Rétrospective 2022: Un Emmanuel Macron encore groggy veut prouver en 2023 sa capacité à réformer

Emmanuel Macron prononce un discours à bord du porte-avions français Charles de Gaulle (Photo, AFP).
Emmanuel Macron prononce un discours à bord du porte-avions français Charles de Gaulle (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 01 janvier 2023

Rétrospective 2022: Un Emmanuel Macron encore groggy veut prouver en 2023 sa capacité à réformer

  • L'année 2022 laisse le chef de l'Etat un peu groggy: réélu pour un second quinquennat, mais au terme d'une campagne sans élan
  • Le gouvernement guette avec appréhension l'étincelle qui risquerait de transformer cette inquiétude en colère

PARIS: Ça passe ou ça casse. Encore en quête de la martingale pour gouverner sans majorité absolue, Emmanuel Macron affronte début 2023, avec les retraites, le vrai test de sa capacité à réformer. Mais son cap est incertain et la course à sa succession déjà enclenchée.

L'année 2022 laisse le chef de l'Etat un peu groggy: réélu pour un second quinquennat, mais au terme d'une campagne sans élan, suivie d'une victoire en demi-teinte aux législatives.

Et elle s'achève dans un climat pesant, plombé par la guerre en Ukraine, l'inflation, un début de pénuries et la menace de coupures d'électricité en janvier -- sans compter une triple épidémie, de Covid, grippe et bronchiolite qui pèse sur un système hospitalier à bout de souffle.

Le gouvernement guette avec appréhension l'étincelle qui risquerait de transformer cette inquiétude en colère.

"L'année 2023 s'annonce périlleuse pour le président", confirme à l'AFP Adélaïde Zulfikarpasic, directrice générale de l'institut de sondages BVA France.

"La grande question", ajoute-t-elle, est de savoir si les multiples sources de mécontentement vont coaguler autour des mobilisations annoncées pour janvier contre la réforme "hautement inflammable" des retraites, et déboucher sur une "convergence des luttes".

Comme beaucoup d'analystes, elle ne se risque pas à un pronostic. Mais note que la société apparaît "fatiguée, lasse" après une succession de crises, sans que l'on puisse prédire si ce mal-être est "propice à de grands mouvements sociaux ou plutôt à une certaine résignation".

Méthode refondée

Emmanuel Macron, qui n'avait pas pu mener à bien son chantier de réforme des retraites lors du premier quinquennat, a fait du report à 65 ans de l'âge de départ l'un des principaux axes de sa furtive campagne. Et le marqueur de son réformisme face à ceux qui le disent moins "disruptif" qu'en 2017.

Aux figures de son camp qui s'inquiètent d'un déficit de "pédagogie", comme le patron du MoDem François Bayrou, ou qui poussent au compromis pour "embarquer" la CFDT, le président répète que le débat a été tranché lors de sa victoire en avril.

Omettant qu'il a bénéficié d'un vote de barrage face à la cheffe du Rassemblement national Marine Le Pen. Et qu'il n'a emporté, aux législatives de juin, qu'une majorité relative, ce qui contraint le gouvernement à batailler texte par texte, et à faire adopter ses budgets sans vote, à coups de 49.3, face à des oppositions de gauche comme d'extrême droite ragaillardies.

Emmanuel Macron a promis une "méthode refondée" -- moins d'injonctions verticales, plus de compromis et de concertation --, mais pour l'instant ses propositions d'union nationale, de coalition et même d'"alliance" ciblée avec la droite sur quelques textes clés ont été rejetées.

Dès lors, le chef de l'Etat a dès septembre fait planer la menace d'une dissolution de l'Assemblée nationale.

Mais avec le temps, le camp présidentiel se montre plus confiant.

"Pourquoi dissoudre? Les dossiers, ils avancent", lance-t-on dans l'entourage du président. "On trouve des compromis avec les différents groupes", constate ce conseiller, évoquant le vote des lois sur le pouvoir d'achat, l'assurance-chômage ou sur les crédits pour les forces de l'ordre.

Pas de vision

Le gouvernement espère que la droite permettra aussi de faire passer les réformes des retraites et de l'immigration, tandis qu'un soutien ponctuel à gauche suffira sur les énergies renouvelables.

La dissolution n'interviendra que "si ça devient le bordel", "qu'on est bloqués", "ce qui n'est pas le cas", estime dès lors un poids lourd de l'exécutif.

Emmanuel Macron, accaparé par ses engagements internationaux où il se pose en médiateur pour la paix dans cette Europe ébranlée par la guerre, fait mine de laisser une certaine autonomie à sa Première ministre Elisabeth Borne.

Mais il reste en fait omniprésent, fixant la ligne dure sur les retraites et s'exprimant quand il pense que l'action du gouvernement n'imprime pas dans l'opinion -- sur l'écologie -- ou fait fausse route -- sur la menace de coupures de courant.

"Ce qui est alarmant pour Macron", c'est que "personne n'a senti de différence" dans sa "méthode", explique d'ailleurs Adélaïde Zulfikarpasic. Et alors que les Français estimaient majoritairement par le passé qu'il savait où il allait, il y a désormais le "sentiment qu'il n'y a pas de vision".

Dernière difficulté: la Constitution l'empêchant de briguer un troisième mandat, son autorité sur son camp est déjà minée par une course très précoce à sa succession, qui aiguise les appétits de ceux qui s'y voient déjà, de Bruno Le Maire à Edouard Philippe en passant par Gérald Darmanin.

"Faut lui foutre la paix au président", proteste un ministre. "Partir trop tôt, partir trop fort, ça n'a pas de sens, les gens ne comprennent pas, ils n'ont pas la tête à 2027."

 


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.