L'ex-patron de la DGSE mis en examen pour complicité de tentative d'extorsion

Le diplomate et fonctionnaire français Bernard Bajolet, part après le discours du président français lors de la conférence annuelle des ambassadeurs de France à l'Elysée (Photo, AFP).
Le diplomate et fonctionnaire français Bernard Bajolet, part après le discours du président français lors de la conférence annuelle des ambassadeurs de France à l'Elysée (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 05 janvier 2023

L'ex-patron de la DGSE mis en examen pour complicité de tentative d'extorsion

  • Bernard Bajolet a aussi été mis en examen pour atteinte arbitraire à la liberté individuelle par personne dépositaire de l'autorité publique
  • Les noms des services et personnes chargées de ce dossier ne seront jamais divulgués, protégés par le secret défense

PARIS: L'ex-directeur général de la sécurité extérieure (DGSE) Bernard Bajolet a été mis en examen en octobre pour complicité de tentative d'extorsion envers un homme d'affaires, qui accuse le service de renseignements d'avoir fait usage de la contrainte pour lui réclamer de l'argent en 2016, a appris mercredi l'AFP de source proche du dossier.

Bernard Bajolet, à la tête de la DGSE d'avril 2013 à mai 2017 avant de prendre sa retraite, a aussi été mis en examen pour atteinte arbitraire à la liberté individuelle par personne dépositaire de l'autorité publique, a ajouté cette source, confirmant une information du journal Le Monde.

En mars 2016, Alain Duménil, homme d'affaires franco-suisse de 73 ans qui apparaît dans une pléthore d'affaires judiciaires et de litiges commerciaux relatifs à la gestion de ses entreprises en France et en Suisse, s'apprête à embarquer pour un vol en partance pour Genève à l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle, d'après le récit de la source proche du dossier.

Au guichet Air France, il est contrôlé par deux fonctionnaires de la PAF (police aux frontières). Après lui avoir demandé son passeport, ils prétextent un contrôle plus approfondi et l'invitent à les suivre au poste de police situé dans le terminal 2F.

Il est amené dans un local du poste de police. Deux des 7 000 agents que compte la DGSE, en civil, pénètrent dans la pièce, selon la même source.

Se présentant comme "l'État", ils lui indiquent qu'il doit rembourser 15 millions d'euros à la France.

Pour appuyer leur requête, ils lui montrent des photos de lui et de sa famille, prises en Angleterre et en Suisse.

D'après le récit qu'en fait Alain Duménil, ils auraient proféré des menaces.

L'entretien dure quelques minutes, l'homme d'affaires s'emporte et annonce porter plainte. Les agents disparaissent.

En octobre 2022, Bernard Bajolet a été entendu et mis en examen. Il explique aux juges d'instruction avoir validé le principe d'une entrevue à l'aéroport mais ne pas être entré dans les détails de sa mise en œuvre.

Les noms des services et personnes chargées de ce dossier, ainsi que ceux des agents ayant mené l'entretien ne seront jamais divulgués, protégés par le secret défense.

Pour Bernard Bajolet, l'objectif était une prise de contact courte et sans contrainte, avec un homme considéré par l'institution comme insaisissable et avec qui de nombreuses tentatives de prises de contact antérieures ont échoué.

"C'est une avancée qui est attendue de longue date, qui n'est pas encore un aboutissement final, mais qui très clairement remet en cause les pratiques de la DGSE dans le cadre du traitement de cette affaire", ont déclaré Me Nicolas Huc-Morel et William Bourdon, avocats d'Alain Dumenil.

Trois millions d'intérêts

Le but de l'instruction en cours à Bobigny est de déterminer le cadre légal du contrôle, le degré de contrainte exercé par les différents agents et les éventuelles menaces.

Depuis la fin de la Première guerre mondiale, la DGSE gère un "patrimoine privé" confié par l'Etat.

À la fin des années 1990, la DGSE avait réalisé des investissements infructueux dans une société. Au début des années 2000, dans un échange de titres, Alain Duménil devient majoritaire dans cette société et cède à la DGSE des parts de sa holding.

Il transfère par la suite l'intégralité des parts de la holding détenues par la DGSE dans trois autres sociétés qu'il détenait également. La holding est mise en liquidation judiciaire.

Dans la procédure judiciaire qui en découle, l'homme d'affaires a été mis en examen en novembre 2016 pour banqueroute.

La DGSE estime qu'Alain Duménil leur doit 15 millions d'euros, dont trois d'intérêts.

L'ex-banquier administre des sociétés dans des domaines divers: luxe, immobilier, industrie aéronautique, presse...

Il a été condamné pour complicité de banqueroute en 2012 par la cour d'appel de Grenoble. La Cour européenne des droits de l'homme a estimé que dans cette affaire, la cour d'appel avait violé le droit à un procès équitable d'Alain Duménil.

Dans une autre affaire, il a été condamné en appel en 2014 à une sanction pécuniaire de 450 000 euros pour délit d'initié.

Dans ce dossier, l'ancien directeur de cabinet de M. Bajolet, Jean-Pierre Palasset, numéro 2 de l'institution à l'époque des faits, a été entendu en octobre sous le statut de témoin assisté.

L'actuel directeur de la DGSE Bernard Emié et l'ancien patron de la PAF de Roissy, qui après validation de sa direction centrale a demandé à ses équipes d'organiser l'entrevue, ont eux été entendus comme simples témoins.

Sollicitée, la DGSE a refusé de répondre à l'AFP, renvoyant à l'une de ses précédentes déclarations où elle démentait "avoir exercé la moindre menace" sur Alain Duménil, "un affairiste international et un délinquant".


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.