Turquie : le nouveau séisme sème l'effroi dans la population locale

Kahraman, 62 ans, passe devant un bâtiment effondré après qu'un tremblement de terre de magnitude 6,4 a frappé la province de Hatay, dans le sud de la Turquie, à Antakya, le 21 février 2023. (Photo, AFP)
Kahraman, 62 ans, passe devant un bâtiment effondré après qu'un tremblement de terre de magnitude 6,4 a frappé la province de Hatay, dans le sud de la Turquie, à Antakya, le 21 février 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 22 février 2023

Turquie : le nouveau séisme sème l'effroi dans la population locale

  • Parmi les morts de lundi soir, figurent trois personnes qui avaient voulu retourner dans leurs appartements endommagés pour y récupérer des affaires et s'y sont faites piéger, a précisé l'Afad
  • Au total, les récents tremblements de terre ont provoqué la mort de 42 310 personnes en Turquie et de 3 688 en Syrie, soit 45 998 au total, selon les derniers bilans des autorités

ANTAKYA: Le nouveau séisme de forte puissance dans la province turque d'Hatay (sud), la plus affectée par celui du 6 février, a semé l'effroi et pousse ses derniers habitants mardi à envisager leur départ.

La secousse de 6,4 survenue peu après 20H00 heure locale la veille et dont l'épicentre a été localisé à proximité d'Antakya, déjà dévastée, a été fortement ressentie en Syrie et jusqu'au Liban et à Chypre.

Elle a fait six morts supplémentaires et plus de 300 blessés côté turc et au moins 150 blessés dans les zones rebelles du nord-ouest de la Syrie.

Au total, les récents tremblements de terre ont provoqué la mort de 42 310 personnes en Turquie et de 3 688 en Syrie, soit 45 998 au total, selon les derniers bilans des autorités.

Le séisme, considéré comme une réplique de celui du 6 février par les sismologues, a fait tomber de nouveaux bâtiments et a été suivie de nombreuses répliques dont l'une de magnitude 5,8, selon l'Afad, l'agence officielle de secours.

L'Afad a comptabilisé mardi un total de 7.242 répliques depuis le 6 février. A Antakya, le siège du gouvernorat s'est effondré, tandis que deux hôpitaux de la province ont dû être évacués.

"C'était comme si le sol allait s'ouvrir sous nos pieds et nous engloutir. J'ai pensé que c'était comme la fin du monde", confie mardi Ayse Altindag, 42 ans.

« Le coeur brisé » 

"Mais ensuite, dans la nuit, je me suis demandé pourquoi j'étais encore là (...) je me suis dit que je devrais partir. Mais, encore une fois, je n'ai pas réussi", poursuit-elle.

"Plus que la peur, j'ai le coeur brisé. La peur, elle va, elle vient mais la douleur, la tristesse elles restent. Parce qu'on a tout perdu. Pas seulement la maison, nos affaires, un miroir ou une armoire, c'est notre enfance qui a disparu, nos amis, l'école, la rue (...) même l'arbre où tu ramassais des fruits a disparu".

Parmi les morts de lundi soir, figurent trois personnes qui avaient voulu retourner dans leurs appartements endommagés pour y récupérer des affaires et s'y sont faites piéger, a précisé l'Afad qui a appelé les habitants de ces régions à ne surtout pas tenter de regagner leurs domiciles, même brièvement.

Kemal Oflazoglu s'est fait une raison : "Le toit de la maison était endommagé et on s'attendait à ce qu'il s'effondre".

Maintenant que c'est arrivé, "ce n'est plus un endroit habitable, ça c'est une réalité", conclut le quinquagénaire. "Il nous reste quelques affaires à régler et on va quitter la ville".

Selon le président Recep Tayyip Erdogan, en visite dans la province voisine d'Osmaniye (sud) mardi, un abri a été fourni à près d'1,7 million de personnes - dont 865 000 sous des tentes et 376 000 dans des dortoirs.

Séismes en Turquie et en Syrie: des répliques en cascade durant des mois

Les répliques de tremblements de terre, comme celles qui viennent de secouer à nouveau la Turquie et la Syrie, se produisent en cascade après un gros séisme. Et elles peuvent durer des mois mais en s'espaçant au fil temps, disent les experts.

Il ne s'agit pas de séismes indépendants mais de répliques du premier choc, tout comme les milliers de secousses signalées depuis le 6 février le long de la faille anatolienne. Celles qui ont fait trembler la terre lundi ont été localisées au sud de cette faille, une zone qui n'avait pas encore rompu.

"Les répliques sont un processus physique bien connu et tout à fait 'normal'", dit le sismologue Yann Klinger, directeur de recherche CNRS au sein de l'équipe de tectonique de l'Institut de physique du globe de Paris.

Un séisme est une rupture qui déstabilise dans son sillage toute la ligne de faille. Chaque séisme produit ses répliques, qui sont des "réajustements du système autour de la faille", analyse Rémy Bossu, sismologue et secrétaire général du Centre Sismologique euro-méditerranéen (EMSC - organisme scientifique qui collecte les données sismologiques dans 55 pays).

Ce réajustement peut s'étaler sur des semaines, voire des mois. "Plus le séisme est fort, plus ça va durer longtemps", souligne l'expert, citant le tremblement de terre de 2015 au Népal. Et il est parfois difficile d'y "mettre un point final".

Le phénomène se produit en cascade, chacune des grosses répliques ayant elle-même son propre jeu de répliques. "On a une sorte de règle empirique selon laquelle pour un séisme de magnitude 7, on peut s'attendre en moyenne à une réplique de (magnitude) 6, une dizaine de 5, une centaine de 4, etc.", explique Yann Klinger.

Statistiquement, les répliques les plus fortes surviennent dans les trois jours suivant le tremblement de terre - celui du 6 février, d'une magnitude de 7,8, a été suivi d'une puissante réplique de 7,5.

Mais si la magnitude a tendance à diminuer au fil du temps, "ce n'est pas systématique, et malheureusement on ne peut pas exclure de voir une réplique de 6 dans six mois", souligne Rémy Bossu.

Ce qui est vérifié en revanche, c'est que le nombre de répliques décroît au cours du temps, selon la loi d'Omori définie par un scientifique japonais à la fin du XIXe siècle.

Cette décroissance en nombre est déjà nette en Turquie. "Aux premières heures après le séisme, le taux de répliques était tellement élevé qu'on n'était même pas capable de détecter les répliques de 4", raconte Rémy Bossu.

Les secousses restent dangereuses, notamment parce qu'elles touchent des bâtiments déjà endommagés. Le scientifique ajoute, "Nerveusement, c'est très difficiles pour les gens parce qu'ils ne sont jamais au repos".

« Il va falloir partir » 

Il a précisé que 139 000 bâtiments s'étaient effondrés, étaient gravement endommagés ou devraient être abattus d'urgence, soit 458 000 logements.

Le chef de l'Etat s'était rendu lundi dans la province d'Hatay, quelques heures avant la nouvelle secousse.

Cette province est la seule avec celle de Kahramanmaras, plus au nord, où les recherches d'éventuels survivants et de corps sans vie se poursuivent.

Elles ont été arrêtées dimanche partout ailleurs et l'espoir de retrouver des rescapés sous les gravats est quasiment nul.

Les derniers, un couple, ont été découverts samedi.

"On n'y pensait pas forcément avant mais c'est vrai que ça commence à s'imposer à nous : il va sans doute falloir partir qu'on le veuille ou non", constate tristement Kahraman, un habitant d'Antakya. "Mais, en vrai, il ne faudrait pas, c'est notre ville natale".

A trois mois de la date - toujours maintenue pour le moment - du 14 mai pour les élections présidentielle et législatives, M. Erdogan, qui sera de nouveau candidat, a promis la construction de 200 000 logements dans les onze provinces affectées.


Le président syrien à la Maison Blanche le 10 novembre

Le président syrien Ahmad al-Chareh rencontrera le président Trump à la Maison Blanche lundi. (Reuters/Archives)
Le président syrien Ahmad al-Chareh rencontrera le président Trump à la Maison Blanche lundi. (Reuters/Archives)
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  • Le président syrien Ahmad al-Chareh sera reçu lundi à la Maison-Blanche par Donald Trump, une première historique qui s’inscrit dans les efforts américains pour la paix mondiale
  • Les discussions porteront sur la levée des sanctions, la lutte contre l’État islamique et la reconstruction de la Syrie, après plus de 14 ans de guerre

WASHINGTON: La porte-parole de la Maison Blanche Karoline Leavitt a indiqué mardi que le président syrien Ahmad al-Chareh serait reçu lundi à la Maison Blanche par Donald Trump.

Il sera le premier chef d'Etat syrien à faire cette visite, qui "fait partie des efforts" du président américain "pour la paix dans le monde", a déclaré la porte-parole pendant une conférence de presse.

Elle a rappelé que Donald Trump, pendant un voyage dans le Golfe en mai, avait annoncé la levée des sanctions américaines contre la Syrie, un sujet qui figurera très haut sur l'ordre du jour de la réunion lundi.

Karoline Leavitt a par ailleurs jugé que la Syrie avait fait "des progrès" sur la voie de la paix avec ce nouveau dirigeant.

Ce sera la deuxième visite aux Etats-Unis d'Ahmad al-Chareh après son passage en septembre à l'ONU à New York, où cet ancien jihadiste est devenu le premier président syrien depuis 1967 à s'adresser à l'Assemblée générale.

Selon le ministre syrien des Affaires étrangères Assaad al-Chaibani, la discussion avec Donald Trump portera aussi sur la lutte contre le groupe Etat islamique et sur la reconstruction en Syrie, après plus de 14 ans de guerre.

Le président américain avait dressé en mai un portrait élogieux d'Ahmad al-Chareh, parlant d'un "gars costaud" et assurant que leur première rencontre, qui a eu lieu en Arabie saoudite, s'était "très bien passée".

Il l'avait pressé à l'époque de rejoindre les accords d'Abraham, une initiative diplomatique dont Donald Trump est particulièrement fier, et qui avait vu plusieurs pays arabes reconnaître Israël en 2020.


Soudan: le ministre de la Défense affirme que la guerre va continuer

Des Soudanais déplacés blessés qui ont fui les violences à El-Fasher sont soignés dans une clinique de fortune gérée par Médecins Sans Frontières (MSF), alors que les affrontements entre la RSF et l'armée soudanaise se poursuivent à Tawila, dans le nord du Darfour. (Reurters)
Des Soudanais déplacés blessés qui ont fui les violences à El-Fasher sont soignés dans une clinique de fortune gérée par Médecins Sans Frontières (MSF), alors que les affrontements entre la RSF et l'armée soudanaise se poursuivent à Tawila, dans le nord du Darfour. (Reurters)
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  • Le ministre soudanais de la Défense, Hassan Kabroun, a annoncé la poursuite de la guerre contre les paramilitaires des FSR, malgré une proposition américaine de cessez-le-feu
  • Depuis la chute d’El-Facher, des exactions massives sont rapportées, tandis que l’aide humanitaire reste bloquée

PORT-SOUDAN: Le ministre soudanais de la Défense a affirmé mardi que la guerre contre les paramilitaires allait continuer, après une réunion gouvernementale qui a discuté d'une proposition américaine de cessez-le-feu.

"Les préparatifs pour la bataille du peuple soudanais sont en cours", a déclaré le ministre, Hassan Kabroun, dans un discours télévisé.

"Nous remercions l'administration Trump pour ses efforts et ses propositions afin de parvenir à la paix", a-t-il dit, tous en affirmant que la guerre était "un droit national légitime".

Aucun détail sur la proposition américaine n'a été rendu public.

Le gouvernement américain "est tout à fait impliqué" pour tenter de trouver une issue "pacifique" au conflit qui ravage le Soudan, a assuré mardi la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt, tout en reconnaissant que "la situation sur le terrain est très compliquée".

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée du général Abdel Fattah Al-Burhane à son ancien allié Mohamed Hamdane Daglo, chef des Forces de soutien rapide (FSR) qui ont pris le 26 octobre El-Facher, dernière ville de la vaste région du Darfour, dans l'ouest, qui échappait à leur contrôle.

Les combats se concentrent désormais sur la région voisine du Kordofan, dans le centre du Soudan, où l'ONU a fait état d'exactions et de déplacements massifs de population ces derniers jours.

- "Incontrôlable" -

Mardi, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a exhorté les belligérants à "venir à la table des négociations" et "mettre fin à ce cauchemar de violence, dès maintenant".

"La crise terrifiante au Soudan (...) est en train de devenir incontrôlable", a-t-il prévenu, alors que le Conseil de défense et de sécurité présidé par le général Burhane s'est réuni dans la journée pour étudier une proposition américaine de trêve.

L'émissaire américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a mené ces derniers jours des entretiens au Caire dans le but de finaliser une proposition de trêve humanitaire formulée mi-septembre sous son égide par un groupe de médiateurs incluant l'Egypte, l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis.

Le groupe de médiation, dit du Quad, travaille sur un plan global de paix pour le Soudan, mais ses dernières propositions, présentées mi-septembre à Washington, sont restées lettre morte. Jusqu'à présent, le général Burhane a accueilli négativement ce plan prévoyant à la fois son exclusion et celle des FSR de la transition politique post-conflit.

- "Ne tuez pas les enfants" -

Depuis la chute d'El-Facher, après 18 mois de siège par les paramilitaires, les informations et les témoignages se multiplient sur les exécutions, les pillages, les viols, les attaques contre des humanitaires, documentés par des images satellite et par des vidéos publiées par les combattants eux-mêmes.

Le général Burhane a affirmé sa volonté de "se venger" de la prise de cette grande ville, tandis que le chef des FSR s'est dit déterminé à poursuivre les conquêtes sur le terrain.

Mardi, la représentante de l'ONU en charge des questions humanitaires, Denise Brown, a déploré que la ville d'El-Facher reste "barricadée" et fermée à l'aide humanitaire.

"La livraison d'aide de survie cruciale reste bloquée par les FSR contrairement à leurs obligations à l'égard des lois internationales", a-t-elle déclaré.

Près de 71.000 civils ont fui la ville depuis sa prise par les FSR, certains ayant trouvé refuge à Tawila, à environ 70 km à l'ouest.

"Ne tuez pas les enfants, ne tuez pas les femmes", pouvait-on lire en arabe sur une pancarte écrite à la main lors d'une manifestation lundi d'enfants à Khartoum, la capitale du pays sous contrôle de l'armée.

Le conflit, qui a fait des dizaines de milliers de morts et près de 12 millions de déplacés, selon l'ONU, se joue sur fond de rivalités régionales.

Les FSR ont reçu armes et drones des Emirats arabes unis, d'après des rapports de l'ONU, tandis que l'armée bénéficie de l'appui de l'Egypte, de l'Arabie saoudite, de l'Iran et de la Turquie, selon des observateurs. Tous nient leur implication.


Le chef de l'ONU appelle à mettre fin au «cauchemar de la violence» au Soudan

Des abris érigés par des Soudanais déplacés qui ont fui El-Fasher après la chute de la ville aux mains des Forces de soutien rapide (RSF) composent le camp d'Um Yanqur, situé à la limite sud-ouest de Tawila, dans la région du Darfour occidental, déchirée par la guerre, au Soudan, le 3 novembre 2025. (AFP)
Des abris érigés par des Soudanais déplacés qui ont fui El-Fasher après la chute de la ville aux mains des Forces de soutien rapide (RSF) composent le camp d'Um Yanqur, situé à la limite sud-ouest de Tawila, dans la région du Darfour occidental, déchirée par la guerre, au Soudan, le 3 novembre 2025. (AFP)
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  • Antonio Guterres appelle à des négociations immédiates pour mettre fin au conflit au Soudan, avertissant que la crise humanitaire et sécuritaire devient « incontrôlable » après deux ans de guerre entre l’armée et les Forces de soutien rapide (FSR)
  • La situation à El-Facher, au Darfour, illustre la gravité du drame, avec des civils pris au piège, des milliers de morts, des violations massives des droits humains et près de 12 millions de déplacés selon l’ONU

DOHA: Le patron de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé mardi à des "négociations" pour un arrêt immédiat du conflit au Soudan, mettant en garde contre une crise "en train de devenir incontrôlable".

Le secrétaire général des Nations unies a exhorté les parties au conflit à "venir à la table des négociations, (et) mettre fin à ce cauchemar de violence, maintenant".

"La crise horrifiante au Soudan (...) est en train de devenir incontrôlable", a-t-il dit lors d'une conférence de presse en marge du deuxième sommet mondial pour le développement social à Doha.

Le conflit entre l'armée et les paramilitaires dure depuis deux ans et a fait des dizaines de milliers de morts, déplacé près de 12 millions de personnes et provoqué la pire crise humanitaire au monde, selon l'ONU.

Le 26 octobre, après 18 mois de siège, les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) ont pris la ville d'El-Facher, dernier verrou stratégique de l'armée au Darfour (ouest du Soudan).

Depuis, les informations et témoignages se multiplient sur les cas d'exécutions, viols, attaques contre des humanitaires et pillages qui y sont commis, documentés par des images satellites et par des vidéos d'exactions publiées par les combattants eux-même.

"El-Facher et les zones environnantes du Nord-Darfour ont été un épicentre de souffrance, de faim, de violence et de déplacements" a souligné M.Guterres, ajoutant que depuis l'entrée des FSR dans la ville, "la situation s'aggrave de jour en jour".

"Des centaines de milliers de civils sont pris au piège par ce siège. Les gens meurent de malnutrition, de maladie et de violence. Et nous continuons à entendre des rapports sur des violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme", a affirmé M.Guterres.