Macron a eu une «discussion claire et sincère» avec Elon Musk sur la modération des contenus

«À La Nouvelle-Orléans, en terre francophone s'il en est», le président Macron a fait savoir qu'il annoncerait une initiative «ambitieuse»: «le fonds "French For All", pour soutenir l'apprentissage du français partout où il est en jeu aux Etats-Unis» (Photo, AFP).
«À La Nouvelle-Orléans, en terre francophone s'il en est», le président Macron a fait savoir qu'il annoncerait une initiative «ambitieuse»: «le fonds "French For All", pour soutenir l'apprentissage du français partout où il est en jeu aux Etats-Unis» (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 03 décembre 2022

Macron a eu une «discussion claire et sincère» avec Elon Musk sur la modération des contenus

  • Le président français s'est offert avec sa femme Brigitte une déambulation dans les petites rues très animées du centre-ville
  • Il a salué plus tôt, lors d'un point presse improvisé, la «terre de créolisation» qu'est la Louisiane, «où le français est aimé, est attendu»

Emmanuel Macron et Elon Musk se sont félicités vendredi d'avoir échangé sur la modération des contenus sur Twitter, alors que l'entrepreneur a jusqu'à présent pris des décisions largement contraires aux exhortations du président français et d'autres leaders européens.

"J'en parle ici, sur Twitter, car c'est de cela qu'il s'agit. Cet après-midi, j'ai rencontré Elon Musk et nous avons eu une discussion claire et sincère", a écrit Emmanuel Macron, en visite d'Etat aux Etats-Unis.

L'entretien a eu lieu à la Nouvelle-Orléans et a duré une heure. Il n'avait pas été précédemment annoncé par l'Elysée, et s'est tenu à l'écart des médias.

"Conditions d'utilisation transparentes, renforcement significatif de la modération des contenus et protection de la liberté d'expression : Twitter doit faire l'effort de se conformer à la réglementation européenne", a ajouté le chef d'Etat dans une série de tweets.

Il a également dit avoir évoqué avec le cofondateur de Tesla de "futurs projets industriels verts, comme la production de véhicules électriques et de batteries".

"C'était un honneur de vous voir à nouveau", a répondu Elon Musk, se disant "impatient" au sujet de "projets enthousiasmants en France".

L'homme le plus riche au monde a racheté fin octobre l'influente plateforme pour 44 milliards de dollars.

Sa vision absolutiste de la liberté d'expression inquiète de nombreux utilisateurs, autorités et annonceurs, qui craignent un déferlement de haine et de désinformation.

"Elon Musk a confirmé la participation de Twitter à l'Appel de Christchurch. Les contenus terroristes et violents n'ont leur place nulle part", a détaillé le président français, faisant référence à une initiative lancée par plusieurs Etats et ONG en 2019, après la tuerie de Christchurch, en Nouvelle-Zélande, dont les images étaient restées accessibles en ligne pendant plusieurs heures.

A La Nouvelle-Orléans, Macron célèbre la francophonie

WASHINGTON: Un bain de foule dans le mythique "French Quarter" pour conclure sa visite d'Etat aux Etats-Unis: Emmanuel Macron s'est rendu vendredi à la Nouvelle-Orléans, ville emblématique des liens historiques franco-américains, pour célébrer la francophonie et... rencontrer Elon Musk.

Au lendemain d'une réception fastueuse à la Maison Blanche qui a scellé "l'amitié" du président français avec son homologue américain Joe Biden, le président français s'est offert avec sa femme Brigitte une déambulation dans les petites rues très animées du centre-ville.

Emmanuel Macron, en bras de chemise, a été accueilli avec des "Bienvenue Monsieur", en français dans le texte. La première dame et lui ont posé avec de jeunes enfants dans les bras que leur confiaient des parents pour une photo.

Un moment qui tranche avec les deux premiers jours très officiels de sa visite, entre rencontre sur le nucléaire et l'espace, discours à l'ambassade et prises de parole devant les parlementaires américains.

Après cette promenade sous une météo bien plus clémente que le soleil d'hiver de Washington, Emmanuel Macron a annoncé depuis le musée d'art de la Nouvelle-Orléans un nouveau plan, "French For All", pour favoriser l'enseignement du français aux Etats-Unis.

Rencontre surprise

Pour faire du français "une langue d'opportunités culturelles, économiques" et rendre sa pratique moins "élitiste", le programme vise à "élargir et développer" l'enseignement de la langue de Molière "de la maternelle à l'enseignement supérieur", a déclaré le président français.

Il a salué plus tôt, lors d'un point presse improvisé, la "terre de créolisation" qu'est la Louisiane, "où le français est aimé, est attendu".

Mais avant sa prise de parole - et en toute discrétion - M. Macron a rencontré pendant une heure Elon Musk, homme le plus riche du monde, fantasque patron de Tesla, SpaceX et désormais Twitter, réseau social où il a limité la modération et supprimé des milliers d'emplois.

Berceau du jazz

Il s'était auparavant entretenu avec le gouverneur de Louisiane, John Bel Edwards, pour évoquer notamment la question du changement climatique et, selon l'Elysée, "le renforcement des relations dans le domaine énergétique" - la Louisiane étant un important exportateur de gaz naturel liquéfié.

Accompagné du réalisateur de cinéma Claude Lelouch et du danseur et chorégraphe Benjamin Millepied, Emmanuel Macron devait rencontrer aussi des acteurs de la vie culturelle dans cette ville berceau du jazz, au lendemain d'un dîner de gala à la Maison Blanche animé par le pianiste virtuose Jon Batiste, issu d'une famille de musiciens de La Nouvelle-Orléans.

Jeudi, lors d'une visite débordante d'affection diplomatique, Emmanuel Macron et Joe Biden ont affiché leur unité sur l'Ukraine, manifestant leur volonté de chercher ensemble une issue à la guerre, et ont arrondi les angles sur les différends économiques qui avaient dominé la préparation de leur tête-à-tête dans le Bureau Ovale.

"Avant que je ne mette les pieds dans le plat", la question de l'impact du plan climat américain (IRA) sur les industries européennes n'était "pas un débat", ni en France, ni aux Etats-Unis, a-t-il dit lors de son bain de foule vendredi. "Maintenant, tout le monde en parle, c'est une bonne chose."

Parlant de la question des "exemptions" réclamées aux Etats-Unis pour les industries européennes, il a déclaré: "d’ici au début de l’année prochaine", au premier trimestre 2023, "il faut qu’on ait pu régler ce sujet”, "il faut qu’on ait finalisé ces sujets".

Après un dîner loin des caméras avec une dizaine de représentants de la vie culturelle de la Nouvelle-Orléans, le président devait s'envoler pour Paris.

«Gros problème»

L'homme d'affaires n'a pas réagi sur ce point.

Il avait initialement promis un conseil de modération des contenus responsable de toutes les décisions majeures, mais il a finalement lui-même décidé de rétablir de nombreux comptes, à commencer par celui de l'ex président américain Donald Trump, banni après l'assaut du Capitole en janvier 2021.

Il a aussi mis fin à la lutte contre les fausses informations liées au Covid, ce qui est un "gros problème", selon Emmanuel Macron.

"Je pense que nous devons prendre le sujet à bras le corps, je suis en faveur de l'exact opposé, plus de régulation. Nous le faisons (en France, NDLR) et nous le faisons au niveau européen", a-t-il déclaré jeudi lors d'une interview accordée à la chaîne ABC.

La liberté d'expression "implique des responsabilités et des limites. Vous ne pouvez pas sortir et tenir des propos racistes ou antisémites, c'est un point qu'il m'importe de défendre", a-t-il ajouté.

Déjà mercredi, le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, avait dit à Elon Musk qu'il  restait "encore un énorme travail à accomplir". Twitter devra "renforcer considérablement la modération des contenus (...) et s'attaquer avec détermination à la désinformation", avait-il ajouté, selon un compte-rendu de leur échange téléphonique.

Modération modérée 

Le nouveau propriétaire de Twitter a licencié plus de la moitié des employés du groupe californien, et les équipes de modération des contenus n'ont pas été épargnées.

Selon plusieurs ONG, dont le Center for Countering Digital Hate, les messages à caractère raciste, homophobe, misogyne et antisémite ont augmenté de façon "choquante" sur la plateforme depuis un mois.

"Complètement faux", a tweeté Elon Musk en réponse à un article du New York Times détaillant les conclusions des associations.

Il a affirmé que le nombre de fois où des tweets contenant des discours de haine sont vus par des utilisateurs "continue à décliner".

L'entrepreneur libertarien a récemment clarifié ses limites personnelles à la liberté d'expression.

Le compte du rappeur américain Kanye West a ainsi été suspendu pour "incitation à la violence", après notamment la publication de propos admiratifs pour Hitler.

Et Elon Musk est opposé au retour d'Alex Jones, le complotiste américain d'extrême droite condamné pour avoir affirmé qu'un massacre dans une école n'était qu'une mise en scène pilotée par des opposants aux armes à feu.

Ayant vécu la mort de son premier enfant, le multimilliardaire a expliqué être "sans merci vis-à-vis de quiconque utiliserait les décès d'enfants pour (engranger des) gains financiers, politiques ou de renommée".

Emmanuel Macron a d'ailleurs conclu sa série de tweets en déclarant: "Nous allons travailler avec Twitter pour améliorer la protection des enfants en ligne. Elon Musk me l'a confirmé aujourd'hui. Protégeons mieux nos enfants en ligne!"


Macron fustige les «bourgeois des centres-villes» qui financent «parfois» le narcotrafic

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  • Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international"
  • La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic

PARIS: Le président Emmanuel Macron a estimé mercredi lors du Conseil des ministres que ce sont "parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants", selon des propos rapportés par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon lors de son compte-rendu.

Le chef de l'État a appuyé "l'importance d'une politique de prévention et de sensibilisation puisque, je reprends ses mots, +c'est parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants+", a précisé Maud Bregeon, ajoutant: "on ne peut pas déplorer d'un côté les morts et de l'autre continuer à consommer le soir en rentrant du travail".

Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international". La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic.

 


Amiante dans les écoles: plus de 50 personnes et sept syndicats portent plainte à Marseille

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
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  • "La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu
  • Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent"

MARSEILLE: Ils sont parents d'élèves, enseignants, agents municipaux: une cinquantaine de personnes, toutes exposées à l'amiante dans des écoles des Bouches-du-Rhône, vont déposer mercredi à Marseille une plainte contre X pour "mise en danger délibérée de la vie d'autrui".

Sept syndicats et trois associations de victimes de l'amiante sont aussi plaignants dans ce dossier, qui concerne 12 établissements scolaires, la plupart à Marseille.

"La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu, qui représente ces plaignants d'une douzaine d'établissements scolaires et dont la plainte va être déposée à 14h.

Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent".

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire.

"Une collègue est décédée en avril 2024 des suites d’un cancer lié à l’amiante, reconnu comme maladie professionnelle", a expliqué dans un dossier de presse le collectif stop amiante éducation, dans lequel sont réunis les syndicats et associations plaignants.

Le collectif dénonce "de nombreuses défaillances", notamment une absence d'information sur l'amiante, malgré les obligations réglementaires, ou encore une absence de protection pendant les travaux.

En mars, les syndicats enseignants avaient révélé que plus de 80% des bâtiments scolaires en France étaient potentiellement concernés par la présence d'amiante.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, prévoit que d’ici 2050, 50.000 à 75.000 décès par cancer du poumon dus à l’amiante aient lieu, auxquels s’ajoutent jusqu'à 25.000 décès par mésothéliome (un autre type de cancer).

 


Assassinat de Mehdi Kessaci: «Non, je ne me tairai pas» face au narcotrafic, dit son frère dans une tribune au Monde

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  • "Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic"
  • "On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement"

PARIS: "Non, je ne me tairai pas" face au narcotrafic, a déclaré mercredi dans une tribune publiée dans le journal Le Monde Amine Kessaci, le frère de Mehdi, abattu jeudi à Marseille par deux personnes à moto.

"Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic", a également écrit le militant écologiste de 22 ans, engagé dans la lutte contre le narcobanditisme. En 2020, cette famille de six enfants avait déjà été endeuillée par l'assassinat d'un autre de ses frères, Brahim, 22 ans, dont le corps avait été retrouvé carbonisé dans un véhicule.

"On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement", a encore déclaré Amine Kessaci, qui a enterré mardi son frère Mehdi. "Voici ce que font les trafiquants : ils tentent d’annihiler toute résistance, de briser toute volonté, de tuer dans l’œuf tout embryon de révolte pour étendre leur pouvoir sur nos vies", a-t-il ajouté.

La protection policière qui lui a été accordée ne l'a pas été à ses proches, a souligné le militant écologiste de 22 ans. "Pourtant, qui ignorait que ma famille avait déjà payé un tribut de sang? Comment ne pas savoir que ma famille pouvait être touchée ?", s'est-il interrogé.

"Face à un tel ennemi, l’Etat doit prendre la mesure de ce qu'il se passe et comprendre qu'une lutte à mort est engagée", a-t-il encore prévenu.

"Il est temps d’agir, par exemple de faire revenir les services publics dans les quartiers, de lutter contre l’échec scolaire qui fournit aux trafiquants une main-d’œuvre soumise, de doter les enquêteurs et les forces de police des moyens dont ils ont besoin, de renforcer, de soutenir réellement les familles de victimes du narcotrafic. Nous comptons nos morts, mais que fait l’Etat ?"

Medhi Kessaci, 20 ans, a été assassiné jeudi à Marseille près d'une salle de concert par deux hommes à moto, activement recherchées, un "crime d'intimidation" et "un assassinat d'avertissement" pour les autorités.