La qualification américaine du BDS d’antisémite suscite un débat sur la liberté d'expression

«Cela aura un impact négatif sur la capacité, entre autres, des Palestiniens à faire valoir leurs arguments.»
«Cela aura un impact négatif sur la capacité, entre autres, des Palestiniens à faire valoir leurs arguments.»
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Publié le Mercredi 25 novembre 2020

La qualification américaine du BDS d’antisémite suscite un débat sur la liberté d'expression

  • Selon un avocat américain : «Assimiler le BDS et l'antisionisme dans son ensemble à l'antisémitisme est tout simplement faux»
  • «Cela aura un impact négatif sur la capacité, entre autres, des Palestiniens à faire valoir leurs arguments»

NEW YORK: La décision du secrétaire d'État américain, Mike Pompeo, de classer le mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) contre Israël comme une organisation antisémite a relancé un débat féroce sur ce qui constitue l'antisémitisme, et sur les limites de la liberté d’expression.

Kenneth Stern, avocat américain et directeur du Bard Center for the Study of Hate, qualifie la décision de Pompeo d’«improductive et de troublante».

«Même si les instigateurs du BDS sont clairement antisionistes, de nombreuses organisations le soutiennent parce qu’elles sont préoccupées par le contrôle par Israël de la Cisjordanie. Donc, assimiler le BDS et l'antisionisme dans son ensemble à l'antisémitisme est tout simplement faux», explique l’avocat à Arab News.

Pompeo a demandé à l’envoyé du département d’État sur la lutte contre l’antisémitisme «d’identifier les organisations qui s’engagent ou soutiennent» le BDS.

Cela fait craindre que les groupes de défense des droits humains palestiniens et internationaux qu'Israël accuse, à tort ou à raison, de soutenir le BDS ne se voient refuser un financement américain.

Bien qu'il soit un sioniste autoproclamé, Kenneth Stern considère la création d'une liste noire d’organisations qui critiquent fortement la politique et la société israéliennes comme problématique.

«Ce n’est pas en créant rapidement une règle dure qui assimile tous les types de protestation et de dissidence à de la haine que vous gérez les différends politiques. Car ce n’est pas le cas», poursuit-il.

Harley Lippman, président de l'Institute for the Study of Global Antisemitism and Policy (ISGAP), lui, ne pouvait être plus en adéquation avec Pompeo.

«Le BDS est un mouvement international qui vise à mettre Israël à genoux», explique Harley Lippman à Arab News. «Ils ne critiquent pas seulement les politiques israéliennes. Ils mettent en place quelque chose qui pourrait détruire Israël, si les nations du monde coopéraient.»

Pour les critiques, le BDS représente un obstacle à la fin du conflit israélo-palestinien, car il rejette le droit de l'État juif à exister et écarte les efforts entrepris pour tisser des liens au motif qu'ils «normalisent» Israël.

«Toutes ces affirmations ont été inventées par des politiciens de droite. Aucune d'entre elles n'est vraie», explique Miko Peled, un militant israélo-américain, à Arab News.

«Les exigences du BDS sont très claires: la fin de l'occupation militaire, l’égalité des droits pour les Palestiniens et toutes les personnes qui vivent dans la Palestine historique, et le droit des réfugiés de retourner sur leurs terres et chez eux», ajoute-t-il.

«Ce ne sont pas des exigences pour blesser ou expulser qui que ce soit. Elles sont réparatrices, pour remédier à la réalité dans laquelle les Palestiniens vivent à la suite de la création de l’État d’Israël.»

Miko Peled est né et a grandi à Jérusalem dans une «famille très sioniste, aussi sioniste que l’on puisse l'imaginer».

Son grand-père a signé la déclaration d’indépendance d’Israël, son père était général dans l’armée, et nombre de ses oncles étaient ambassadeurs.

Mais un voyage dans les territoires palestiniens l'a fait sortir «pour soutenir la lutte pour la justice et la liberté en Palestine».

Il a découvert «une histoire dont on ne m’a pas parlé, dont les Israéliens étaient tenus à distance», et l’a relatée dans son livre Le fils du général: le voyage d’un Israélien en Palestine.

 «Les Palestiniens de Palestine vivent sous un régime brutal d'apartheid, soumis à des lois racistes et à un état policier qui leur rend la vie impossible», explique Miko Peled.

Pour lui, la décision de Pompeo de qualifier le BDS d’antisémite repose sur une hypothèse erronée, selon laquelle «le fait de s’opposer et de rejeter Israël et le sionisme est raciste, alors qu’en fait c’est le contraire. S'opposer au sionisme, c’est s’opposer au racisme et à l'antisémitisme. Mais les partisans d’Israël ont tout inversé. Maintenant, ils perpétuent ce mythe partout.»

La Chambre des représentants des États-Unis a adopté une résolution contre le BDS l'année dernière, et plusieurs États américains ont promulgué des lois similaires. Certaines de ces lois ont cependant été annulées pour violation du premier amendement concernant la liberté d'expression.

Un sondage publié l'année dernière a montré qu'un Américain sur cinq approuvait le BDS comme moyen de s'opposer à la politique israélienne envers les Palestiniens.

«D’un campus à l’autre à travers le monde, les étudiants soutiennent le BDS», décrit Miko Peled. «Est-ce que cela entraîne l'effondrement de l'économie israélienne? Bien sûr que non. Mais ces choses prennent du temps. C'est une question de sensibilisation. De plus en plus de gens sont conscients que l’achat d’un produit fabriqué en Israël est une erreur.»

Au contraire, pour Harley Lippman, membre de longue date du Comité des affaires publiques israéliennes américaines (AIPAC), les actions du BDS se retournent contre lui.

«Tout ce qu'il fait, c'est galvaniser les gens autour d'Israël. Comme nous nous sentons menacés, cela finit par nous motiver à faire plus pour Israël et à le défendre davantage», explique-t-il.

Malgré le retrait d'Israël de certaines entreprises, les investissements étrangers dans le pays sont en plein essor. Israël dépend moins de l'exportation de produits de base que de la propriété intellectuelle telle que les logiciels, ce qui rend le boycott plus difficile.

«Si Israël est la nation la plus puissante du Moyen-Orient, c’est aussi la plus fragile. Le fait que son économie soit en plein essor ne diminue en rien le caractère sinistre et plein de préjugés de ce que le BDS essaie de faire », poursuit M. Lippman.

«C’est comme dire : “Il existe un parti nazi aux États-Unis, mais il ne fait pas de mal aux juifs en ce moment, alors où est le problème? Eh bien, pas encore. Mais nous connaissons tous l'idéologie nazie. Nous savons que leur objectif serait d'assassiner tous les juifs», ajoute le président de l’ISGAP dont la famille a perdu 86 membres pendant l'Holocauste.

Kenneth Stern, auteur de The Conflict over the Conflict, qui aborde le débat israélo-palestinien sur les campus universitaires, révèle : «Je comprends le désir de certaines parties de la communauté juive et de la communauté évangélique qu'il y ait un seul État juif. Le fait de le cibler et de remettre en question son droit d'exister est une manifestation d’antisémitisme. Je comprends pourquoi ils veulent mettre en avant ce point.»

«Mais je m'inquiète pour un autre aspect. Juridiquement, nous sous-entendons l’idée que l’antisionisme est toujours de l’antisémitisme. Cela aura un impact négatif sur la capacité, entre autres, des Palestiniens à faire valoir leurs arguments. Je ne suis peut-être pas entièrement d'accord avec leur cause, mais ils ont sans aucun doute le droit de le faire.»

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Réunion sur Gaza vendredi à Miami entre Etats-Unis, Qatar, Egypte et Turquie

L'émissaire américain Steve Witkoff se réunira vendredi à Miami (Floride, sud-est) avec des représentants du Qatar, de l'Egypte et de la Turquie pour discuter des prochaines étapes concernant la bande de Gaza, a appris l'AFP jeudi auprès d'un responsable américain. (AFP)
L'émissaire américain Steve Witkoff se réunira vendredi à Miami (Floride, sud-est) avec des représentants du Qatar, de l'Egypte et de la Turquie pour discuter des prochaines étapes concernant la bande de Gaza, a appris l'AFP jeudi auprès d'un responsable américain. (AFP)
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  • Le Qatar et l'Egypte, qui font office de médiateurs autant que de garants du cessez-le-feu dans le territoire palestinien ravagé par deux ans de guerre, ont récemment appelé à passer à la prochaine phase du plan de Donald Trump
  • Celle-ci prévoit le désarmement du Hamas, le retrait progressif de l'armée israélienne de tout le territoire, la mise en place d'une autorité de transition et le déploiement d'une force internationale

WSAHINGTON: L'émissaire américain Steve Witkoff se réunira vendredi à Miami (Floride, sud-est) avec des représentants du Qatar, de l'Egypte et de la Turquie pour discuter des prochaines étapes concernant la bande de Gaza, a appris l'AFP jeudi auprès d'un responsable américain.

Le Qatar et l'Egypte, qui font office de médiateurs autant que de garants du cessez-le-feu dans le territoire palestinien ravagé par deux ans de guerre, ont récemment appelé à passer à la prochaine phase du plan de Donald Trump.

Celle-ci prévoit le désarmement du Hamas, le retrait progressif de l'armée israélienne de tout le territoire, la mise en place d'une autorité de transition et le déploiement d'une force internationale.

Le cessez-le-feu à Gaza, entré en vigueur en octobre entre Israël et le Hamas, demeure précaire, les deux camps s'accusant mutuellement d'en violer les termes, tandis que la situation humanitaire dans le territoire reste critique.

Le président américain n'en a pas moins affirmé mercredi, dans une allocution de fin d'année, qu'il avait établi la paix au Moyen-Orient "pour la première fois depuis 3.000 ans."

La Turquie sera représentée à la réunion par le ministre des Affaires étrangères Hakan Fidan.

Dans un discours, le président turc Recep Tayyip Erdogan a quant à lui affirmé que son pays se tenait "fermement aux côtés des Palestiniens".

 

 


Zelensky dit que l'Ukraine a besoin d'une décision sur l'utilisation des avoirs russes avant la fin de l'année

ze;"Nos partenaires ont été informés que la décision doit être prise d'ici la fin de cette année", a déclaré Zelensky. (AFP)
ze;"Nos partenaires ont été informés que la décision doit être prise d'ici la fin de cette année", a déclaré Zelensky. (AFP)
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  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé jeudi que l'Ukraine avait besoin d'une décision européenne sur l'utilisation des avoirs russes gelés avant la fin de l'année
  • "Nos partenaires ont été informés que la décision doit être prise d'ici la fin de cette année", a-t-il déclaré. Il avait indiqué auparavant que Kiev aurait un "gros problème" si les dirigeants européens ne parvenaient pas à un accord

BRUXELLES: Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé jeudi que l'Ukraine avait besoin d'une décision européenne sur l'utilisation des avoirs russes gelés avant la fin de l'année, lors d'une conférence de presse à Bruxelles en marge d'un sommet des dirigeants de l'UE sur le sujet.

"Nos partenaires ont été informés que la décision doit être prise d'ici la fin de cette année", a-t-il déclaré. Il avait indiqué auparavant que Kiev aurait un "gros problème" si les dirigeants européens ne parvenaient pas à un accord sur l'utilisation de ces avoirs pour financer l'Ukraine. En l'absence d'accord, Kiev sera à court d'argent dès le premier trimestre 2026.

 

 


Trump impose des restrictions d'entrée à sept autres pays et aux Palestiniens

Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
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  • Donald Trump élargit les interdictions d’entrée aux États-Unis à sept pays supplémentaires, dont la Syrie, et inclut les Palestiniens munis de documents de l’Autorité palestinienne
  • La Maison Blanche invoque la sécurité nationale, tout en prévoyant des exceptions limitées, dans le cadre d’un durcissement général de la politique migratoire

WASHINGTON: Donald Trump a étendu mardi les interdictions d'entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de sept pays, dont la Syrie, ainsi qu'aux Palestiniens.

Le président américain a signé une proclamation "restreignant et limitant davantage l'entrée des ressortissants étrangers afin de protéger la sécurité des Etats-Unis", a indiqué la Maison Blanche.

Les nouveaux pays concernés par cette mesure sont le Burkina Faso, le Niger, le Mali, le Soudan du Sud et la Syrie, tandis que le Laos et la Sierra Leone passent de restrictions partielles à totales.

Les Palestiniens disposant de documents de voyage émis par l'Autorité palestinienne sont également visés.

L'administration Trump avait déjà imposé des restrictions totales visant les ressortissants de douze pays et des dizaines d'autres pays se sont vus imposer des restrictions partielles.

S'agissant de la Syrie, la mesure intervient quelques jours après une attaque meurtrière contre des soldats américains dans le centre de ce pays.

L'administration Trump dit avoir identifié des pays où les vérifications sont "tellement insuffisantes qu'elles justifiaient une suspension totale ou partielle de l'admission des ressortissants de ces pays".

La proclamation prévoit cependant des exceptions pour les résidents permanents légaux, les titulaires de visas existants, certaines catégories de visas comme les athlètes et les diplomates, et les personnes dont "l'entrée sert les intérêts nationaux des Etats-Unis".

Depuis son retour au pouvoir en janvier, Donald Trump mène une vaste campagne contre l'immigration illégale et a considérablement durci les conditions d'entrée aux Etats-Unis et l'octroi de visas, arguant de la protection de la sécurité nationale.

Ces mesures visent ainsi à interdire l'entrée sur le territoire américain aux étrangers qui "ont l'intention de menacer" les Américains, selon la Maison Blanche.

De même, pour les étrangers qui "pourraient nuire à la culture, au gouvernement, aux institutions ou aux principes fondateurs" des Etats-Unis.

Le président américain s'en est récemment pris avec virulence aux Somaliens, disant qu'il "ne voulait pas d'eux chez nous".

En juin, il avait annoncé des interdictions d'entrée sur le territoire américain aux ressortissants de douze pays, principalement en Afrique et au Moyen-Orient (Afghanistan, Birmanie, Tchad, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale, Erythrée, Haïti, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Yémen).

En revanche, le Turkménistan, pays qui figure parmi les plus reclus au monde, se voit accorder un satisfécit, la Maison Blanche évoquant mardi des "progrès significatifs" dans cet Etat d'Asie centrale.

Du coup, les ressortissants de ce pays pourront à nouveau obtenir des visas américains, mais uniquement en tant que non-immigrants.

Lors de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump s'en était pris de façon similaire à certains pays, ciblant principalement des pays musulmans.