Une délégation de l’UE s’apprête à lancer une enquête sur le gouverneur de la banque centrale du Liban

Une vue du bâtiment de la Banque centrale du Liban à Beyrouth, Liban, le 23 avril 2020 (Reuters)
Une vue du bâtiment de la Banque centrale du Liban à Beyrouth, Liban, le 23 avril 2020 (Reuters)
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Publié le Samedi 07 janvier 2023

Une délégation de l’UE s’apprête à lancer une enquête sur le gouverneur de la banque centrale du Liban

  • Le procureur a rencontré des diplomates français, allemands et luxembourgeois dans un contexte malaisant face aux implications pour la souveraineté libanaise
  • 15 banquiers, dont les vice-gouverneurs actuels et anciens de la banque centrale, seront interrogés lors de l’enquête qui débute lundi

BEYROUTH : Une délégation judiciaire française, allemande et luxembourgeoise lancera lundi à Beyrouth son enquête sur les activités de la banque centrale du Liban et de son gouverneur, Riad Salameh. L’enquête devrait se poursuivre jusqu’à vendredi.

Salameh est poursuivi dans des affaires liées à des transferts d’argent du Liban vers des banques de ces pays européens ainsi qu’aux sources des fonds et à la mesure dans laquelle ces deux pourraient être liés à la corruption, au blanchiment d’argent et à la criminalité financière en Europe.

Arab News comprend que la Division centrale des enquêtes criminelles, affiliée au Bureau du procureur au Liban, a informé les personnes convoquées pour un interrogatoire des dates où elles devraient se présenter au Palais de justice de Beyrouth, à partir de la semaine prochaine. Parmi ces personnes-là sont présents 15 responsables de banques, dont les vice-gouverneurs actuels et anciens de la banque centrale. Une source judiciaire a indiqué que Salameh ne sera pas encore interrogé à ce stade.

EN BREF

15 banquiers, dont les vice-gouverneurs actuels et anciens de la banque centrale, seront interrogés lors de l’enquête qui débute lundi

En mars 2022, les autorités européennes avaient gelé 130 millions de dollars d’actifs libanais et ont ciblé Salameh et quatre personnes proches de lui pour une enquête sur des allégations de détournement de fonds publics.

Le juge Ghassan Oueidate a rencontré jeudi une délégation diplomatique des ambassades de France, d’Allemagne et du Luxembourg au Palais de justice. La justice libanaise a exprimé sa désapprobation quant à la manière dont elle est traitée au sein de cette affaire.

Les autorités libanaises avaient été officiellement informées par une lettre qu’une délégation judiciaire des trois pays européens arriverait au Liban pour mener son enquête. Cette délégation comprend des procureurs et des juges financiers spécialisés qui avaient informé les autorités libanaises de leur visite grâce à une lettre, sans pour autant leur demander formellement l’autorisation de mener cette enquête.

Selon la source judiciaire, il s’agit en effet d’une décision étrange et unique en son genre qui engendre une interrogation profonde sur la souveraineté et la pertinence de l’état libanais si des pays étrangers peuvent simplement s’octroyer le pouvoir de mener des enquêtes sur son sol.

Il est surprenant que les représentants des trois pays européens n’aient informé la justice libanaise que de la date d’arrivée de la délégation à Beyrouth pour mener son enquête ainsi que des noms des personnes à interroger, sans demander l’assistance ou la coopération de la justice libanaise. Cela porte atteinte et passe outre à l’autorité de la justice libanaise.

« La délégation judiciaire étrangère n’a pas le droit d’arriver au Liban et de mener des enquêtes sans lettre de sollicitation » a déclaré la source.

« La Convention contre la corruption signée par le Liban l’oblige à répondre aux demandes des autorités judiciaires étrangères, à condition que ces dernières respectent les lois libanaises. »

Salameh a été sévèrement critiqué pour ses politiques monétaires et ses opérations d’ingénierie financière qui ont été accusées d’avoir contribué à l’accumulation de la dette et l’éventuel effondrement de l’économie libanaise.

Cela fait depuis 2021 que la justice financière enquête sur lui pour blanchiment d’argent et détournement de fonds. Il est gouverneur de la banque centrale depuis 1993 et son mandat doit se terminer en mai.

La Suisse a également enquêté sur des allégations de détournement de fonds à la banque centrale, Salameh et son frère étant les principaux suspects.

Au cours de leur rencontre, le juge Oueidate et les membres de la délégation ont suivi la procédure régulière suivie par le Liban dans de tels cas. L’enquête aura lieu dans la salle de la Cour de cassation au Palais de justice de Beyrouth et la source judiciaire a déclaré que le juge Oueidate et les membres de la délégation ont convenu d’un protocole à suivre au cours de l’enquête. Il exige que les enquêteurs adressent leurs questions aux témoins par l’intermédiaire des juges libanais qui seront présents lors des audiences, plutôt que de directement s’adresser aux personnes interrogées qui auront droit à des avocats.

« Si les juges européens veulent faire des réclamations, qu’ils le fassent dans leur pays et non pendant les séances d’instruction au Liban » a ajouté la source.

« Après la réclamation, une demande de remboursement doit être envoyée au Liban. Ce qui est certain, c’est qu’aucune action ne peut être prise contre un libanais qui a été interrogé. »

La source a déclaré que la justice libanaise ne peut extrader aucun citoyen libanais vers un autre pays pour qu’il y soit poursuivi, même s’il existe des conventions signées entre les pays. Toute poursuite d’un citoyen libanais aura lieu sur le territoire libanais, comme dans le cas de Ziad Takieddine.

Ce dernier est un homme d’affaires franco-libanais de 72 ans accusé par la justice française de délits financiers. Il a été un témoi- clé dans une enquête sur le financement présumé par la Libye de la campagne électorale de 2007 de l’ancien président français Nicolas Sarkozy. Il a déclaré aux enquêteurs français en 2016 qu’il avait donné à Sarkozy et à son directeur de bureau 5 millions d’euros (soit 5,3 millions de dollars, 1 euro = 1,07 dollar) afin de financier la campagne de Sarkozy. Il a été détenu au Liban en 2020 où il a fait l’objet d’une enquête française mais en étant jugé par la justice libanaise.

De même, en 2021, des enquêteurs français se sont rendus au Liban pour interroger l’homme d’affaires libanais Carlos Ghosn. Leurs questions avaient été adressées à un juge libanais qui, à son tour, les a posées à Ghosn.

La source a ajouté : « Les français connaissent ce protocole au Liban parce qu’ils l’ont déjà vécu. »

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.