L’attentat de la mosquée de Peshawar place le Pakistan devant un choix difficile en matière de sécurité

Des enquêteurs fouillent les décombres d’une mosquée à l’intérieur du quartier général de la police à Peshawar après qu’un attentat suicide a tué plus de 100 personnes le 1er février 2023. (AFP)
Des enquêteurs fouillent les décombres d’une mosquée à l’intérieur du quartier général de la police à Peshawar après qu’un attentat suicide a tué plus de 100 personnes le 1er février 2023. (AFP)
Moazzam Jah Ansari (C), chef des forces de police de la province de Khyber Pakhtunkhwa, intervient lors d’une conférence de presse au quartier général de la police à Peshawar, le 2 février 2023. (AFP)
Moazzam Jah Ansari (C), chef des forces de police de la province de Khyber Pakhtunkhwa, intervient lors d’une conférence de presse au quartier général de la police à Peshawar, le 2 février 2023. (AFP)
Des secouristes enlèvent des débris à côté d’une mosquée endommagée après l’attentat suicide du 30 janvier à l’intérieur du quartier général de la police à Peshawar, le 1er février 2023. (AFP)
Des secouristes enlèvent des débris à côté d’une mosquée endommagée après l’attentat suicide du 30 janvier à l’intérieur du quartier général de la police à Peshawar, le 1er février 2023. (AFP)
Des secouristes enlèvent des débris à côté d’une mosquée endommagée après l’attentat suicide du 30 janvier à l’intérieur du quartier général de la police à Peshawar, le 1er février 2023. (AFP)
Des secouristes enlèvent des débris à côté d’une mosquée endommagée après l’attentat suicide du 30 janvier à l’intérieur du quartier général de la police à Peshawar, le 1er février 2023. (AFP)
Short Url
Publié le Samedi 18 février 2023

L’attentat de la mosquée de Peshawar place le Pakistan devant un choix difficile en matière de sécurité

  • Le gouvernement est contraint de lancer une offensive générale contre les milices dans un contexte de crise économique et politique
  • L’attentat suicide perpétré en janvier dans une mosquée de la police à Peshawar est l’attaque terroriste la plus meurtrière depuis plusieurs années

ISLAMABAD: La tempête de crises que traverse le Pakistan — crise économique, chute de la monnaie, polarisation politique et militantisme islamiste — a été exacerbée par l’attentat suicide perpétré le mois dernier contre une mosquée située dans un complexe policier hautement fortifié à Peshawar.

Cet attentat, le plus meurtrier au Pakistan depuis plusieurs années, rappelle une période qui remonte à plus de dix ans, où Peshawar, une ville proche des anciennes zones tribales qui bordent l’Afghanistan, était marquée par la violence des militants et une contre-offensive militaire.

Les autorités de Peshawar pensent que l’attentat du 30 janvier a été perpétré en représailles au rôle joué par la police en première ligne de la lutte que mène le Pakistan contre une insurrection résurgente depuis le retour au pouvoir des Talibans de l’autre côté de la frontière, en Afghanistan.

img 1
L’explosion d’une mosquée qui a fait 101 morts – principalement des policiers – dans le nord-ouest du Pakistan, le 30 janvier 2023, a replongé une ville longtemps marquée par la violence dans une situation tendue. (AFP)

Cet attentat suicide est le dernier d’une série d’attaques contre le personnel de sécurité dans tout le pays depuis que la milice Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP) a mis fin à son accord de cessez-le-feu avec le gouvernement pakistanais en novembre.

En visite à Peshawar peu après l’attaque, le Premier ministre pakistanais, Shahbaz Sharif, a déclaré que «toutes les ressources» seraient mobilisées pour débusquer les militants. «Il s’agit d’une attaque contre le Pakistan, ni plus ni moins [...].  Je ne doute pas que le terrorisme soit notre principal défi en matière de sécurité nationale», a-t-il tweeté.

Si le gouvernement de Sharif décide de joindre l’action à la parole, il ne manquera pas de soutien à en juger par l’indignation de l’opinion publique, attisée par le nombre élevé de morts.

img 1
Le Premier ministre du Pakistan, Shehbaz Sharif. (AFP)

«Le Pakistan doit sortir de la confusion, mettre fin à l’apaisement des militants par le biais de pourparlers de paix et s’engager à fond contre eux pour instaurer une paix permanente», explique Mosharraf Zaidi, un analyste pakistanais de la sécurité, à Arab News.

Tant que le Pakistan «n’aura pas rompu avec l’extrémisme violent», les militants continueront à croire qu’ils peuvent prendre le pouvoir, souligne-t-il.

«Nous devons écraser l'infrastructure idéologique et la chaîne d’approvisionnement des militants pour briser leur colonne vertébrale», note Zaidi, ajoutant que le gouvernement devait formuler une «stratégie décisive» pour débusquer les terroristes. 

L’attentat de Peshawar s’est produit à un moment où le Pakistan est confronté à une série de défis de taille, avec des tensions politiques intérieures qui s’exacerbent en raison de l’aggravation de l’inflation, à l’approche des élections générales prévues en octobre.

img 1
Des responsables de la sécurité pakistanaise se rassemblent pour assister aux funérailles des policiers qui ont été tués dans un attentat contre une mosquée à l’intérieur du quartier général de la police à Peshawar, le 30 janvier 2023. (Photo, AFP)

Selon les analystes, la désunion politique et la confusion idéologique ont permis aux militants de se regrouper et de cibler l’État.

La situation est compliquée par le fait que le TTP a pris ses distances par rapport à l’attentat de Peshawar, affirmant qu’il ne vise pas les mosquées. La police cherche à savoir si l’attentat est l’œuvre d’une filiale du TTP, Jamaat-ul-Ahrar.

Bien que distinct, le mouvement des Talibans du Pakistan, créé en 2007, est allié au mouvement des Talibans d’Afghanistan, qui a repris le pouvoir dans l’Afghanistan voisin en août 2021, lorsque les forces américaines et de l’Otan ont mis fin à leur occupation du pays qui durait depuis vingt ans.

img 1
Cette photo non datée reçue le 17 décembre 2014 montre des combattants du Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP) dans un lieu non divulgué. (Photo, AFP)

Plusieurs milices, dont le TTP, ont commencé à mener des opérations dans les anciennes zones tribales administrées fédéralement (FATA) du Pakistan peu après l’invasion de l’Afghanistan par les États-Unis et leurs alliés, en réponse au refus des Talibans de livrer le chef d’Al-Qaïda, Oussama ben Laden, après les attentats du 11 septembre 2001.

Pendant cette période, les militants ont déclenché une vague d’attentats terroristes dans les FATA, tuant des soldats, assassinant des politiciens et des célébrités connus pour leur franc-parler, et éliminant les opposants perçus comme tels. Pour aggraver la crise, ils ont rendu illégale l’éducation des femmes dans la région, détruisant environ 200 écoles de filles.

C’est en 2012, dans le district de Swat, dans la province de Khyber Pakhtunkhwa, que Malala Yousafzai, 15 ans, a reçu une balle dans la tête tirée par un militant taliban pakistanais. Elle a miraculeusement survécu à l’attaque et a ensuite remporté le prix Nobel de la paix pour son plaidoyer en faveur de l’éducation des filles.

 

EN BREF

  • Allié avec Al-Qaïda, Tehrik-e-Taliban Pakistan a été créé en 2007 et a tué des dizaines de milliers de civils et de membres du personnel de sécurité
  • Écrasé par une répression militaire après 2014, le TTP s’est regroupé depuis que les Talibans ont pris le pouvoir de l’autre côté de la frontière en août 2021
  • Pour ce qui est de l’attentat du 30 janvier à Peshawar, la police pakistanaise a accusé Jamaat-ul-Ahrar, un groupe plus radical occasionnellement affilié au TTP, qui a nié toute implication

Des opérations de lutte contre l’insurrection à grande échelle ont commencé en 2014, tuant la plupart des commandants et combattants des milices et poussant les autres à se réfugier en Afghanistan. Les zones constituant les FATA, établies au moment de la partition avec l’Inde en 1947, ont été fusionnées à la province voisine du Khyber Pakhtunkhwa en 2018.

Cependant, après le retour des Talibans au pouvoir à Kaboul et la fin des opérations antiterroristes américaines dans la région frontalière, les militants pakistanais ont commencé à se regrouper dans les anciens districts tribaux. Depuis lors, une série d’attaques meurtrières a laissé les Pakistanais dans l’incertitude quant à la reprise de l’insurrection dans leur pays.

Ismaïl Khan, journaliste pakistanais et analyste de la sécurité, estime que le gouvernement Sharif doit de toute urgence élaborer «une stratégie globale et à long terme dans le cadre de la conférence pour faire face au problème actuel».

Par ailleurs, «le gouvernement devrait également collaborer directement avec le gouvernement afghan pour mettre fin aux mouvements transfrontaliers des terroristes, en plus de formuler et de mettre en œuvre une solide stratégie de lutte contre le terrorisme», a-t-il déclaré à Arab News.

img 1
Des bénévoles pakistanais portent un étudiant blessé d’un Institut de formation agricole après une attaque de militants talibans à Peshawar, le 1er décembre 2017. (AFP)

Rien qu’en janvier, les militants ont tué 124 membres du personnel de sécurité et en ont blessé 247 dans 26 attentats distincts, la majorité d’entre eux ayant eu lieu dans la région de Khyber Pakhtunkhwa, qui borde l’Afghanistan, selon les données communiquées par le Pak Institute for Peace Studies, un groupe de réflexion basé à Islamabad.

La ventilation des données montre que sur ces 26 attaques, sept ont eu lieu au Baloutchistan, faisant six morts et 17 blessées; une au Sindh, sans aucune victime; deux au Pendjab, faisant deux morts; et 16 au Khyber Pakhtunkhwa, faisant 116 morts et 230 blessés.

Selon le groupe de réflexion, les attaques ont augmenté de 50% au Pakistan, principalement dans les provinces occidentales limitrophes de l’Afghanistan, au cours de la première année du règne des Talibans à Kaboul.

img 1
Mémorial pour les victimes du massacre perpétré par les Talibans en 2015 à l’École publique de l’armée. (AFP)

Ces derniers mois, Islamabad a accusé Kaboul de ne pas avoir assuré la sécurité de ses frontières et d’avoir permis aux militants présents en Afghanistan de planifier des attaques contre le Pakistan.

Les négociations de paix entre le TTP et le Pakistan, sous la médiation du mouvement des Talibans d’Afghanistan, ont échoué en novembre, rompant un cessez-le-feu précaire. Pendant les pourparlers, les militants ont vu leur nombre augmenter grâce à la libération d’une centaine de combattants de rang inférieur des prisons pakistanaises.

Le général de division Ejaz Awan (retraité), éminent analyste de la sécurité et ancien ambassadeur du Pakistan à Brunei, estime qu’une réponse militaire est la seule solution à la menace terroriste.

img 1
Certains commandants militaires pakistanais estiment qu’il ne reste plus qu’une seule option, celle de mener une guerre à part entière contre les militants talibans. (Photo, AFP)

«Ils ne veulent ni reconnaître la Constitution, ni la loi, ni l’autorité de l’État pakistanais. Il ne reste donc qu’une seule option, celle de mener une guerre totale contre eux», indique Awan à Arab News.

Awan, qui a tenu plusieurs séries de pourparlers de paix infructueux avec les militants au début des années 2000, souhaite que le gouvernement pakistanais lance une opération fondée sur le renseignement dans les districts tribaux du pays et dans d’autres régions afin d’éradiquer les militants, leurs facilitateurs et leurs partisans.

«Ces militants sont équipés des derniers gadgets, tels que des lunettes de vision nocturne, laissés par les forces américaines et de l’Otan en Afghanistan après leur retrait. Le Pakistan devrait donc également aborder la question avec les autorités afghanes», ajoute-t-il. 

img 1
Des soldats pakistanais participent à un raid sur un repaire de militants lors d’une opération à Peshawar, le 16 avril 2019. (Photo, AFP)

Selon les enquêteurs qui se sont adressés à l’AFP, le suspect est apparu sur une vidéo de surveillance en arrivant aux portes du complexe sur une moto avant de passer un contrôle de sécurité et de demander aux agents où se trouve la mosquée Police Lines.

Moazzam Jah Ansari, chef des forces de police de la province de Khyber Pakhtunkhwa, a précisé que le kamikaze avait utilisé 10 à 12 kg d’explosifs, apportés sur le site avant l’attentat en pièces détachées.

Les autorités ont eu du mal à trouver une explication au fait que le kamikaze ait réussi à accéder à la mosquée, vêtu d’un uniforme de police.

Ils enquêtent sur la manière dont une violation aussi importante a pu se produire dans l’une des zones les plus sécurisées de la ville, qui abrite les bureaux de renseignement et de lutte contre le terrorisme. Certains craignent que des personnes se trouvant dans le complexe policier aient facilité l’attaque.

img 1
Des policiers et des habitants allument des bougies en hommage aux victimes de l’attentat suicide contre une mosquée à l’intérieur du quartier général de la police à Peshawar, lors d’une veillée à Karachi le 2 février 2023. (AFP)

Des centaines de policiers participaient aux prières de l’après-midi à l’intérieur du quartier général de la police, qui aurait dû être étroitement contrôlé, lorsque l’explosion s’est produite, provoquant l’effondrement d’un mur et l’écrasement de dizaines d’officiers.

Le 2 février, les responsables de la police ont revu le nombre de morts à la baisse, passant de 101 à 83 officiers et un civil, après avoir déclaré qu’il y avait eu confusion dans l’enregistrement des corps. De nombreux survivants sont toujours hospitalisés et se trouvent dans un état critique.

Exprimant sa solidarité avec le Pakistan, le ministère saoudien des Affaires étrangères a «réaffirmé la position ferme du Royaume qui rejette le fait de cibler les lieux de culte, de terroriser et de tuer des innocents», selon un article publié par l’agence de officiellle presse saoudienne.

Le ministère «a également affirmé que le Royaume se tient aux côtés de la République islamique du Pakistan, pays frère, contre toute forme de violence, d’extrémisme et de terrorisme, quels que soient ses motifs ou ses justifications».

img 1
Des militants de la société civile protestent à Lahore, au Pakistan, le 1er février 2023, à la suite de l’attentat suicide perpétré contre une mosquée à l’intérieur du quartier général de la police à Peshawar. (AFP)

L’attaque a en outre suscité de vives condamnations de la part de la Ligue islamique mondiale et du secrétaire général du Conseil de coopération du Golfe, entre autres organisations internationales.

«Il est particulièrement odieux que cet attentat se soit produit dans un lieu de culte», a commenté Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, par l’intermédiaire d’un porte-parole. «La liberté de religion ou de croyance, y compris la possibilité de pratiquer son culte en paix et en sécurité, est un droit humain universel.»

«Il est impératif que nous améliorions notre collecte de renseignements et que nous équipions correctement nos forces de police pour lutter contre la menace croissante du terrorisme», a souligné Imran Khan, ancien Premier ministre pakistanais et farouche critique du gouvernement actuel.

Le Premier ministre Sharif a lancé un appel à l’unité nationale à la suite de l’attentat de Peshawar. «Nous devons nous unir pour résoudre ce problème», a-t-il déclaré le 3 février lors de sa visite dans la ville.

Néanmoins, compte tenu de l’ensemble des défis auxquels le Pakistan est confronté, l’attention de son gouvernement continuera probablement à se porter sur plusieurs fronts.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Washington cible l'Autorité palestinienne, en plein débat sur la reconnaissance d'un Etat de Palestine

Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
Short Url
  • Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine.

L'annonce des sanctions américaines survient en effet au moment où de nombreux Etats, dont la France et le Canada, ont promis de reconnaître un Etat de Palestine en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre, provoquant la colère d'Israël et des Etats-Unis qui parlent d'une "récompense" faite au Hamas dans la bande de Gaza.

La France et l'Arabie saoudite ont co-présidé lundi et mardi à l'ONU une conférence internationale, plaidant ainsi pour la solution à deux Etats, israélien et palestinien, seul chemin pour parvenir à la paix au Proche-Orient.

Washington, qui rejette toute reconnaissance unilatérale d'un Etat palestinien, a décrit la conférence comme étant une "insulte" faite aux victimes de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Dans un communiqué jeudi, le département d'Etat américain a fait part de sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'OLP, sans les identifier, accusés notamment d'"internationaliser le conflit avec Israël".

Washington reproche aux deux institutions de "soutenir des actions au sein d'organisations internationales qui sapent et contredisent les engagements antérieurs" notamment à travers la Cour internationale de justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI).

Washington avait sanctionné en juin quatre magistrates de la CPI, estimant que leurs procédures visant l'exécutif israélien étaient "illégitimes" et "politisées".

Washington, principal allié d'Israël, accuse aussi l'OLP et l'Autorité palestinienne de "continuer à soutenir le terrorisme, y compris par l'incitation et la glorification de la violence" dans les livres scolaires, une accusation de longue date.

Les sanctions consistent en un refus de visa pour des membres des deux institutions.

- "Distorsion morale" -

"Il est dans l'intérêt de notre sécurité nationale d'imposer des sanctions et de tenir l'OLP et l'Autorité palestinienne responsables du non-respect de leurs engagements et de la remise en cause des perspectives de paix", a indiqué le département d'Etat.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, s'est aussitôt félicité de cette décision, jugeant que "l'Autorité palestinienne doit payer le prix de sa politique actuelle consistant à verser des indemnités aux terroristes et à leurs familles pour les attentats commis et pour l'incitation à la haine contre Israël dans les écoles, les manuels scolaires, les mosquées et les médias palestiniens".

Il a également relevé, sur X, que cette mesure "met en évidence la distorsion morale de certains pays qui se sont empressés de reconnaître un Etat palestinien virtuel tout en fermant les yeux sur le soutien de l'Autorité palestinienne au terrorisme et à l'incitation à la haine".

L'Autorité palestinienne, dont le président est Mahmoud Abbas, administre la Cisjordanie occupée, tandis que l'OLP, créée en 1964, est le mouvement fondateur représentant les Palestiniens, longtemps dirigée par leur leader historique Yasser Arafat.

L'OLP rassemble la majorité des mouvements politiques palestiniens mais pas le mouvement islamiste Hamas, qui s'est emparé du pouvoir à Gaza en 2007.

Des pays arabes et occidentaux voudraient voir l'Autorité palestinienne, très affaiblie, jouer un rôle dans la gouvernance de la bande de Gaza après la guerre qui y fait rage depuis octobre 2023.

Depuis son retour au pouvoir en janvier, le président Donald Trump, qui a accueilli le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu par trois fois à la Maison Blanche, plus qu'aucun autre dirigeant étranger, a apporté un soutien inconditionnel à Israël, tout en oeuvrant sans succès pour un cessez-le-feu à Gaza.

Mais il s'est montré peu disert sur l'Autorité palestinienne, décriée pour le manque de réformes et la corruption.

Parmi ses premiers décrets, le président Trump avait levé des sanctions imposées sous son prédécesseur Joe Biden visant des colons israéliens extrémistes en Cisjordanie, en proie à une recrudescence des violences.


L'envoyé de Trump rencontre Netanyahu, Israël face à des critiques accrues

L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
Short Url
  • L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël
  • Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël

Jérusalem, Non défini: L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël.

Après 22 mois d'une guerre dévastatrice déclenchée par une attaque du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023, la bande de Gaza est menacée d'une "famine généralisée" selon l'ONU et est totalement dépendante de l'aide humanitaire distribuée par camions ou larguée depuis les airs.

Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël, selon la Défense civile locale qui a fait état de 38 Palestiniens tués jeudi.

Plusieurs dizaines de corps gisaient empilés à la morgue de l'hôpital al-Chifa dans le nord de Gaza, dans l'attente d'être collectés par leurs proches, a constaté un correspondant de l'AFP.

"Le moyen le plus rapide de mettre fin à la crise humanitaire à Gaza est que le Hamas CAPITULE ET LIBÈRE LES OTAGES !!!", a déclaré le président américain Donald Trump sur X.

Rien n'a filtré de la rencontre entre MM. Witkoff et Netanyahu mais en début de semaine, M. Trump a semblé se distancer de son allié israélien en évoquant une "vraie famine" à Gaza.

Avant l'arrivée jeudi de l'émissaire de M. Trump, des dizaines de mères et proches d'otages encore aux mains du Hamas ont manifesté devant le bureau du Premier ministre à Jérusalem, exigeant un "accord global" qui garantirait la libération des 49 otages encore détenus à Gaza, dont 27 ont été déclarés morts par l'armée.

- "Position minoritaire" -

L'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné du côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles.

En riposte, Israël a juré de détruire le Hamas et lancé une offensive dévastatrice à Gaza qui a fait au moins 60.249 morts, en majorité des civils, d'après les données du ministère de la Santé à Gaza jugées fiables par l'ONU. La campagne aérienne et terrestre a dévasté le territoire et provoqué un désastre humanitaire.

Le chef de la diplomatie allemande Johann Wadephul a lui rencontré à Jérusalem son homologue israélien Gideon Saar, avant de rencontrer M. Netanyahu.

Avant de décoller pour Israël, M. Wadephul a estimé qu'Israël était "de plus en plus en position minoritaire", alors qu'un "nombre croissant de pays, y compris européens, sont prêts à reconnaître un Etat palestinien sans processus de négociation préalable".

Ces visites interviennent après la multiplication des alertes d'organisations internationales sur une famine à Gaza et l'échec de négociations indirectes, sous médiation américaine, qatarie et égyptienne, entre Israël et le Hamas en vue d'un cessez-le-feu.

Le gouvernement israélien a annoncé dimanche une pause limitée dans l'offensive afin de permettre l'acheminement de l'aide dans le petit territoire pauvre où s'entassent plus de deux millions de Palestiniens.

Mais ces aides sont jugées insuffisantes par les organisations internationales face aux besoins immenses de la population.

- "Pression déformée"

Le Portugal a indiqué jeudi envisager de reconnaître l'Etat de Palestine, après que plusieurs pays dont le Canada, la France et le Royaume-Uni ont annoncé leur intention de faire de même en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre.

Une telle reconnaissance reste néanmoins largement symbolique en raison du refus d'Israël de la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Dans ce contexte, Israël a dénoncé une "campagne de pression internationale déformée" venant "récompenser le Hamas et nuire aux efforts visant à obtenir un cessez-le-feu à Gaza".

Les Etats-Unis, qui ont dénoncé les annonces sur la reconnaissance d'un Etat palestinien, ont imposé des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), accusant les deux organismes d'avoir pris des mesures pour "internationaliser leur conflit avec Israël" et de "continuer à soutenir le terrorisme".

Le gouvernement Netanyahu, qui veut chasser le Hamas de Gaza et a annoncé son intention de contrôler le territoire, semble peiner à trancher sur une solution politique d'après-guerre.

Dans ce contexte, la frange la plus radicale de sa coalition gouvernementale plaide pour un retour des colonies à Gaza, évacuées en 2005 avec le retrait unilatéral israélien du territoire après 38 ans d'occupation.

L'armée israélienne a par ailleurs annoncé le retrait du nord de Gaza de sa 98e Division, composée d'unités parachutistes et de commandos d'élite, qui a "se prépare désormais à de nouvelles missions".


Une experte de l’ONU : « La famine imposée à Gaza est une atteinte grave à la dignité humaine »

Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
Short Url
  • Alice Jill Edwards dénonce une privation prolongée de nourriture entraînant malnutrition, défaillances d’organes et décès, notamment chez les nourrissons et femmes enceintes
  • « Des règles changeantes, une distribution militarisée et l’incertitude permanente sur l’accès aux besoins de base provoquent désespoir, stress et traumatismes », alerte-t-elle

NEW YORK: La rapporteuse spéciale de l’ONU sur la torture, Alice Jill Edwards, a exprimé mercredi sa vive inquiétude face à l’augmentation du nombre de décès liés à la famine parmi les Palestiniens de Gaza.

Elle a qualifié la famine infligée aux civils de « meurtrière, inhumaine et dégradante », appelant à une aide humanitaire rapide et sans entrave vers l’enclave dévastée.

« Priver des gens de nourriture, d’eau et de dignité constitue une violation grave et répétée dans ce conflit. Cela doit cesser », a-t-elle déclaré, citant des rapports « choquants » de civils tués en faisant la queue pour se nourrir, et des cas généralisés de faim et de malnutrition.

Elle a alerté sur un risque croissant de famine généralisée à Gaza, soulignant que toutes les parties au conflit ont des obligations juridiques, au regard du droit international, d’assurer un accès à l’eau et à la nourriture pour les civils sous leur contrôle, et de faciliter l’aide humanitaire.

« Ils ne doivent ni voler, ni détourner, ni bloquer délibérément l’acheminement de l’aide », a-t-elle averti.

Elle a décrit les « conséquences physiologiques catastrophiques » de la privation prolongée de calories : malnutrition, défaillance d’organes et décès, touchant particulièrement les groupes vulnérables comme les nourrissons et les femmes enceintes.

« L’impact psychologique d’un tel déni est d’une cruauté intrinsèque », a-t-elle poursuivi.

« Des règles constamment changeantes, des distributions militarisées, et une incertitude quotidienne sur l’accès aux besoins fondamentaux plongent les gens dans un désespoir et une détresse extrêmes. »

Elle a salué l’annonce par Israël de pauses humanitaires permettant au Programme alimentaire mondial d’opérer pendant trois mois, tout en soulignant que « davantage doit être fait » pour mettre fin aux hostilités et établir une paix durable fondée sur la solution à deux États.

« Personne ne devrait subir l’humiliation de devoir mendier pour se nourrir, surtout quand des stocks suffisants sont disponibles », a-t-elle déclaré.

Edwards a également renouvelé son appel à la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages, à la libération des Palestiniens détenus arbitrairement, et à la mise en place d’enquêtes indépendantes sur les allégations de torture, de mauvais traitements et d’éventuels crimes de guerre, de la part de toutes les parties.

Elle a indiqué avoir exprimé ses préoccupations à plusieurs reprises aux autorités concernées et continuer de réclamer une pleine reddition de comptes.

Les rapporteurs spéciaux font partie des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Ils sont indépendants, ne sont pas membres du personnel des Nations unies et travaillent bénévolement.