À court d’argent, l'Unrwa craint un «désastre» à Gaza et au Liban

Une famille palestinienne reçoit une aide alimentaire de l’Unrwa, le 15 septembre à Gaza (Photo, Mohammed ABED/AFP).
Une famille palestinienne reçoit une aide alimentaire de l’Unrwa, le 15 septembre à Gaza (Photo, Mohammed ABED/AFP).
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Publié le Lundi 16 novembre 2020

À court d’argent, l'Unrwa craint un «désastre» à Gaza et au Liban

  • La semaine dernière, le commissaire général de l'Unrwa avait annoncé ne pas pouvoir payer les salaires en novembre et décembre de ses 28 000 employés, eux-mêmes pour la plupart des réfugiés
  • Une suspension des programmes de l'Unrwa pourrait avoir des effets économiques et sécuritaires « dévastateurs » dans ce territoire sous contrôle des islamistes du Hamas

GAZA: La « pire » crise financière de l'histoire de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) pourrait causer un « désastre » dans la bande de Gaza, voire ajouter une « nouvelle source d'instabilité » au Liban, prévient son chef.

La semaine dernière, le commissaire général de l'Unrwa, Philippe Lazzarini, avait annoncé que son organisation est à court de liquidités pour payer les salaires en novembre et décembre de ses 28 000 employés, eux-mêmes pour la plupart des réfugiés, offrant des services (éducation, soins de santé) à plus de cinq millions de Palestiniens répartis dans des camps en Jordanie, en Syrie, au Liban et dans les Territoires palestiniens.

Or la situation est particulièrement critique dans la bande de Gaza, enclave palestinienne de deux millions d'habitants où le chômage dépasse déjà les 50% et où la pandémie de Covid-19 a poussé les autorités à couper de 40% le salaire des fonctionnaires.

Dans ce contexte, une suspension des programmes de l'Unrwa pourrait avoir des effets économiques et sécuritaires « dévastateurs » dans ce territoire sous contrôle des islamistes du Hamas, et où l'Unrwa, avec ses 13 000 salariés uniquement à Gaza est le « premier employeur » hormis les autorités locales. 

« Nous représentons 80% de l'aide pour Gaza. Si nous suspendons les services, cela risque d'être un désastre total. Et je ne crois pas que ce soit dans l'intérêt de qui que ce soit d'y voir les activités des écoles suspendues et les soins de santé aussi suspendus en pleine pandémie », souligne Lazzarini lors de cet entretien dimanche soir par visioconférence.

« Et la chose pourrait aussi se produire au Liban », où vivent plus de 470 000 réfugiés palestiniens. « C'est un pays qui est frappé par une crise financière sans précédent, où le taux de chômage monte en flèche » et où la suspension des programmes d'aide aux réfugiés palestiniens pourrait être une « nouvelle source d'instabilité », plaide le patron de l'Unrwa.

« Nous sommes dans une période où les gens s'attendent à ce que l'Unrwa en fasse davantage mais (...) où l'Organisation fait face à sa pire crise financière », ajoute-t-il. 

Super Biden ?

La crise du financement de l'Unrwa est un sujet récurrent dans les milieux diplomatiques et humanitaires, et le patron de l'agence pour les réfugiés palestiniens reconnaît que des donateurs font part à l'occasion de leur « fatigue » de financer l'aide à des réfugiés d'un conflit qui s'étire sur plus de soixante-dix ans. 

« Nous sommes au bord du gouffre », affirme le nouveau patron de l'Unrwa, arrivé en poste cette année après une crise interne à la tête de l'Organisation qui avait d'ailleurs poussé des bailleurs à prendre leur distance avec cette agence déjà malmenée par l'administration Trump.

En 2018, les Etats-Unis de Donald Trump avaient retiré leurs billes de l'agence, la privant ainsi de plus de 360 millions de dollars par année, soit près de 30% de son budget annuel.

Face à la crise, une quarantaine d'Etats avaient rehaussé sur un an leur contribution à l'agence pour limiter les impacts de la coupe américaine. Mais depuis, les contributions ont reculé et la crise de la Covid-19 n'a pas aidé cette année d'où l'espoir que fait naître Joe Biden chez certains Palestiniens et dans les milieux humanitaires.

La grande question étant de savoir si le successeur de Donald Trump à la Maison-Blanche remettra des billes américaines dans le sac de l'Unrwa. « Tous les messages indiquent qu'il y a une volonté de la part de la (future) administration américaine de restaurer la relation à long terme avec l'Unrwa. Comment et quand se traduira dans les faits (...) cela sera discuté lorsque la nouvelle administration entrera en fonction ».

D'ici là, en janvier, l'Unrwa tente de convaincre des donateurs de remettre 70 millions de dollars dans la caisse pour payer les salaires. Depuis son cri du cœur la semaine dernière, le patron de l'agence a-t-il reçu des engagements ? « Pas encore », répond-il, en espérant ne pas avoir à trop penser aux conséquences d'une suspension des activités.


Turquie: le chef kurde Öcalan veut agir avec «sérieux et responsabilité»

 Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs. (AFP)
Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs. (AFP)
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  • "Pour passer à une phase positive, il est essentiel que chacun agisse avec sensibilité, sérieux et sens des responsabilités"
  • Abdullah Öcalan, qui a appelé en février son mouvement à se dissoudre, est détenu à l'isolement depuis 1999 sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul

ISTANBUL: Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs.

"Pour passer à une phase positive, il est essentiel que chacun agisse avec sensibilité, sérieux et sens des responsabilités", écrit le leader historique du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), auquel une délégation du parti prokurde DEM a rendu visite lundi.

Abdullah Öcalan, qui a appelé en février son mouvement à se dissoudre, est détenu à l'isolement depuis 1999 sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul.

Le PKK a annoncé le 26 octobre le retrait vers le nord de l'Irak de ses derniers combattants présents en Turquie, complétant ainsi la première phase du processus de paix initié un an auparavant par Ankara.

Lors d'une cérémonie en juillet, une trentaine de combattants en treillis avaient symboliquement brûlé leurs armes.

Le parti prokurde, troisième force au Parlement, a appelé à "passer à la deuxième phase, à savoir les étapes juridiques et politiques".

"Nous nous efforçons de développer une phase positive, et non une phase destructrice et négative", poursuit M. Öcalan. "L'intégration du phénomène kurde dans toutes ses dimensions dans le cadre légal de la République et un processus de transition solide doivent en constituer le fondement", écrit-il.

Une commission parlementaire transpartisane planche depuis août sur une traduction légale et encadrée de cette transition vers la paix.

Elle doit notamment décider du sort d'Abdullah Öcalan et de possibles garanties de sécurité pour ses combattants.

La libération du leader kurde âgé de 76 ans est au cœur des demandes du PKK. Il a été autorisé en septembre à rencontrer ses avocats pour la première fois en six ans.

Selon des analystes, le PKK est affaibli par des décennies de guérilla qui ont fait au moins 50.000 morts, selon un bilan officiel. Et la communauté kurde, qui représente selon des estimations 20% de la population turque sur 86 millions d'habitants, est épuisée par un long conflit.


Un hôpital de Gaza déclare avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens

L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël. (AFP)
L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël. (AFP)
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  • Sur les 28 otages décédés que le Hamas avait accepté de remettre à Israël dans le cadre de l'accord, 21 ont été restitués à ce jour. Israël exige toujours la restitution des sept dernières dépouilles
  • Le mouvement islamiste palestinien a également libéré le 13 octobre les 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza, en échange de la libération de près de 2.000 prisonniers palestiniens

KHAN YOUNES: L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël.

"La dixième série de dépouilles de martyrs palestiniens, soit 15 martyrs", est arrivée "dans le cadre de l'échange de dépouilles entre la partie palestinienne et l'occupation israélienne", a déclaré l'hôpital en précisant que 285 dépouilles ont été reçues dans la bande de Gaza depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre.

Sur les 28 otages décédés que le Hamas avait accepté de remettre à Israël dans le cadre de l'accord, 21 ont été restitués à ce jour. Israël exige toujours la restitution des sept dernières dépouilles.

Le mouvement islamiste palestinien a également libéré le 13 octobre les 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza, en échange de la libération de près de 2.000 prisonniers palestiniens.

Mardi, la branche armée du Hamas a fait parvenir aux autorités israéliennes la dépouille d'une personne, identifiée mercredi comme Itay Chen, un soldat israélo-américain tué à l'âge de 19 ans.

Dans la bande de Gaza, des proches de personnes arrêtées par Israël et qui attendent leur retour ont dit lors de plusieurs remises de dépouilles par Israël que les corps étaient très difficiles à identifier.

Le service de presse du gouvernement du Hamas à Gaza a de nouveau accusé mercredi les autorités israéliennes de refuser de transmettre des listes de noms des personnes dont les dépouilles arrivent dans le territoire palestinien.


Soudan: 40 morts au Kordofan, les combats s'intensifient dans la région

Une attaque dans la ville stratégique d'El-Obeid, capitale régionale du Kordofan-Nord au Soudan, a fait au moins 40 morts, a annoncé mercredi l'ONU, pendant que les violences continuent dans la région voisine du Darfour. (AFP)
Une attaque dans la ville stratégique d'El-Obeid, capitale régionale du Kordofan-Nord au Soudan, a fait au moins 40 morts, a annoncé mercredi l'ONU, pendant que les violences continuent dans la région voisine du Darfour. (AFP)
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  • L'attaque, qui a visé un enterrement, s'est produite mardi sur la ville assiégée par les paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR), alors que les combats pour le contrôle de cette région du centre du Soudan se sont intensifiés ces derniers jours
  • "Des sources locales rapportent qu'au moins 40 civils ont été tués et des dizaines de blessés hier dans une attaque sur un rassemblement lors de funérailles"

PORT-SOUDAN: Une attaque dans la ville stratégique d'El-Obeid, capitale régionale du Kordofan-Nord au Soudan, a fait au moins 40 morts, a annoncé mercredi l'ONU, pendant que les violences continuent dans la région voisine du Darfour.

L'attaque, qui a visé un enterrement, s'est produite mardi sur la ville assiégée par les paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR), alors que les combats pour le contrôle de cette région du centre du Soudan se sont intensifiés ces derniers jours.

Le conflit entre l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane et les FSR de Mohammed Daglo a éclaté en avril 2023 et se concentre désormais au Kordofan, région stratégique car située entre la capitale Khartoum, contrôlée par les militaires, et le Darfour, aux mains des paramilitaires.

"Des sources locales rapportent qu'au moins 40 civils ont été tués et des dizaines de blessés hier dans une attaque sur un rassemblement lors de funérailles" à El-Obeid, a déclaré le Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha).

Les violences continuent aussi au Darfour, selon l'Ocha, qui fait état de "multiples frappes aériennes et de drones" survenues dimanche, sans pouvoir donner de bilan du fait de l'accès limité au terrain et des difficultés de communications.

"Viols collectifs" 

Depuis la chute aux mains des paramilitaires le 26 octobre de la ville d'El-Facher, dernier bastion de l'armée au Darfour, l'ONU a fait état de massacres, viols, pillages et déplacements massifs de population.

"Nous nous réveillons en tremblant de peur, les images du massacre nous hantent", a témoigné Amira, mère de quatre enfants réfugiée à Tawila, une ville à environ 70 kilomètres d'El-Facher, où s'entassent les déplacés sous des bouts de tissus transformés en tentes ou en auvent.

"C'étaient des viols collectifs. Des viols collectifs en public, devant tout le monde, et personne ne pouvait les arrêter", a-t-elle raconté.

Des images satellite analysées par le Humanitarian Research Lab (HRL) de l'université américaine de Yale, qui documente la situation à El-Facher depuis le début du siège il y a 18 mois, ont permis de mettre en évidence des atrocités sur place.

Ces rapports ont déclenché l'"indignation générale", a déclaré à l'AFP Nathaniel Raymond, directeur du HRL qui croise les vidéos postées par des paramilitaires "en train de tuer des gens à un volume record" avec les images satellites afin de géolocaliser les exactions.

Le patron de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, s'est indigné des "attaques continues visant le système de santé", affirmant que quatre personnes, dont des enfants, avaient été tuées à l'hôpital pédiatrique de la région de Kernoi, au Darfour, près de la frontière du Tchad.

Pourparlers ou combats ? 

L'émissaire américain pour l'Afrique, Massad Boulos, s'est efforcé ces derniers jours, lors d'un déplacement au Caire, de finaliser une proposition de trêve humanitaire formulée mi-septembre sous son égide par un groupe de médiateurs incluant aussi l'Egypte, l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis.

Ce groupe de médiation, dit du Quad, travaille sur un plan global de paix pour le Soudan, mais ses dernières propositions sont restées lettre morte.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, avait pourtant exhorté mardi les belligérants à "venir à la table des négociations" et "mettre fin à ce cauchemar de violence".

Mais après avoir étudié la proposition de cessez-le-feu, les autorités pro-armée ont affirmé que la guerre allait continuer.

"Les préparatifs pour la bataille du peuple soudanais se poursuivent", a déclaré le ministre de la Défense, Hassan Kabroun.

Le Conseil de souveraineté présidé par le chef de l'armée, le général al-Burhane, a néanmoins présenté un plan pour "faciliter l'accès à l'aide humanitaire" et "la restauration de la sécurité et de la paix dans toutes les régions du Soudan", selon le compte-rendu du ministre.

 "Malnutrition sévère" 

"La situation sur le terrain est très compliquée", a reconnu la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt.

Plus de 71.000 civils ont fui El-Facher depuis sa chute et quelque 12.000 arrivées ont été enregistrées à Tawila, selon l'ONU.

La guerre entre l'armée et les FSR a déjà fait des dizaines de milliers de morts et près de 12 millions de déplacés, selon l'ONU.

La situation des populations déplacées reste critique, a averti l'Unicef en soulignant que 14,6% des enfants de moins de cinq ans souffraient de malnutrition sévère.