Aide à la Russie: Washington accroît sa pression sur Pékin

Le directeur de la CIA, William Burns (Photo, AFP).
Le directeur de la CIA, William Burns (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 27 février 2023

Aide à la Russie: Washington accroît sa pression sur Pékin

  • «Nous sommes convaincus du fait que les dirigeants chinois envisagent de fournir du matériel létal»
  • Pékin a démenti ces allégations avec force

WASHINGTON: Les États-Unis sont "convaincus" que la Chine envisage de fournir des armes à la Russie dans sa guerre en Ukraine, même si selon eux aucune décision n'a été prise, et font monter la pression sur Pékin, l'avertissant de ne pas franchir cette ligne rouge.

"Nous sommes convaincus du fait que les dirigeants chinois envisagent de fournir du matériel létal" à la Russie, a déclaré le chef de la CIA, William Burns, dans une rare interview à la chaîne CBS diffusée dimanche.

Mais, a ajouté le directeur de l'agence de renseignement américaine, "nous n'avons pas constaté qu'une décision définitive ait été prise" et "nous n'avons pas constaté de preuves qu'ils aient livré" des armes à la Russie.

Les États-Unis sont engagés depuis une semaine dans une vaste offensive diplomatique, mettant en garde la Chine contre tout soutien militaire létal à la Russie, ce qui, selon des experts, changerait la donne dans ce conflit entré dans sa deuxième année et sans règlement en vue.

Pékin a démenti ces allégations avec force.

Selon des informations de la presse, dont celles du Wall Street Journal et de la chaîne NBC citant des responsables non identifiés, il s'agirait pour la Chine de fournir des drones et des munitions notamment.

Une entreprise chinoise envisage de démarrer une production de drones "rôdeurs" pour le compte de l'armée russe en vue d'une possible utilisation pour frapper des cibles en Ukraine, affirmait vendredi l'hebdomadaire allemand Der Spiegel.

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a directement fait part de ces craintes au plus haut diplomate chinois, Wang Yi, lors d'une rencontre tendue samedi dernier à Munich en marge d'une conférence sur la sécurité.

Ce dernier a été reçu en milieu de semaine dernière au Kremlin, une rencontre soulignant les liens privilégiés entre Moscou et son allié chinois.

Selon Washington, la Chine fournit déjà du matériel non létal à la Russie via des entreprises chinoises.

Pour mieux enfoncer le clou, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Jake Sullivan, a fait le tour des plateaux de télévision dimanche pour assurer que les États-Unis restaient "vigilants" à cet égard.

Il a réaffirmé la mise en garde de Washington à Pékin contre les "conséquences" d'une telle fourniture d'armes.

"Nous allons continuer à envoyer un message de fermeté selon lequel envoyer de l'aide militaire à la Russie en ce moment (...) serait une grave erreur et la Chine devrait ne pas y prendre part", a-t-il affirmé sur CNN.

Le patron de la CIA s'inquiète des liens de plus en plus étroits entre Téhéran et Moscou

La Russie envisagerait d'aider l'Iran avec son programme de missiles et de lui fournir des avions de combat, a souligné dimanche le chef de la CIA, William Burns, s'inquiétant d'une "dangereuse" escalade dans la coopération militaire entre Téhéran et Moscou.

"Ce que nous constatons également, ce sont des signes selon lesquels la Russie propose d'aider les Iraniens avec leur programme de missiles et envisage aussi la possibilité de procurer à l'Iran des avions de combat", a déclaré Bill Burns dans une rare interview diffusée sur la chaîne CBS.

Cette coopération militaire s'accélère "dans une direction qui est très dangereuse dans la mesure où l'on sait que les Iraniens ont déjà fourni des centaines de drones armés aux Russes, qu'ils utilisent pour faire souffrir les civils ukrainiens" et toucher les infrastructures, a-t-il affirmé.

"Nous savons aussi qu'ils (les Iraniens) ont fourni des munitions pour l'artillerie et les chars", a ajouté le patron du renseignement américain.

Selon lui, la guerre en Ukraine pose de "sérieuses complications" pour les Chinois mais si Pékin décidait de franchir le pas et de fournir des armes à Moscou, cela engendrerait de "vrais coûts" pour elle.

«Taïwan demain»

Washington se refuse à détailler ce que seraient ces "coûts" mais dispose d'une large panoplie de sanctions aptes à frapper l'économie chinoise.

Le président Joe Biden avait lui-même indiqué vendredi dans une interview sur ABC avoir eu une conversation à ce sujet avec son homologue chinois Xi Jinping, évoquant les conséquences d'un tel soutien, en rappelant que la guerre en Ukraine avait entraîné le retrait de nombreuses entreprises de Russie.

"Ce n'est pas une menace" mais un fait, a-t-il dit au président chinois.

Lors d'un sommet virtuel vendredi, les dirigeants des pays du G7 ont aussi menacé de "coûts sévères" les pays qui viendraient en aide à la Russie afin de contourner les sanctions occidentales.

Poutine convaincu qu'il gagnera la guerre à l'usure, selon le chef de la CIA

Confronté aux difficultés de son armée en Ukraine, Vladimir Poutine sait qu'il ne peut pour le moment pas gagner la guerre mais est convaincu qu'il remportera une victoire finale à l'usure, refusant d'envisager toute autre option, a analysé le patron de la CIA, William Burns, dans un entretien dimanche.

"Poutine, selon moi, pense aujourd'hui qu'il ne peut pas gagner tout de suite, mais qu'il ne peut pas se permettre de perdre", a déclaré le directeur de l'agence de renseignement américaine à CBS.

"En ce moment", selon William Burns, "je pense que Poutine est carrément déterminé" mais "trop confiant dans sa capacité à épuiser l'Ukraine".

Cette guerre constitue un dossier délicat pour Pékin, en raison de ses forts liens diplomatiques et économiques avec Moscou, consolidés par l'intérêt commun de faire contrepoids à Washington.

La Chine s'était jusque-là gardée de prendre position à propos de l'invasion russe. Elle a avancé vendredi un document en 12 points dans lequel elle exhorte les deux belligérants au dialogue, insiste sur le respect de l'intégrité territoriale et s'oppose à tout recours de l'arme nucléaire.

Vu de Washington, Pékin tente ainsi de jouer sur les "deux tableaux", une position d'équilibriste de plus en plus difficile à tenir.

Quant à l'opposition républicaine au président Biden, elle s'est aussi inquiétée de l'éventuelle aide chinoise à la Russie, avec en ligne de mire Taïwan, île dont Pékin revendique la souveraineté.

"Il s'agit peut-être de l'Ukraine aujourd'hui, mais ce sera Taïwan demain. C'est pourquoi ceci est très important", a estimé le chef républicain de la Commission des Affaires étrangères à la Chambre des Représentants, Michael McCaul, sur la chaîne ABC.


Inde: l'opposition fustige Modi et ses propos anti-musulmans

Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
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  • M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019
  • Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril

NEW DELHI: L'opposition indienne a accusé jeudi le Premier ministre Narendra Modi de tenir des propos stigmatisant les musulmans et alimentant, en plein processus électoral, les tensions sectaires dans la plus grande démocratie du monde, constitutionnellement laïque.

M. Modi déploie "son jeu habituel consistant à diviser les hindous et les musulmans", a déclaré jeudi P. Chidambaram, ancien ministre des Finances et membre influent du Congrès, principal parti d'opposition,

"Le monde observe et analyse les déclarations du Premier ministre indien, qui ne sont pas à la gloire de l'Inde", a-t-il ajouté.

M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019 en jouant sur la fibre religieuse de l'électorat hindou.

Agé de 73 ans et encore très populaire dans l'ensemble du pays, le Premier ministre brigue un troisième mandat à la tête du pays.

Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril et se déroulent en sept phases jusqu'au 1er juin.

M. Modi a présenté mardi sa candidature au siège de député de Varanasi (Bénarès), cité sacrée de l'hindouisme, dans l'Etat de l'Uttar Pradesh (nord), qu'il occupe depuis une décennie.

L'opposition et les défenseurs des droits accusent M. Modi de favoriser les hindous, majoritaires dans le pays, au détriment d'importantes minorités, dont 210 millions d'Indiens musulmans, inquiètes pour leur avenir.

M. Modi a récemment suscité l'indignation dans les rangs de l'opposition en accusant le Congrès de vouloir distribuer la "richesse nationale" aux "infiltrés", "à ceux qui ont le plus d'enfants", désignant ainsi la communauté musulmane.

L'opposition a saisi les autorités électorales qui n'ont pas sanctionné le Premier ministre. L'Inde est constitutionnellement laïque et son code électoral interdit toute campagne fondée sur des "sentiments communautaires".

Dans un entretien mardi sur la chaîne d'information continue News18, le chef du gouvernement s'est défendu d'alimenter et d'exploiter tout clivage entre hindous et musulmans.

Discrimination 

"Le jour où je commencerai à parler des hindous-musulmans sera celui où je perdrai ma capacité à mener une vie publique", a-t-il affirmé en hindi.

Le lendemain, en plein rassemblement électoral, Narendra Modi accusait le Congrès d'orchestrer un "jihad par le vote" pour que les musulmans se prononcent contre lui.

Au début de la semaine, Madhavi Latha, actrice et candidate du BJP à Hyderabad (sud), s'est autorisée, dans un bureau de vote, à vérifier que la carte électorale de musulmanes correspondait à leur identité, exigeant qu'elles ôtent leur voile.

La police de la ville a ouvert une enquête sur l'incident.

Au total, 968 millions d'Indiens sont appelés à élire les 543 membres de la chambre basse, soit plus que la population totale des Etats-Unis, de l'Union européenne et de la Russie réunis.


L'axe Pékin-Moscou, facteur de «stabilité» et de «paix» selon Xi et Poutine

Le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping assistent à un concert marquant le 75e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Russie et la Chine (Photo, AFP).
Le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping assistent à un concert marquant le 75e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Russie et la Chine (Photo, AFP).
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  • Tout juste de retour d'une tournée en Europe, Xi Jinping y a défendu le droit de maintenir avec son voisin russe des liens économiques normaux
  • Vladimir Poutine est arrivé jeudi matin à Pékin pour une visite de deux jours, son premier voyage à l'étranger depuis sa réélection en mars et son deuxième en Chine en un peu plus de six mois

PEKIN: Xi Jinping et Vladimir Poutine ont défendu jeudi l'axe Pékin-Moscou comme un facteur de "stabilité" et de "paix" dans le monde, le dirigeant russe espérant un soutien accru de la Chine à sa guerre en Ukraine.

La relation Chine-Russie "est non seulement dans l'intérêt fondamental des deux pays et des deux peuples, mais elle est également propice à la paix", a estimé Xi Jinping, lors d'une rencontre avec son homologue à Pékin.

Et "la Chine est prête à travailler avec la Russie pour (...) soutenir l'équité et la justice dans le monde". "La relation Chine-Russie aujourd'hui a été durement acquise et les deux parties doivent la chérir et la nourrir", a-t-il ajouté.

Cette relation est "un facteur de stabilité sur la scène internationale", a assuré de son côté Vladimir Poutine, selon le Kremlin. Elle "n'est pas opportuniste et elle n'est dirigée contre personne".

"Ensemble, nous soutenons les principes de justice et un ordre démocratique mondial reflétant les réalités multipolaires et fondé sur la loi internationale", a-t-il déclaré.

Après leur entretien bilatéral, les deux hommes ont signé un communiqué commun pour approfondir le "partenariat stratégique global" sino-russe, selon l'agence officielle Chine nouvelle.

«Reconnaissant»

Vladimir Poutine est arrivé jeudi matin à Pékin pour une visite de deux jours, son premier voyage à l'étranger depuis sa réélection en mars et son deuxième en Chine en un peu plus de six mois.

Quelques heures plus tôt, il s'était félicité des avancées de l'armée russe en Ukraine.

Dans leur communiqué commun jeudi, Pékin et Moscou jugent "nécessaire" d'éviter toute décision contribuant "à la prolongation des hostilités et à une nouvelle escalade du conflit".

Une formulation qui semble viser Européens et Américains, la Chine et la Russie affirmant régulièrement que ce sont les livraisons d'armes occidentales à l'Ukraine qui font durer la guerre.

Le géant asiatique est une planche de salut économique cruciale pour la Russie, en proie aux lourdes sanctions occidentales.

Tout juste de retour d'une tournée en Europe, Xi Jinping y a défendu le droit de maintenir avec son voisin russe des liens économiques normaux. La Chine bénéficie notamment d'importations d'énergie russe bon marché.

S'exprimant devant la presse au côté de Xi Jinping, Vladimir Poutine s'est dit jeudi "reconnaissant" envers la Chine pour ses "initiatives" de paix dans la crise ukrainienne, selon les agences russes.

La Chine appelle régulièrement au respect de l'intégrité territoriale de tous les pays (sous-entendu Ukraine comprise) mais exhorte aussi à prendre en considération les préoccupations de sécurité de la Russie.

Ligne rouge 

"Les deux parties sont d'accord sur le fait qu'une solution politique à la crise en Ukraine est la voie à suivre", a déclaré M. Xi face à la presse.

"La Chine espère que la paix et la stabilité seront rapidement rétablies sur le continent européen et continuera à jouer un rôle constructif à cette fin", a-t-il promis.

Par ailleurs, Vladimir Poutine a jugé "nuisible" toute alliance politique et militaire "fermée" en Asie-Pacifique, où son partenaire chinois est en concurrence avec les Etats-Unis, qui coopèrent avec l'Australie et le Royaume-Uni pour contrer l'influence de Pékin.

Le président russe a également rencontré jeudi après-midi le Premier ministre Li Qiang, lequel a déclaré que Pékin souhaitait "continuer à approfondir la coopération dans divers domaines" avec Moscou.

Ces liens sino-russes étroits sont vus avec une suspicion croissante en Occident.

Washington a fixé une ligne rouge à Pékin - ne pas fournir directement d'armes à Moscou - et dit n'avoir à ce jour pas eu la preuve du contraire.

Mais les Etats-Unis estiment que le soutien économique chinois permet tout de même à la Russie de renforcer sa production de missiles, de drones et de chars.

Banques prudentes 

Les échanges commerciaux sino-russes ont explosé depuis l'invasion de l'Ukraine, dépassant les 220 milliards d'euros en 2023, selon les douanes chinoises.

Les exportations chinoises vers le voisin russe ont toutefois baissé en mars et en avril, après la menace de sanctions américaines.

Car un décret signé en décembre par le président américain Joe Biden autorise désormais des sanctions secondaires contre les banques étrangères liées à la machine de guerre russe. Le Trésor américain peut les exclure du système financier mondial, fondé sur le dollar.

Plusieurs banques chinoises ont ainsi interrompu ou réduit leurs transactions avec leurs clients russes, selon huit ressortissants des deux pays impliqués dans le commerce bilatéral.

La Chine cherche parallèlement à renouer ses liens avec les Etats-Unis et devrait limiter le renforcement de sa coopération avec la Russie, selon des analystes.

Moscou et Pékin ont toutefois signé jeudi plusieurs accords commerciaux.

Vendredi, Vladimir Poutine doit se rendre à Harbin (nord-est) pour visiter une foire dédiée au commerce et aux investissements.


Le Premier ministre slovaque dans un état stable mais toujours «très grave»

Le Premier ministre slovaque Robert Fico transporté d'un hélicoptère par des médecins et ses agents de sécurité à l'hôpital de Banska Bystrica, en Slovaquie, où il doit être soigné, le 15 mai 2024. (Photo de AFP)
Le Premier ministre slovaque Robert Fico transporté d'un hélicoptère par des médecins et ses agents de sécurité à l'hôpital de Banska Bystrica, en Slovaquie, où il doit être soigné, le 15 mai 2024. (Photo de AFP)
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  • Le dirigeant de 59 ans a subi mercredi «une opération de cinq heures», a précisé la directrice de l'établissement Miriam Lapunikova
  • Selon le vice-Premier ministre, il s'agit d'«une attaque politique» à laquelle il faudra «réagir en conséquence»

BANSCA BYSTRICA: Le Premier ministre slovaque Robert Fico se trouve jeudi matin dans un état stable mais toujours "très grave", après avoir été blessé par balle la veille, a déclaré le vice-Premier ministre Robert Kalinak.

"Cette nuit, les médecins ont réussi à stabiliser l'état du patient", a déclaré M. Kalinak, qui est également ministre de la Défense. "Malheureusement, l'état reste très grave, car ses blessures sont compliquées", a-t-il ajouté lors d'un point de presse devant l'hôpital Roosevelt de Banska Bystrica (centre).

Le dirigeant de 59 ans a subi mercredi "une opération de cinq heures", a précisé la directrice de l'établissement Miriam Lapunikova, confirmant qu'il est toujours dans un état "vraiment très grave" et va rester en soins intensifs.

Robert Fico a été touché par balle "plusieurs fois", selon sa page officielle Facebook, mercredi en début d'après-midi après une réunion de cabinet à Handlova, dans le centre de la Slovaquie. L'attentat a suscité une vive émotion dans le pays d'Europe centrale et une vague de condamnations internationales.

Selon M. Kalinak, il s'agit d'"une attaque politique" à laquelle il faudra "réagir en conséquence".

La police a arrêté l'assaillant présumé, un homme de 71 ans identifié par les médias slovaques comme un écrivain local. Aucune information n'a été donnée à ce stade sur ses motivations.