France : La «frilosité» des banques en question dans le financement de l'industrie de défense

L'industrie de défense française s'inquiète d'être étouffée par des difficultés croissantes à se financer auprès des banques. (AFP)
L'industrie de défense française s'inquiète d'être étouffée par des difficultés croissantes à se financer auprès des banques. (AFP)
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Publié le Vendredi 27 novembre 2020

France : La «frilosité» des banques en question dans le financement de l'industrie de défense

  • Afin de continuer de fournir à la France les moyens d'une politique de défense souveraine, les industriels de l'armement ont besoin d'investissements dans la durée pour développer leurs programmes et de financements pour l'export, qui représente la moitié
  • Les refus de financements bancaires «mettent en péril» des entreprises dont les revenus ont été amputés par la crise et posent selon le Gicat «un réel et profond problème quant à la pérennité de notre industrie de défense et de sécurité»

L'industrie de défense française s'inquiète d'être étouffée par des difficultés croissantes à se financer auprès des banques, qui ont renforcé le contrôle de leurs opérations dans ce secteur sensible face aux risques juridiques et d'image.

Afin de continuer de fournir à la France les moyens d'une politique de défense souveraine, les industriels de l'armement ont besoin d'investissements dans la durée pour développer leurs programmes et de financements pour l'export, qui représente la moitié de leur activité.

Or "les entreprises de défense se heurtent de plus en plus fréquemment à un phénomène de frilosité bancaire", a affirmé le délégué général pour l'armement (DGA) Joël Barre en octobre devant les sénateurs. Selon le responsable des programmes d'armement du ministère des Armées, "il convient de s'inquiéter du comportement des banques".

"La crise du Covid-19 a accéléré et aggravé ce problème", estime de son côté le Groupement des industries françaises de défense et de sécurité terrestres (Gicat) dans une note dévoilée par La Tribune et que l'AFP a consultée.

Les refus de financements bancaires "mettent en péril" des entreprises dont les revenus ont été amputés par la crise et posent selon le Gicat "un réel et profond problème quant à la pérennité de notre industrie de défense et de sécurité".

"Il y a certaines banques qui décident de ne plus financer aucun programme d'armement, d'autres banques qui vont être extrêmement sensibles au type de matériel ou au type de pays, en dehors même de toutes les autorisations que l'on a pu obtenir, et enfin certaines qui s’appuient sur les règles européennes les plus restrictives", a détaillé le directeur de la stratégie de Thales, Philippe Keryer, lors du Paris Air Forum, organisé cette semaine par La Tribune. 

Le député Jean-Louis Thiériot, chargé d'une mission d'information "flash" sur cette question par la commission de la Défense, pointe notamment le problème du financement pour l'export "en raison des règles de compliance (conformité, NDLR), de l'extraterritorialité du droit américain, des choix de responsabilité sociétale (RSE) qui font qu'un certain nombre de banques n'osent pas aller sur la défense".

- "Au garde-à-vous" -

Interrogé par l'AFP, un banquier français sous couvert d'anonymat se défend de tout retrait du secteur, disant son établissement "au garde-à-vous derrière l'industrie de la défense française".

"La politique n'est pas restrictive mais elle donne un cadre", nuance-t-il. La banque "peut être amenée à décliner certaines opérations" portant sur certains matériels, certains pays ou "vues comme trop risquées d'un point de vue d'image".

Les campagnes des ONG ne sont cependant que "l'épaisseur du trait par rapport au vrai renforcement de politique des banques" sur les risques juridiques, estime pour sa part Stéphane Audrand, ancien banquier devenu consultant spécialisé en maîtrise des risques, et pour qui il existe une tendance lourde en Europe.

Il faut que les entreprises françaises, surtout les plus petites, gagnent en "maturité" dans leur capacité à répondre aux demandes bancaires de conformité, explique-t-il à l'AFP.

"Quand une PME française arrive la bouche en cœur avec un nouveau produit (...) qu’elle veut exporter vers des pays du Golfe, qu’on ne sait pas très bien qui sont les intermédiaires, le banquier dit non pour des raisons de sécurité financière, de risques de corruption", expose-t-il.

D'autant que le travail de vérification de conformité est "le même pour 20 millions ou 20 milliards d'euros" de contrat, ajoute le banquier sous couvert d'anonymat, en évoquant un "accompagnement des PME à partir d'un certain seuil".

Avec le risque qu'une PME n'arrive pas à se tourner vers l'export ou trouve des financements ailleurs.

"Certaines entreprises de défense sont obligées de se financer à l'extérieur, notamment au Moyen-Orient", selon le sénateur Cédric Perrin, qui suggère "l'idée d'un fonds souverain" dédié.

L'Etat a créé le fonds Definvest, dont la dotation a doublé mais est limitée à 100 millions d'euros. Dix-huit millions d'euros ont déjà été investis dans neuf entreprises, selon BPIfrance.

Pour Stéphane Audrand, "l'Etat doit prendre ses responsabilités" et se tourner vers les banques publiques.

Selon lui, "à partir du moment où l'État s'engage dans des partenariats (avec un pays étranger) et octroie une licence d'exportation, il faut qu'il admette que les banques françaises n'ont pas vocation à servir de manière aveugle la politique étrangère de la France".


Dans le tumulte ambiant, la voix de la France mérite une plus grande écoute

Depuis Oslo, Emmanuel Macron déclare sans ambiguïté : « Il n’y a pas de légalité à ces frappes américaines en Iran », une affirmation qui tranche radicalement avec l’attitude de Washington. (AFP)
Depuis Oslo, Emmanuel Macron déclare sans ambiguïté : « Il n’y a pas de légalité à ces frappes américaines en Iran », une affirmation qui tranche radicalement avec l’attitude de Washington. (AFP)
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  • L’attaque iranienne perpétrée hier, contre une base américaine au Qatar en riposte aux frappes des bombardiers américains sur des sites nucléaires en Iran, a failli plonger le monde dans engrenage incontrôlable
  • À ceux qui rêvent d’un changement de régime à Téhéran, le chef de l’État français oppose la réalité tragique des interventions militaires qui ont déstabilisé et continuent à le faire, des régions entières

PARIS: Alors que le monde est en proie aux fracas des armes, aux lignes de fracture idéologiques et à la tentation de la force brute, la France fait entendre sa propre voix, celle de la raison, du droit et de la diplomatie. 

Bien que cette position semble de plus en plus marginalisée, notamment les États-Unis et Israël, elle demeure essentielle, car dans l’effondrement progressif de l’ordre international, il faut encore croire à la possibilité d’un chemin pacifique. 

Cette possibilité est aujourd’hui incarnée par la France alors que les Américains et les Israéliens avancent dans une logique d’affrontement militaire.

Depuis Oslo, Emmanuel Macron déclare sans ambiguïté : « Il n’y a pas de légalité à ces frappes américaines en Iran », une affirmation qui tranche radicalement avec l’attitude de Washington, qui cherche depuis plusieurs semaines à imposer un nouvel ordre régional à coups de missiles. 

L’attaque iranienne perpétrée hier, contre une base américaine au Qatar en riposte aux frappes des bombardiers américains sur des sites nucléaires en Iran, a failli plonger le monde dans engrenage incontrôlable, mais au lieu de s’aligner, la France s’est élevée contre cette spirale.

À ceux qui rêvent d’un changement de régime à Téhéran, le chef de l’État français oppose la réalité tragique des interventions militaires qui ont déstabilisé et continuent à le faire, des régions entières.

Évoquant les erreurs passées, de l’intervention militaire américaine en Irak en 2003 à la campagne franco-britannique en Libye, Macron rappelle un principe fondamental, « on ne sauve pas un peuple contre lui-même ».

La position française prend plus de relief, dans un contexte où l’Union européenne elle-même peine à parler d’une seule voix,

Tandis que certains dirigeants européens, comme le chancelier allemand Friedrich Merz, saluent le « courage » d’Israël face au « terrorisme iranien », Paris se montre plus mesuré. 

La chef de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, tente bien de préserver une ligne commune en réunissant les Vingt-Sept, mais les divisions internes sont profondes. 

Quinze États membres ont exprimé leur soutien à Israël, tandis que d’autres s’indignent des initiatives unilatérales de la Commission européenne, notamment les prises de position très partiales de sa présidente d’Ursula von der Leyen.

La France, elle, refuse cette polarisation brutale, fidèle à son engagement historique dans le dossier nucléaire iranien, elle prône une solution diplomatique, forte d’une expertise construite au fil de plus de dix ans de négociations.

Elle rappelle l’urgence d’encadrer non seulement le programme nucléaire, mais aussi le programme balistique iranien. 

Les efforts français ne se limitent pas à des déclarations, depuis les frappes du 13 juin, Macron et ses ministres ont multiplié les contacts avec les dirigeants régionaux : Arabie saoudite, Émirats, Qatar, Oman. 

Des messages de retenue ont été adressés aussi bien à Téhéran qu’à Tel-Aviv, et même à Washington.

 À deux reprises, Macron s’est entretenu avec le président iranien pour éviter toute escalade, il a également eu des échanges directs avec le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, mettant en garde contre toute velléité de régime par la force, rappelant que cela ne pourrait qu’aboutir à un plus grand chaos.

La France plaide pour une relance des négociations, et pousse également à une reprise du dialogue sur une éventuelle zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, proposition ancienne mais toujours d’actualité, même si Israël refuse de reconnaître son propre arsenal nucléaire.

Face à la gravité de la situation, la France tente de maintenir un cap, alors que l’unité européenne est de plus en plus vacillante, en raison de la poursuite injustifiée de la guerre à Gaza.

L’Irlande, l’Espagne et, plus récemment, les Pays-Bas ont demandé à revoir les accords commerciaux avec l’État hébreu, même une voix aussi conservatrice que celle du chancelier allemand admet ne « plus comprendre » les opérations militaires israéliennes.

Pourtant, en l’absence de consensus clair, aucune sanction n’est encore envisageable, la présidente de la Commission européenne ne peut aller plus loin sans mandat des États membres. 

Pendant ce temps, le fracas des armes continue, rendant la voix française d’autant plus isolée mais aussi d’autant plus précieuse.

L’annonce par le président Trump d’un cessez-le-feu entre Israël et l’Iran est saluée par Paris comme une « ouverture à saisir ». 

La France appelle dans un communiqué publié par le ministère des affaires étrangères, toutes les parties à respecter l’arrêt des hostilités et à s’engager sur le seul chemin viable, celui de la diplomatie. 

Elle réaffirme que l’Iran ne doit jamais détenir l’arme nucléaire, mais que les inquiétudes sur ses activités doivent trouver des réponses par la négociation, non par la guerre.

Cette voix, aussi minoritaire soit-elle aujourd’hui, porte en elle une vision du monde, elle repose sur le respect du droit international, sur la conviction et les principes.

En tenant cette ligne, la France ne défend pas seulement ses intérêts ou ses citoyens, elle défend aussi une certaine idée de la communauté internationale, de l’équilibre des puissances et de la paix. 

Si le cessez-le-feu tient bon, sauvant provisoirement le régime iranien et confirmant qu'Israël et les États-Unis n’hésitent plus à employer la force sans limite, les efforts de la France pour promouvoir une solution diplomatique pourraient enfin trouver un écho.


Gaza: des ONG , dont MSF mettent en garde la Fondation GHF contre une complicité de crimes de guerres

Figurent parmi les signataires la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), le Centre palestinien pour les droits humains, le Centre américain pour les droits constitutionnels ou encore la Commission internationale des juristes. (Source Médecins sans Frontières)
Figurent parmi les signataires la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), le Centre palestinien pour les droits humains, le Centre américain pour les droits constitutionnels ou encore la Commission internationale des juristes. (Source Médecins sans Frontières)
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  • La pénurie orchestrée par les autorités israéliennes prive les Palestiniens d’eau et de soins, et les met en danger immédiat, alors que des blessés affluent par centaines dans les structures médicales.
  • Plusieurs organisations de défense des droits humains ont appelé lundi la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), dont les distributions d'aide donnent lieu à des scènes chaotiques et meurtrières, à cesser ses opérations

NATIONS-UNIES: Plusieurs organisations de défense des droits humains ont appelé lundi la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), dont les distributions d'aide donnent lieu à des scènes chaotiques et meurtrières, à cesser ses opérations, mettant en garde contre des risques de complicité de "crimes de guerre".

"Ce nouveau modèle de distribution d'aide privatisée, militarisée, représente un changement radical et dangereux par rapport aux opérations humanitaires internationales établies", écrivent ces 15 organisations dans une lettre ouverte, dénonçant un système "déshumanisant et meurtrier".

"Nous appelons la GHF et toutes les organisations et individus qui ont soutenu ou soutiennent le travail de la GHF et les sociétés militaires privées" opérant dans ses centres de distribution "à cesser leurs opérations".

"Ne pas le faire pourrait exposer ces organisations et leurs responsables, représentants et agents à des responsabilités criminelles et civiles pour complicité de crimes en vertu du droit international, y compris crimes de guerre, crimes contre l'humanité, ou génocide, en violation du droit international, du droit américain et d'autres juridictions nationales", mettent en garde ces organisations.


France: la surveillante tuée reçoit la Légion d'honneur à titre posthume

La surveillante de collège poignardée à mort en France par un élève le 10 juin a reçu, à titre posthume, la Légion d'honneur, la plus haute distinction honorifique du pays, selon un décret publié mardi par le le Journal officiel. (AFP)
La surveillante de collège poignardée à mort en France par un élève le 10 juin a reçu, à titre posthume, la Légion d'honneur, la plus haute distinction honorifique du pays, selon un décret publié mardi par le le Journal officiel. (AFP)
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  • La semaine dernière, le ministère de l'Education avait indiqué qu'elle recevrait aussi le titre de commandeur des Palmes académiques, la plus ancienne distinction décernée à titre civil
  • Les obsèques de la jeune femme de 31 ans ont eu lieu le 17 juin dans une stricte intimité familiale à Sarcey, un petit village du nord-ouest où elle vivait

PARIS: La surveillante de collège poignardée à mort en France par un élève le 10 juin a reçu, à titre posthume, la Légion d'honneur, la plus haute distinction honorifique du pays, selon un décret publié mardi par le le Journal officiel.

La semaine dernière, le ministère de l'Education avait indiqué qu'elle recevrait aussi le titre de commandeur des Palmes académiques, la plus ancienne distinction décernée à titre civil. La qualité de pupille de la Nation, qui offre une protection matérielle et morale particulière aux enfants de victimes d'actes de terrorisme, sera attribuée à son fils.

Les obsèques de la jeune femme de 31 ans ont eu lieu le 17 juin dans une stricte intimité familiale à Sarcey, un petit village du nord-ouest où elle vivait.

Le collégien de 14 ans interpellé immédiatement après les faits a été inculpé pour meurtre aggravé par la circonstance que sa victime était chargée d'une mission de service public, et placé en détention provisoire.

Du fait de sa minorité, il encourt une peine de 20 ans de prison.

Le meurtre a eu lieu à l'entrée du collège, alors que des gendarmes procédaient à un contrôle inopiné des sacs des élèves, pour saisir d'éventuelles armes blanches. Un gendarme a été blessé à la main lors des faits.

Durant sa garde à vue, le suspect a confié aux enquêteurs avoir voulu tuer une surveillante, "n'importe laquelle".

Ce nouveau drame en milieu scolaire a eu un grand retentissement en France, dans les sphères politique et éducative en particulier.