Réforme des retraites: semaine cruciale, au Parlement et dans la rue

Le plan du gouvernement français pour réformer le système de retraite, qui comprend le relèvement de l'âge minimum de départ à la retraite, commencera à être débattu au Parlement le 6 février 2023, avec une nouvelle journée de grèves et de manifestations nationales contre le projet de loi prévue le 7 février. (AFP).
Le plan du gouvernement français pour réformer le système de retraite, qui comprend le relèvement de l'âge minimum de départ à la retraite, commencera à être débattu au Parlement le 6 février 2023, avec une nouvelle journée de grèves et de manifestations nationales contre le projet de loi prévue le 7 février. (AFP).
Short Url
Publié le Dimanche 05 février 2023

Réforme des retraites: semaine cruciale, au Parlement et dans la rue

  • «Nous allons bouger en étendant le dispositif des carrières longues à ceux qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans», ce qui leur permettra de «partir à 63 ans», a annoncé Elisabeth Borne
  • Du côté des syndicats, la détermination ne faiblit pas. Deux nouvelles journées d'action sont prévues, les mardi 7 et samedi 11 février

PARIS : Exécutif et syndicats abordent lundi une semaine cruciale pour la réforme des retraites, ces derniers prévoyant deux journées d'action pour tenter de peser sur les débats qui commencent en plénière à l'Assemblée, avec à la manœuvre un ministre chef de file affaibli.

Sans remettre en cause la mesure cardinale de la réforme, le recul de l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans, la Première ministre Elisabeth Borne a fait un pas dimanche en direction du groupe LR, dont les voix sont indispensables pour voter la réforme.

"Nous allons bouger en étendant le dispositif des carrières longues à ceux qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans", ce qui leur permettra de "partir à 63 ans", a-t-elle annoncé dans le JDD.

Une mesure qualifiée de "rustine" par Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, le premier syndicat français. "Clairement, ce n'est pas la réponse à la mobilisation massive, diverse géographiquement et professionnellement, qui s'est opérée" les 19 et 31 janvier, a-t-il dit sur France Inter.

Le président de LR Eric Ciotti a répété au Parisien samedi souhaiter "voter une réforme des retraites", se félicitant des "avancées" obtenues et pointant le sujet des carrières longues.

Mme Borne a par ailleurs assuré de sa "confiance" le ministre du Travail Olivier Dussopt, en première ligne sur ce projet de loi, au moment où il est fragilisé par des soupçons de "favoritisme" dans l'attribution d'un marché public lorsqu'il était maire d'Annonay.

Du côté des syndicats, la détermination ne faiblit pas. Deux nouvelles journées d'action sont prévues, les mardi 7 et samedi 11 février, après deux journées de grève et de manifestations, les 19 et 31 janvier, dont la dernière (avec 1,27 million de manifestants selon la police et plus de 2,5 million selon l'intersyndicale) a dépassé le record de participation de 2010.

C'est une semaine de mobilisation, "avec deux dates et un point d'orgue", les défilés du samedi 11, auxquels "il faut venir massivement", a dit Laurent Berger dimanche.

"On a conjugué un jour en semaine et un samedi, on verra sur l'ensemble des deux jours, malgré cette période de vacances scolaires" (les congés de février), a dit vendredi le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez.

Course d'obstacles 

De source sécuritaire, les autorités attendent mardi entre 900 000 et 1,1 million de personnes dont 70 000 maximum à Paris, où le cortège défilera de la place de l'Opéra à Bastille. Une intersyndicale se tiendra à la Bourse du travail à Paris dans la soirée.

Les grèves devraient une nouvelle fois concerner particulièrement les secteurs de l'énergie, des raffineries et des transports ferroviaires, qui ont prévu de cesser le travail les 7 et 8 février.

Mais l'heure n'est pas encore au blocage de l'économie, une stratégie décriée par les syndicats réformistes, qui entendent conserver l'opinion de leur côté en organisant des manifestations massives et "conviviales, respectueuses", pour mieux peser sur le débat parlementaire.

Laurent Berger a indiqué avoir "des échanges très constructifs avec des députés de la majorité". "Bien sûr, ce sera à eux de se décider. Il faut qu'ils regardent dans toutes les villes et circonscriptions où ils sont élus. Quand par exemple vous êtes député de l'Ain et qu'il y a 10.000 manifestants à Bourg-en-Bresse, cela doit-il vous laisser totalement indifférent?", a-t-il questionné.

Elisabeth Borne, elle, "n'envisage pas" l'hypothèse de dégainer comme à l'automne le 49.3. Gouvernement et majorité en sortiraient "politiquement affaiblis", admet la députée Stéphanie Rist (Renaissance), rapporteure du projet de loi.

La bataille qui s'engage lundi après-midi dans l'hémicycle du Palais Bourbon promet en tout cas d'être une course d'obstacles pour le gouvernement.

Les députés LFI défendront d'emblée une demande de rejet de l'ensemble de la réforme qui inquiète le camp présidentiel. Puis le groupe RN portera sa demande de référendum sur la réforme, qui a peu de chances d'être votée par l'Assemblée.

Les députés s'attelleront ensuite aux quelque 20 000 amendements déposés sur le projet de loi, dont 13 000 par LFI. Le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a critiqué dimanche "l'obstruction bête et méchante" de la Nupes.

Si l'Assemblée ne vient pas à bout des amendements d'ici le 17 février minuit, le texte pourra tout de même passer au Sénat, du fait du choix de l'exécutif de recourir à un budget rectificatif de la Sécu.


A une semaine du vote de confiance, Bayrou entame des consultations, a priori vaines

Short Url
  • Le Premier ministre recevra lundi à 17H les dirigeants du Parti communiste, avant de continuer mardi et mercredi avec notamment ceux des partis soutenant la coalition présidentielle et ceux du Rassemblement national
  • Olivier Faure a tué dimanche tout suspense en martelant que la décision des socialistes, volontaires pour prendre la suite de M. Bayrou à Matignon, est "irrévocable"

PARIS: François Bayrou entame lundi une série de consultations politiques, a priori vaines, à une semaine du vote de confiance à l'Assemblée qui devrait sceller le sort de son gouvernement, tout en continuant à défendre sa méthode critiquée jusque dans sa coalition.

Le Premier ministre recevra lundi à 17H les dirigeants du Parti communiste, avant de continuer mardi et mercredi avec notamment ceux des partis soutenant la coalition présidentielle et ceux du Rassemblement national.

En temps normal, les attentes se seraient cristallisées sur la rencontre jeudi matin avec le Parti socialiste, dont les voix sont indispensables au gouvernement pour ne pas être renversé le 8 septembre par l'opposition conjointe de la gauche et du RN.

Mais Olivier Faure a tué dimanche tout suspense en martelant que la décision des socialistes, volontaires pour prendre la suite de M. Bayrou à Matignon, est "irrévocable". Selon lui, le Premier ministre fait "sa tournée d'adieux" en multipliant les interventions depuis sa décision surprise il y a une semaine d'engager la responsabilité de son gouvernement sur sa trajectoire de désendettement du pays par un effort budgétaire de 44 milliards d'euros.

Cela n'a pas empêché François Bayrou de continuer à défendre sa position lors d'un entretien dimanche accordé aux quatre chaînes d'information en estimant que la question en jeu n'était pas "le sort du Premier ministre" mais celui de la France.

Il n'y a "aucune politique courageuse possible" sans "accord minimal" sur le "diagnostic", a-t-il répété.

Mais les chances de compromis paraissent quasi nulles, M. Bayrou ayant lui-même balayé les propositions budgétaires du PS qui ne font "rien" pour réduire l'endettement et constituent "une menace sur les investissements en France".

Le PS propose notamment de diviser par deux l'effort budgétaire voulu par François Bayrou et veut le faire peser "d'abord sur les grandes fortunes" par une taxe de 2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros.

Le Premier ministre assure être prêt à "négocier" mais sa manière de critiquer les oppositions en prenant l'opinion à témoin fait douter de sa volonté réelle jusque dans sa majorité.

La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a reconnu lundi qu'il "aurait peut-être fallu davantage dialoguer cet été" et regretté "les mots maladroits" du Premier ministre sur les oppositions en "vacances."

"Quand vous dites +ils sont tous en vacances+ vous ne cherchez pas à recoller les morceaux. L'opinion, elle ne vote pas (au Parlement). Il s'est mis lui-même dans la nasse", renchérit un député macroniste.

Quelle coalition ? 

Sur le fond du plan Bayrou, Mme Braun-Pivet a réclamé l'abandon de la mesure la plus impopulaire, la suppression de deux jours fériés, tout comme le président de la région des Hauts-de-France Xavier Bertrand (LR).

"François Bayrou aurait dû écouter l'avis des Français. Ce plan est injuste, je l'avais dit dès la mi-juillet, or le Premier ministre n'a rien bougé, n'a rien changé", a-t-il déploré sur Franceinfo

A défaut de réussir à négocier le fond de son plan, les consultations du Premier ministre - qui restera quoi qu'il arrive le leader d'un parti, le MoDem, comptant 36 députés à l'Assemblée - serviront peut-être à discuter de l'après 8 septembre.

Ni les socialistes, ni le camp présidentiel, ni la droite ne réclament une nouvelle dissolution mais peuvent-ils se mettre d'accord, au nom de la "stabilité des institutions", sur la formation d'un nouveau gouvernement qui laisserait de côté les "irritants" jusque 2027 comme le réclame Mme Braun-Pivet ?

A gauche, LFI, qui veut une présidentielle anticipée, a déjà averti les socialistes qu'ils "n'accorderaient pas de confiance à un gouvernement qui ne porte pas un programme de rupture" selon leur cheffe de file à l'Assemblée Mathilde Panot sur France 2.

Le RN plaide de son côté pour une dissolution dont il sortirait gagnant, selon les sondages, et tient déjà lundi après-midi un "bureau de campagne" pour préparer d'éventuelles législatives.

En attendant, la situation politique continue d'être suivie de près à l'étranger.

Tous les risques de chute de gouvernement "sont préoccupants", a estimé lundi la présidente de la Banque centrale européenne (BCE) Christine Lagarde car "ils ont un impact évident sur l'économie, sur l'appréciation par les marchés financiers des risques-pays".


Avant de rencontrer Bayrou, le RN prépare déjà des législatives anticipées

Le Premier ministre français François Bayrou (au centre) s'entretient avec les journalistes Marc Fauvelle (à gauche) de BFMTV, Sonia Mabrouk (2e à gauche) de CNews, Darius Rochebin (2e à droite) de LCI et Myriam Encaoua (à droite) de FranceInfo TV lors d'une interview télévisée en direct diffusée sur les chaînes d'information LCI, CNews, BFMTV et FranceInfo TV, à l'Hôtel de Matignon à Paris, le 31 août 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou (au centre) s'entretient avec les journalistes Marc Fauvelle (à gauche) de BFMTV, Sonia Mabrouk (2e à gauche) de CNews, Darius Rochebin (2e à droite) de LCI et Myriam Encaoua (à droite) de FranceInfo TV lors d'une interview télévisée en direct diffusée sur les chaînes d'information LCI, CNews, BFMTV et FranceInfo TV, à l'Hôtel de Matignon à Paris, le 31 août 2025. (AFP)
Short Url
  • Autour du président du parti et de Mme Le Pen, cheffe des 123 députés du parti à la flamme, plusieurs cadres du groupe dont Thomas Ménagé et Julien Odoul vont donc "préparer une éventuelle dissolution et une éventuelle campagne législative"
  • L'état-major du mouvement d'extrême droite va "d'abord faire le point sur les investitures", déjà "très avancées"

PARIS: Invités mardi matin à Matignon par un François Bayrou dont ils souhaitent la chute, Marine Le Pen et Jordan Bardella réunissent lundi après-midi un "bureau de campagne" du Rassemblement national, pour anticiper une possible dissolution et de nouvelles législatives anticipées.

Dans l'air depuis que le Premier ministre a convoqué un vote de confiance à l'Assemblée le 8 septembre, le rendez-vous est officiellement apparu lundi à l'agenda de M. Bardella: le "bureau de campagne des élections législatives" du RN doit se tenir le jour même à 15H30.

Autour du président du parti et de Mme Le Pen, cheffe des 123 députés du parti à la flamme, plusieurs cadres du groupe dont Thomas Ménagé et Julien Odoul vont donc "préparer une éventuelle dissolution et une éventuelle campagne législative" qui "peuvent arriver à tout moment, vu la situation", indique un participant à l'AFP.

L'état-major du mouvement d'extrême droite va "d'abord faire le point sur les investitures", déjà "très avancées". La place réservée aux alliés de l'UDR d'Eric Ciotti - qui devrait obtenir davantage que les 62 circonscriptions accordées en 2024 - ou à d'autres personnalités comme Marion Maréchal n'est en revanche pas à l'ordre du jour.

La réunion va surtout aborder l'épineuse question du programme et des "thèmes de campagne que les candidats pourront développer, sachant que s'il y a dissolution demain il reste 18 mois" jusqu'à la présidentielle de 2027, et que dans ce délai "évidemment vous ne pouvez pas tout faire", ajoute ce responsable du parti.

D'autant plus qu'un autre écueil se profile: "Qu'est-ce qu'on peut faire en étant en cohabitation" avec Emmanuel Macron?, s'interroge-t-il.

Par rapport au programme présenté l'an dernier, le RN doit donc faire des choix: "Qu'est-ce qu'on promet aux Français en 18 mois? Il faut qu'ils voient que les choses bougent avec nous, sans leur faire croire qu'on va tout révolutionner en 18 mois, en n'ayant pas la totalité du pouvoir exécutif".


Budget : le PS propose de diviser par deux l'effort de réduction du déficit

Le premier secrétaire du Parti socialiste (PS) français, Olivier Faure, prononce un discours lors du Campus de la gauche à Blois, dans le centre de la France, le 29 août 2025. (Photo de GUILLAUME SOUVANT / AFP)
Le premier secrétaire du Parti socialiste (PS) français, Olivier Faure, prononce un discours lors du Campus de la gauche à Blois, dans le centre de la France, le 29 août 2025. (Photo de GUILLAUME SOUVANT / AFP)
Short Url
  • Le PS a présenté samedi à Blois son projet de budget alternatif, prévoyant une réduction du déficit l'année prochaine deux fois moindre que celle de François Bayrou.
  • Le plan prévoit 14 milliards d'euros d'économies, notamment grâce à une réduction des aides aux grandes entreprises, à des économies sur le fonctionnement de l'État et à une régulation du système de santé.

BLOS, FRANCE : Le PS a présenté samedi à Blois son projet de budget alternatif, prévoyant une réduction du déficit l'année prochaine deux fois moindre que celle de François Bayrou, à 21,7 milliards d'euros, avec pour ambition un déficit à 5% du PIB pour 2026 et 2,8% en 2032. 

Le parti a également proposé la suspension immédiate de la réforme des retraites, avec pour objectif un retour à l'âge de départ à la retraite à 62 ans, la mise en place d'une taxe sur les plus hauts patrimoines et une baisse de la CSG pour soutenir le pouvoir d'achat.

« Il nous faut d'évidence reprendre la main » face au « budget de souffrance » du Premier ministre, a estimé Boris Vallaud, chef des députés, au dernier jour des universités d'été socialistes à Blois.

Le parti propose notamment de diviser l'effort par deux par rapport à celui proposé par M. Bayrou, soit 21,7 milliards d'euros pour 2026 au lieu de 44 milliards. Le passage sous le seuil symbolique des 3 % de déficit interviendrait en 2032 plutôt qu'en 2029 dans le projet de M. Bayrou. 

Pour épargner les ménages modestes et soutenir leur pouvoir d'achat, le PS souhaite également « une baisse ciblée de la CSG (contribution sociale généralisée) entre 1 et 1,4 SMIC », a précisé Boris Vallaud.

Le parti promet également la « suspension immédiate de la réforme des retraites » et demandera « aux partenaires sociaux de négocier les modalités et le financement d'un retour à la retraite à 62 ans ».

Le plan prévoit 14 milliards d'euros d'économies, notamment grâce à une réduction des aides aux grandes entreprises, à des économies sur le fonctionnement de l'État et à une régulation du système de santé.

Le parti prévoit également 26,9 milliards d'euros de recettes, avec comme « première pierre angulaire » « une contribution de 2 % sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros », a expliqué la députée Estelle Mercier.

Cette taxe, dite « Zucman », « touche 0,01 % des Français et pourrait rapporter 15 milliards d'euros », a-t-elle insisté.

Le parti suggère également un plan de relance et de soutien aux entreprises, axé sur « la souveraineté et la préparation de la transition écologique », d'un montant de 10 milliards d'euros.

« Dès la semaine prochaine, nous rencontrerons nos partenaires de gauche pour discuter de ces propositions », a expliqué Boris Vallaud. Le PS se tournera également « vers les députés qui ont été élus dans l'élan du front républicain » pour trouver une majorité sur ce budget.