, la cour a considéré qu'il présentait des garanties "particulièrement faibles" face à son risque de fuite.

Dans son cas, la justice a également considéré que "les risques de pressions continuent d'exister" sur des témoins de l'affaire, notamment l'ancien directeur de cabinet de Mouammar Kadhafi, Bechir Saleh, condamné dans le dossier et en fuite.

Dans les deux cas, le président Olivier Géron a précisé au préalable qu'en statuant sur une demande de mise en liberté, "les critères d'appréciation de la juridiction d'appel sont nécessairement différents de ceux de la juridiction de premier degré" et que ces décisions ne présageaient en rien de l'issue du procès en appel, qu'il devrait diriger.

Très attendu, ce nouveau procès libyen devrait se tenir à partir du mois de mars, même si les dates précises n'ont pas encore été officiellement annoncées. Elles devraient être communiquées aux avocats jeudi, à l'occasion d'une réunion à la cour d'appel sur ce sujet, ont indiqué à l'AFP des sources proches du dossier.