Face à la crise de l'eau qui menace le Moyen-Orient, l'espoir du progrès technologique

Vue aérienne des marais asséchés de Chibayich, dans la province de Dhi Qar, au sud de l'Irak (Photo, AFP).
Vue aérienne des marais asséchés de Chibayich, dans la province de Dhi Qar, au sud de l'Irak (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Jeudi 16 février 2023

Face à la crise de l'eau qui menace le Moyen-Orient, l'espoir du progrès technologique

  • Le Moyen-Orient doit adopter de nouvelles idées et technologies afin de préserver les précieuses réserves d'eau
  • Les pertes les plus importantes de ressources en eau souterraine sont observées en Iran, dans le nord de l'Arabie saoudite, dans l'est de la Turquie et en Irak

WASHINGTON: Alors que les effets du changement climatique se font de plus en plus sentir dans le monde entier, les pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, étant déjà la région la plus pauvre en eau au monde, sont confrontés à une diminution toujours plus importante de leurs ressources en la matière.
Parallèlement, l'instabilité économique fait souvent obstacle à la mise en place de programmes efficaces de développement et de gestion de l'eau.
Ce sont là quelques conclusions issues d'une discussion digitale organisée par l'Institut du Moyen-Orient à Washington, mercredi.
Chercheurs et scientifiques s'y sont accordés sur le fait que les pays du monde arabe doivent adopter de nouvelles idées et technologies afin d’aider à préserver les réserves d'eau et trouver de nouveaux moyens de limiter les pertes.
Les niveaux de pénurie d'eau varient d'une zone à l'autre dans la région MENA, et la diminution de l'approvisionnement pourrait entraîner une plus grande instabilité politique et davantage de conflits entre les pays pour l'accès aux précieuses ressources, ont-ils averti.
Bien que les anciennes méthodes de mesure des précipitations, des averses et de l'évaporation restent valables à l'ère moderne, les chercheurs recommandent d'utiliser la technologie de l'imagerie par satellite dans le but de surveiller et de mieux comprendre les précipitations.
Raha Hakimdavar, professeure adjoint à l'université de Georgetown, a cependant rappelé que la précision et la disponibilité de l'imagerie satellitaire varient d'un endroit à l'autre, et qu'elle ne peut donc pas clarifier toutes les questions auxquelles les spécialistes de l'eau doivent répondre pour les aider à élaborer des solutions appropriées aux déperditions dans la région.
Par exemple, la résolution des images et la fréquence à laquelle elles sont prises ont une incidence sur la précision des données, a-t-elle précisé.
Youssef Wehbe, chercheur non-résident du programme sur le climat et l'eau de l'Institut du Moyen-Orient, a prévenu: «Aujourd'hui, la région MENA exerce une pression sans précédent sur les réserves d'eau, ce qui entraîne une augmentation brutale de la demande, menace la sécurité alimentaire locale et nuit aux écosystèmes régionaux.»
La région ne peut pas répondre à la demande croissante d'eau, a-t-il ajouté, en raison notamment de sa nature aride et semi-aride dans laquelle les précipitations sont inférieures à 200 millilitres par an et les niveaux d'évaporation dépassent 55%.
«En conséquence, les ressources en eau disponibles ne peuvent pas répondre à la demande humaine dans tous les principaux secteurs», a-t-il expliqué.
Les satellites américains, européens et japonais produisent des données précises et fiables sur les ressources en eau en Amérique, en Europe et dans certaines régions d'Asie. Toutefois, au Moyen-Orient les données et les images satellitaires disponibles concernant les questions liées à l'eau manquent toujours de précision, principalement à cause du manque de participation aux initiatives visant à les collecter.
Certains États arabes du Golfe, tels que l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Qatar, ont mis en place des programmes spatiaux ambitieux et prometteurs qui pourraient inaugurer une nouvelle ère de recherche sur l'eau par satellite, a indiqué Wehbe, également responsable du programme de recherche des Émirats arabes unis pour la science de l'amélioration des pluies.
Enrique R. Vivoni, professeur à l'université d'Arizona, a averti que la quantité d'eau souterraine perdue sur une période de dix à quinze ans dans la région MENA, sur la base de recherches publiées dans des revues scientifiques fiables, est stupéfiante.
«La perte de réserves d'eau terrestre au Moyen-Orient est énorme et correspond au débit moyen du bassin du fleuve Colorado, qui représente une perte de 10 à 25 kilomètres cubes d'eau dans l'atmosphère», a-t-il précisé.
Vivoni a ajouté que la plus grande perte de ressources en eau souterraine non renouvelable, d'après l'imagerie satellitaire, a été observée en Iran, dans le nord de l'Arabie saoudite, dans l'est de la Turquie et en Irak.
Il a exhorté les responsables de ces pays à enquêter sur ces données de manière à déterminer si elles sont correctes et, le cas échéant, à mettre en place des mesures afin de réduire ou inverser le problème.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Assassinat au Liban: les autorités pointent du doigt le Mossad

Le corps de Mohammad Sarur, qui faisait l'objet de sanctions des Etats-Unis, a été retrouvé criblé de sept balles dans une villa proche de Beyrouth le 9 avril. (AFP).
Le corps de Mohammad Sarur, qui faisait l'objet de sanctions des Etats-Unis, a été retrouvé criblé de sept balles dans une villa proche de Beyrouth le 9 avril. (AFP).
Short Url
  • Le corps de Mohammad Sarur, qui faisait l'objet de sanctions des Etats-Unis, a été retrouvé criblé de sept balles dans une villa proche de Beyrouth le 9 avril
  • "Ce crime (...) selon les données que nous avons jusqu'à présent, a été exécuté par des services de renseignement", a affirmé dimanche soir le ministre de l'Intérieur, Bassam Mawlawi, lors d'une interview télévisée

BEYROUTH: Le ministre libanais de l'Intérieur et deux autres hauts responsables ont affirmé que le Mossad était impliqué dans l'assassinat d'un homme accusé de transférer des fonds de l'Iran au Hamas palestinien, selon les premiers résultats de l'enquête.

Le corps de Mohammad Sarur, qui faisait l'objet de sanctions des Etats-Unis, a été retrouvé criblé de sept balles dans une villa proche de Beyrouth le 9 avril.

"Ce crime (...) selon les données que nous avons jusqu'à présent, a été exécuté par des services de renseignement", a affirmé dimanche soir le ministre de l'Intérieur, Bassam Mawlawi, lors d'une interview télévisée.

Au journaliste de la chaîne Al-Jadeed qui lui demandait s'il pensait qu'il s'agissait du Mossad, le service de renseignement israélien, il a répondu "oui".

Sarur travaillait pour des institutions financières du puissant Hezbollah pro-iranien, allié du Hamas, selon une source de sécurité libanaise.

En août 2019, le Trésor américain avait annoncé des sanctions à son encontre, l'accusant d'être "responsable du transfert de dizaines de millions de dollars entre les Gardiens de la révolution d'Iran", l'armée idéologique du régime, "et les brigades Ezzeddine al-Qassam", la branche armée du Hamas, "à travers le Hezbollah au Liban".

"Toutes les données indiquent que le Mossad est derrière son assassinat", a affirmé lundi à l'AFP un haut responsable judiciaire qui a requis l'anonymat.

"L'enquête en est à ses début, et rassemble les éléments, notamment des télécommunications", a ajouté ce responsable.

Un responsable de sécurité qui a également requis l'anonymat a précisé à l'AFP que "le Mossad a utilisé des agents libanais et syriens pour attirer Sarur dans une villa à Beit Méry", sur les hauteurs de Beyrouth.

"C'est là qu'il a été torturé et tué", a ajouté cette source, selon laquelle "les auteurs du crime ont utilisé des pistolets munis de silencieux et effacé toutes les empreintes digitales" sur les lieux du crime.

Selon sa famille, il avait disparu six jours avant que son corps soit retrouvé.

Le Liban et Israël sont toujours en état de guerre et les autorités annoncent régulièrement avoir arrêté des personnes accusées d'espionner pour le compte de leur ennemi.

En janvier 2019, l'armée libanaise avait annoncé avoir arrêté un agent du Mossad impliqué dans une tentative d'assassinat un an plus tôt d'un responsable du Hamas dans le sud du Liban.

Mais les opérations du Mossad au Liban remontent à plus de cinquante ans. Le service de renseignement extérieur israélien avait notamment assassiné, en avril 1973, trois responsables palestiniens lors d'une attaque spectaculaire à Beyrouth.

Mohammed Youssef al-Najjar, Kamal Adwan et Kamal Nasser, avaient été abattus à leurs domiciles par un commando dont faisait partie Ehud Barak, devenu plus tard Premier ministre, déguisé en femme.

En janvier 1979, un autre haut responsable de l'Organisation de libération de la Palestine, Ali Hassan Salamé, avait été tué dans l'explosion de son véhicule à Beyrouth, attribuée au Mossad.

Salamé, marié à l'époque à l'ex-Miss Univers libanaise Georgina Rizk, comme les trois autres dirigeants, étaient poursuivis pour leur implication dans la mort d'athlètes israéliens à Munich en 1972.


Attaquer directement Israël n'est plus tabou pour l'Iran

Au cours des 45 dernières années, les deux ennemis ont pris l'habitude de lancer des opérations clandestines, qu'ils ne revendiquent pas, ou de s'en remettre à des actions menées par des organisations non-étatiques, comme le Hezbollah libanais soutenu par Téhéran. (AFP).
Au cours des 45 dernières années, les deux ennemis ont pris l'habitude de lancer des opérations clandestines, qu'ils ne revendiquent pas, ou de s'en remettre à des actions menées par des organisations non-étatiques, comme le Hezbollah libanais soutenu par Téhéran. (AFP).
Short Url
  • Au cours des 45 dernières années, les deux ennemis ont pris l'habitude de lancer des opérations clandestines, qu'ils ne revendiquent pas,
  • "Aujourd’hui, l’équation stratégique a changé. Cibler les forces et les moyens iraniens entraînera une réponse directe", a averti Mohammad Jamshidi

TEHERAN: En attaquant pour la première fois le territoire israélien, l'Iran a annoncé avoir appliqué sa nouvelle stratégie: répliquer directement depuis son territoire à Israël lorsque les intérêts iraniens seront pris pour cibles en Iran ou à l'étranger.

Ce changement de posture face à son ennemi juré a été dévoilé par les dirigeants politiques et militaires iraniens qui se sont exprimés depuis la vague de drones, missiles balistiques et de croisière lancés samedi soir vers Israël.

Israël a affirmé avoir intercepté, avec l'aide des Etats-Unis notamment, 99% des plus de 350 projectiles. Seuls quelques missiles sont entrés dans l'espace aérien israélien touchant "légèrement" une base militaire et il y a eu quelques blessés, d'après lui.

A Téhéran, le président Ebrahim Raïssi a dit avoir infligé une "leçon instructive à l'ennemi sioniste".

Pour lui, "la punition de l'agresseur" s'est réalisée sur "la base du droit légitime de se défendre" après la mort de sept militaires iraniens dans une frappe attribuée à Israël contre le consulat iranien à Damas le 1er avril.

Mais l'envergure de la riposte a surpris la communauté internationale car la République islamique s'était gardée d'attaquer frontalement Israël depuis son instauration en 1979.

Au cours des 45 dernières années, les deux ennemis ont pris l'habitude de lancer des opérations clandestines, qu'ils ne revendiquent pas, ou de s'en remettre à des actions menées par des organisations non-étatiques, comme le Hezbollah libanais soutenu par Téhéran.

« La nouvelle stratégie »

"Aujourd’hui, l’équation stratégique a changé. Cibler les forces et les moyens iraniens entraînera une réponse directe", a averti Mohammad Jamshidi, un conseiller de M. Raïssi, dans un message posté sur X dimanche.

Hossein Salami, le commandant des Gardiens de la révolution, l'armée idéologique de la République islamique, a été plus explicite: "la nouvelle équation est la suivante: désormais, en cas d'attaque israélienne contre des intérêts, des personnalités ou des citoyens iraniens n’importe où, il y aura une riposte" lancée depuis l'Iran.

Saluant à la une le succès "historique" de l'attaque, le quotidien gouvernemental Iran a souligné lundi qu'elle illustrait la "nouvelle stratégie du pouvoir dans la région".

Elle représente "un test dont l'Iran avait besoin pour savoir comment agir dans les batailles futures", a renchéri le quotidien ultraconservateur Javan.

Le journal réformateur Ham Mihan souligne que "la réponse directe" de l'Iran à Israël a "mis fin au statu quo et brisé les règles du conflit qui oppose les deux parties" depuis des décennies.

"Il n'y a plus de guerre de l'ombre entre les deux camps", qui "peuvent oser attaquer directement l'autre partie", écrit-il.

Cela n'avait pas été le cas après les précédentes attaques attribuées à Israël contre des intérêts iraniens en Syrie, ou ailleurs, ces dernières années.

« L'ère de la patience est terminée »

Depuis le début de la guerre à Gaza entre Israël et le Hamas, déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien le 7 octobre, l'Iran défend avec force ce mouvement. En s'appuyant surtout, selon des experts, sur la stratégie d'essayer d'épuiser Israël par des actions menées par ses alliés, les Houthis yéménites ou le Hezbollah libanais.

En 2020, l'Iran avait aussi choisi une réaction relativement limitée, selon les spécialistes, à la mort du général Qassem Soleimani, un important chef  des Gardiens de la Révolution, dans une frappe américaine près de Bagdad en janvier 2020.

Quatre jours plus tard, il avait lancé des missiles contre deux bases américaines en Irak, mais en avertissant au préalable les Etats-Unis selon des sources américaines. Aucun soldat n'avait été tué.

Dans son message dimanche, Mohammad Jamshidi a souligné: "l'ère de la patience stratégique face aux vices du régime sioniste est terminée".

Le concept de la "patience stratégique" a été défendu par l'ex-président modéré Hassan Rohani après la décision des Etats-Unis de quitter l'accord sur le nucléaire en 2018 sous la présidence de Donald Trump. Il justifiait le fait que Téhéran ne prendrait pas immédiatement de contre-mesures et attendrait la bonne opportunité en pariant sur le long terme.

Après la frappe contre le consulat d'Iran à Damas, des partisans de la République islamique ont critiqué cette stratégie, estimant qu'elle était trop passive et encourageait Israël à mener davantage d'attaques contre les intérêts iraniens.

"L'opération victorieuse" contre Israël a "renforcé la dissuasion stratégique de l'Iran face aux ennemis", a affirmé lundi le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian.


L'Iran a fermé ses installations nucléaires le jour de son attaque contre Israël

Les installations iraniennes devaient rouvrir lundi. (AFP).
Les installations iraniennes devaient rouvrir lundi. (AFP).
Short Url
  • M. Grossi a été interrogé sur la possibilité d'une frappe de représailles israélienne contre des installations nucléaires iraniennes
  • "Ce que je peux vous dire, c'est que nos inspecteurs en Iran ont été informés par le gouvernement iranien qu'hier (dimanche, NDLR), toutes les installations nucléaires que nous inspectons chaque jour resteraient fermées pour des raisons de sécurité"

NATIONS-UNIES: L'Iran a fermé ses installations nucléaires dimanche, jour de son attaque contre Israël, a indiqué lundi le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi.

Lors d'une conférence de presse en marge d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU consacrée à la centrale ukrainienne de Zaporijjia, M. Grossi a été interrogé sur la possibilité d'une frappe de représailles israélienne contre des installations nucléaires iraniennes.

"Nous sommes toujours préoccupés par cette possibilité", a répondu le chef de l'AIEA.

"Ce que je peux vous dire, c'est que nos inspecteurs en Iran ont été informés par le gouvernement iranien qu'hier (dimanche, NDLR), toutes les installations nucléaires que nous inspectons chaque jour resteraient fermées pour des raisons de sécurité", a-t-il ajouté.

Selon lui, les installations iraniennes devaient rouvrir lundi. "J'ai décidé de ne pas laisser les inspecteurs revenir tant que la situation n'est pas complètement calme. Nous reprendrons demain" (mardi, NDLR), a-t-il expliqué.

Cette fermeture "n'a pas eu d'impact sur nos activités d'inspection. Mais bien sûr, nous appelons toujours à la plus grande retenue", a-t-il poursuivi.

En 1981, Israël avait bombardé le réacteur nucléaire d'Osirak, dans l'Irak de Saddam Hussein, malgré l'opposition de Washington. Israël a également admis, en 2018, avoir lancé un raid aérien ultrasecret onze ans plus tôt contre un réacteur nucléaire dans l'est de la Syrie.

Les services secrets israéliens sont aussi accusés par Téhéran d'avoir assassiné deux physiciens nucléaires iraniens en 2010, et d'en avoir enlevé un autre l'année précédente.

Egalement en 2010, une cyberattaque très sophistiquée via le virus Stuxnet, attribuée par Téhéran à Israël et aux Etats-Unis, avait frappé le programme nucléaire iranien, entraînant une série de pannes dans son parc de centrifugeuses utilisées pour l'enrichissement de l'uranium.

Israël accuse l'Iran - qui dément - de vouloir se doter de la bombe atomique et dit chercher par tous les moyens à l'en empêcher.