«Taxe Gafa»: Paris assume de mécontenter Washington, au nom de la justice fiscale

«Gafa» (acronyme désignant Google, Amazon, Facebook et Apple) (Photo, AFP)
«Gafa» (acronyme désignant Google, Amazon, Facebook et Apple) (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 26 novembre 2020

«Taxe Gafa»: Paris assume de mécontenter Washington, au nom de la justice fiscale

  • «Les entreprises assujetties à cette taxe ont reçu un avis d'imposition pour le versement des acomptes de 2020»
  • La décision française de collecter sa taxe sans attendre s'explique aussi par le contexte de lutte contre les effets économiques de la pandémie

PARIS : L'élection de Joe Biden n'y a rien changé: la France a confirmé mercredi qu'elle prélèverait bien en 2020 sa taxe sur les géants du numérique, assumant le risque de représailles américaines au moment où elle est aux prises avec une pandémie dévastatrice pour les finances publiques. 

« Les entreprises assujetties à cette taxe ont reçu un avis d'imposition pour le versement des acomptes de 2020 », et payeront le solde « début 2021 », a indiqué le ministère français de l'Economie.

Ce faisant, la France s'expose à des sanctions américaines sur 1,3 milliard de dollars de produits français, notamment les sacs à main et les cosmétiques. 

Pour l'heure, l'administration Trump n'avait pas réagi.

La menace d'une riposte avait été annoncé après que la France avait adopté en juillet 2019 une taxe de 3% sur le chiffre d'affaires des géants du numérique dépassant 750 millions d'euros d'activité mondiale, faisant de la France un pays pionnier en matière d'imposition des « Gafa » (acronyme désignant Google, Amazon, Facebook et Apple) et autres champions de l'optimisation fiscale.

Si Paris a décidé d'agir sans attendre la prise de fonctions, le 20 janvier, du nouveau président américain Joe Biden, réputé plus enclin au multilatéralisme que son prédécesseur Donald Trump, elle ne prend pas pour autant son allié par surprise. 

« Nous avions suspendu la perception de la taxe le temps que la négociation de l'OCDE aboutisse. Cette négociation a échoué, nous percevrons donc une taxe sur les géants du digital en décembre prochain », avait prévenu mi-octobre le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire.

Paris et Washington, qui juge cette taxe discriminatoire envers les entreprises américaines, avaient conclu en janvier une trêve à base de gel de la taxe contre gel des sanctions, mais la France ne s'estime plus liée par cet accord.  

Impôt pour « se racheter »

Pas question pour autant de « faire cette taxe dans notre coin », selon la source ministérielle. Alors que plusieurs pays européens ont adopté ou sont en voie d'adopter une taxe similaire, « nous continuons à soutenir la solution de l'OCDE, et nous voulons une solution européenne début 2021 ». 

Le blocage des négociations autour du plan de relance européen ne pousse cependant guère à l'optimisme, alors que toute décision relative à la fiscalité requiert l'approbation unanime des 27, y compris donc des Pays-Bas, du Luxembourg ou de l'Irlande, où les Gafa ont transféré leurs bénéfices réalisés en Europe afin de payer le moins d'impôt possible.... 

La décision française de collecter sa taxe sans attendre s'explique aussi par le contexte de lutte contre les effets économiques de la pandémie, qui a déjà coûté 186 milliards d'euros au budget de l'Etat: 86 milliards de dépenses en plus, 100 milliards de recettes en moins. 

Le gouvernement doit trouver d'urgence des moyens de renflouer les caisses de l'Etat, sans augmenter les impôts comme il s'y est engagé.

Or la « taxe sur les services numériques », qui a rapporté à la France 400 millions d'euros en 2019, apparaît d'autant plus justifiée que les Gafa sont les grands gagnants de la crise du Covid-19. A commencer par Amazon, déjà premier commerçant en ligne en France, et qui a profité du second confinement pour accroître encore sa part de marché. 

En cette période où les Etats se saignent les veines, les rapports se multiplient pour dénoncer le coût de l'optimisation fiscale des grandes entreprises et des très hauts revenus (« le top 1% »). 

Un coût chiffré à 427 milliards de dollars par an par l'organisation londonienne Tax Justice Network, soit l'équivalent du salaire annuel de 34 millions d'infirmières, dans un rapport publié récemment. 

Elle réclame un impôt sur les « bénéfices excessifs des grandes multinationales », et en particulier « celles dont les profits ont grimpé en flèche pendant la pandémie, tandis que les petits commerces étaient forcés de fermer ». 

« Pour les géants du numérique qui prétendent nous être dévoués, alors qu'ils pratiquent l'évasion fiscale à coups de milliards, cela leur permettrait de se racheter », estime Alex Cobham, son directeur général. 


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.