De Bali à Bangkok, Macron déroule sa stratégie « Indopacifique »

Le président français Emmanuel Macron tient des gants qu'il a reçus lors d'une visite au Rajadamnern Muay Thai Stadium à Bangkok le 17 novembre 2022, alors qu'il se rend en Thaïlande pour le sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC). (AFP).
Le président français Emmanuel Macron tient des gants qu'il a reçus lors d'une visite au Rajadamnern Muay Thai Stadium à Bangkok le 17 novembre 2022, alors qu'il se rend en Thaïlande pour le sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC). (AFP).
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Publié le Vendredi 18 novembre 2022

De Bali à Bangkok, Macron déroule sa stratégie « Indopacifique »

  • Le président français Emmanuel Macron va tenter de relancer cette semaine les ambitions stratégiques de la France en Asie-Pacifique
  • Il a eu mardi des entretiens avec les présidents chinois Xi Jinping et indonésien Joko Widodo et devait aussi rencontrer mercredi les Premiers ministres indien Narendra Modi et australien Anthony Albanese

NUSA DUA: Le président français Emmanuel Macron va tenter de relancer cette semaine les ambitions stratégiques de la France en Asie-Pacifique, mises à mal par la crise avec l'Australie autour d'un mégacontrat de sous-marins.

Il a eu mardi des entretiens avec les présidents chinois Xi Jinping et indonésien Joko Widodo et devait aussi rencontrer mercredi les Premiers ministres indien Narendra Modi et australien Anthony Albanese en marge du sommet du G20 en Indonésie.

"Le Président a réaffirmé l’engagement de la France dans la région pour promouvoir la stabilité et la coopération face aux défis communs", a indiqué l'Elysée à l'issue de la bilatérale avec Joko Widodo.

Il espère surtout une "reconnaissance" des ambitions et de l'influence de la France lors du sommet du Forum de coopération économique Asie-Pacifique (Apec), jeudi et vendredi à Bangkok, auquel il sera le premier chef d'Etat européen invité.

Les défis sont nombreux, de l'ampleur de la zone dans laquelle la France essaie de se projeter, à plus de 10.000 kilomètres de l'Europe, à la faiblesse des moyens déployés par Paris, notamment militaires.

Emmanuel Macron a érigé en priorité stratégique cette vaste zone allant des côtes est-africaines aux côtes ouest-américaines - d'où son appellation "Indopacifique" - où la France compte de nombreux territoires et espaces maritimes.

Ce centre névralgique du commerce mondial abritera 60% de la population et du PIB mondiaux en 2030. Théâtre d'une rivalité croissante entre Chine et Etats-Unis, toutes les attentions se portent sur lui.

La France y détient la majeure partie de sa zone économique exclusive (ZEE), la deuxième du monde, autour de sept territoires, de la Réunion à la Nouvelle-Calédonie et Tahiti, où vivent 1,65 million de ressortissants.

« Grosse baffe »

Ce vaste espace maritime lui offre un droit de regard de premier plan sur les enjeux environnementaux et halieutiques, ainsi que la lutte contre les trafics liés aux océans.

La France est aussi de plus en plus présente militairement, privilégiant, outre ses propres points d'appui, une coopération croissante avec les pays riverains.

Elle multiplie les exercices conjoints (Inde, Japon) et les patrouilles en mer de Chine, zone qui concentre les tensions et où Pékin multiplie les revendications.

La conclusion de l'alliance AUKUS entre l'Australie, les Etats-Unis et le Royaume-Uni, avec pour corollaire l'annulation par Canberra d'un contrat d'acquisition de douze sous-marins français, a fortement contrarié ces ambitions en 2021.

"La grosse baffe, c’est de ne pas avoir été invité, même sur un strapontin, dans l'alliance AUKUS", relève l'expert en géopolitique Jean-Marc Balencie.

La France a renforcé depuis sa coopération avec l'Indonésie, grande puissance régionale (270 millions d'habitants), et entend multiplier ces partenariats.

Jakarta a signé en février un premier contrat d'acquisition d'avions de chasse français Rafale et est intéressé par des sous-marins, des corvettes et d'autres équipements militaires.

Emmanuel Macron s'est aussi réconcilié avec son homologue américain Joe Biden, qui a fait amende honorable dans l'affaire AUKUS et l'attend le 1er décembre à Washington pour une visite d'Etat.

Une petite place 

L'heure est aussi au réchauffement avec l'Australie et son nouveau Premier ministre, Anthony Albanese.

Paris pourrait même être de nouveau sur les rangs pour vendre des sous-marins à l'Australie en attendant ceux promis par les Etats-Unis.

L'affaire AUKUS est susceptible en outre d'avoir un effet positif inattendu en démontrant le non-alignement de la France sur Washington, alors que nombre d'Etats de la région refusent de choisir entre Etats-Unis et Chine.

"AUKUS paradoxalement nous a donné quelques arguments, on peut jouer cette voie de troisième acteur", avance l'amiral Pascal Ausseur, directeur général de la Fondation méditerranéenne d'études stratégiques (FMES). "On n’a pas un boulevard parce que les deux gros ne nous laissent pas beaucoup de place, mais il y a une place".

La marge de manœuvre de la France reste aussi contrainte militairement. Seuls 7.000 soldats sont déployés en permanence dans la zone, ainsi que quelques patrouilleurs et avions de reconnaissance.

"Ses forces de souveraineté sur zone sont saturées par les missions de surveillance des territoires", relève Céline Pajon à l'Institut français de relations internationales (Ifri).

La stratégie française s'inscrit dans la nouvelle approche Indopacifique de l'Union européenne.

"Celle-ci, pour convaincre, doit être mise en œuvre de manière concrète le plus rapidement possible, être lisible et visible", prévient la chercheuse.


Macron met en garde contre la mort de l'Europe

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Le président français a évoqué une Europe «dans une situation d'encerclement» face aux grandes puissances régionales
  • Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a appelé l'UE à renforcer encore sa défense au sein de l'Otan

PARIS: "Notre Europe est mortelle, elle peut mourir". Emmanuel Macron a dressé jeudi un portrait alarmiste à un mois et demi d'élections européennes compliquées pour son camp, en exhortant à un sursaut des Vingt-Sept pour bâtir une "Europe puissance" et une défense "crédible".

"Cela dépend uniquement de nos choix mais ces choix sont à faire maintenant" car "à l'horizon de la prochaine décennie, (...) le risque est immense d'être fragilisé, voire relégué", a-t-il asséné devant 500 invités, dont les ambassadeurs des 26 autres Etats membres de l'UE, des étudiants, des chercheurs et le gouvernement au complet.

Le président français a évoqué dans un discours-fleuve une Europe "dans une situation d'encerclement" face aux grandes puissances régionales et a jugé que les valeurs de la "démocratie libérale" étaient "de plus en plus critiquées" et "contestées".

"Le risque, c'est que l'Europe connaisse le décrochage et cela, nous commençons déjà à le voir malgré tous nos efforts", a averti le chef de l'Etat, en plaidant pour une "Europe puissante", qui "se fait respecter", "assure sa sécurité" et reprend "son autonomie stratégique".

Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a annoncé qu'il inviterait les Européens à se doter d'un "concept stratégique" de "défense européenne crédible", en évoquant la possibilité pour elle de se doter d'un bouclier antimissiles.

Il a aussi appelé l'Europe à renforcer son industrie de défense et plaidé pour un "emprunt européen", sujet tabou notamment en Allemagne, pour investir dans l'armement en appliquant le principe de "préférence européenne".

Entrée en campagne

Face aux débats sur l'immigration portés par la droite et l'extrême droite, il a affirmé que l'UE devait "retrouver la maîtrise" de ses "frontières" et "l'assumer", proposant "une structure politique" continentale pour prendre des décisions sur les sujets de migration, de criminalité et de terrorisme.

Sur le plan économique, pour aboutir à une "Europe de prospérité", Emmanuel Macron a défendu un "choc d'investissements commun", en doublant la capacité financière de l'UE pour faire face aux défis de défense, climatique, numérique et industriel.

Devant les pratiques commerciales chinoises et américaines, le président français a également demandé une "révision" de la politique européenne "en défendant nos intérêts".

"Ca ne peut pas marcher si on est les seuls au monde à respecter les règles du commerce telles qu'elles avaient été écrites il y a 15 ans, si les Chinois, les Américains, ne les respectent plus en subventionnant les secteurs critiques", a-t-il déclaré.

Réagissant peu après, le chancelier allemand Olaf Scholz, pas toujours sur la même longueur d'ondes que son homologue, a salué les "bonnes impulsions" du discours pour que "l'Europe reste forte" et promis de continuer à la "faire avancer ensemble".

Le discours d'Emmanuel Macron est largement considéré comme une entrée en campagne du chef de l'Etat français, alors que son camp patine à six semaines des élections européennes du 9 juin, pour lesquelles le Rassemblement national (RN, extrême droite) fait largement course en tête.

Selon un récent sondage Opinionway, la liste de la majorité présidentielle, à 19%, se situait toujours loin derrière celle du RN (29%), mais gardait une nette avance sur celle des socialistes (12%).

"Sur la scène européenne, cela fait sept ans qu'Emmanuel Macron confond ses incantations et ses gesticulations avec des réalisations", a ironisé Marine Le Pen, cheffe de file des députés du RN, sur X, accusant le chef de l'Etat de "brader des pans entiers de souveraineté" nationale.

Le palais présidentiel de l'Elysée a réfuté toute tactique électoraliste et affirmé que M. Macron ambitionnait d'"influer sur l'agenda" de la prochaine Commission européenne à l'issue des élections de juin.

Une légitimité qui sera mesurée à l'aune des réactions européennes. Et aux retours des Français, qui estiment à 57% que le président n'a pas eu "d'influence réelle" sur l'UE depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi.

Vendredi, le président prendra aussi la température lors d'un échange avec des étudiants à Strasbourg (Est), où il signera un nouveau contrat triennal pour conforter la stature européenne de la capitale alsacienne qui accueille le parlement européen.

 

 


UE: une majorité de Français doute de l'influence réelle de Macron, selon un sondage

Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
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  • 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas «s'impliquer davantage dans la campagne» car «ce n'est pas son rôle en tant que président de la République»
  • Pour autant 61% des Français jugent qu'une «défaite nette» de la liste Renaissance serait un «échec personnel» pour le président

PARIS: Une majorité de Français (57%) doute de l'influence réelle d'Emmanuel Macron sur le fonctionnement et les décisions prises par l'Union européenne depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi pour BFMTV.

Alors qu'Emmanuel Macron va mettre en avant son bilan européen lors d'un discours jeudi matin à la Sorbonne, seuls 42% des Français estiment que le chef de l'État a eu "une influence réelle sur le fonctionnement et les décisions prises par l’Union européenne" depuis 2017.

L'électorat d’Emmanuel Macron porte un regard très positif sur son rôle (70%), alors que la majorité des électeurs de gauche (56%) et d'extrême droite (68%) sont plutôt négatifs.

A un mois et demi des européennes, 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas "s'impliquer davantage dans la campagne" car "ce n'est pas son rôle en tant que président de la République".

Pour autant 61% des Français jugent qu'une "défaite nette" de la liste Renaissance serait un "échec personnel" pour le président.

En cas de large défaite du camp présidentiel, une majorité (61%) souhaite qu'Emmanuel Macron "change significativement d'orientation politique", une opinion partagée par 43% des électeurs du président au premier tour de l'élection présidentielle en 2022.

Pour autant, seule une minorité de Français (46% contre 54%) réclame une dissolution de l’Assemblée nationale et l'organisation d'élections législatives anticipées. Encore moins (39% contre 61%) souhaitent un changement de Premier ministre.

Si 58% des sondés déclarent tenir compte avant tout d'enjeux de politique européenne dans leur décision de vote, 41% concèdent qu'ils feront leur choix avant tout sur des enjeux nationaux, surtout parmi les électeurs RN (61%).

Ce sondage a été réalisé par internet du 23 au 24 avril à partir d'un échantillon de 1.001 personnes, représentatif des résidents de France métropolitaine âgés de 18 ans et plus. Selon les résultats, la marge d'erreur est comprise entre +/- 1,4 point et +/-3,1 points.


Evénements climatiques extrêmes: la Croix-Rouge souhaite un sac d'urgence par Français

Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
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  • Le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge
  • «75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule», selon un sondage OpinionWay

PARIS: Un "sac d’urgence" pour chaque Français en cas d’évacuation face aux événements climatiques extrêmes: c’est l’une des préconisations de la Croix-Rouge française dans un rapport sur la résilience de la société française, qui fait état d'un manque de préparation.

Canicule, sécheresse, incendies de forêt, inondations: le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge, en collaboration avec le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc), publiée jeudi.

"75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule", selon un sondage OpinionWay pour la Croix-Rouge française.

"La préparation face aux crises est l'affaire de tous. Elle concerne bien entendu les pouvoirs publics, mais aussi les acteurs associatifs et privés, ainsi que les citoyens", déclare à l'AFP Philippe Da Costa, président de la Croix-Rouge française.

Pour affronter "l’inévitable", l’association a dix recommandations. Dont la constitution du "Catakit", un sac d'urgence par personne, prêt en cas d'évacuation et comprenant par exemple de la nourriture non périssable, de l'eau, une trousse de secours, des vêtements et une lampe torche, pour attendre l'arrivée de l'aide.

"Seuls 11% des Français disposent d’un sac d’urgence prêt, et moins de la moitié connaît les objets indispensables qu’il faut y glisser", détaille le sondage OpinionWay.

Autre recommandation: la formation aux gestes et aux comportements qui sauvent. "On estime aujourd’hui à seulement 40% le nombre de Français ayant récemment suivi une formation aux gestes qui sauvent, contre 95% Norvège ou 80% en Allemagne", note le rapport.

Or, rappelle la Croix-Rouge, "si les individus sont informés et formés, l’impact des événements climatiques extrêmes sur les populations sera moindre et les dégâts matériels réduits".

L'association suggère que chaque Français ait a minima connaissance des réflexes vitaux: "savoir identifier les alertes sonores, avoir les bons comportements en cas de catastrophes" en plus de la maîtrise des gestes qui sauvent.

"Les événements climatiques extrêmes se manifestent de manière plus fréquente, plus intense, plus longue, et plus étendue géographiquement, rappelle Philippe Da Costa. "Tous les territoires de l'Hexagone et d’Outre-mer sont concernés".

Pour la Croix-Rouge, "il n’y a pas de fatalité". "Se préparer pour savoir comment agir avant les crises et comment réagir pendant les crises" pourra limiter l'impact des évènements climatiques extrêmes sur les populations.