Le séisme, nouveau défi pour l'opposition turque

Le président Recep Tayyip Erdogan n'a pas dit un mot depuis la catastrophe à propos des scrutins prévus pour le 14 mai mais, au sein de son parti - l'AKP - et des formations de l'opposition, les conjectures vont bon train sur leur possible ajournement. (Photo, AFP)
Le président Recep Tayyip Erdogan n'a pas dit un mot depuis la catastrophe à propos des scrutins prévus pour le 14 mai mais, au sein de son parti - l'AKP - et des formations de l'opposition, les conjectures vont bon train sur leur possible ajournement. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 14 février 2023

Le séisme, nouveau défi pour l'opposition turque

  • Le séisme va «changer la donne non seulement pour le gouvernement mais aussi pour l'opposition», juge Berk Esen, de l'université Sabanci d'Istanbul
  • «Ces terribles événements ont fourni à l'opposition de nouvelles munitions contre le gouvernement - propulsées par la colère et les griefs de la population» qui juge pour partie que l'aide a trop tardé, renchérit l'analyste Anthony Skinner

ISTANBUL : La tenue des élections présidentielle et législatives en mai semble incertaine après le séisme qui a dévasté le sud de la Turquie et a déjà obligé l'alliance de l'opposition à différer l'annonce du nom de son candidat.

Celle-ci aurait dû avoir lieu lundi.

Le tremblement de terre du 6 février, d'une magnitude de 7,8, a fait près de 32 000 morts dans ce pays - auxquels il faut ajouter les plus de 3 500 personnes qui ont perdu la vie en Syrie voisine - et ce bilan est loin d'être définitif.

Le président Recep Tayyip Erdogan n'a pas dit un mot depuis la catastrophe à propos des scrutins prévus pour le 14 mai mais, au sein de son parti - l'AKP - et des formations de l'opposition, les conjectures vont bon train sur leur possible ajournement.

Le séisme "va changer la donne non seulement pour le gouvernement mais aussi pour l'opposition", juge Berk Esen, de l'université Sabanci d'Istanbul.

"Ces terribles événements ont fourni à l'opposition de nouvelles munitions contre le gouvernement - propulsées par la colère et les griefs de la population" qui juge pour partie que l'aide a trop tardé, renchérit l'analyste Anthony Skinner.

Avant le tremblement de terre, beaucoup doutaient déjà de la capacité de l'opposition, réunie en grande partie dans une Alliance nationale rassemblant six partis, à annoncer son candidat commun lundi.

Le chef du CHP, la plus grande formation d'opposition, Kemal Kiliçdaroglu, entend se présenter contre M. Erdogan. Mais l'une des principales figures de l'alliance, Meral Aksener, la fondatrice du Bon Parti, s'est selon certains observateurs opposée à sa candidature.

«Un devoir»

"L'opposition était déjà dans une position très délicate" car divisée sur la personnalité capable de défier M. Erdogan, au pouvoir depuis 2003, rappelle M. Esen.

A 74 ans, M. Kiliçdaroglu n'apparaît pas dans les sondages comme le mieux placé pour battre le chef de l'Etat sortant - comparé notamment aux maires CHP de la capitale Ankara et d'Istanbul.

Pour Berk Esen, il reste néanmoins le candidat le plus probable car "cela sera très difficile pour un autre" de faire campagne désormais.

Pour les experts, des élections en mai paraissent improbables. Ils envisagent leur déroulement en juin, la dernière date possible dans le respect de la Constitution turque, car leur ajournement n'est théoriquement possible qu'en cas de guerre, rappellent-ils.

Pour reporter ces scrutins au-delà de juin et sans modifier la Constitution, le gouvernement a besoin de la majorité des deux tiers au parlement, ce qui implique que des dizaines de députés de l'opposition votent en faveur d'une telle option.

Pour Sinem Adar, du Centre d'études appliquées sur la Turquie à Berlin, l'opposition a tout intérêt à s'assurer de leur organisation d'ici à juin.

Meral Aksener veut un vote en juin.

"C'est notre devoir de les organiser", a-t-elle glissé la semaine dernière devant la presse.

Fissures dans l'opposition

Mais, même dans sa réponse au tremblement de terre, l'opposition est loin de s'accorder.

Meral Aksener a choisi le silence et a évité les régions sinistrées les premiers jours "pour ne pas gêner les secours", tandis que Kemal Kilicdaroglu s'est rapidement rendu sur place et a tenté de consoler les victimes, fustigeant le pouvoir et son impréparation.

Samedi, il s'est présenté avec un dirigeant prokurde à Diyarbakir, la grande ville du sud-est en majorité peuplée de Kurdes, touchée par le séisme. Diyarbakir est le chef-lieu de la seule des 10 provinces victimes du tremblement de terre à n'avoir pas voté en faveur de l'alliance formée autour de M. Erdogan aux précédentes élections, en 2018.

Les maires d'Ankara et d'Istanbul ont pour leur part partagé des images d'employés municipaux de leurs villes participant aux opérations de sauvetage, nettoyant les décombres et fournissant des repas chauds aux survivants.

Pour Sinem Adar, la catastrophe du 6 février risque de fissurer davantage encore l'opposition sur le choix de son candidat et le rôle de chaque parti.

Berk Esen reconnaît, quant à lui, un manque de coordination en son sein mais fait valoir qu'une semaine seulement s'est écoulée depuis le tremblement de terre.


Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.