Soudan: Compromis politique trouvé, l’espoir peut renaître

Des dirigeants civils soudanais brandissent des documents après la signature d'un premier accord conclu avec les pouvoirs militaires le 5 décembre à Khartoum (Photo, AFP).
Des dirigeants civils soudanais brandissent des documents après la signature d'un premier accord conclu avec les pouvoirs militaires le 5 décembre à Khartoum (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 12 décembre 2022

Soudan: Compromis politique trouvé, l’espoir peut renaître

  • L'émissaire onusien estime que l'accord-cadre du 5 décembre offre une voie pour sortir de l'incertitude provoquée par le coup d'État de 2021
  • Les experts sont sceptiques quant à la tenue d'élections démocratiques et au retour de l'armée dans ses casernes

LONDRES: Les centres du pouvoir soudanais ont signé un accord-cadre qui devrait ramener le pays vers un gouvernement civil après le coup d'État militaire d'octobre 2021. Toutefois, les doutes des ONG et des universitaires, ainsi que les manifestations de rue qui perdurent, mettent en garde contre des attentes trop optimistes.

Dévoilé le 5 décembre dans la capitale Khartoum, l'accord a été signé par les généraux Abdel-Fattah Burhan et Mohammed Hamdan Dagalo, également connu sous le nom de Hemeti, ainsi que par les dirigeants des Forces pour la liberté et le changement (FFC), le plus grand groupe prodémocratie du pays, et 40 autres partis.

L'accord-cadre, qui ouvre la voie à une transition dirigée par des civils, qui prévoit des élections démocratiques et le retour des militaires dans leurs casernes, reconnaît la nécessité d'un contrôle civil total sur tous les aspects de la société, avec un conseil de sécurité et de défense présidé par le Premier ministre.

Réagissant à la nouvelle, Volker Perthes, chef de la Mission intégrée des Nations unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS), a qualifié l'accord de «mesure courageuse», tandis que John Godfrey, ambassadeur des États-Unis au Soudan, a tweeté son soutien à l'accord, qui, selon lui, ouvre une «voie crédible... pour sortir de la crise politique».

Malgré le soutien positif de la communauté internationale et des généraux – puisque Burhan a scandé l'un des slogans des manifestants «les militaires dans leurs casernes» – l'accord n'a toujours pas enthousiasmé de nombreuses composantes de la société civile soudanaise.

Des manifestants soudanais déploient un drapeau national géant en défilant devant le siège de l'ONU dans le quartier de Manshiya, dans la capitale Khartoum, le 3 décembre 2022 (Photo, AFP).

Durant la séance de signature de l'accord dans l'enceinte fortifiée du palais républicain de Khartoum, des manifestants sont descendus dans les rues de la capitale pour dénoncer l'accord considéré comme un moyen pour les généraux de conserver leur pouvoir tout en s'exonérant des conséquences politiques et économiques du coup d'État de 2021.

«L'accord a pour objectif d'établir une autorité entièrement civile, de créer un climat de liberté politique et de parvenir à un accord final avec la plus grande participation politique», a déclaré Al-Wathiq al-Barir, un porte-parole du FFC, à la chaîne BBC la semaine dernière.

Cependant, Kholood Khair, fondatrice et directrice du think tank Confluence Advisory, basé à Khartoum, décrit l'accord comme étant essentiellement «une liste de souhaits de cinq pages», défaillante en raison de ses ambiguïtés et de l'absence de détails.

«Cet accord est censé être basé sur un projet de la Société du barreau du Soudan, mais il s'agit au mieux d'un accord initial, d'un document préliminaire, qui ne précise pas comment parvenir à des résultats conséquents, comme le choix du Premier ministre, les questions de responsabilité financière, de justice transitionnelle et de réforme de la sécurité», a déclaré Mme Khair à Arab News.

Mme Khair considère la nomination d'un Premier ministre et d'un cabinet potentiel comme la première phase de l'accord et une phase particulièrement urgente, étant donné que ces décisions doivent être prises avant que la phase de transition de deux ans ne puisse prendre effet, et ce dans un délai d'un mois.

Alors qu'elle s'attendait à une série d'annexes établissant explicitement les mécanismes de sélection d'un Premier ministre et un programme pour le gouvernement de transition, Mme Khair déclare que l'absence de la phase «vitale» de mise en œuvre l’amène à douter de la viabilité de l'accord.

Le commandant paramilitaire soudanais Mohammed Hamdan Dagalo (Photo, AFP).

«Ce qui a été rendu vraiment difficile, c'est la mesure dans laquelle le gouvernement civil aura l'espace et la capacité de fournir ce que le cadre prétend vouloir, car le simple fait d'être Premier ministre ne revient pas à avoir le pouvoir politique», a-t-elle déclaré à Arab News.

De plus, a-t-elle ajouté, au sein des mouvements prodémocratie, «il y a des désaccords importants, en nombre et en portée, et des zones de divergence. Étant donné la façon dont cet accord s'est produit – à huis clos et sans transparence – la méfiance est grande, car de nombreuses parties impliquées ont perdu la capacité de dire qu'elles ont le soutien de la rue».

Cela pourrait être vital, compte tenu du mécontentement de la société accumulé depuis le coup d'État du 25 octobre 2021, avec plus de 7 000 manifestants blessés, plus de 100 tués, et des prévisions selon lesquelles un tiers de la population aurait besoin d'une aide humanitaire l'année prochaine si la dégradation de l'économie n'était pas stoppée.

Gilbert Achcar, professeur d'études de développement et de relations internationales à la School of Oriental and African Studies de l'université de Londres, partage le scepticisme de Mme Khair quant à la teneur réelle de l'accord.

«Je doute qu'il puisse résoudre le problème. Les conditions sont encore pires qu'elles ne l'étaient après la destitution d'Omar al-Bachir en 2019, ce qui a entraîné une mobilisation contre le coup d'État et le régime militaire qui a suivi», a-t-il indiqué à Arab News.

«L'accord peut dire le contraire, mais ceux qui s'opposent frontalement au coup d'État poursuivent la lutte contre les militaires et rejettent l'accord, qu'ils considèrent comme un moyen pour les militaires de légitimer leur pouvoir.»

Des manifestants soudanais prient devant le siège de l'ONU dans le quartier de Manshiya, dans la capitale Khartoum, le 3 décembre 2022 (Photo, AFP).

À l'instar de Mme Khair, M. Achcar s'interroge sur la logique des omissions dans le texte de l'accord. Par exemple, il note que l'accord stipule que les militaires doivent retourner dans les casernes, mais il souligne que les engagements ne sont associés ni à un calendrier ni à des mesures concrètes. Il considère plutôt l'accord comme une tactique des militaires pour «gagner du temps» tout en divisant l'opposition.

«Le coup d'État a été un échec total selon toute norme objective, il s'est produit à un moment où le pays était déjà confronté à une grave crise économique, et a eu lieu sans aucun signe qu'il recevrait un soutien populaire – et il n'a pas reçu de soutien populaire», a déclaré M. Achcar à Arab News.

«Par conséquent, les militaires n'ont pas été en mesure de maintenir la paix civile, et ils ont opté pour cet accord alors qu'ils étaient confrontés à un échec.» 

«Ils devaient agir, et en approuvant cet accord avec les groupes prodémocratie, tout ce qu'il leur a coûté, ce sont quelques promesses vides qui garantiront que le gouvernement civil assumera la responsabilité de la crise économique et sociale qui engloutit le Soudan.»

En bref

* Le Soudan est en crise depuis que l'armée a renversé le dictateur Omar al-Bachir en 2019. 

* Les dirigeants militaires et civils ont convenu de former un gouvernement de transition conjoint.

* L'arrangement s'est terminé à la fin de l'année dernière lorsque les militaires ont renversé le Premier ministre Abdalla Hamdok.

* Hamdok a été réintégré au début de l'année, mais a démissionné à la suite de manifestations de masse.

Mme Khair considère que le «vrai gagnant» de l'accord est Hemeti. Commandant du groupe paramilitaire des Forces de soutien rapide (FSR), il a bénéficié de promotions rapides après le coup d'État de 2019 qui a renversé Al-Bachir. Malgré les multiples accusations de crimes contre l'humanité lancées par des groupes tels que Human Rights Watch, Hemeti a réussi en jouant sur son soutien national et international.

«Il est vraiment inquiétant de voir que le cadre reconnaît les FSR comme l'une des quatre forces militaires du Soudan, avec son propre commandant et responsable devant le chef d'État civil, d'autant plus qu'il ne s'agit pas d'une disposition particulièrement bien définie dans l'accord», a indiqué Mme Khair à Arab News.

«Les généraux sont les seuls véritables partisans et ils ont confié la tâche aux FFC, qui doivent maintenant tenir leurs promesses, et ce très rapidement, dans un environnement politique fragile, avec un accord précaire qui décharge les généraux du coup d'État et de la charge de gouverner.»

«Les FFC ont tout à offrir et tout à perdre ; ils ne sont pas gagnants dans cette affaire», a poursuivi Mme Khair.

«[L’accord] met symboliquement fin au coup d'État, mais si les protestations et les conflits au sein des camps rebelles se poursuivent, dans quelle mesure peut-on dire que cela répond aux besoins après la fin du coup d'État? Il ne s'agit en fait que d'un changement dans la dynamique de l'après-coup d'État.»

Le chef de l'armée soudanaise Abdel Fattah Al-Burhan (au centre à droite) et le commandant paramilitaire Mohammed Hamdan Dagalo (au centre à gauche) (Photo, AFP).

Pour sa part, M. Achcar estime que les circonstances permettent un certain optimisme, en supposant que le FFC et les groupes prodémocratie chercheront à rallier les acteurs de la société civile qui se sont en grande partie opposés à l'accord, mais il est lui aussi sceptique quant à leur capacité à y parvenir.

«Après 30 ans de régime militaire et tous les privilèges qui en découlent, l'idée qu'ils puissent remettre tout cela aux mains des militaires semble fantaisiste», a-t-il déclaré à Arab News.

Comme on pouvait s'y attendre, le gouvernement soudanais est plus optimiste quant à l'accord.

«La signature de l'accord-cadre politique peut être considérée comme une étape essentielle vers le retour à un gouvernement de transition dirigé par des civils au Soudan», a déclaré à Arab News Ola Elgindi, du service médias et culture de l'ambassade du Soudan à Londres.

«On peut également considérer qu'il s'agit d'une preuve claire de la détermination de l'armée soudanaise à céder la place aux parties civiles soudanaises pour former un accord final.»

«Dans la prochaine phase, nous espérons que l'accord inclura d'autres parties civiles favorables à la transition qui n'ont pas encore signé l'accord», a-t-elle affirmé.

«À tous ceux qui mettent en doute la viabilité de cet accord, nous disons qu'il est encore trop tôt pour juger et faire des suppositions. Nous espérons vivement que les choses se passeront bien.»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


CIJ: l'impartialité de l'UNRWA suscite de «sérieux doutes» selon les Etats-Unis

En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence". (AFP)
En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence". (AFP)
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  • La CIJ, située à La Haye (Pays-Bas), a ouvert lundi sa semaine d'audiences plus de 50 jours après l'instauration d'un blocus total sur l'aide entrant dans la bande de Gaza ravagée par la guerre
  • Israël, qui ne participe pas à ces audiences, a dénoncé lundi une "persécution systématique" de la CIJ

LA HAYE: Un représentant des Etats-Unis a fait part mercredi à la Cour internationale de Justice de "sérieux doutes" concernant l'impartialité de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) lors d'audiences consacrées aux obligations humanitaires d'Israël envers les Palestiniens.

"L'impartialité de l'UNRWA suscite de sérieux doutes, du fait d'informations selon lesquelles le Hamas a utilisé les installations de l'UNRWA et que le personnel de l'UNRWA a participé à l'attentat terroriste du 7 octobre contre Israël", a déclaré Josh Simmons, de l'équipe juridique du département d'État américain.

La CIJ, située à La Haye (Pays-Bas), a ouvert lundi sa semaine d'audiences plus de 50 jours après l'instauration d'un blocus total sur l'aide entrant dans la bande de Gaza ravagée par la guerre.

Israël, qui ne participe pas à ces audiences, a dénoncé lundi une "persécution systématique" de la CIJ.

M. Simmons a déclaré aux juges qu'Israël avait "de nombreuses raisons" de mettre en doute l'impartialité de l'UNRWA.

"Il est clair qu'Israël n'a aucune obligation d'autoriser l'UNRWA à fournir une assistance humanitaire", a-t-il déclaré.

Israël a promulgué une loi interdisant à l'UNRWA, d'opérer sur le sol israélien, après avoir accusé certains membres du personnel d'avoir participé aux attaques du Hamas le 7 octobre 2023, qui a déclenché le conflit.

Une série d'enquêtes, dont l'une menée par l'ancienne ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna, a révélé des "problèmes de neutralité" à l'UNRWA, mais a souligné qu'Israël n'avait pas fourni de preuves de son allégation principale.

Philippe Lazzarini, directeur de l'UNRWA, a déclaré mardi que plus de 50 membres de son personnel à Gaza avaient été maltraités et utilisés comme boucliers humains alors qu'ils étaient détenus par l'armée israélienne.

Lors de sa déposition face à la Cour, Diégo Colas, représentant la France, a appelé Israël à lever "sans délai" son blocage de l'aide vers la bande de Gaza".

"L'ensemble des points de passage doivent être ouverts, le travail des acteurs humanitaires doit être facilité, et le personnel doit être protégé conformément aux droits internationaux", a-t-il déclaré .

"Conséquences mortelles" 

Israël contrôle tous les flux d'aide internationale, vitale pour les 2,4 millions de Palestiniens de la bande de Gaza frappés par une crise humanitaire sans précédent, et les a interrompus le 2 mars dernier, quelques jours avant l'effondrement d'un fragile cessez-le-feu après 15 mois de combats incessants.

"L'interdiction totale de l'aide et des fournitures humanitaires décrétée par les autorités israéliennes depuis le 2 mars a des conséquences mortelles pour les civils de Gaza", a déclaré dans un communiqué Claire Nicolet, responsable de la réponse d'urgence de l'ONG Médecins sans Frontières dans la bande de Gaza.

"Les autorités israéliennes utilisent l'aide non seulement comme une monnaie d'échange, mais aussi comme une arme de guerre et un moyen de punition collective pour plus de 2 millions de personnes vivant dans la bande de Gaza," a-t-elle ajouté.

En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence".

La résolution demande à la CIJ de clarifier les obligations d'Israël concernant la présence de l'ONU, de ses agences, d'organisations internationales ou d'États tiers pour "assurer et faciliter l'acheminement sans entrave des fournitures urgentes essentielles à la survie de la population civile palestinienne".

Les avis consultatifs de la CIJ ne sont pas juridiquement contraignants, mais celui-ci devrait accroître la pression diplomatique sur Israël.

En juillet dernier, la CIJ avait aussi rendu un avis consultatif jugeant "illégale" l'occupation israélienne des Territoires palestiniens, exigeant qu'elle cesse dès que possible.


Après la panne géante, les énergies renouvelables sur le banc des accusés en Espagne

Des passagers attendent avant de monter dans leur train à la gare de Sants à Barcelone, le 29 avril 2025, au lendemain d'une panne d'électricité massive qui a touché toute la péninsule ibérique et le sud de la France. (Photo par Josep LAGO / AFP)
Des passagers attendent avant de monter dans leur train à la gare de Sants à Barcelone, le 29 avril 2025, au lendemain d'une panne d'électricité massive qui a touché toute la péninsule ibérique et le sud de la France. (Photo par Josep LAGO / AFP)
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  • Deux jours après la panne géante qui a touché la péninsule, la nature du mix énergétique ibérique est au cœur de vifs débats mercredi en Espagne.
  • Dans le viseur de ces deux quotidiens, mais aussi des partis d'opposition, se trouve la politique énergétique mise en place depuis plusieurs années par le gouvernement du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez.

MADRID : L'essor des énergies renouvelables a-t-il fragilisé le réseau électrique espagnol ? Deux jours après la panne géante qui a touché la péninsule, la nature du mix énergétique ibérique est au cœur de vifs débats mercredi en Espagne, malgré les messages rassurants des autorités.

« Le manque de centrales nucléaires et la multiplication par dix des énergies renouvelables ont mis à terre le réseau électrique », assure en une le quotidien conservateur ABC mercredi matin. « Les alertes sur les renouvelables depuis cinq ans » ont été « ignorées », regrette de son côté El Mundo, également classé à droite.

Dans le viseur de ces deux quotidiens, mais aussi des partis d'opposition, se trouve la politique énergétique mise en place depuis plusieurs années par le gouvernement du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez, qui a fait de l'Espagne l'un des champions européens de la transition verte.

Selon le gestionnaire du réseau électrique espagnol REE, le solaire et l'éolien ont représenté en 2024 près de 40 % du mix électrique espagnol. C'est près de deux fois plus qu'en 2014, et près du double également de la part du nucléaire, tombée l'an dernier à 20 %. 

Cette évolution est défendue par l'exécutif, qui s'est engagé à fermer toutes les centrales nucléaires d'ici dix ans, mais elle est source de tensions dans le pays, plusieurs rapports ayant pointé ces derniers mois de possibles risques en l'absence de mesures fortes pour adapter le réseau.

- Une énergie « sûre » ?

Dans son document financier annuel publié fin février, Redeia, la maison-mère de REE, avait ainsi mis en garde contre « la forte pénétration de la production renouvelable sans les capacités techniques nécessaires à un comportement adéquat face aux perturbations ».

Cela pourrait « provoquer des coupures de production », qui « pourraient devenir sévères, allant jusqu'à entraîner un déséquilibre entre la production et la demande, ce qui affecterait significativement l'approvisionnement en électricité » de l'Espagne, avait-elle écrit. 

Un message relayé par l'organisme espagnol de la concurrence (CNMC) dans un rapport de janvier. « À certains moments, les tensions du réseau de transport d'électricité ont atteint des valeurs maximales proches des seuils autorisés, dépassant même ces seuils à certains moments », avait écrit l'organisme.

Après la coupure de lundi, certains experts du secteur se sont interrogés sur un éventuel déséquilibre entre production et demande (difficile à corriger dans un réseau où l'éolien et le solaire ont une place prépondérante) qui aurait pu contribuer à l'effondrement du système électrique espagnol.

Dans un entretien accordé mercredi matin à la radio Cadena Ser, Beatriz Corredor, la présidente de Redeia et REE (l'ex-députée socialiste) a cependant assuré que la production d'énergies renouvelables était « sûre ».

« Relier l'incident si grave de lundi à une pénétration des énergies renouvelables n'est pas vrai, ce n'est pas correct », a-t-elle insisté, en assurant que le rapport de février ne faisait que dresser la liste de risques potentiels, comme l'y oblige la législation. 

- « Ignorance » -

Mardi déjà, Pedro Sánchez avait lui aussi défendu le modèle énergétique mis en œuvre par son gouvernement, rappelant que la cause précise de la panne qui a provoqué le chaos au Portugal et en Espagne durant de longues heures lundi n'était toujours pas connue à ce stade.

« Ceux qui lient cet incident au manque de nucléaire mentent franchement ou démontrent leur ignorance », a assuré le dirigeant socialiste.

« Les centrales nucléaires, loin d'être une solution, ont été un problème » durant la panne, car « il a été nécessaire de rediriger vers elles de grandes quantités d'énergie pour maintenir leurs réacteurs stables », a insisté le chef du gouvernement. 

Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la panne depuis deux jours, dont celle d'une cyberattaque. Mardi, la justice espagnole a ouvert une enquête pour déterminer si la panne avait été provoquée par un « sabotage informatique » susceptible d'être qualifié de « délit terroriste ».

REE estime cependant que cette hypothèse est peu crédible. « Au vu des analyses que nous avons pu réaliser avec l'aide notamment du Centre national du renseignement espagnol (CNI), nous pouvons écarter un incident de cybersécurité », a ainsi assuré le gestionnaire.

D'après REE, l'équivalent de 60 % de la consommation électrique de l'Espagne, soit 15 gigawatts, a disparu en l'espace de cinq secondes seulement lors de la panne survenue lundi à 12 h 33 (11 h 33 GMT), un phénomène qualifié d'« inédit » et « totalement extraordinaire ».


Des rapports internes concluent à un climat antisémite et anti-musulman à Harvard

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
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  • Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël
  • Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants

NEW YORK: Deux rapports distincts sur Harvard publiés mardi par l'université ont établi qu'un climat antisémite et anti-musulman s'était installé sur le campus de la prestigieuse université américaine, dans le viseur de Donald Trump, et la pressent d'agir pour y remédier.

Ces deux rapports de plusieurs centaines de pages, construits notamment à partir de questionnaires et de centaines de témoignages d'étudiants et d'encadrants menés depuis janvier 2024, sont rendus au moment où l'université implantée près de Boston (nord-est) s'est attiré les foudres de Donald Trump, qui l'a dernièrement dépeinte en "institution antisémite d'extrême gauche", "foutoir progressiste" et "menace pour la démocratie".

Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël après l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants, a établi que les deux phénomènes "ont été alimentés, pratiqués et tolérés, non seulement à Harvard, mais aussi plus largement dans le monde universitaire".

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël".

Un autre groupe de travail distinct, lui consacré aux positions anti-musulmans, anti-arabes et anti-Palestiniens, a conclu à "un sentiment profondément ancré de peur parmi les étudiants, les enseignants et le personnel". Les personnes interrogées décrivent "un sentiment de précarité, d'abandon, de menace et d'isolement, ainsi qu'un climat d'intolérance omniprésent", écrivent ses auteurs.

"Harvard ne peut pas - et ne va pas - tolérer l'intolérance. Nous continuerons à protéger tous les membres de notre communauté et à les préserver du harcèlement", s'engage dans une lettre accompagnant les deux rapports le président de Harvard, Alan Garber, à l'initiative des deux rapports, en promettant de "superviser la mise en oeuvre des recommandations" préconisées.

Harvard, l'université la plus ancienne des Etats-Unis et une des mieux classées au monde, s'est distinguée en étant la première à attaquer en justice l'administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d'exigences du président.

Donald Trump, qui reproche aux universités d'être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d'admission des étudiants, les embauches d'enseignants ou encore les programmes.

L'accusation d'antisémitisme est fréquemment employée par son administration pour justifier ses mesures contre les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que contre certains étudiants étrangers liés aux manifestations contre la guerre à Gaza.