Les cours criminelles, bientôt généralisées, divisent

«On ne supprime pas la cour d'assises», assure le ministère de la Justice, les crimes les plus graves et les appels échappant toujours à la compétence des cours criminelles départementales (Photo, AFP).
«On ne supprime pas la cour d'assises», assure le ministère de la Justice, les crimes les plus graves et les appels échappant toujours à la compétence des cours criminelles départementales (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Jeudi 22 décembre 2022

Les cours criminelles, bientôt généralisées, divisent

  • Héritage de la Révolution française, le jury populaire disparaîtra avec cette réforme pour tous les jugements en première instance de crimes punis jusqu'à vingt ans de réclusion
  • Dans les juridictions, l'inquiétude est forte face à l'insuffisance des effectifs et de salles d'audience

PARIS: Les viols bientôt jugés sans jurés: déjà expérimentées dans quelques départements, les cours criminelles seront généralisées partout en France le 1er janvier avec l'objectif de traiter plus vite certains crimes auparavant dévolus aux assises, une révolution judiciaire qui divise les professionnels.

À l'approche de son entrée en vigueur, ses détracteurs se mobilisent pour "sauver les assises", à travers des motions, une pétition ou une proposition de loi de la députée EELV Francesca Pasquini.

Héritage de la Révolution française, le jury populaire disparaîtra avec cette réforme pour tous les jugements en première instance de crimes punis jusqu'à vingt ans de réclusion, des viols essentiellement, soit environ la moitié des affaires pour lesquelles des citoyens sont appelés actuellement à siéger.

"On ne supprime pas la cour d'assises", assure le ministère de la Justice, les crimes les plus graves et les appels échappant toujours à la compétence des cours criminelles départementales (CCD). "Il ne s'agit pas de remettre en cause les fondements de notre justice criminelle, il s'agit d'être pragmatiques".

Lancées en 2019 à titre expérimental dans une poignée de départements, ces cours ont permis "un gain assez important" par rapport aux assises en temps de journées d'audience mais aussi de délais d'audiencement, sans rogner sur l'oralité et la qualité des débats, se satisfait la Chancellerie.

Les 387 affaires jugées par les cours criminelles (à 88% des viols, 5% des coups mortels, 2% des vols à main armée...) ont nécessité 863 jours d'audience, quand il en aurait fallu 982 aux cours d'assises, selon le comité d'évaluation et de suivi des CCD.

«Recrutement substantiel»

Soit pour l'Union syndicale des magistrats (USM) un gain "minime" et "mis à néant par un taux d'appel plus important", de 21% pour les cours criminelles contre 15% pour les assises selon les premières évaluations, quand les peines prononcées et taux d'acquittement sont similaires.

Le syndicat majoritaire, favorable sur le principe aux cours criminelles, s'oppose à leur généralisation "sans moyens dédiés". Le comité d'évaluation a aussi pointé "la nécessité impérative" d'un "recrutement substantiel de magistrats et de greffiers".

Avec cinq magistrats (dont jusqu'à deux peuvent être honoraires) contre trois aux assises, ces cours "viennent ponctionner une ressource rare", souligne le président de l'USM, Ludovic Friat, qui craint "l'embolie" à moyen terme des cabinets des juges appelés à y siéger.

Dans les juridictions, l'inquiétude est forte face à l'insuffisance des effectifs et de salles d'audience. "C'est surtout difficile dans les petites cours d'appel", remarque Frédéric Fèvre, président de la Conférence nationale des procureurs généraux.

Compte tenu des délais d'audiencement, les cours criminelles ne fonctionneront pas à plein régime avant "le second semestre 2023, voire 2024", ce qui "laisse du temps" pour "s'acculturer" à la réforme, veut rassurer la Chancellerie.

À la cour d'appel de Paris, les premières audiences ne se tiendront pas avant "mars 2023", indique le parquet général, qui envisage que "six sessions sur 35 soient réservées à la CCD" au premier semestre, soit "une trentaine d'affaires".

Les cours criminelles semblent avoir eu jusque-là un impact limité sur la pratique de la correctionnalisation (requalifier un crime en délit pour le faire juger devant un tribunal), ainsi que sur le désengorgement des assises, le "'stock' resté très important" de dossiers obligeant à tenir des sessions en parallèle, relève Frédéric Fèvre.

Mais "c'est une bonne réforme et on souhaite qu'elle réussisse. L'équilibre va se faire naturellement", estime-t-il.

Un avis loin d'être unanime au sein de la magistrature.

"Le problème fondamental, c'est la coupure avec les citoyens", regrette une présidente de cour criminelle dans un département pilote, qui se demande si elle va rester à ce poste.

Les assises permettent de "restaurer la confiance" en la justice et de "déconstruire complètement les idées reçues sur le viol" par exemple, ajoute cette magistrate, déplorant une généralisation "complètement à contre-courant de la société actuelle".

"On a envie de penser que sur un sujet aussi grave, les crimes sexuels, on prenne le temps de comprendre ce qui s'est passé. Ça ne sera pas permis dans des audiences au rabais parce qu'inéluctablement, bien qu'on s'en défende, les cours criminelles deviendront de grosses correctionnelles", tacle Karine Bourdié, coprésidente de l'Association des avocats pénalistes.


Colère agricole en France: Macron reçoit les syndicats, des blocages persistent

Des tracteurs lors d'une manifestation organisée par le syndicat agricole Coordination Rurale près du Mont-Saint-Michel, dans le nord-ouest de la France, le 18 décembre 2025. (AFP)
Des tracteurs lors d'une manifestation organisée par le syndicat agricole Coordination Rurale près du Mont-Saint-Michel, dans le nord-ouest de la France, le 18 décembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Emmanuel Macron a reçu les syndicats agricoles, opposés à l’accord UE-Mercosur, dans un contexte de forte colère liée aux crises sanitaires, notamment la dermatose bovine
  • Les blocages routiers se poursuivent dans le Sud-Ouest, alors que de nouveaux cas de la maladie sont confirmés et que la mobilisation agricole se prolonge

PARIS: Le président français Emmanuel Macron a reçu mardi les syndicats agricoles pour parler de l'accord UE-Mercosur, auquel ils sont opposés, tandis que des axes routiers sont toujours bloqués pour protester contre le traitement par les autorités de l'épizootie de dermatose bovine.

"L'objet du rendez-vous, c'était d'essayer d'éteindre un peu le feu qui est partout dans les campagnes", a souligné Stéphane Galais, porte-parole national de la Confédération paysanne - un syndicat classé à gauche -, à la sortie de la rencontre, ajoutant qu'il fallait pour cela "des mesures structurelles fortes".

Les syndicats disent avoir par ailleurs rappelé au chef de l'Etat "l'extrême tension" et la "colère" du monde agricole et que des réponses étaient attendues "dès les premiers jours de janvier" sur le Mercosur mais aussi sur les crises sanitaires, au premier rang desquelles la dermatose bovine et la grippe aviaire.

C'était la première rencontre entre le chef de l'Etat et les syndicats agricoles depuis début décembre et l'amorce de la crise qui secoue l'élevage français, face à la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

C'était aussi la première depuis l'annonce, jeudi dernier, du report a priori au 12 janvier de la signature du traité décrié entre l'UE et des pays du Mercosur.

Cet accord faciliterait l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel et soja sud-américains, ce qui inquiète les filières concernées, lesquelles affirment que ces produits ne respectent pas les mêmes normes que les produits européens.

L'accord permettrait en revanche aux Européens d'exporter davantage de véhicules, machines, vins et spiritueux en Amérique du Sud.

Sur le terrain, la mobilisation a connu un léger regain mardi (53 actions mobilisant 1.600 personnes, selon le ministère de l'Intérieur) par rapport à lundi (35 actions mobilisant 1.200 personnes), mais elle reste nettement inférieure à celle de la semaine dernière (110 actions jeudi).

Certains agriculteurs sont mobilisés depuis plus de 10 jours, notamment contre l'abattage total des troupeaux dans lesquels des cas de DNC sont détectés dans le Sud-Ouest.

Mardi, le ministère de l'Agriculture a confirmé un nouveau cas de la maladie en Haute-Garonne, portant le bilan total à 115 foyers enregistrés depuis juin en France. Ce dernier troupeau concerné a été abattu.

Dans le Sud-Ouest, des blocages d'autoroute étaient notamment maintenus sur l'A63 près de Bordeaux ou sur l'A64 au sud de Toulouse ou près de Bayonne.

Au sud de Bordeaux, les manifestants de la branche locale du syndicat Coordination rurale - classé à droite - ont dit vouloir organiser un réveillon et une messe de Noël mercredi soir sur leur barrage, à l'instar des agriculteurs mobilisés près de Toulouse.


Mercosur: les syndicats rencontrent Macron à l'Elysée, la dermatose en toile de fond

Des agents de la police nationale française bloquent une route alors que des agriculteurs manifestent contre l'accord UE-Mercosur, alors que le président français Emmanuel Macron rencontre les lecteurs du quotidien « La Voix du Nord », à Arras, dans le nord de la France, le 19 novembre 2025. (AFP)
Des agents de la police nationale française bloquent une route alors que des agriculteurs manifestent contre l'accord UE-Mercosur, alors que le président français Emmanuel Macron rencontre les lecteurs du quotidien « La Voix du Nord », à Arras, dans le nord de la France, le 19 novembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Emmanuel Macron reçoit les syndicats agricoles, opposés à l’accord UE-Mercosur, dont la signature a été reportée, mais les tensions restent fortes malgré les concessions évoquées par le gouvernement
  • La rencontre se déroule sur fond de crise sanitaire liée à la dermatose bovine et de blocages agricoles persistants, avec une remobilisation annoncée début janvier

PARIS: Emmanuel Macron reçoit mardi après-midi les syndicats agricoles pour parler de l'accord UE-Mercosur auquel ils sont opposés mais le sujet de la dermatose bovine sera difficile à éviter au regard des blocages routiers qui persistent sur le terrain.

La FNSEA, les Jeunes agriculteurs (JA), la Coordination rurale et la Confédération paysanne sont reçus à 16H30, ont-ils annoncé à l'AFP.

C'est la première rencontre entre le chef de l'Etat et les syndicats depuis début décembre et l'amorce de la crise qui secoue l'élevage français, face à la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

C'est aussi la première depuis l'annonce jeudi dernier du report de la signature du traité décrié entre l'UE et des pays du Mercosur, après une mobilisation de plusieurs milliers d'agriculteurs avec leurs tracteurs à Bruxelles.

Cet accord faciliterait l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel et soja sud-américains, ce qui alarme les filières concernées qui affirment que ces produits ne respectent pas les mêmes normes, notamment environnementales et sanitaires, que les produits européens.

Il permettrait en revanche aux Européens d'exporter davantage de véhicules, machines, vins et spiritueux en Amérique du Sud.

Emmanuel Macron s'était félicité du report de la signature, demandant que les "avancées" réclamées par la France, mais aussi l'Italie, se concrétisent afin que "le texte change de nature".

Les syndicats agricoles sont remontés depuis des mois et demandaient au président de prendre clairement position, après que celui-ci eut déclaré en novembre être "plutôt positif" quant à la possibilité d'accepter l'accord.

Emmanuel Macron avait rencontré des représentants de différents syndicats à Toulouse mi-novembre, des manifestations ayant changé le programme d'un déplacement qui devait être consacré aux réseaux sociaux et au spatial.

- "Mercosur = NON" -

"Le message de la FNSEA au Président de la République restera inchangé, ferme et clair: Mercosur = NON", a indiqué mardi le syndicat dominant dans une déclaration à l'AFP. Son président Arnaud Rousseau fera une déclaration à la presse à l'issue. Il avait déjà rencontré le président mi-novembre.

La Coordination rurale et la Confédération paysanne, fer de lance de la contestation de la gestion de la dermatose par l'Etat et opposants historiques au traité UE-Mercosur, ont ensuite confirmé à l'AFP leur venue.

Pour ces deux syndicats, c'est la première rencontre entre le président et des représentants nationaux depuis le dernier Salon de l'agriculture.

Plusieurs sources diplomatiques ont indiqué que la nouvelle échéance visée pour la signature était désormais le 12 janvier au Paraguay.

"Nous ne nous contentons pas de nous opposer à cet accord. En l'état, nous obtenons des concessions inédites au bénéfice de nos agriculteurs, que cet accord soit signé ou qu'il ne le soit pas", a déclaré lors des questions au gouvernement mardi Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, citant des "mesures miroir pour garantir la réciprocité", des "contrôles douaniers" et des clauses de sauvegarde annoncées en septembre par la Commission européenne.

Les agriculteurs français ont déjà prévenu qu'ils se remobiliseraient début janvier, jugeant ces réponses insuffisantes.

Mais certains sont mobilisés depuis plus de 10 jours sur le terrain, notamment contre la stratégie gouvernementale pour lutter contre la dermatose bovine dans le Sud-Ouest, mais aussi ponctuellement plus au nord, contre le Mercosur et les autres crises qui pèsent sur le monde agricole.

En Gironde, la Coordination rurale (CR33) a annoncé organiser un "réveillon de Noël façon auberge espagnole" sur l'A63 au sud de Bordeaux.

"Le côté festif, ça permet de durer plus longtemps", résume à l'AFP Jean-Paul Ayres, porte-parole de la CR33, alors qu'un terrain de moto-cross a été improvisé sur le terre-plein central de l'autoroute.

Les bureaux centraux des syndicats se sont bien gardés d'appeler à lever les blocages, laissant les sections locales décider et appelant simplement au "repos" de leurs troupes et à une "trêve" pour certains pour mieux reprendre en janvier si nécessaire.

La mobilisation des agriculteurs a connu un léger regain lundi (35 actions mobilisant 1.200 personnes) par rapport à dimanche (23 actions), mais elle est nettement en baisse comparée à la semaine dernière (110 actions jeudi, 93 vendredi).


Vol au Louvre: une grille de protection installée sur la fenêtre empruntée par les cambrioleurs

Des ouvriers installent des grilles de protection en fer sur les fenêtres de la galerie d'Apollon du musée du Louvre, côté quai François Mitterrand, à Paris, le 23 décembre 2025, quelques semaines après que des voleurs aient utilisé un monte-meubles pour s'introduire dans le musée. (AFP)
Des ouvriers installent des grilles de protection en fer sur les fenêtres de la galerie d'Apollon du musée du Louvre, côté quai François Mitterrand, à Paris, le 23 décembre 2025, quelques semaines après que des voleurs aient utilisé un monte-meubles pour s'introduire dans le musée. (AFP)
Short Url
  • Une grille de protection a été installée sur la porte-fenêtre du Louvre utilisée lors du vol spectaculaire de bijoux du 19 octobre, dont le butin de 88 millions d’euros reste introuvable
  • Le musée renforce sa sécurité après de vives critiques : grilles supplémentaires, dispositifs anti-intrusion et vidéosurveillance accrue prévue d’ici 2026

PARIS: Une grille de protection a été installée mardi matin sur la porte-fenêtre du musée du Louvre à Paris, empruntée par les cambrioleurs lors du spectaculaire vol de bijoux du 19 octobre, a constaté un journaliste de l'AFP.

Le 19 octobre, quatre malfaiteurs ont réussi à approcher le bâtiment en camion-élévateur et à hisser deux d'entre eux jusqu'à cette fenêtre menant à la galerie d'Apollon, qui donne sur les quais de Seine, grâce à une nacelle.

Ils ont dérobé huit joyaux de la Couronne de France. Le butin, estimé à 88  millions d'euros, reste introuvable.

Depuis le cambriolage, la sécurité du musée le plus visité au monde se retrouve au cœur des critiques, le braquage ayant révélé une série de défaillances.

La grille de protection "est l'une des mesures d'urgence décidées après le vol ", a précisé mardi à l'AFP Francis Steinbock, administrateur général adjoint du musée.

Des "réflexions" sont en cours concernant la "sécurisation sur les autres fenêtres", a ajouté le responsable.

La présidente du Louvre, Laurence des Cars, avait assuré la semaine dernière devant les sénateurs français qu'une grille serait reposée "avant Noël". Elle avait précisé que la précédente avait été retirée en 2003-2004, lors d'importants travaux de restauration.

Autre chantier majeur: le renforcement de la vidéosurveillance sur les façades du palais. "Nous avons annoncé un dispositif d'une centaine de caméras positionnées autour du palais. Le marché a été signé et l'installation pourra débuter tout au long de l'année 2026 ", a précisé Francis Steinbock.

La semaine dernière, le Louvre avait également annoncé l'achèvement de la mise en place de dispositifs anti-intrusion autour du musée.

Du 15 au 18 décembre, les agents du Louvre étaient en grève pour réclamer de meilleures conditions de travail et des moyens supplémentaires pour la sécurité. Le mobilisation a été levée vendredi, mais les négociations se poursuivent entre les syndicats et le ministère de la Culture pour répondre aux inquiétudes des agents.