L'accueil des Ukrainiens, deux fois plus coûteux que pour les exilés «classiques»

Une manifestante tient une bannière aux couleurs de l'Ukraine lors d'une manifestation de solidarité avec l'Ukraine, à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France, le 25 février 2023, à l'occasion du premier anniversaire de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. (AFP).
Une manifestante tient une bannière aux couleurs de l'Ukraine lors d'une manifestation de solidarité avec l'Ukraine, à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France, le 25 février 2023, à l'occasion du premier anniversaire de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. (AFP).
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Publié le Mardi 28 février 2023

L'accueil des Ukrainiens, deux fois plus coûteux que pour les exilés «classiques»

  • Les près de 115 000 déplacés ukrainiens arrivés en France depuis un an ont été accueillis dans des «conditions satisfaisantes», grâce au régime inédit de la «protection temporaire» qui leur a permis de s'installer librement
  • «Cette réactivité n'a pas été sans prix», a écrit la juridiction financière dans un rapport d'audit flash

PARIS : L'accueil des Ukrainiens en 2022 a coûté environ 630 millions d'euros à la France, a estimé mardi la Cour des comptes, une prise en charge exceptionnelle qui représente en moyenne le double du budget alloué aux demandeurs d'asile "classiques".

Les près de 115 000 déplacés ukrainiens arrivés en France depuis un an ont été accueillis dans des "conditions satisfaisantes", grâce au régime inédit de la "protection temporaire" qui leur a permis de s'installer librement en bénéficiant d'une salve sans précédent de droits sociaux: accès au travail, aux services de santé, à la scolarisation des enfants, à l'hébergement d'urgence...

"Cette réactivité n'a pas été sans prix", a écrit la juridiction financière dans un rapport d'audit flash rendu public mardi. "L'ensemble des dépenses engagées par l'Etat et la Sécurité sociale pour la protection temporaire des Ukrainiens devrait s'élever à environ 634 millions d'euros pour l'année 2022."

Un budget pour l'essentiel constitué de l'allocation versée à ces déplacés (218,46 millions) et de leur hébergement (253,27 millions).

La Cour des comptes a observé un surcoût important dans cette dépense, qui tient surtout "à l'urgence" dans laquelle l'accueil a dû s'organiser.

Ainsi, le "coût unitaire" pour un Ukrainien a représenté en 2022 "presque le double de celui des dispositifs offerts aux demandeurs d'asile classiques", a souligné la Cour.

Dans le détail, pour l'hébergement, "le coût par place et par jour s'est élevé à 38 euros en moyenne nationale, là où la mise à l'abri de droit commun (...) est en moyenne inférieure à 20 euros et (inférieure) à 18 euros dans le dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile", a-t-elle poursuivi.

Demander une «contribution» aux Ukrainiens ?

Des dispositifs exceptionnels, comme le placement de centaines de personnes fin mars à bord d'un ferry de la compagnie Corsica Linea au large de Marseille ont fait exploser la facture: 71 euros par jour et par place.

A l'avenir, "les enjeux de l'hébergement hôtelier vont devoir être réévalués", en envisageant par exemple une "contribution" des Ukrainiens à leur hébergement "dès lors qu'(ils) disposent de ressources suffisantes", notamment lorsqu'ils travaillent, a écrit la Cour des comptes.

L'autorité administrative a par ailleurs recommandé de "mieux encadrer l'hébergement citoyen", sur lequel pèse selon elle 40% du poids de l'accueil.

Pour l'heure, "la capacité humaine et financière à maintenir une prise en charge dans la durée est en question", a-t-elle estimé.

Depuis fin 2022, près de 900 foyers accueillant des déplacés ukrainiens perçoivent une aide financière de l'Etat, environ 150 euros mensuels, ce qui a représenté une enveloppe de quelque 786 000 euros, avait indiqué la semaine dernière à l'AFP le ministère du Logement.

Problème, a jugé la Cour, "la capacité à maintenir une indemnisation" n'est "pas garantie".

Sans compter qu'"un nombre non mesurable de ces hébergements s'est organisé sans intermédiaires, aux abords des gares ou sur les réseaux sociaux, sans qu'aucun contrôle soit possible".

La Cour a également regretté que l'accueil des Ukrainiens ne soit pas encore budgété dans la loi de finances 2023, ce qui "prive l'ensemble des intervenants de la visibilité nécessaire pour organiser les moyens d'agir".

Le gouvernement a indiqué à l'occasion du premier anniversaire du conflit, le 24 février, qu'un "petit flux" de quelques centaines d'Ukrainiens par mois continue d'arriver.

En un an, ce sont à 80% des Ukrainiennes qui se sont installées en France, accompagnées de 20 000 enfants aujourd'hui scolarisés.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.